Vous avez de la chance, la monarchie administrative, c'est mon dada
(ben oui, c'est drôle, mais je trouve ça passionnant depuis que j'ai eu comme prof l'excellentissime Michel Pernot)
Les différents conseils sont en fait réduits à la routine à l’époque de Louis XIV, car le roi ne veut pas leur donner trop d’importance ; plus le temps passe, et plus le roi travaille en tête à tête avec les chefs des grands services administratifs (contrôleur général et secrétaires d’Etat) si bien que les affaires importantes ne passent plus que pour la forme devant les conseils.
Le Conseil d’En Haut est réuni régulièrement 2 à 3 fois par semaine, et les personnes pouvant prétendre à s’occuper des affaires en raison de leur rang en sont systématiquement écartés (frère, princes du sang) ; le Grand dauphin n’y est admis qu’en 1691, et seuls 2 nobles d’épée (Villeroy et Beauvillier) y ont participé en 54 ans de règne. Le chancelier est aussi jugé un trop haut personnage, et n’y siège pas systématiquement : Le Tellier y est présent de 1661 à sa mort en 1685, mais seulement à partir de 1677 comme Chancelier. Boucherat (1685-1699) n’y entrera jamais, Phélypeaux si, de 1689 à 1714, mais seulement à partir de 1699 comme Chancelier. De même, le Conseil n’a accueilli aucun prélat ni maréchal. Louis XIV s’en est expliqué dans les
Mémoires pour l’instruction du Dauphin :
"Il n’était pas de mon intérêt de prendre des sujets d’une qualité plus éminente. Il fallait avant tout [...] établir ma propre réputation et faire connaître au public, par le rang même d’où je les prenais, que mon intention n’était pas de partager mon autorité avec eux. Il m’importait qu’ils ne conçussent par eux-mêmes de plus hautes espérances que celles qu’il me plaisait de leur donner".
Les membres du Conseil d’En Haut continuent d’être appelés « ministres », ou « ministres d’Etat », mais contrairement à la période précédente, où l’on était nommé par brevet ou lettres patentes, on le devient sous Louis XIV par simple convocation verbale d’un huissier, et on cesse de l’être si le roi ne vous convoque plus ; ainsi, on ne sait pas quand colbert devint ministre exactement, car il n’existe aucune trace écrite !
Les ministres ne furent jamais plus de 5 à la fois au Conseil, au total 18 ; vous pourrez les trouver sur le forum, car ils ont fait l’objet d’une question au jeu « Grand Siècle ». En fait, 3 dynasties ministérielles ont servi de vivier : les Colbert, les Le Tellier, les Phélypeaux (un seul ministre, mais 5 secrétaires d’Etat de 1629 à 1715). Madame de Maintenon assistait aux séances mais sans droit de parole.
Les autres conseils :
Le "
Conseil royal des finances" est la grande nouveauté de Colbert en 1661, et remplace le Conseil des Finances et le Conseil d’Etat et des Finances, en même temps que la disparition du Surintendant des Finances (voir le fil sur Fouquet). Le roi est seul maître des finances, mais ce conseil l’assiste. Il est composé du roi (le Chancelier en l’absence du roi), du chef du Conseil (rôle honorifique tenu au début par Villeroy), du Contrôleur Général des Finances (Colbert jusqu’en 1683), et de 2 ou 3 intendants des finances.
Le
Conseil privé ou « des Parties » fonctionnait comme aujourd’hui la Haute Cour de justice, la Cour de Cassation (des arrêts du Parlement) et le Conseil d’Etat. Il est présidé par le Chancelier, le roi y vient rarement (il y a un fauteuil vide), et comprend 80 (plus tard 98) maîtres des requêtes et 30 conseillers (24 de robe, 3 d’Eglise, 3 d’épée). Ce conseil met aussi en forme les édits et ordonnances. C’est le vivier des intendants, ambassadeurs et Secrétaires d’Etat.
Le "
Conseil des Dépêches" regroupe autour du roi une fois tous les 15 jours (c’est très peu, mais rappelez-vous que le roi traite beaucoup d’affaires en tête à tête) tous les ministres et Secrétaires d’Etat, ceux-ci chargés chacun d’un quart de la France, et traite la correspondance administrative.
Il y a aussi quelques autres conseils de moindre importance :
Conseil de Conscience : il traite les affaires écclésiastiques (nominations aux bénéfices, évêchés, abbayes..) chaque vendredi et comprend le Confesseur du roi, l’archevêque de Paris et un ou 2 évêques. Avant la révocation, il existait un
Conseil de la R.P.R. pour les affaires protestantes.
Un
Conseil du commerce a fonctionné sous Colbert, qui comprenait des représentants des commerçants des principales villes, «les « Députés du Commerce » (la société civile, dirions-nous aujourd’hui). Il est réactivé en 1700.
Un
Conseil de Justice est créé en 1665, présidé par le Chancelier, rassemble des Conseillers d’Etat et des représentants des Cours souveraines. Il avait pour but de réformer la justice ; 6 Codes ont ainsi été élaborés, dont le fameux « Code Noir », qui a fait couler tant d’encre sur ce forum !
Les Secrétaires d’Etat étaient 3 jusqu’en 1683 : Celui « des
Etrangers » (comprenez « Affaires Etrangères »), celui de la
Guerre, celui de la
Maison du Roi, la
Marine était partagée entre la guerre pour le Levant, et les Etrangers pour le Ponant. Mais pour compliquer encore les choses, le roi avait officieusement demandé à Colbert de s’occuper de la Marine sans les enlever en droit aux 2 Secrétaires d’Etat précités.
Vous citez les finances, mais elles sont en fait dirigées non par un Secrétaire d’Etat, mais par le Surintendant avant 1661, et par le Contrôleur général ensuite.
Après 1683, chaque Secrétaire s’occupe des 4 grands groupes d’affaires : Affaires étrangères, Marine, Guerre et Maison du Roi. Notez qu’il n’y a pas de préposé à l’Intérieur, dont s’occupe à la fois le Conseil d’En haut, le Contrôleur Général des Finances et chaque Secrétaire d’Etat dans sa zone géographique : c’est à eux que les Intendants envoient leur courrier.
La bureaucratie employée par ces Secrétaires d’Etat n’a cessé de se développer tout au long du règne. A Versailles, elle occupait les 2 bâtiments en avant du corps central du Château, les « ailes des Ministres » .
Je pourrai si vous le souhaitez vous donner la liste chronologique et par département des Secrétaires d’Etat.