Jean-Marc Labat a écrit :
Les Mérovingiens n'ont jamais été sacrés, le premier roi à l'être est Pépin le Bref.
La rectification était en effet nécessaire.
Mais qu'est-ce qui explique que Charles Martel, voire l'un de ses prédécesseurs, ne se soit pas imposé comme roi à la place du roi ? S'il s'était agi d'une quelconque principauté, il aurait simplement évincé le comte ou le duc et tout le monde aurai trouvé cela tout naturel. C'est que la dignité royale avait un caractère sacré excédant un simple droit qu'on ne conserve que dans la mesure où l'on a les moyens de le faire. Cela se manifestait non par le sacre mais par d'autres signes tels que la chevelure. C'est la raison pour laquelle Pépin a pris soin de faire valider son accession à la royauté par le clergé, plutôt deux fois qu'une et la deuxième fois par l'évêque de Rome en personne tant qu'à faire.
Avec la théorie statutaire de Terre-Vermeille, on quitte le domaine de la magie et du sacré pour entrer dans le domaine du droit. Cette théorie procède d'une conception du pouvoir plus intellectuelle et plus moderne qui n'est pas une révolution. Elle ne tend pas à fragiliser la dynastie régnante. Au contraire, elle vise à légitimer la transmission héréditaire depuis Hugues Capet, qui est devenue par la force du temps loi fondamentale du royaume, et donc à condamner les prétentions du roi d'Angleterre. Comme le roi ne dispose pas de sa couronne, il ne peut écarter son fils aîné de la succession, mais aussi, a fortiori, personne ne peut contester au roi une légitimité qui ne résulte que de la filiation.
Cette loi fondamentale doit toutefois se conjuguer avec une autre loi fondamentale qui fait du roi le défenseur de la foi et de l'Eglise. Si le roi faillit à cette mission, il perd de sa légitimité. Henri de Navarre n'a pu faire reconnaître la sienne qu'après sa conversion au catholicisme.