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Message Publié : 27 Juil 2009 21:02 
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Enki-Ea a écrit :
Bonjour Marquis,

oui effectivement, nous nous écartons un peu du sujet de départ mais il faut dire que cette discussion est intellectuellement stimulante.

En ce qui concerne le résumé que vous faites de ma "théorie", je ferais quelques petites retouches. En une phrase, je dirais que Louis XV et Louis XVI restent absolutistes dans la forme sans l'être dans le fond alors qu'il eût fallu l'inverse. L'absolutisme dans la forme va leur mettre à dos certaines catégories sociales et donner une mauvaise image de la monarchie. Le manque d'absolutisme dans le fond va expliquer le manque de réformes nécessaires au pays et à la sauvegarde du pouvoir royal.

Voilà résumé à grands traits ce que je pense.


Bonsoir Enki-Ea,

Je n'ai pas le temps de réaliser une réponse à la hauteur de votre théorie, donc je vais me contenter de retranscrire un passage de l'article consacré à la monarchie absolue dans le dictionnaire critique de la révolution française.

Citer :
" Les derniers moments de la monarchie absolue laissent ainsi l'impression d'une confusion générale dans laquelle chacun parle en même temps le langage de l'archaïsme et celui de la nécessaire modernisation : la chose est vraie des hommes du roi comme de leurs adversaires. Aucun épisode ne la fait mieux voir que la dernière tentative véritable de ressaisissement de la monarchie, celle du chancelier Maupeou à partir de :771. Réforme, révolution, coup d'Etat ? L'indécision sur les termes ne renvoie point seulement ici à des positions partisanes, elle dénote l'incroyable ambiguïté d'une politique pourtant radicale, qui se dresse entre la société des corps pour réaffirmer l'absolue souveraineté royale. D'ailleurs le débat ne peut déjà plus être cantonné entre le droit du roi et les prétentions des cours souveraines. Si en tentant de démanteler l'opposition parlementaire, Maupeou cherche à restaurer un lien direct entre l'autorité du souverain et le corps de ses sujets, Malesherbes, exprimant les remontrances de la Cour des Aides, en appelle aux droits et à l'opinion de la nation.
Dans les deux camps, on remet en cause l'espace politique séculaire dans lequel la monarchie absolue a grandi, s'est affirmée puis se désagrège. Était-elle susceptible de se réformer ? La question, qui est à l'origine d'inépuisables débats, n'a guère de sens puisque c'est l'absolutisme lui-même qui désormais remet en cause l'équilibre historique sur lequel il a longtemps fondé sa vigueur. Jacques REVEL."


Je trouve que la question de la réforme royale posée à travers l'analyse du système de la monarchie absolue est bien plus convainquante que la question portant sur la volonté de Louis XV ou de Louis XVI de réformer réellement le système.

La lecture des échecs des tentatives de réformes royales devient plus simple. Par exemple, l'échec de la réforme fiscale : Le roi cherche à établir l'impôt "universel", mais il ne peut l'obtenir car il refuse de mettre fin à la société d'Ordre et il refuse le contrôle des dépenses de l'État. Ce contrôle signifiant la fin de la monarchie absolue...

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Message Publié : 27 Juil 2009 21:25 
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Alain.g a écrit :
On sent que Louis XVI a évolué tout au long de son règne, mais ce qui est incroyable, c'est que succédant à Louis XV, il commence son règne imprégné par son éducation des conceptions de son père le dauphin, dont il approuvait les conceptions traditionnelles, d'après Banville qui insiste sur ce ce point, en citant cette mention de la main du roi: "qu'ont donc fait les grands, les Etats de province, les parlements pour mériter leur déchéance?". Il condamne les décisions de Louis XV contre les parlements.



Son père est mort en 1765. Louis Auguste a onze ans. Il devient roi à 20 ans... Difficile de penser qu'une jeune garçon, qui ne devient Dauphin qu'en 1761, soit impregné des conceptions politiques de son père. Père qui faisait office de chef d'un nouveau parti "dévot", et rien dans la politique initiale de Louis XVI démontre une influence dévote. Et d'ailleurs, le rappel du comte de Maurepas s'inscrit à rebours.

Citer :
Michelet, cité par Bainville, montre aussi que le jeune roi est persuadé que : " le parlement avait des titres aussi bien que la royauté ... en y touchant Louis XV avait fait une chose dangereuse, révolutionnaire ..." .
Toute une conception de la royauté qui est gravée en lui. Il croit par exemple que l'indépendance de la magistrature fait partie des lois fondamentales du royaume.


C'est juste, Maupeou a touché à l'équilibre du système de la monarchie absolue. Remettre en cause les lois fondamentales du royaume revenait à détruire la monarchie absolue et à créer un nouveau contrat entre le roi et le peuple.

Mais le rappel des parlements s'explique aussi par une volonté de s'attirer l'amour de son peuple. En cela, oui c'est bien un respect des traditions. Il choisira pour créer ce nouveau "contrat" avec le peuple un procédé archaïque mais traditionnel : les Etats généraux. Mais là, pour faire face à l'opinion publique, l'autorisation du doublement du Tiers sera le premier acte révolutionnaire.

Citer :
Louis XVI était donc condamné dès le départ à ne rien comprendre. Irrattrapable car quoiqu'il ait fait ensuite, il n'a pu convaincre dès lors qu'il pensait qu'il fallait plutôt revenir en arrière que réformer. Ce qu'il fera en redonnant à la noblesse des garanties, notamment pour l'accès à l'armée, par exemple.
Fidèle à son père, Louis XVI a " empêché un rajeunissement de l'Etat" conclut Bainville. L'analyse a le mérite d' éclairer les contradictions du roi. Il pensait traditions à remettre en place et ses ministres lui disaient qu'il fallait au contraire réformer dans l'esprit du temps. De quoi ... perdre la tête!


Louis XVI est à la tête d'une monarchie absolue mais ne possède pas un pouvoir absolu et même d'un pouvoir fort, car le pouvoir est trop contesté depuis le début du siècle.

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Message Publié : 27 Juil 2009 21:37 
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pierma a écrit :
Le malheureux ! Son premier acte est d'annuler la mesure qui a sauvé le trône de son prédécesseur, ce qui revient à rétablir l'anarchie dans le royaume. (Il se trouvera beaucoup de monde pour le féliciter de ce geste libéral, mais concrètement, il signe la fin de la monarchie absolue.)


Marquis de Chambonas a écrit :
Vous exagérez tout de même un peu la situation. Le trône de Louis XV ne fut pas menacé à ce point. Entre blocage et menace, il y a une marge. :wink:

Cette estimation provient de Gilles Perrault, dans le tome II du Secret du Roi : "à chaque conflit, Choiseul avait conseillé au roi de reculer. Hors on en était arrivé au point où on ne pourrait plus reculer sans tomber."

Je vous accorde qu'il n'est pas historien, mais les faits qu'il rapporte sont gratinés :

"Dans le Dauphiné, les parlementaires exilés sont rappelés, tandis que l'intendant Bourgeois de Boynes doit donner sa démission. A Rouen le duc d'Harcourt, gouverneur de Normandie, est publiquement humilié et le parlement, démissionnaire, revient triomphant au milieu d'une liesse populaire qui dure une semaine. A Grenoble, les magistrats n'acceptent de rentrer dans le rang que si le lieutenant général Du Mesnil est désavoué par le pouvoir. (...) A Toulouse le duc de Fitz-James, commandant en chef de la province, doit s'entourer de gardes du corps, comme y avait été obligé Du Mesnil à Grenoble, pour ne pas être arrêté par les argousins du parlement, qui a eu l'audace de lancer contre lui un mandat d'amener. (...)
Le mot "anarchie" est-il trop fort pour qualifier l'état d'un pays où le représentant du roi dans une province doit s'entourer de gardes pour échapper à l'arrestation, et où un procureur général, en principe l'homme du roi au Parlement ne craint pas de recourir contre lui au chantage ?
" -Il s'agit du procureur La Chalotais, en Bretagne, qui conservait des lettres compromettantes de Louis XV à sa maîtresse répudiée, Anne de Romans, et poursuivait le duc d'Aiguillon, gouverneur de Bretagne, pour une tentative de meurtre imaginaire contre La Chalotais lui-même : dans cette variante bretonne, le Parlement monte tranquillement contre le représentant du roi... une accusation de tentative de meurtre.

J'admets que Louis XV a fini par y mettre bon ordre (non sans mal !) mais on mesure à cette énumération la faute majeure commise par Louis XVI dès le début de son règne : rappeler les Parlements, c'était s'exposer à nouveau à la même situation, face à des parlementaires encore renforcés par ce succès. Sans parler de l'impossibilité de faire voter de nouveaux impôts, dès l'instant où les Parlements bloquent tout.

EDIT : comme vous l'écrivez joliment, avec Louis XVI la monarchie absolue est très éloignée du pouvoir absolu !

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Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


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Message Publié : 27 Juil 2009 21:57 
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L'affaire concernant le duc d'Aiguillon est intéressante car elle permet de mettre en valeur les divisions du "gouvernement royal" sous Louis XV et l'importance de la question fiscale.

En 1765, c'est un affaire d'impôt (comme par hasard...) supplémentaire imposé par le duc D'Aiguillon aux bretons qui déclenche les hostilités. Mais l'homme fort à Versailles à ce moment-là est le duc de Choiseul. Il possède une solide clientèle parmi les parlementaires et domine ce que l'on pourrait appeler dans un raccourci facile un parti des "philosophes". Donc Choiseul éprouve quelques scrupules à mater la révolte parlementaire...

En 1769 la procédure judiciaire des bretons à l'encontre d'Aiguillon est une provocation. Choiseul a été disgracié, il devient l'exilé de Chanteloup, et le Duc d'Aiguillon est le favori de la nouvelle favorite, la Du Barry... Il est donc plus facile de mater la révolte en théorie.

Ces deux affaires nous conduisent directement à l'exil "révolutionnaire" des parlements. Le roi doit alors affronter l'opinion publique, sa cour et sa propre famille !

Au plaisir de vous lire.

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Message Publié : 28 Juil 2009 21:38 
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Finalement on en revient toujours à croiser la grande et la petite Histoire,

Mais je préfère me concentrer sur la personne du sieur Capet, l'histoire a retenu de lui le portrait d'un grand timide qui avait du mal à prendre des décisions, et encore plus à les faire appliquer (même si ce n'est pas un mal propre à son règne, un des paradoxe de l'absolutisme est d'offrir un pouvoir absolu à des monarques qui dans l'absolu ne sont pas toujours capables de se faire respecter ou de faire respecter leurs décisions devant les blocages ou les résistances des corps sociaux).

J'aimerais émettre une nouvelle hypothèse: avec une personnalité plus forte, plus affirmée, voire plus terrible- un genre de Pierre le Grand Français- ou de Buonaparte bourbon (l'horrible oxymore)- aurait-il pu donner un autre visage à cette révolution ? Car au tout début des événements, rien ne semble prédire l'embrasement prochain, le formidable souffle qui va balayer tout un pays et une partie de l'Europe pendant 10 ans,

Robospierre n'est qu'un isolat au milieu d'une assemblée qui ne souhaite qu'une chose: tempérer les pouvoirs du Roi dans une monarchie à l'Anglaise capable à la fois de satisfaire les aspirations de l'élite éclairée mais aussi de garantir la sécurité civile et politique. Ils sont rares ceux qui en 1789 réclament la tête du Roi, St Just n'est encore qu'un jeune adulte dont le seul fait est d'avoir écrit une nouvelle érotique de mauvais goût.

Et même si rapidement le ver est dans le fruit... Une personnalité plus affirmée, plus énergie et moins enfermé dans sa tour d'ivoire Versaillaise aurait-elle pu donner un autre cours à la Révolution ?


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Message Publié : 28 Juil 2009 21:55 
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Mais la personnalité de Louis XVI était tout à fait affirmée, trop même sans doute par rapport aux attentes. On avait l'image d'un roi populaire, qui était d'ailleurs soigneusement entretenue par le pouvoir, et comme on avait tendance à accuser la reine et la cour de tous les maux, on le pensait un peu faible. On est finalement surpris de découvrir que la réalité ne ressemble pas à cette image. Plus que 89, je crois qu'il faut remonter à 87 parce que beaucoup de choses se jouent à ce moment-là : Louis XVI ne veut absolument pas plier devant les notables. Il exile le duc d'Orléans et ne veut céder à aucun prix quand on réclame son retour.


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Message Publié : 28 Juil 2009 22:39 
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Certes mais comme l'indique F.Furet, 1787 semble être aussi l'année de naissance de la révolution, car à la fin de l'année le roi ordonne la préparation de la réunion des Etats généraux. Il a résisté aux notables, mais il engage un processus qui ne fut jamais favorable à la monarchie.

Cette convocation revient à se dessaisir d'une partie de son pouvoir, en fait à mettre fin à l'absolutisme. On ne peut aller jusqu'à l'idée que cette convocation correspond à la création d'une représentation nationale, mais on s'y approche. Notamment lorsque Louis XVI autorise le doublement des représentants du Tiers l'année suivante.

La question de Stavroguine est excellente.

Louis XVI aurait été un bon roi, possédant connaissances, soucis de l'intérêt général et volonté de réforme, mais dans un tout autre contexte politique et social. Le reproche sur l'indécision du monarque me semble réellement justifier. De multiples événements démontrent qu'il s'écarte de sa résolution première, non parce qu'il pense avoir tort, mais sous la pression de ses "conseillers" ou mauvais "génies".

Ensuite l'idée qu'un monarque autoritaire, comme le solaire, aurait pu changer le cours de la révolution me semble peu convainquante.

Répétons-le, pour satisfaire les besoins de réforme du pays il faut commencer par résoudre la question de la répartition de l'impôt. La question est cruciale non seulement en raison de la dette de l'Etat mais aussi en raison de la montée des inégalités entre les différentes composantes de la société durant tout le siècle. Les écarts de richesse sont plus importants au XVIII qu'au XVII ème. Toucher aux privilèges et créer un impôt égalitaire et universel ne peut se faire qu'en accordant un droit de regard sur les comptes de l'Etat. La monarchie absolue en serait morte. Cela revient à autoriser deux pouvoirs et à convertir la France à la monarchie constitutionnelle.

Un coup de force du monarque durant l'année 1789 n'aurait pas servi à grand-chose. Paris a bien connu des sièges royaux sans trembler ni céder. Lutter contre le seul Parlement de Paris fut parfois un échec, donc lutter contre la majorité des répresentants du pays... La journée des Tuiles a laissé aussi quelques traces... Le départ des premiers émigrés en 1789 semble démontrer qu'ils ne croyaient pas à la réussite d'un coup de force.

(Nous avons oublié un voyage de Louis XVI ! Celui du sacre ! :wink: )

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Message Publié : 28 Juil 2009 23:19 
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Oui, je suis d'accord avec le fait que 87 soit l'année de naissance de la Révolution. Suite à l'assemblée des notables, le bras de fer continue avec les Parlements et des émeutes populaires éclatent pour les soutenir. En réunissant les Etats généraux, Louis XVI a besoin de se regagner le soutien populaire d'où les mesures favorables au Tiers. Jusqu'à Varennes, il mise beaucoup sur sa popularité en province. Alors que les Parisiens sont plutôt froids en 86, l'accueil qu'il reçoit en Normandie achève de le persuader que Paris demeure une exception. Bercé par cette illusion, il s'obstine d'autant plus et campe sur sa position. Moins que sa faiblesse, c'est plutôt cette opiniâtreté qui a précipité l'enrayement de la machine.


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Message Publié : 29 Juil 2009 10:26 
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Aurore c a écrit :
Oui, je suis d'accord avec le fait que 87 soit l'année de naissance de la Révolution. Suite à l'assemblée des notables, le bras de fer continue avec les Parlements et des émeutes populaires éclatent pour les soutenir. En réunissant les Etats généraux, Louis XVI a besoin de se regagner le soutien populaire d'où les mesures favorables au Tiers. Jusqu'à Varennes, il mise beaucoup sur sa popularité en province.



Tout à fait, cependant il faut noter que les choix de Louis XVI lors de l'organisation des élections des Etats généraux furent "explosifs".

Il a conscience que l'aristocratie va s'opposer aux projets de réforme des privilèges, donc il accorde à Necker le droit de mettre en place des élections, quasi représentatives, ( pour la première fois les lettres de convocation sont assorties d'une véritable code électoral, le droit de suffrage et d'éligibilité sont reconnus à tout homme de plus de 25 ans en province, le système étant plus sélectif à Paris...) permettant le doublement du Tiers.

Mais il refuse de remettre en cause l'organisation de la société en organisant selon le schéma classique l'élection des deux ordres privilégiés et en imposant une délibération séparée. Il cherche ainsi à ressourcer son pouvoir en s'appuyant sur la division en ordre du royaume. Il provoque un affrontement direct entre le parti "national" et le parti aristocratique. Les deux camps ainsi formés ont le sentiment d'être soutenu par leur souverain...

La première parole publique réellement révolutionnaire n'est pas prononcée à partir du 5 mai 1789, mais le 4 mai lors de la messe inaugurale des Etats généraux. L'évêque de Nancy ose s'attaquer publiquement aux demandes réformatrices exagérées (du Tiers et au besoin de luxe ( les dépenses royales...)

Citer :
Alors que les Parisiens sont plutôt froids en 86, l'accueil qu'il reçoit en Normandie achève de le persuader que Paris demeure une exception. Bercé par cette illusion, il s'obstine d'autant plus et campe sur sa position. Moins que sa faiblesse, c'est plutôt cette opiniâtreté qui a précipité l'enrayement de la machine.


Certes, mais les cahiers de doléance de l'ensemble du royaume démontrent à la fois un profond respect de l'autorité royale et aussi une remise en cause des seigneurs, des privilèges ou de l'absolutisme. L'agitation n'était pas uniquement parisienne. Le roi ne pouvait l'ignorer. Quoique...

Louis XVI s'obstine car il ne conçoit pas la monarchie possible sans le maintien de l'aristocratie, tout au moins, de certains de ses privilèges. Il faut se souvenir que le roi refuse de cautionner durant une longue période les résultats juridiques de la nuit du 4 août. De plus, dans son discours du 23 juin 1789 il n'évoque que le maintien de la tradition pour empêcher la fin de l'absolutisme, il n'existe aucun plaidoyer royal, jusqu'à sa mort, sur l'acceptation d'une monarchie transformée et revigorée par le soutien de la nation.

Comme le dit si bien F.Furet :" Ni Louis XVI ni Marie-Antoinette ne pouvaient concevoir leur monarchie prospérant sur les ruines de la société aristocratique."

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Message Publié : 29 Juil 2009 12:34 
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Citer :
Louis XVI s'obstine car il ne conçoit pas la monarchie possible sans le maintien de l'aristocratie, tout au moins, de certains de ses privilèges. Il faut se souvenir que le roi refuse de cautionner durant une longue période les résultats juridiques de la nuit du 4 août. De plus, dans son discours du 23 juin 1789 il n'évoque que le maintien de la tradition pour empêcher la fin de l'absolutisme, il n'existe aucun plaidoyer royal, jusqu'à sa mort, sur l'acceptation d'une monarchie transformée et revigorée par le soutien de la nation.


Résultat provoqué par l'émotion des nuits de la Grande Peur, on a tendance parfois à oublier cet événement mais il reste l'élément le plus significatif de la haine anti- féodale qui existait dans ce pays,

Avec tous ses châteaux et leurs terriers qui brûlent, il est difficile à croire que l'aristocratie pouvait rester ce qu'elle était avant 1789.


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Message Publié : 29 Juil 2009 13:37 
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Stavroguine a écrit :
Mais je préfère me concentrer sur la personne du sieur Capet, l'histoire a retenu de lui le portrait d'un grand timide qui avait du mal à prendre des décisions, et encore plus à les faire appliquer (même si ce n'est pas un mal propre à son règne, un des paradoxe de l'absolutisme est d'offrir un pouvoir absolu à des monarques qui dans l'absolu ne sont pas toujours capables de se faire respecter ou de faire respecter leurs décisions devant les blocages ou les résistances des corps sociaux).



La première partie de votre analyse doit être nuancée, à mon sens,le roi aimerait obtenir un consensus, et chaque prise de décision royale est l’enjeu d’un affrontement entre différents ministres du roi ou entre différentes coteries de la cour. A partir de 1780 on a coutume de dire que la reine est le meilleur homme du roi. (Je me souviens plus de la citation exacte...) C’est souvent elle qui emporte l’ultime décision ou alors l’annulation d’une décision.

La seconde partie est remarquable de pertinence.


Citer :
J'aimerais émettre une nouvelle hypothèse: avec une personnalité plus forte, plus affirmée, voire plus terrible- un genre de Pierre le Grand Français- ou de Buonaparte bourbon (l'horrible oxymore)- aurait-il pu donner un autre visage à cette révolution ? Car au tout début des événements, rien ne semble prédire l'embrasement prochain, le formidable souffle qui va balayer tout un pays et une partie de l'Europe pendant 10 ans.


Difficile d’imaginer un Pierre le Grand dans le contexte français de la fin du XVIII ème. Il ne s’agit pas de moderniser et d’occidentaliser une société un rien archaïque, mais de mettre en adéquation les changements sociaux et le régime politique, tout en résolvant la question financière.

Bonaparte a utilisé les acquis de la révolution (en premier lieu la fin de la société d’ordre) pour imposer son régime autoritaire. Il peut donc justifier son coup de force en indiquant que seul l’ordre peut concrétiser les acquis de la révolution.

Tous les contemporains européens ont été stupéfaits par l’effondrement rapide de la monarchie absolue. Quelques résistances armées auraient-elles changées l’histoire ?


Citer :
Robospierre n'est qu'un isolat au milieu d'une assemblée qui ne souhaite qu'une chose: tempérer les pouvoirs du Roi dans une monarchie à l'Anglaise capable à la fois de satisfaire les aspirations de l'élite éclairée mais aussi de garantir la sécurité civile et politique. Ils sont rares ceux qui en 1789 réclament la tête du Roi, St Just n'est encore qu'un jeune adulte dont le seul fait est d'avoir écrit une nouvelle érotique de mauvais goût.

Et même si rapidement le ver est dans le fruit... Une personnalité plus affirmée, plus énergie et moins enfermé dans sa tour d'ivoire Versaillaise aurait-elle pu donner un autre cours à la Révolution ?


Effectivement, un roi reniant son héritage absolutiste, dédaignant ses convictions religieuses et délaissant le soutien aristocratique naturel en choisissant la monarchie constitutionnelle aurait pu changer le cours des choses. Mais ce n’était pas dans le caractère de Louis XVI. Il faut bien avouer l’énormité de ce programme qui suppose un renoncement important ou une capacité visionnaire incroyable.

De plus, Louis XVI n’est pas un monarque de guerre, il ne se porte pas à la tête de ses troupes pour un affrontement armé. (Comment aurait-il pu d’ailleurs organiser une lutte armée efficace ?)

En conclusion, Louis XVI choisit la voie médiane. Il feint. Il ment. Il ne reconnaît pas le changement et ses serments (fête de la fédération) ne sont d’aucune valeur pour lui. Le parti monarchique qui aurait pu être à l’intérieur de l’assemblée constituante un contrepoids idéal au parti national est mort-né. L’Assemblée se méfie du roi et la première constitution résulte de ce fait. La lutte entre les deux représentants de la souveraineté, ancienne et nouvelle, ne pouvait que s’accentuer.

Citer :
Résultat provoqué par l'émotion des nuits de la Grande Peur, on a tendance parfois à oublier cet événement mais il reste l'élément le plus significatif de la haine anti- féodale qui existait dans ce pays, avec tous ses châteaux et leurs terriers qui brûlent, il est difficile à croire que l'aristocratie pouvait rester ce qu'elle était avant 1789.


La Grande Peur est sûrement l’événement révolutionnaire le moins bien étudié. La Grande Peur résulte à la fois de la haine anti-féodale, mais aussi des émeutes de la faim et des mouvements locaux de foules qui imaginent des représailles du pouvoir. Une partie de l’aristocratie comprends parfaitement la fin de la société d’Ordre, (Noailles, Aiguillon premier président des Jacobins) , l’autre partie choisit l’exil… ( et un futur affrontement ?)

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Message Publié : 30 Juil 2009 10:04 
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Jean Mabillon
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Bonjour Marquis!

Je ne suis pas trop d'accord quand vous dites cela:
Marquis de Chambonas a écrit :
Effectivement, un roi reniant son héritage absolutiste, dédaignant ses convictions religieuses et délaissant le soutien aristocratique naturel en choisissant la monarchie constitutionnelle aurait pu changer le cours des choses. Mais ce n’était pas dans le caractère de Louis XVI. Il faut bien avouer l’énormité de ce programme qui suppose un renoncement important ou une capacité visionnaire incroyable.


Je ne vois pas trop en quoi c'était un énorme programme... Il y a eu des précédents, notamment à l'étranger (Suède, Angleterre...). De plus, la monarchie absolue était relativement jeune et ne représentait pas la tradition monarchique française. Le pouvoir royal avait été rogné à plusieurs reprises dans l'histoire de France : après Louis XI, après Henri II...
Ce qui frappe chez Louis XVI, c'est surtout son manque d'adaptation. Comme s'il se tenait vaille que vaille à son idée de départ.


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Message Publié : 30 Juil 2009 10:32 
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Enki-Ea a écrit :
Bonjour Marquis!

Je ne vois pas trop en quoi c'était un énorme programme... Il y a eu des précédents, notamment à l'étranger (Suède, Angleterre...). De plus, la monarchie absolue était relativement jeune et ne représentait pas la tradition monarchique française. Le pouvoir royal avait été rogné à plusieurs reprises dans l'histoire de France : après Louis XI, après Henri II...
Ce qui frappe chez Louis XVI, c'est surtout son manque d'adaptation.



Bonjour, Enki-Ea !

La phrase est mal formulée alors, c'est un énorme programme pour Louis XVI, pour un monarque possédant son caractère, sa forte conviction religieuse et son héritage politique. :wink: En somme, ce n'est pas le meilleur des candidats pour occuper le poste à ce moment-là... Même s'il posséde de solides connaissances et le soucis de bien gérer l'Etat. Il aurait pu être un bon roi, appelé, pourquoi pas le "Bien-aimé" dans un autre contexte politique. :rool: Bon, c'est forcément très subjectif ce que je viens d'écrire. :wink:

En Angleterre, la décapitation de Charles Ier n'a pas tué la monarchie, ( cela sera tout le contraire en France) le retour des Stuarts, mais surtout l'avènement de Guillaume d'Orange et de Marie sont réalisés par des concessions significatives du pouvoir royal. Mais la question religieuse explique, en partie, la glorieuse révolution de 1688, en fait une invasion hollandaise ! :wink: (mais il ne faut jamais dire que l'Angleterre a été envahi depuis 1066! lol ) Il existe une harmonie de vue entre les nouveaux souverains et leurs sujets sur la question religieuse. Point de dissonances et de désaccords, juste la codification des ajustements dans l'organisation des pouvoirs.

Ce qui n'est sûrement pas le cas entre Louis XVI et les nouveaux citoyens français, tout au moins, les nouveaux représentants de la nation française. La question religieuse qui s'invite dans le débat dès le mois de juillet 1789 devient une sorte de catalyseur des incompréhensions entre l'ancien monarque absolu et la nouvelle représentation du pays. Louis XVI aurait bien voulu sauver la dîme, les propriétés ecclésiastiques et refuser la constitution civile du clergé et tout cela par conviction religieuse plus que par "dogme" politique.

Citer :
Comme s'il se tenait vaille que vaille à son idée de départ.


Il a vécu et a régné dans un système de monarchie absolue... :wink: Cela forge, d'une certaine façon, votre caractère ! :wink:

A mon tout de poser une question, vous semblez définir la monarchie absolue comme un système très jeune, vieux d'un siècle à peine, mais que faites-vous des initiatives absolutistes apparues dès le règne de François Ier ? Ne faudrait-il pas lire l'attitude de Louis à travers un prisme temporel bien plus étendu ?

Cordialement.

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La timidité est le défaut des petits hommes et l'arrogance, la vertu des grands.


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Message Publié : 30 Juil 2009 13:56 
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Inscription : 06 Juil 2009 22:33
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En Angleterre, la décapitation de Charles Ier n'a pas tué la monarchie, ( cela sera tout le contraire en France) le retour des Stuarts, mais surtout l'avènement de Guillaume d'Orange et de Marie sont réalisés par des concessions significatives du pouvoir royal. Mais la question religieuse explique, en partie, la glorieuse révolution de 1688, en fait une invasion hollandaise ! :wink: (mais il ne faut jamais dire que l'Angleterre a été envahi depuis 1066! lol ) Il existe une harmonie de vue entre les nouveaux souverains et leurs sujets sur la question religieuse. Point de dissonances et de désaccords, juste la codification des ajustements dans l'organisation des pouvoirs.


Il ne faut pas oublier que des rois comme Guillaume d'Orange et leurs successeurs du XVIIIe n'étaient pas anglais la plupart du temps (même si c'est une constante de l'Histoire Anglaise, ils n'ont pas eu de dynastie purement national depuis 1066). Je pense notamment à la Dynastie des Hanovriens, dont les monarques ne résidaient pas toujours en Angleterre et laissaient une assez grande latitude de gouvernement à leur Premier Ministre dans un système parlementaire qui va très bien s'accommoder de cette non- présence.

Surtout qu'on peut très bien faire des parallèles entre les concessions de Charles II et celle de Louis XVIII, et celle de Louis-Philippe d'Orléans avec celles faites par Guillaume III ou les Hanovriens.

Je m'écarte un peu du sujet initial mais il faudrait voir dans quel mesure ce point à joué dans l'évolution de l'histoire des rapports de pouvoir en Angleterre.


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Message Publié : 30 Juil 2009 13:58 
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Inscription : 15 Avr 2004 22:26
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Localisation : Alsace, Zillisheim
De plus, on considère souvent que quelque chose qui est en place est perçu pour la mémoire des hommes comme ayant toujours existé. A part quelques érudits qui savent que d'autres systèmes avaient existé avant, les autres personnes n'en ont pas conscience et trouvent que ce système qu'elles connaissent depuis leur naissance est un système naturel ....
Dans un tel contexte, dire que le pouvoir absolu n'était la norme en France que depuis 150 ans ne veut rien dire.

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Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable.
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