comte d'Empire a écrit :
Si en revanche il s'agit de dire que les responsables politiques n'ont qu'un pouvoir symbolique et de façade, alors :
1) Quid des dirigeants des grands états démocratiques actuels. Ont-ils moins-autant-davantage de pouvoir que Louis XIV sur le cours des choses ?
2) Et même en ce cas, est-ce que la capacité à arbitrer entre les grands intérêts de fond de la société civile ne serait pas justement le vrai pouvoir, in fine ?
Si nous sommes d'accord sur le fait que le vrai pouvoir, ce n'est pas le fait du prince, la capacité d'arbitraire telle que l'image d'épinal nous les montre, mais au contraire la capacité à modifier le cours des choses selon sa volonté, alors c'est vrai que le cours de l'histoire va dans le sens d'un "pouvoir" de plus en plus partagé, à quelques accidents près dont le XXè siècle n'est pas avare. Mais est-ce que cela permet de qualifier Louis XIV de fantoche ?
J'en doute. Même son ancêtre Hugues Capet, qu'on pourrait qualifier de plus puissant chef de clan parmi ses pairs, n'était pas démuni de pouvoir ; et je doute qu'on puisse dire que XIV en ait eu moins...
D'abord soyons méfiants sur la comparaison av des dirigeants contemporains "démocratiquement élus" ..et avec Hugues capet !! je crois que nous acceptons l'idée que la période moderne est dominée par une structuration de la société qui se fait autour de l'argent . Le roi, depuis les Valois vit à crédit. Par essence la monarchie n'a pas d'argent . Médiévale? Elle vit "du sien" ( même si dès le XIIIe s ce n'est plus vrai). Mon analyse commence aux guerres d'Italie ( je l'écris dans un précédent message). La monarchie est TRES TOT surendettée. De multiples fois en faillite et donc a recors à des expédients qu'en effet Dessert décrit bien. Le faux-monnayage ( par altération des monnaies) la demultiplication des " offices" ( vs vs souvenez de la phrase de Pontchartrain : Sire il suffit que vous crééiez un office pour qu'il se trouve un niais pr l'acheter..)par multiplication des taxes... ce système corrompt la vision irenique ( et fausse) des trois ordres sagements rangés. L'argent a pénétré tous les "ordres" créé des solidarités nouvelles, des clans plus ou moins agissants selon qu'ils en sont pourvus. Le monarque doit donc s'allier av des clans détenteurs de grosses liquidités parce que sans eux il n'est qu'un ectoplasme. Il a une autre solution : désigner les "traitants" et autres "partisants" comme responsables des mauvaises finances et instaurer des "jours" ( grands jours ou cours de justice afin de FAIRE MINE de lur faire rendre gorge.Le roi a 3 exercices : la justice, la diplomatie et la guerre . La justice est vendue depuis Henri II à partir de la paulette elle passe definitivement dans les biens de famille provinciales ou regionales qui en 3 générations tiennent le lieu de leur pouvoir par leurs alliances et par l'étendue de leur pouvoir ( à partir du XVIe s l'épiscopat est pour l'essentiel "fils" de la robe), la diplomatie est l'art de corrompre l'autre negociateur ( en se servant au passage) elle coûte aussi cher que la guerre reste la guerre interieure ou extérieure. En deux ou trois generations le fermier avisé va accéder à la noblesse ( aubergiste-fourrage-remonte-) 2e generation bien élevée dans les humanités 3e generation noblesse ( secrétaires du roi ou judicature). La guerre ruine le royaume et enrichit des gens venus de nulle part : tout simplement parce que le fourrage, la remonte conditionnenent des operations urgentes. Soyons justes pour 1 famille qui fera souche dans la fortune 10 chuteront lourdement. Mais le modèle vaut usqu au roi. Le jeune Louis XIV n'a pas un fifrelin et son controleur general des finances a Vaux le Vicomte, intéressant non? Vous me retorquerez que le jeune Louis va gagner la Fronde, rien de moins vrai : c'est la fidélité des parlements qui lui fera remporter ce combat ( d'où les erreurs dans les premieres pages de Michel Pernot dans son livre sur la Fronde). Pourquoi les parlements s'attachent-ils à la monarchie? Parce qu'ils affectent de tenir leur siège du roi alors qu'ils le tiennent UNIQUEMENT de la finance l'office et de la paulette ( on peut d'ailleurs tenir le même raisonnement ( à la "paulette" prêt) pour la quasi disparition de la monarchie française sous le Dauphin ( ?) Charles futur Charles VII.
Enfin oui Dessert a le mérite de sortir les mécanismes les plus intérieurs du pouvoir monarchique mais s'il vous donne de l'urticaire lisez donc Claude Dulong sur "Mazarin et l'argent" ( ed. de l'Ecole des Chartes 2002)
Pardon de répondre en une phrase à votre long et intéressant exposé mais en quoi est-ce lié au fait que le roi de France serait éventuellement esclave d'une hypothétique mainmise des financiers?
Quand Louis XIII choisit Richelieu - un ecclésiastique désargenté qui n'a aucun rapport avec le monde des traitants -, est-il esclave des financiers? Quand Louis XIV fait désastreusement confiance à Chamillart durant huit longues (très longues) années, y a-t-il un lien quelconque avec les financiers?
Dessert a apporté des éclairages extrêmement intéressants sur l'influence de la finance à l'époque moderne. Malheureusement, comme beaucoup d'historiens hantés par l'idée d'être inutiles et voulant à tout prix apporter une thèse nouvelle, il est devenu escalve de son thè,e de prédilection et en a exagéré l'influence. On en a parlé également en Renaissance avec Jouanna.