Dans les Essais, Montaigne répond de lui-même à la question. Le premier paragraphe du chapitre XXXVI en est éloquent :
Citer :
Je ne commets pas l'erreur courante qui consiste à juger autrui d'après moi-même. Je lui accorde volontiers des qualités différentes des miennes. Si je me suis engagé dans quelque chose, je n'oblige pas tout le monde à me suivre, comme font la plupart des gens. Je crois, et je conçois mille façons différentes de vivre. A l'inverse de la plupart des gens, j'accepte plus facilement la différence que la ressemblance. Je décharge bien volontiers cet autre que moi de mes propres règles et principes, et le considère simplement en lui-même, sans le comparer à moi, me le représentant selon son propre modèle. Bien que je ne sois pas chaste, je n'en admire pas moins la chasteté des Feuillants et des Capucins, et je trouve bonne leur façon de vivre. Je me mets à leur place en imagination et les aime et les honore d'autant plus qu'ils sont différents de moi. Je voudrais vraiment que l'on nous juge chacun en particulier et qu'on ne me traite pas en fonction des exemples communs.
Ailleurs, dans les Essais, il présente les protestants comme des adversaires dont il admire les "réelles" vertus. Montaigne refuse la division et la répartition du monde en parti. Il prend exemple sur lui-même. Ce n'est pas parce qu'il admire le duc de Guise qu'il adhère à la sainte ligue. Il peut reconnaître les qualités ou les défauts d'un homme sans pour autant adhérer ou rejeter son parti.