Je cherche des informations que je ne trouve pas facilement en livre, les historiens ne vont pas assez loin sur le sujet, c'est peut être pas trés interessant mais j'aimerais bien lire sur ce sujet, j'y viens, c'est la vie au quotidien dans cette prison de Pignerol et surtout la vie du masque de fer et Nicolas Fouquet, commence se passe la journée ? on mange quoi ? on chauffe comment ? passe t'on la journée sans sortir ? enfin plein de questions qui sont pas abordées.

Bonjour-

La vie au quotidien de Nicolas Fouquet à Pignerol est un sujet qui doit être, au contraire, assez intéressant. Seulement vous avez raison, on n'en dit en général pas grand chose...

S'il y vivait comme les quelques prisonniers "de luxe" enfermés à la Bastille sous Louis XIV, son traitement n'était pas si rude qu'on pourrait le croire. Pour quelqu'un qui a le malheur d'etre privé de sa liberté, je veux dire.

Certains prisonniers de la Bastille pouvaient recevoir des amis, se faire servir par leur domestique, pouvaient meubler (!) leur cellule à leur goût... Ils avaient le droit de sortir dans le jardin du gouverneur et de demander à voir un confesseur ou un médecin. La nourriture, quant à elle, n'était pas non plus des plus mauvaises.

Ca c'est pour la Bastille, et pour des personnages qui n'avaient pas eu le malheur de susciter chez Louis XIV la haine qu'il portait au Surintendant... Je ne sais pas si ce dernier a bénéficié de tous ces égards pendant son long séjour à Pignerol... La seule chose que je sais, c'est que Fouquet avait l'autorisation de rendre visite à un autre prisonnier (bien connu lui aussi!) Lauzun, et vice-versa. Et aussi qu'il avait le droit de se promener.

Ah oui, une lettre de Louvois (ministre de la Guerre à cette époque) datée du 23 Nov 1678, promet à Fouquet des adoucissements considérables dans sa captivité. Donc il ne devait pas être si confortablement installé que ca...

Pour ce qui est du fameux masque de fer (qui était d'ailleurs un masque de velours noir, selon les propres mots de son geôlier de toujours, M. de Saint-Mars, dans l'acte de décès) c'est tout une histoire! Je dirai juste qu'il était traité, en tous cas d'apres ce que j'ai lu, avec tous les égards dûs à un personnage de haute naissance. (Ce qui contredit d'ailleurs un petit passage posté ailleurs dans ce forum. Je ne sais pas qui a raison.) Maintenant les détails... Le sujet du masque de fer a déjà été traité quelque part dans ce forum, et bien que l'objet de la discussion ait été son identité, vous y trouverez peut-être des détails sur sa vie en captivité.

_________________
And the heart that is soonest awake to the flowers / Is always the first to be touch'd by the thorns. -Thomas Moore

merci pour ces détails, mais quand même Pignerol en 1680 devait être loin de Vaux-le-Vicomte pour cet homme qui a eu une vie "royale" il devait souvent penser à son château et se demander se qu'il faisait ici. c'est dommage de ne pas avoir trace des discussions qu'il avait avec Lauzun. au fait Pignerol existe toujours ?. dommage aussi que M. De Saint-Mars n'ait pas pris sa plume pour écrire un peu, mais il était un bon militaire obéissant et savait garder secret.

Bonjour-

Pignerol, la ville, existe toujours bien entendu. Mais pour ce qui est de la forteresse, je ne suis pas sûre. Je crois que oui, mais il faudrait vérifier.
Quant à Fouquet, oui, c'est évident que Pignerol n'est pas Vaux-le-Vicomte! Ni même Saint Mandé... Lauzun et lui avaient en effet matière à réflexion! Comme vous, j'aurais bien aimé savoir de quoi ils discutaient, ces illustres prisonniers...



Oh lui, c'était plutôt dans son intérêt de se taire (en ce qui concerne le masque) Et puis... il était bien récompensé pour sa discrétion. La captivité du masque dura quelque chose comme trente-quatre ans, je crois, période au cours de laquelle le goêlier et ses neveux (la garde du prisonnier se transmit "en héritage") amassèrent une fortune considérable. Sans parler des titres de noblesse et des promotions... Et, pour couronner le tout (c'est le cas de le dire), l'éternelle reconnaissance royale...

Par ailleurs, j'ai pu recueillir deux ou trois détails sur sa captivité - Outre le fait qu'il pouvait choisir lui-même ses repas, qui lui étaient servis par le gouverneur, il eut droit à des meubles neufs et, il semblerait, une quantité appréciable de livres. Le gouverneur rendait régulièrement compte de sa santé à Louvois-

Son cachot avait été aménagé par le collaborateur direct de Vauban, de manière à ce que personne ne puisse le voir, ni l'entendre. C'est que Louvois avait bien recommandé à M. de Saint-Mars que le prisonnier fut "gardé avec une grande sûreté et qu'il ne puisse donner de ses nouvelles à qui que ce soit en nulle manière [...] qu'il (le gouverneur) n'écoute jamais sous quelque prétexte que ce puisse être ce qu'il voudra lui dire [...] Quant au cachot "le faire accommoder de sorte que les jours qui seront au lieu où il sera ne donnent point sur des lieux qui puissent être abordés de personne, et qu'il y ait assez de portes fermées les unes sur les autres pour que vos sentinelles ne puissent rien entendre."

Voilà.

_________________
And the heart that is soonest awake to the flowers / Is always the first to be touch'd by the thorns. -Thomas Moore

Pour apporter quelques informations complémentaires sur la vie à Pignerol, Fouquet (tout comme Lauzun) avait droit à deux valets, qui devaient donc partager la peine de leur maître, c'est-à-dire ne quitter la forteresse qu'à leur mort. Il était extrêmement difficile de trouver des personnes acceptant de s'enfermer toute leur vie ! Ainsi, à la mort de Champagne, l'un des deux serviteurs du surintendant, en 1674, le gouverneur Saint-Mars fait part à Louvois de sa difficulté de trouver un remplaçant. Il lui demande alors l'autorisation de mettre Eustache Danger (jusqu'alors gardé au secret et considéré par beaucoup comme le futur "masque de fer") au service de Fouquet. Le ministre accepte.

A partir de 1677, Louis XIV décide d'améliorer le sort de Fouquet (enfermé depuis le 16 janvier 1665) et de Lauzun (emprisonné le 12 décembre 1671). Ils peuvent désormais se promener séparément sur les remparts deux heures tous les deux jours. Pendant ces promenades, ils peuvent parler aux officiers de la citadelle.

A partir de janvier 1679, Fouquet obtient l'autorisation de se promener dans toute la citadelle, et de pouvoir rencontrer Lauzun, enfermé à l'étage en dessous (tous deux communiquaient en fait en secret depuis longtemps, Lauzun ayant creusé un passage entre leurs deux chambres ). Tous deux peuvent commander les livres de leurs choix. Ils peuvent également écrire à leurs familles et amis respectifs, à condition de transmettre leurs courriers à Louvois. L'autorisation de recevoir des visites leur est accordée : Fouquet peut revoir sa femme et ses enfants (sa fille Marie-Madeleine, âgée de 22 ans, obtient même la faveur de loger au-dessus de ses appartements) ; les notables rendent visite aux deux illustres captifs.

Cette liste des adoucissements du régime carcéral des deux prisonniers permet de déduire a contrario ce que pouvait être leur quotidien auparavant.