Excusez moi par avance d'être un peu long, mais cette période est ma préférée et voici donc une synthèse de mes connaissances pour répondre uniquement à la question sur la mésentente entre Marie de Médicis et son fils.
1. Le désaccord profond sur la stratégie de gouvernement
Marie de Médicis voulait gouverner à l'italienne et Louis XIII voulait gouverner à la gallicane. Marie de Médicis ne voulait donc par vraiment diriger la France, mais plutôt être l'arbitre des seigneurs composant la France, à la manière de l'Italie qui était une mosaïque d'Etats. Au contraire, Louis XIII voulait un gouvernement centralisé, avec des décisions prises de Paris s'appliquant de manière rigoureuses en tout point de la France afin d'assurer une certaine égalité qui lui paraissait juste. En politique étrangère, Marie de Médicis ne voulait pas s'opposer à l'empire espagnol et germanique. Elle voulait que la France s'unisse à lui, pour créer une Europe politique. Louis XIII, au contraire, était nationaliste, et voulait l'indépendance de la France. De plus Marie de Médicis croyait encore à domination de la Méditerranée, alors que Louis XIII avait bien compris que le futur se trouvait du côté de l'Atlantique et de l'Europe du nord.
2. Marie de Médicis n'était pas l'aîné comme l'était Louis XIII.
Les aînés et les cadets ont des caractères différents. Les aînés aiment l'indépendance, les responsabilités et le sérieux. Les cadets comptent plus sur les autres, sont plus sociables, aiment davantage s'amuser. Or Marie de Médicis était la sixième enfant du couple Francesco, Granduca di Toscana, et Johanna von Österreich. Quand elle se marie en 1600 à 27 ans, elle est accompagnée de sa soeur Eleonora âgée de 33 ans, femme du Duca di Montova. Par contre Louis XIII était l'aîné, et très conscient de son destin de roi.
3. Marie de Médicis n'était pas une mauvaise mère.
Marie de Médicis s'est occupé de ses enfants quand ils étaient petits. Elle n'était pas "froide" avec eux. Elle n'était pas non plus sévère. (C'était le père, Henri IV, qui voulait que ses enfants fussent fouettés quand il faisaient des bêtises, comme lui-même l'avait été. Henri IV voulait que Louis ait un caractère fort pour être un bon chef de guerre et pour accepter les conditions rudes des campagnes militaires.) Marie de Médicis et Henri IV laissaient souvent leurs enfants à Saint-Germain, alors qu'ils étaient à Paris ou en province. Elle acceptait que Louis fissent partie d'une petite bande avec les bâtards de Henri IV, dont César et Alexandre de Vendôme. Ces derniers, bien qu'étant un peu plus âgés que Louis, étaient contraints de lui obéir. Marie de Médicis gâtait ses enfants, leur offrant les plus beaux jouets et les plus beaux vêtements. Elle acceptait aussi leurs caprices, si bien que Louis XIII n'a pas fait de bonnes études malgré des précepteurs érudits. Par exemple, il connaissait assez mal le Latin, et quasiment rien aux autres matières, sauf à l'art de la guerre, de la chasse, du ballet et du jeu de paume.
4. Marie de Medicis éduqua son fils pour être roi, tout en donnant beaucoup de pouvoir à son entourage italien.
Les deux gros volumes du Journal de Heroard montrent que Marie de Médicis faisait venir son fils à toutes les réunions du Conseil. Donc, très jeune, Louis XIII a suivi toutes les affaires politiques du royaume. Ce serait faux d'affirmer que Marie de Medicis aurait voulu l'écarter du pouvoir. Cependant, Marie de Medicis confiait beaucoup de pouvoir à son entourage italien, venu à sa suite. La personne la plus importante du royaume durant la régence, fut très certainement Leonora Dori, dite la Galigaï, l'amie d'enfance de Marie. Leonora Dori prenait des pôts de vins énormes, à la manière des dirigeants italiens, ce qui était choquant et humiliant pour les notables parisiens et français. Elle nommait des hommes de paille à la moralité douteuse aux plus hautes fonctions, tels que Concini, Barbin, et Mangot, tout en éloignant les hauts fonctionnaires de qualité qu'étaient Sully et Du Vair. Cette femme très intelligente, ne pouvant pas gouverner officiellement, son mari, Concino Concini, était mis en avant. Malheureusement, Concini était un joueur frivole et insolent. Personne ne l'aimait en France. Cependant Marie de Medicis le soutenait, non seulement pour aider la Galigai, mais aussi parce qu'elle était elle-même une profiteuse comme lui. Par exemple, elle ne possédait pas des bijoux anodins, mais le plus gros des diamants du monde de l'époque, le Sancy. Elle s'était fait construire à Paris, le Palais du Luxembourg qui était plus luxueux que le Louvre de l'époque. Pour garder un souvenir de son mariage, elle ne se contenta pas d'un petit tableau. Elle commanda une incroyable série de peintures au grand Rubens. L'argent et le faste comptait plus que la moralité pour elle, alors que c'était le contraire pour Louis XIII qui a toujours vécu de manière plutôt modeste et n'a fait construire rien de luxueux ni acquis de choses fabuleuses.
|