L’identification du roi au soleil est assez précoce, mais n’est pas d’abord de son fait ; ainsi, enfant puis adolescent, entre 1651 et 1659, il est apparu souvent dans des ballets de cour, en jouant le rôle d’Apollon, notamment dans l’allégorie du soleil levant, où il porte une perruque dorée et un habit éclatant:
Cependant, il semble qu’une démarche volontaire ait été engagée à partir de 1662 : dans le fameux carrousel des Tuileries, le bouclier du roi portait un soleil avec l’inscription "ut vidi vici" (quand j’ai vu, j’ai vaincu), et il écrit dans ses Mémoires :
Citer :
"Ce fut là [lors du carrousel de 1662] que je commençai à prendre [la devise « nec pluribus impar », c’est moi qui précise] que j'ai toujours gardée depuis ; et que vous voyez en tant de lieux. Je crois que, sans m'arrêter à quelque chose de particulier et de moindre, elle devait représenter, en quelque sorte, les devoirs d'un prince, et m'exciter éternellement moi-même à les remplir. On choisit pour corps le soleil, qui, dans les règles de cet art, est le plus noble de tous, et qui, par la qualité d'unique, par l'éclat qui l'environne, par la lumière qu'il communique aux autres astres qui lui composent comme une espèce de cour, par le partage égal et juste qu'il fait de cette même lumière à tous les divers climats du monde, par le bien qu'il fait en tous lieux, produisant sans cesse de tous côtés la vie, la joie et l'action, par son mouvement relâche, où il parait néanmoins toujours tranquille, par cette course constante et invariable, dont il ne s'écarte et ne se détourne jamais, est assurément la plus vive et la plus belle image d'un grand monarque"
La première mention écrite que j’ai trouvé sur cette identification est de Racine, qui célèbre en 1663 la guérison du roi (il avait eu la rougeole) dans une "Ode à la convalescence du Roi" en dénonçant la "perfidie" de "l’insolente maladie" qui avait osé menacer le roi, comparant Louis XIV au soleil et son règne à l’âge d’or (Racine,
Oeuvres complètes, Gallimard la Pléiade, tome II, p.986). Mais il y en a sûrement de plus précoces.
La construction de Versailles permet de développer le thème, dès la construction, et même dans la construction du château lui-même : il est orienté est-ouest, le soleil se levant au solstice d’été dans l’axe passant par la chambre du roi et se couchant dans l’axe du Grand Canal, étant ainsi à midi à la verticale du centre du château. Le bassin d’Apollon se trouve aussi dans cet axe.
Vers 1680 cependant, le thème du soleil est moins présent, de même que l’identification à Auguste et Hercule, probablement dans le souci de ne pas être accusé de paganisme ou de blasphème par les Protestants dans le contexte de la préparation de la Révocation : par exemple, les Anglais raillent dans un pamphlet le décor de la statue de Louis XIV sur la place des Victoires, statue "couronnée de rayons et d’étoiles comme les anciens Romains avaient l’habitude de le faire pour leur dieu Jupiter".
Sur l'image de Louis XIV, un excellent ouvrage:
Louis XIV, les stratégies de la gloire, P. Burke, Seuil 1995