Echange pendant la campagne d'Egypte entre Bonaparte et Krettly (du corps des guides), conté par ce dernier dans ses Souvenirs historiques :
«-Bamboche, me dit alors Bonaparte, j'ai bien faim. -Possible, mon général , mais le bon Dieu ne laisse plus tomber la manne comme autrefois dans les déserts d'Egypte. -Farceur, ce n'est pas de l'écriture sainte que je te demande ; laisse cette nourriture-là aux âmes dévotes et donne-moi, si c'est possible, quelque chose de plus positif, de plus restaurant. -En ce cas, mon général, à la guerre comme à la guerre. Henri, mets la table , moi je découpe le rôti. Bonaparte se mit à rire quand il me vit tirer de mon sac un morceau de jarret de bourrique que mes camarades m'avaient donné en partant de l'isthme de Suez, et le découper comme une volaille délicate. -Gourmand, dit vivement Bonaparte qui mordait à belles dents la chair grossière que je lui avais présentée, gourmand, tu m'offres de la viande sans pain ! -Pardon, mon général, j'ai du pain dans mon sac, et je lui présentai quelques paniosques (biscuits des Arabes). Il les accepta volontiers, et les dévora avec un appétit qui faisait plaisir à voir. -Ma faim s'apaise, nous dit-il après quelques minutes, mais ma soif s'augmente. J'avais de l'eau dans une peau de bouc pour mon cheval et pour moi; je lui en présentai. Il en but peu. -Bouache ! bouache ! b.... qu'elle est chaude et que c'est mauvais !... (Je conserve religieusement ses propres expressions. ) -Ça ne vaut pas une bouteille de notre Champagne, mon général, mais je puis vous en dédommager, et je lui offris une goutte d'aragui, eau-de-vie faite avec des dattes et des oignons du pays. »
_________________ " Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)
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