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 Sujet du message : Montaigne face à la Réforme
Message Publié : 05 Oct 2010 18:43 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 07 Sep 2008 15:55
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Pourriez vous me donner un avis circonstancié sur la position de Montaigne à l'égard de la réforme protestante ?

Les avis de ses biographes (tels que j'ai pu les trouver sur le net) sont variés : tolérance à l'égard du protestantisme, convictions catholique apparentes ou réelles, tentatives de médiation entre les deux camps, condamnation des guerres viviles (dont les protestants eraient les responsables).

Comme j'avais toujours compris (peut-être hâtivement) que l'auteur des essais était un modèle de tolérance, je voulais savoir si la réalité fut plus complexe.


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Message Publié : 05 Oct 2010 20:01 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile
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Inscription : 19 Mars 2005 18:17
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Localisation : Paris
L'appartenance à une religion n'est pas l'unique facteur qui détermine la relation avec autrui. Celle-ci se construit également en fonction du sexe de l'autre, de son âge, de son rang social, de son appartenance culturelle, de son niveau d'intelligence, de son niveau de culture, de sa sociabilité, de sa sincérité, de son tempérament, de son niveau de piété, de son appartenance politique, de son appartenance familiale, de ses réseaux sociaux, de sa niveau de fortune etc.

Si la réalité est complexe, c'est parce qu'elle relève de la diversité du genre humain. Il me semble que Montaigne avait une soeur sinon une cousine qui était devenue protestante et avec qui il n'avait pas de très bonnes relations, mais rien ne dit que c'est la religion qui l'explique.

Montaigne ne construisait pas ses relations à partir de la religion de ses contemporains. S'il rejetait catégoriquement la religion protestante, cela ne l'empêchait pas d'avoir des amis protestants. Il avait autant de respect pour le duc de Guise que pour le roi de Navarre. Il avait des amis chez les catholiques ultra, tout étant celui de La Boétie ... Il ne supportait pas sa mère ...

Son esprit me fait penser à celui du chroniqueur Pierre de L'Estoile qui a parfois des mots assez forts pour fustiger la religion protestante mais qui en même temps entretient des amitiés avec des protestants et qui utilise des mots très durs pour comdamner les jésuites et des catholiques intégristes dont il se moque éperdument.

Et puis si Montaigne était un modèle de tolérance, l'était-il aussi dans la vie courante ?


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Message Publié : 06 Oct 2010 15:13 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon
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Inscription : 26 Juin 2008 8:11
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Localisation : 中国
Si je ne m'abuse, Montaigne faisait partie du courant qu'on appelait des "bons Français": Catholiques bien réels, parfois même très anti-protestants, mais qui faisaient passer la paix civile avant toute chose.


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Message Publié : 06 Oct 2010 18:19 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 07 Sep 2008 15:55
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Enki-Ea a écrit :
Si je ne m'abuse, Montaigne faisait partie du courant qu'on appelait des "bons Français": Catholiques bien réels, parfois même très anti-protestants, mais qui faisaient passer la paix civile avant toute chose.


mais quelles étaient les raisons de son hostilité au protestantisme : l'attachement à la paix civile et à l'autorité royale qui lui faisait voir les innovateurs comme des fauteurs de troubles ? ou bien un certain rejet des doctrines de calvin (sur la prédestination, la grâce ou l'Ecriture) qui auraient pu lui sembler réduire exagérément le libre arbitre de l'homme ?

Je suis confus d poser ces questions maus je n'ai pas d'édition des essais sous la main et je ne trouve pas de réponse claire sur le net !


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Message Publié : 06 Oct 2010 19:45 
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Eginhard
Eginhard
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Inscription : 04 Juin 2008 20:24
Message(s) : 749
Sans répondre directement à votre question, vous trouverez des pages intéressantes dans son Voyage en Italie, notamment quand il passe par Kempten. Il demande à voir le pasteur luthérien, suit un mariage protestant et note les différences, s'amuse de la haine que voue le luthérien contre les zwingliens. Il regrette de ne pouvoir lire la tentative de confession commune entre luthériens et calvinistes (dont le nom m'échappe...) que vient de recevoir le pasteur car elle est en allemand (il dialogue avec le pasteur en latin). Le pasteur le reçoit très bien et lui indique si je me souviens bien le chemin qui doit le conduire à l'abbaye où il va passer la nuit. Un texte loin de l'image des guerres de religion. Bref, dans ces pages se dégagent une curiosité d'honnête homme, une volonté de s'informer mais aucun attrait particulier pour le culte réformé.

_________________
"Denken heisst überschreiten" : Penser signifie faire un pas au-delà. Ernst Bloch (1885-1977)


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Message Publié : 09 Oct 2010 0:57 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile
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Inscription : 19 Mars 2005 18:17
Message(s) : 2159
Localisation : Paris
Dans les Essais, Montaigne répond de lui-même à la question. Le premier paragraphe du chapitre XXXVI en est éloquent :

Citer :
Je ne commets pas l'erreur courante qui consiste à juger autrui d'après moi-même. Je lui accorde volontiers des qualités différentes des miennes. Si je me suis engagé dans quelque chose, je n'oblige pas tout le monde à me suivre, comme font la plupart des gens. Je crois, et je conçois mille façons différentes de vivre. A l'inverse de la plupart des gens, j'accepte plus facilement la différence que la ressemblance. Je décharge bien volontiers cet autre que moi de mes propres règles et principes, et le considère simplement en lui-même, sans le comparer à moi, me le représentant selon son propre modèle. Bien que je ne sois pas chaste, je n'en admire pas moins la chasteté des Feuillants et des Capucins, et je trouve bonne leur façon de vivre. Je me mets à leur place en imagination et les aime et les honore d'autant plus qu'ils sont différents de moi. Je voudrais vraiment que l'on nous juge chacun en particulier et qu'on ne me traite pas en fonction des exemples communs.


Ailleurs, dans les Essais, il présente les protestants comme des adversaires dont il admire les "réelles" vertus. Montaigne refuse la division et la répartition du monde en parti. Il prend exemple sur lui-même. Ce n'est pas parce qu'il admire le duc de Guise qu'il adhère à la sainte ligue. Il peut reconnaître les qualités ou les défauts d'un homme sans pour autant adhérer ou rejeter son parti.


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Message Publié : 04 Mars 2011 12:13 
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Hérodote
Hérodote

Inscription : 11 Mai 2010 16:25
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bonjour, je tombe par hasard sur cette partie du forum... ce qui tombe bien car je suis étudiant en L1 histoire à nanterre et j'ai commencé l'histoire moderne... je lis aussi en parallèle les Fortunes de France de Robert Merle...
Dans le livre, Montaigne est contre la Réforme mais a quand même des amis qui sont protestants, et accepte de recevoir le narrateur Pierre de Siorac, qui est reconnu pour ses études en médecine. En passant on rencontre aussi l'Estoile, au moment de la famine de Paris, au début du règne d'Henri IV. Lui, est décrit comme un politique contre la Ligue, qui vit dans Paris à cette époque.

Je voulais vous demander si je pouvais me fier à l'oeuvre de Robert Merle au niveau historique?? je sais que c'est romancé mais je pense tout de même que de la part de Robert Merle, il y a quand même un travail historique derrière son livre. pouvez vous m'éclairer, s'il vous plait??


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Message Publié : 04 Mars 2011 15:26 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile
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Inscription : 27 Avr 2008 14:42
Message(s) : 2320
croc-blanc95 a écrit :
bonjour, je tombe par hasard sur cette partie du forum... ce qui tombe bien car je suis étudiant en L1 histoire à nanterre et j'ai commencé l'histoire moderne... je lis aussi en parallèle les Fortunes de France de Robert Merle...
Dans le livre, Montaigne est contre la Réforme mais a quand même des amis qui sont protestants, et accepte de recevoir le narrateur Pierre de Siorac, qui est reconnu pour ses études en médecine. En passant on rencontre aussi l'Estoile, au moment de la famine de Paris, au début du règne d'Henri IV. Lui, est décrit comme un politique contre la Ligue, qui vit dans Paris à cette époque.

Je voulais vous demander si je pouvais me fier à l'oeuvre de Robert Merle au niveau historique?? je sais que c'est romancé mais je pense tout de même que de la part de Robert Merle, il y a quand même un travail historique derrière son livre. pouvez vous m'éclairer, s'il vous plait??


Oui Robert Merle a nourri son roman d'une excellente recherche historique et Fortune de France est parfait pour se mettre dans l'ambiance du XVIe siècle.

_________________
Alceste

Que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants... ne soient pas des signaux de haine et de persécution...

La prière de Voltaire, Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII


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Message Publié : 20 Mars 2011 22:11 
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Hérodote
Hérodote

Inscription : 20 Mars 2011 21:49
Message(s) : 1
Je confirme d'après ce que j'ai lu, que Robert Merle attachait une grande importance à la rigueur historique de ses récits. Il ne souhaitait pas que ses romans soient associées à des romans sans aucune valeur historique. Tu peux jeter un oeil sur le livre de Stefan Zweig intitulé "Montaigne", je l'avais feuilleté à la BU, il a l'air pas mal...


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Message Publié : 15 Sep 2011 19:30 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 05 Juil 2011 14:39
Message(s) : 1623
Localisation : Armorique
Dans ses "Essais", Montaigne raconte plaisamment les tracas qu'il subit pendant les Guerres de Religion :
"Je fus pelaudé (étrillé) à toutes mains : au gibelin j'étais guelfe, au guelfe gibelin" lol
L'expression est passée dans la langue courante. N'ayant donné de gages ni aux catholiques ni aux huguenots : il fut également suspect à chaque camp... :rool:
Ce qui ne fit que le pousser plus fortement à se cloîtrer en sa librairie (bibliothèque).
Pour l'anecdote, les pages où sont écrits les "Essais" sont étranges et suivent un mouvement hermétique... Pas une semblable ! Chaque nouveau coin est un nouveau dessin tel un logo ! Je viens de découvrir le pourquoi :
son chat se couchait sur un morceau de la page et Montaigne d'écrire sur le reste... Mignon, non ? :P

_________________
"... Et si je te semble avoir agi follement, peut-être suis-je accusée de folie par un insensé." (Sophocle)


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