Je vais maintenant répondre à la question initiale puisque ça fait une bonne vingtaine d'années que ce sujet m'intéresse. Les informations sont très disparates. Voici, en avant-première pour Passion-Histoire, mon résumé du puzzle :
- Au 15e et 16e siècle, la Renaissance fait éclore en Italie plusieurs centaines de petites académies.
- En France, la Renaissance a fait émergé aussi des savants. François 1er créa le Collège royal (collège de France), à l'origine pour l'études des langues de l'antiquité, puis avec d'autres chaires pour d'autres sciences telle que les mathématiques. Ce collège, placé sous la protection du roi et non pas de l'Eglise, faisait un peu le contrepoids de l'Université de Paris, en enseignant des matières qui n'étaient pas celles du cursus traditionnel.
- L'Accademia dei Lincei, fondée à Rome en 1603, est la plus connue des académies scientifiques italiennes.
- Le développement économique s'accompagne d'un allongement de la durée des études pour les enfants des familles riches. L'apprentissage de la lecture et de l'écriture ne suffit plus. Des sujets difficiles commencent à être enseignés, tels que les textes antiques et la théologie.
- La réforme protestante fait apparaitre des collèges et universités, qui s'éloignent de l'enseignement classique des écoles catholiques. Certains professeurs se tournent vers les nouvelles sciences que sont les mathématiques, la physique, et la biologie.
- La contre-réforme catholique apporte un vent de renouveau, soutenu notamment par les Jésuites qui multiplient les fondations de nouveaux collèges. Au Vatican, le jésuite Clavius rédige un nouveau programme, son ratio studiorum, qui introduit, ou accentue, l'étude des sciences dures. De jeunes professeurs remarquables, tels que le père Jean Leurechon, font découvrir ces sujets aux enfants.
- Le père Marin Mersenne fonde à Paris en 1635 une académie scientifique. Quelques années passée au collège des Jésuites de La Flèche, lui ont donné le goût de la science. Il suit les travaux des académies italiennes. Dans son couvent des Minimes près le la place royale (la place des Vosges), il a du temps et de l'espace pour organiser des rencontres entre les savants parisiens. C'est ainsi qu'il attire autour de lui des scientifiques tels que Descartes (passé à la postérité par son talent et par des récupérations diverses). L'académie est créée, en partie, en réaction à la condamnation de Galilée en 1633, pour que les scientifiques puissent exercer un contre-pouvoir grâce à la force de leur union.
- D'autres académies scientifiques se développent en province, dont la plus remarquable est celle de Castres, fondée en 1648, animée par le médecin Pierre Borel. Les travaux du voisin toulousain, Pierre de Fermat, y sont lus et retransmis, bien que Fermat n'y soit pas présent.
- A Paris, le riche Henri-Louis Habert de Montmor prend le relais de l'académie du père Mersenne, poussé par Pierre Gassendi, qui est chanoine et professeur d'astronomie au Collège royal, lui aussi ardent soutien de Galilée. Pour prolonger l'oeuvre de Gassendi et lui rendre hommage après son décès en 1655, Montmor donne officiellement le nom d'académie en 1657 aux réunions de savants qui dinent chez lui.
- L'Angleterre se relève après sa guerre civile. Elle crée la Royal Society en 1660 (pas en 1645 comme le note Wikipedia dans l'article sur l'Académie royale des sciences). La royauté britannique souhaite avoir une institution ayant autant de prestige que l'Académie française, mais souhaite s'en démarquer en rassemblant des scientifiques au lieu de gens de lettres. Cette création est due aussi à l'activisme de John Evelyn qui a vécu en Italie, et qui admire Gassendi.
- Louis XIII n'était pas intéressé par le sciences. Il aimait principalement le jeu de paume, les ballets, la chasse, et la guerre. Le premier de ses ministres, le cardinal Richelieu, aimait le théâtre, et fond l'Académie française en 1635, à la fois pour encourager et récompenser les auteurs qu'il aimait, et aussi pour les amadouer par l'argent d'une pension.
- Louis XIV fut d'avantage intéressé par la science et les sujets intellectuels que son père. C'est sans doute parce que celui qui surveilla de loin son éducation, fut le cardinal Mazarin qui aimait les livres. Louis XIV fonda l'Académie royale des sciences, poussé par sa rivalité avec l'Angleterre et les Pays Bas, par le désir de certains savants qui n'avaient pas de place chez Montmor, et sûrement inspiré par Richelieu, dans le but d'avoir une nouvelle institution prestigieuse tout en muselant un peu des intellectuels en leur donnant des objectifs scientifiques plutôt que politiques. Sans s'en rendre bien compte, le roi Soleil participera ainsi activement à l'avènement du siècle des Lumières.
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