Bonjour à tous,
mais non Lorenzo, je ne vais pas effacer votre message, ne serait-ce que parce que nous sommes de vieilles connaissances, vous et moi
.
Mais vous avez répondu à côté, désolée
: il n'était pas question de la violence de la RF en tant que telle, mais des différences de traitement entre les divers épisodes violents qui ont marqué la période. Pourquoi les massacres de septembre sont-ils devenus un symbole et pas la Terreur blanche, qui sur certaints points leur est comparable? Quand on veut faire dresser les cheveux sur la tête, pourquoi parle-t-on toujours des noyades collectives de Carrier à Nantes, et pas de celles de Rochambeau à Saint-Domingue? La "fournée" des Girondins, c'est affreux : mais pourquoi est-elle devenue emblématique de la guillotine, alors que les trois fournées des "complices de Robespierre", (dont une de soixante-dix personnes
) en tout cent onze hommes exécutés sans jugement, la plupart n'ayant rien à voir avec Robespierre, sont oubliées?
C'était ça la question, elle partait d'une remarque faite par Hervé qui m'avait paru intéressante sur la multiplicité des "Terreurs".
Un mot sur votre réponse quand même : vous pensez que les violences révolutionnaires sont spécifiques à cause de leur base idéologique. Certaines d'entre elles sont en effet liées à des idées, mais pas toutes (je ne vois pas quelle serait la base idéologique des massacres de septembre par exemple...). Et vous faites fausse route en pensant que la RF est la première période où ce phénomène apparaît. Dites-moi, quand on a écartelé Damiens, au nom de quoi a-t-on déployé une barbarie extrême, sinon au nom de cette idée abstraite qu'était la sacralité de la personne royale? Un peu plus tôt, les violences contre les protestants suite à la révocation de l'Edit de Nantes, au nom de quoi les a-t-on perpétrées : ne serait-ce pas au nom de l'idée de la nécessaire unité religieuse du royaume? Hum?
Duc, je suis d'accord avec vous sur la question des périodes : certaines sont tellement mieux connues que d'autres que leurs violences sont spécialement inscrites dans la mémoire collective. Mais je ne pense pas que cela puisse suffire à tout expliquer.
Je vais essayer de fournir un élément de réponse, en précisant que ce n'est qu'une hypothèse et que j'espère des contestations. C'est une idée légèrement paranoïaque
, mais je sollicite l'indulgence des lecteurs
.
Il me semble qu'assez souvent, les épisodes de violences sont choisis ou éliminés par les historiens (dont la mémoire collective est largement tributaire à toute époque) en fonction d'interprétations globales.
Je donne un exemple : prenons l'article "Terreur" du
Dictionnaire Critique de la RF de Furet et Ozouf. Il s'agit d'un texte assez ambitieux, qui se propose de réfléchir sur les mécanismes par lesquels la violence, au cours de la Révolution, s'est peu à peu incorporée au politique jusqu'à devenir un moyen de gouvernement. Or dans l'article, quels éléments sont définis comme des jalons de cette évolution? Dans l'ordre : les "violences populaires" autour de la Bastille, les meurtres de Foulon et Bertier, la prise des Tuileries, le tribunal du 17 août, les massacres de septembre, le procès du roi, le Tribunal Révolutionnaire et l'éviction des Girondins.
Eh bien, en admettant qu'il soit bien pertinent de tout mettre sur le même plan, où sont passé la fusillade des Suisses de la Bastille, la première répression de 89, le massacre de Nancy, la loi martiale, le massacre du Champ de Mars? Comment analyser un mécanisme si l'on ne prend en compte que la moitié de ses rouages? Je crains qu'il n'y ait là une sélection des seuls éléments qui permettent de constituer un cadre interprétatif (et celui que propose Furet est extrêmement faible...Bon, ça c'est une vacherie personnelle
). Et j'ai tendance à penser que ce phénomène se reproduit plus largement et de façon diffuse dans la mémoire collective... On retient de préférence ce qui va dans le sens de certaines idées...
Voilà, ce n'est que mon avis personnel et j'attends vos remarques.
Cordialement,
CC