Ci-après un post que j'avais mis en ces lieux et qui dut être éffacé à l'époque d'un bug.
Pour ceux qui seraient intéressé, je reproduis à titre d’information et in extenso, le passage auquel je me référais, en espérant qu’il soit utiles à ceux qui s’attachent à la question. Le xxxx, réfère à un mot grec, et je ne dispose pas de typo pour le transcrire.
L’ouvrage en lui-même a dut être écrit dans les années 1860. La dernière date cité dans les notes étant 1859.
In « Histoire de Satan », M. L’abbé Lecanu, docteur en théologie, Tiquetonne éditions 1990.
— La reine Pédauque — Les cagots
[…]
La marque d’un pied d’oie ou de gui, ou de canard, comme parlait le peuple, devint très anciennement obligatoire pour une certaine classe d’individus, nommés cagots, qui, par leur origine, appartenaient au gnosticisme, et, selon toute apparence, avaient puisé dans les mœurs inhérentes à cette hérésie le germe d’une maladie repoussante et en même temps des plus contagieuses, si on en juge par les précautions excessives qui furent prises pour en arrêter la propagation. Ils devaient porter cette marque attachée à leurs vêtements de la manière la plus ostensible, soit comme un avertissement aux personnes saines de fuir leur contact, soit comme un signe humiliant, propre à leur rappeler le déshonneur de leur origine, et à les maintenir dans un état perpétuel d’ilotisme. Les états de Béarn demandaient encore en 1460, au prince Gaston IV, qu’il fut enjoint aux cagots de porter l’ancienne marque du pied de l’oie comme par le passé ; mais le prince n’eut pas égard à leur demande. Alors la cagoutille était devenue seulement héréditaire. Cette maladie infesta les provinces de haute et de basse Navarre, de Guipuscoa, de Biscaye, de Gascogne, de Béarn, de Guyenne, de Bresse, de Bigorre, de Labour, de Soule, d’Armagnac, de Marsan, de Chalosse, le Poitou, le Maine, la Bretagne, et principalement l’évèché de Saint-Malo. On désigna ceux qui en étaient atteints par les noms de capots, agots, cahets, gahets, gavos et gaffots, suivant les lieux. En Bretagne, on les appela cacous et cacouas. Dans cette dernière province, ils se donnaient entre eux le titre de cousins, expression d’autant plus remarquables, qu’elle est étrangère à la langue bretonne, et encore usuelle dans certaines confréries de compagnonnage ; partout ailleurs, les cagots se titraient de l’appellation de chrétiens, et , dans les provinces méridionales, crestias et cristias ; le peuple les appelait canards, et par corruption cagnards et chaignards, à cause de la marque flétrissante qu’ils portaient. Il est bon de se souvenir de ce que dit le moine Regnier, jadis un des leurs que les cathares se donnaient entre eux le même nom de chrétiens.
Il est possible qu’il y ait eu quelques différences entre les cagots et gahets, entre ceux-ci et les gaffots ; les actes publics qui les concernent paraissent en établit une en effet ; mais ces différences étaient accidentelles, et elles allèrent en s’effaçant, à mesure que la maladie s’amoindrit ; de telle sorte qu’au milieu du XV siècle on confondit les cagots entre eux et même avec les lépreux. Une ordonnance de louis XI, de l’an 1439, relative aux maladies de la ville de Toulouse, porte qu’ils sont « entichez d’une trez horrible et griefve maladie, appelée la maladie de la lèpre et capoterie. » en 1514, les cagots de Navarre étaient entièrement guéris, ainsi qu’il résulte d’une supplique adressée par eux aux souverain pontife pour obtenir leur réintégration au sein de la famille chrétienne.
Jusqu’alors, en effet, nonobstant les plus louables efforts de l’autorité religieuse et séculière, le préjugé et la répulsion universelle avaient retenu les malheureux cagots dans un état complet d’isolement. La grande révolution de 1789 effaça les différences en passant son niveau, mais elle n’effaça pas tous les préjugés ; il en est resté de nos jours. Les cagots avaient une porte spéciale, ou plutôt un couloir long et étroit pour entrer dans l’église ; ils y étaient séparés du reste du peuple par un grillage, ils avaient un bénitier à leur usage, dans lequel personne n’allait tremper le bout de son doigt, et si l’un d’eux avaient osé s’approcher du bénitier commun, il aurait été fort malmené. Ils allaient à la communion après tout le monde, et recevaient de même la pain bénit ; on leur donnait la paix avec un instrument particulier, on les enterrait dans un cimetière spécial. Ils habitaient des villages séparés, ne s’alliaient qu’entre eux, et exerçaient les plus vils métiers. Ils étaient exempts de tailles et d’impôts ainsi que du service militaire.
Il n’est pas de race dont l’origine ait donné lieu à plus de recherches ; il n’est pas de nom dont l’étymologie ait été plus diversement interprétée ; nous croyons inutile de mentionner des suppositions qui se détruisent mutuellement, qui sont inadmissibles au même degré, et ne jettent aucun jour sur l’origine de la maladie. Les gnostiques sont les véritables ancêtres des cagots : c’est l’opinion la plus ancienne, la plus universellement admise parmi les populations au milieu desquels ils vécurent, et adoptée par les écrivains qui parlèrent les premiers du cagotisme, celle qui régnait parmi eux, et à laquelle ils se ralliaient eux-mêmes dans la supplique adressée à Léon X en 1514 « Nos ancêtres, disaient-ils, passent pour avoir embrassé le parti des albigeois ; s’il en fût ainsi, c’est leur faute et non la nôtre ; pour nous, nous sommes attachés d’esprit et de cœur à l’Eglise romaine, nous professons sa croyance et pratiquons ses préceptes. » Mais cette origine est étrangère sinon tout à fait à la répulsion qu’ils inspiraient du moins à l’isolement absolu dans lequel on les maintenait ; leur maladie seule pouvait, comme pour les lépreux, en être la cause. La cagoutille, ainsi l’appelait-on, se reconnaissait à l’odeur fétide des cagots, à la pâleur de leur teint, à la couleur terne de leurs yeux, à l’absence du lobe sous-auriculaire, aux plaies de leur dos, aux boutons dont leur langue et leur face étaient couverte, et qu’on appelait les boutons de la mezellerie. Ils étaient sujets à des accès de folie ou d’idiotisme à intervalles réguliers, et plus spécialement au moment des pleines et nouvelles lunes.
Comme leurs ancêtres, les cagots étaient de grands sorciers, leur réputation n’a jamais varié à cet égard. Et la maladie développait en eux un phénomène, qui devait puissamment contribuer à maintenir une telle réputation : à savoir, la production des taches insensibles, aux pieds et aux mains, qu’on a prises si longtemps pour les stigmates du diable. Ambroise Paré et la plupart des médecins de l’époque affirment qu’on pouvait transpercer les pieds ou les tendons, sans qu’ils manifestassent la plus légère sensation .
Les Etablissements de la ville de Marmande, rédigés en 1396, ordonnaient encore aux cagots de porter sur leurs vêtements la marque du pied de guit, formée d’un morceau d’étoffe rouge, long d’une darne et de trois doigts d’ampleur. Ces divers rapprochements suffisent, ce nous semble, pour justifier notre manière de voir à l’égard de la reine Pédauque et des races maudites, quoiqu’elle s’éloigne des opinions maintenant accréditées .
In « Histoire de Satan », M. L’abbé Lecanu, docteur en théologie, Tiquetonne éditions 1990.
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