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Message Publié : 05 Juil 2012 23:52 
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Polybe
Polybe

Inscription : 19 Déc 2007 18:08
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Bonjour,

on connaît les conséquences diplomatiques de la douloureuse guerre de succession d'Espagne : cession d'une partie de la Nouvelle-France, renonciation de Philippe à la couronne de France pour prix de son installation sur le trône d'Espagne, et redéfinition de l'équilibre européen.

En revanche j'ignore quels étaient, je n'ose pas dire les projets, et pour cause, mais la pensée diplomatique de Louis XIV après la signature de la paix d'Utrecht, qui a marqué un arrêt dans l'expansion française tout en limitant les dégâts. J'ai lu chez Bainville qu'il a envisagé un rapprochement avec l'Autriche, préfigurant par là le retournement des alliances de Choiseul. Je me rappelle avoir vu je ne sais plus où qu'il considérait cette alliance comme un bloc continental contre l'Angleterre montante. La formulation me paraît un peu anachronique. J'aimerais cependant savoir quels ont été ses décisions en politique extérieure à la toute fin de son règne.
Les mémoires de Torcy nous apprennent qu'en dépit de sa diminution et de ses souffrances, le roi soleil gardait toute sa tête dans les négociations de paix ; il ne m'apparaît pas impossible qu'il ait cherché à esquisser un équilibre européen original dirigé contre Albion.

Certes, la régence a tout remis à plat. Je suis curieux cependant des avis de Louis XIV sur la politique européenne après sa dernière guerre.


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Message Publié : 01 Sep 2012 21:41 
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Polybe
Polybe

Inscription : 19 Déc 2007 18:08
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Personne pour débattre sur le crépuscule innovant de Louis XIV en matière diplomatique ? >:(

Afin d'apporter de l'eau à mon moulin, je vous cite un extrait de l'Histoire de deux peuples de Bainville, où l'Historien prête à Louis XIV agonisant la volonté de s'allier à l'Autriche pour contrer les maisons montantes en Allemagne.

"La but de la succession d'Espagne atteint, les Habsbourg à jamais éloignés de Madrid, réduits à leurs domaines héréditaires et au titre vide et pompeux d'Empereurs, Louis XIV eut une pensée par laquelle s'atteste encore ce haut bon sens que lui a reconnu Sainte-Beuve. À la fin de sa carrière, peu de mois avant sa mort, Louis XIV avait la satisfaction de voir un cycle fermé."

(...)

"Tout en restant convaincu de la nécessité de prévenir et d'arrêter au besoin par la force un retour aux anciennes idées de suprématie européenne si longtemps nourries par l'Autriche, Louis XIV voyait en elle une associée contre les nouvelles tendances qui se faisaient jour dans les pays allemands.
Il continuait et il étendait le système de Richelieu : après les Etats catholiques allemands, c'était l'Autriche qu'il voulait faire entrer dans son alliance comme contrepoids aux Etats protestants qui, à la faveur des événements, avaient remarquablement grandi.

Les instructions que le comte du Luc reçut en janvier 1715, sept mois avant la mort de Louis XIV, développent ces vues avec ampleur.
Il s'agit pour l'ambassadeur du roi, - le premier, on le souligne, qui s'en aille à Vienne en cette qualité, - de « former entre la maison de France et la maison d'Autriche une union aussi avantageuse à leurs intérêts qu'elle sera nécessaire au maintien du repos général de l'Europe. » Le comte du Luc représentera à l'Empereur que la France ne voit plus d'inconvénient à ce que la couronne impériale reste dans sa Maison et l'aidera même à ce qu'aucune puissance nouvelle ne s'en empare. Toujours sur ses gardes, la diplomatie royale distinguait en effet que, si les Habsbourg, vaincus et définitivement usés en Allemagne, n'avaient plus aucune chance d'y constituer une grande monarchie héréditaire, la même ambition pouvait venir à d'autres puissances qui s'appuieraient sur l'élément opposé, c'est-à-dire sur l'élément protestant. C'était faire preuve d'une pénétration et d'une justesse de coup Jacques Bainville, Histoire de deux peuples continuée jusqu’à Hitler (1945) 49

d'oeil extraordinaires que de reconnaître que le grand zèle des princes protestants pour la « liberté germanique » s'éteindrait dès que l'un d'eux verrait s'ouvrir la perspective de confisquer cette liberté à son profit. Deux Etats étaient signalés au comte du Luc comme également à surveiller : c'était l'électorat de Hanovre, dont le titulaire venait de gagner singulièrement en puissance et en force par son avènement au trône d'Angleterre, et c'était le royaume de Prusse. Hanovre ou Prusse, le danger d'une grande monarchie allemande réapparaîtrait tôt ou tard de l'un de ces côtés-là. Ce danger, l' « union nouvelle qu'il convenait d'établir entre la maison de France et celle d'Autriche » était destinée à le conjurer.

On reconnaîtra que cette perspicacité et cette clairvoyance sont dignes de l'admiration la plus profonde. Louis XIV laissait, en mourant, la France avertie d'un péril nouveau. Il laissait aussi la marche à suivre pour que les Français en fussent préservés."

Voilà des pensées bien avant-gardistes en effet pour un roi finissant - à moins que Bainville sollicite à la gloire de la monarchie des instructions diplomatiques plus convenues qu'il ne l'écrit ?

Après Louis XIV conquérant, Louis XIV prophète de Sedan ? B)


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Message Publié : 03 Sep 2012 9:10 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 04 Mai 2010 14:51
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texte prémonitoire concernant les Maisons de Hanovre et de Prusse qui deviendront des "ennemis héreditaires".A la fin de son régne et l'age et raison aidant ,Louis comprend tres vite que les guerres qui ont fait son régne doivent cesser.Apres le roi Guillaume d'orange en Angleterre ,son ennemi juré ,les Hanovres :le Roi de France sait qu'il doit composer voire s'allier aux pays chrétiens catholiques (Autriche,Baviére)pour contrer le protestantisme.Apres sa mort ,la Régence avec le cardinal Bernis ne poursuivra pas ,cherchant une entente avec l'Angleterre.Il faudra attendre Louis XV (et Pompadour) pour renverser les alliance avec l'Autriche.Si la poltique étrangére de Louis XIV avait suivi ,on aurait évité la désatreuse guerre de sept ans et la montée en puissance de la Grande Bretagne


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Message Publié : 14 Juin 2013 22:59 
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Polybe
Polybe

Inscription : 19 Déc 2007 18:08
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Je me permets sans vergogne de remonter ce fil, parce qu'après quelques recherches j'ai toujours du mal à répondre à cette question fondamentale : quelle est la direction que Louis XIV souhaitait voir prendre à son pays en matière de politique étrangère, à la fin de son règne et donc après sa mort :?:


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Message Publié : 08 Juil 2013 13:57 
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Tite-Live
Tite-Live

Inscription : 03 Mars 2010 11:03
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quelle est la direction que Louis XIV souhaitait voir prendre à son pays en matière de politique étrangère, à la fin de son règne et donc après sa mort


Mais sommes nous sûrs que Louis XIV ait voulu quoique ce soit ? Et si en fin de compte il n'avait été que le jouet d'autres acteurs? Je me permets de renvoyer à un entretien avec Daniel Dessert, où il explique pourquoi Louis XIV ne fut qu'un "roi-marionnette".

C'est plutôt du côté de Pontchartrain qu'il faudrait regarder pour avoir une vision :elle était simple, drainer le plus d'espèces métalliques possible, sans oublier qu'à partir de 1702, l'Espagne était devenue une alliée. Le livre d'André Lespagnol sur Saint-Malo contient de très intéressants passages sur le développement du commerce interlope à la fin du XVIIe siècle (en toute illégalité) qui marque une nouvelle époque et sur le rétropédalage des autorités françaises à partir de l'acceptation de la couronne d'Espagne. pas vraiment une politique linéaire !

Même si l'on ne partage pas les opinions de M. Dessert, désacralisons la vision des chefs d'Etat. Personne n'a connu quelqu'un qui diasait " après moi le déluge!" ?


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Message Publié : 24 Août 2013 9:18 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 07 Sep 2008 15:55
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j'hésite toujours à m'exprimer sur ces sujets que je connais mal mais je voudrais vous proposer quatre brèves observations personnelles.

Ne faut il pas faire preuve d'une particulière vigilance à l'égard de Bainville, grand historien (et même grand écrivain) certainement mais néanmoins très marqué (voire obsédé) par la rivalité franco-allemande - et me semble-t-il assez austrophile par hostilité également aux choix de Clemenceau en 1919 ?

Que savons nous des conceptions diplomatiques du Roi et du département des affaires étrangères en 1715 ? je veux dire : ces gens situaient ils uniquement leurs projets dans la tactique, dans le double jeu permanent, dans la recherche opportuniste d'alliés .. ou avaient ils une logique? et si oui laquelle : géographique ? économique ? religieuse ?

Enfin restons toujours prudents dans la lecture et l'interprétation des textes diplomatiques (même censés avoir été secrets) : ils ne dévoilent jamais entièrement la pensée de leur auteur. Au cas particulier affirmer que la France souhaite que les Habsbourg conservent l'Empire n'engage à rien de concret (au moins à court terme). Se méfier du Hanovre est parfaitement logique avec l'accession de Georges Ier au trône d'Angleterre. Mais il n'y a là aucune clairvoyance car le Hanovre sera plutôt un poids mort à trainer sur le continent pour la diplomatie et l'armée britanniques jusqu'en 1837.

Quant à la méfiance à l'égard de la Prusse elle peut sembler clairvoyante mais il me semble qu'à Vienne on devait très peu apprécier cet électeur de Brandebourg qui venait de se déclarer Roi...Il s'agit peut être d'un moyen pour le comte du Luc d'amadouer la chancellerie impériale ? Il faudrait lire en parallèle les instructions adressées au ministre du Roi à Berlin !

N'y a-t-il pas de la part de Versailles une vision archaïque au contraire en imaginant que les électeurs protestants (Hanovre ou Brandebourg) puissent ambitioner la couronne impériale ? à moins que ce danger n'ait été au contraire fort intelligemment inventé (ou grossi) par la France pour inquiéter Vienne et faciliter par là la réconciliation des Bourbons et des Habsbourg ? auquel cas un langage archaique exprime une vision d'avant-garde en effet.

Il faudrait qu'un spécialiste de la période (et de l'histoire diplomatique en particulier) puisse relire mes observations et les rectifier si nécessaire.

Une dernière chose : Dessert a sans doute raison de dire que Louis XIV ne comprenait rien à la fiscalité et aux finances. En revanche je doute qu'il a été naîf en matière militaire et surtout diplomatique.


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Message Publié : 25 Août 2013 21:27 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 21 Sep 2008 23:29
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Localisation : Belgique
Aigle a écrit :
j'hésite toujours à m'exprimer sur ces sujets que je connais mal mais je voudrais vous proposer quatre brèves observations personnelles.

Ne faut il pas faire preuve d'une particulière vigilance à l'égard de Bainville, grand historien (et même grand écrivain) certainement mais néanmoins très marqué (voire obsédé) par la rivalité franco-allemande - et me semble-t-il assez austrophile par hostilité également aux choix de Clemenceau en 1919 ?

Que savons nous des conceptions diplomatiques du Roi et du département des affaires étrangères en 1715 ? je veux dire : ces gens situaient ils uniquement leurs projets dans la tactique, dans le double jeu permanent, dans la recherche opportuniste d'alliés .. ou avaient ils une logique? et si oui laquelle : géographique ? économique ? religieuse ?

Enfin restons toujours prudents dans la lecture et l'interprétation des textes diplomatiques (même censés avoir été secrets) : ils ne dévoilent jamais entièrement la pensée de leur auteur. Au cas particulier affirmer que la France souhaite que les Habsbourg conservent l'Empire n'engage à rien de concret (au moins à court terme). Se méfier du Hanovre est parfaitement logique avec l'accession de Georges Ier au trône d'Angleterre. Mais il n'y a là aucune clairvoyance car le Hanovre sera plutôt un poids mort à trainer sur le continent pour la diplomatie et l'armée britanniques jusqu'en 1837.

Quant à la méfiance à l'égard de la Prusse elle peut sembler clairvoyante mais il me semble qu'à Vienne on devait très peu apprécier cet électeur de Brandebourg qui venait de se déclarer Roi...Il s'agit peut être d'un moyen pour le comte du Luc d'amadouer la chancellerie impériale ? Il faudrait lire en parallèle les instructions adressées au ministre du Roi à Berlin !

N'y a-t-il pas de la part de Versailles une vision archaïque au contraire en imaginant que les électeurs protestants (Hanovre ou Brandebourg) puissent ambitioner la couronne impériale ? à moins que ce danger n'ait été au contraire fort intelligemment inventé (ou grossi) par la France pour inquiéter Vienne et faciliter par là la réconciliation des Bourbons et des Habsbourg ? auquel cas un langage archaique exprime une vision d'avant-garde en effet.

Il faudrait qu'un spécialiste de la période (et de l'histoire diplomatique en particulier) puisse relire mes observations et les rectifier si nécessaire.

Une dernière chose : Dessert a sans doute raison de dire que Louis XIV ne comprenait rien à la fiscalité et aux finances. En revanche je doute qu'il a été naîf en matière militaire et surtout diplomatique.


Aigle,

le sujet est plutôt ce que Louis XIV pensait à la fin de sa "carrière" et ce qu'il voulait après son règne. Mais je pense, que c'est peut-être intéressant de voir ce qu'il a accompli lors de sa règne. Je vois dans les textes "français" plutôt quelque chose comme une éloge de Louis XIV, mais la question reste si il n'était pas déçu de ses guerres pour donner la France ses frontières naturelles et de donner une foi unique à la France? La balance à la fin de sa vie n'est selon moi ni si positif. Il a gagné Artois et une partie de la Flandre, il a obtenu l'Alsace et Lorraine, mais par ses trois guerres il a mis la Grande-Bretagne sur la voie de l'hégémonie mondiale. Et pendant tout son règne il était, même avec ses interventions dans les affaires des autres pays, toujours sous le "jeu" des Anglais, qui jouaient l'équilibre entre les puissances du continent.

Par exemple:
Dans la guerre de Succession d'Espagne: c'était la France contre la Grande Bretagne, les Provinces-Unies, les Habsbourgs et un grand nombre de royautés allemands. Mais quand l'empéreur Jozef II mourrait en 1711 son frère Charles VI devenait empéreur. Jusqu'à ce jour les Britanniques avaient retenu Charles VI comme candidat pour la couronne espagnolle. Si il devenait ét empéreur de la Sainte Empire Romain ét roi d'Espagne, l'équilibre européen serait perturbé. Et alors les Britanniques laissaient tomber leurs alliés. Ce qui aboutit sur les traités de Utrecht 1713 (c'est le tricentenaire maintenant et on a des célébrations. La deuxième conférence diplomatique internationale? après celle de 1648 de Westphalia? Mais c'est un autre sujet)
L'Autriche recevait les Pays-Bas espagnols et les possessions espagnolles en Italie, la Grande-Bretagne recevait Gibraltar et des régions au Canada. La France avait perdu sa prépondérance en Europe et le pays était ruiné. L'ascension de la Grande Bretagne est commencé et même Napoléon...

Pour les événements qui ont conduit à cet état lamentable de la France:
http://en.wikipedia.org/wiki/Nine_Years'_War
Et en français ça semble être "La guerre de la Ligue d'Augsbourg"
http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_ ... 'Augsbourg
Je dois encore comparer si les deux articles sont semblables...

Et oui après la mort de Louis XIV la France devenait plus "pragmatique" avec même une alliance avec l'Angleterre:
http://en.wikipedia.org/wiki/Triple_Alliance_(1717)
Je chercherai l'équivalent en français...

En cherchant pour la période après Louis XIV j'ai trouvé cette étude belge de 1926 avec laquelle j'ai des ennuis, parce que ma connaissance n'est pas assez forte pour controler ce que c'est étude dit...
http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... m_5_2_6376

Ce sont mes pensées préliminaires à la question ce que Louis XIV voulait à la fin de son règne.

Cordialement et avec estime,

Paul.


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Message Publié : 26 Août 2013 16:22 
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Inscription : 03 Mars 2010 11:03
Message(s) : 323
Localisation : France
Citer :
Dessert a sans doute raison de dire que Louis XIV ne comprenait rien à la fiscalité et aux finances. En revanche je doute qu'il a été naîf en matière militaire et surtout diplomatique.


C'est justement le paradoxe que souligne D . Dessert : parce que la guerre est quasi permanente et la nécessité de l'approvisionner en espèces métalliques, le roi, qui ne contrôle aucun des leviers financiers, n'a aucun pouvoir réel.


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