Je n'ai pas pu avoir accès aux œuvres complètes d'Olympe de Gouges (l'ouvrage est donc emprunté), j'ai donc dû me rabattre sur d'autres titres — en passant, j'ai vu que celui qui avait publié les textes d'Olympe, Olivier BLANC, était aussi l'auteur d'une biographie (sur Olympe), publiée aux Éditions Syros en 1989 (je n'y ai pas accès).
Dans le chapitre 2 « Révolution française » du tome 4 de l'Histoire des femmes consacré au XIXe siècle (Paris, Plon, 1991), Élisabeth G. Sledziewski écrit : « Encadrés par des appels au combat contre les hommes, le Préambule et les dix-sept articles de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne reprennent fidèlement le modèle de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Olympes de Gouges ne fait du reste que transposer aux femmes les avantages de l'État de droit, en insistant sur le caractère bisexué de la communauté civile et politique. Rien de très original, donc, dans ce texte provocateur, si ce n'est, justement, la démarche de provocation qui l'anime. Rappeler que les droits de l'homme se déclinent au féminin, et veiller à ce que cette déclinaison soit effective, c'est dire clairement que l'universalisme des droits est une supercherie, et qu'en feignant de parler au nom de l'humanité tout entière, il parle seulement du sexe masculin. En féminisant explicitement, d'une manière quasi obsessionnelle, la Déclaration de 1789, Olympe de Gouges met en échec la politique du mâle, démasque les exclusions implicites et les ambiguïtés ravageuses d'un universalisme au-dessus de tout soupçon. « Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l'usurpation », s'exclame la médiocre poétesse, mais vraie femme des Lumières. Il n'est plus permis désormais de se laisser duper. Mais seule la vigilance politique des femmes peut empêcher les hommes de confisquer la Révolution. Le sens libérateur de cette Révolution, c'est aux femmes qu'il appartient de le dévoiler. » (pages 53-54).
Christiane VEAUVY et Laura PISANO, Paroles oubliées. Les femmes et la construction de l’État-nation en France et en Italie 1789-1860. Paris, Armand Colin, 1997, publient entre autres textes un très long extrait des Droits de la Femme d’Olympe de Gouges (1791). Voilà comment elles présentent ce texte :
« Pour dépasser toute approche partielle de la pensée et de la pratique politique d’O. de Gouges [...], il est nécessaire de lire ce texte dans sa totalité [...]. Il comporte quatre parties distinctes :
— La première partie est une adresse à la reine. Olympe sollicite son soutien pour la défense de « ce sexe malheureux » en invoquant sa qualité de mère et d’épouse. Cette adresse n’a aucune en-tête.
— La deuxième partie, la plus brève, est intitulée « Les Droits de la Femme ». Olympe interpelle l’Homme à la seconde personne du singulier : « ...es-tu capable d’être juste ? », puis montre comment « [l’homme] veut commander en despote sur un sexe qui a reçu toutes les facultés intellectuelles ».
— La Déclaration de droits de la femme et des citoyennes proprement dite est structurée en trois temps : (i) le « préambule » introduit le thème des droits de la femme dans la perspective du « maintien de la constitution, des bonnes mœurs et [du] bonheur de tous » ; (ii) les 17 articles de la Déclaration sont articulés autour des notions d’égalité entre les sexes et de nation ; de celle-ci, Olympe dit qu’elle est « le principe de toute sainteté » (terme équivalent pour elle à celui de souveraineté) ; (iii) le postambule synthétise de manière percutante l’analyse de la condition féminine ; l’un des points clés de l’analyse d’Olympe est la confrontation du statut de la femme avec celui de l’esclave. Elle critique les stratégies féminines de pouvoir telles que « la ruse » et « l’administration nocturne », thème que reprendront les saint-simoniennes.
— La dernière partie, intitulée « Forme du Contrat Social de l’Homme et de la Femme », probablement la plus originale, est très composite. Elle comporte non seulement une « formule de l’acte conjugal » ainsi que des revendications en faveur des veuves, des « demoiselles trompées par les fausses promesses d’un homme à qui elles se seraient attachées » et des « femmes publiques », mais encore « quelques mots sur les troubles que cause, dit-on, le décret en faveur des hommes de couleur, dans nos îles » ; ces « quelques mots » remplissent, en réalité, une page entière et confirment que l’abolition de l’esclavage a constitué pour Olympe une préoccupation aussi importante que celle des droits de la femme, l’une et l’autre étant chez elle indissociables. » (page 121).
Suit pages 122 à 127 le texte (incomplet) de la Déclaration.
_________________ « Le luxe [...] corrompt à la fois le riche et le pauvre, l’un par la possession, l’autre par la convoitise ; [...] il ôte à l’État tous ses citoyens pour les asservir les uns aux autres, et tous à l’opinion. »
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