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Message Publié : 02 Oct 2015 12:37 
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Marc Bloch
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Je crois qu Enzo a compris le message et fera des efforts à l'avenir.
Je pense que Cornelis exagéré un peu en évoqua t le pacte germano soviétique. Il n'a pu servir de référence aux conventionnels car il est postérieur à la Révolution.
J'attends avec impatience l'explication de Jefferson.

Autre question : quels historiens donnent la meilleure interprétation de cette guerre civile interne au camp républicain en 1793-1794?


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Message Publié : 02 Oct 2015 13:21 
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Grégoire de Tours
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Bonjour,

Jefferson a écrit :
Haha. Je sais qu'il n'est pas convenable de commenter la modération, mais je pense que c'était de l'humour de la part d'Ezio (Jerome disait un peu plus haut qu'il trouvait ses réponses trop longues pour être compréhensibles).

C'est exact ! ;) J'ai bien compris votre réponse. Un peu d'humour et d'autodérision peuvent parfois s'avérer un bon sas de décompression.

Pas de problème Pierma. Je ne donnerai plus dans le style SMS, promis. Ma tentative est réussie car j'ai votre aval pour faire plus long.
;)

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Message Publié : 02 Oct 2015 14:10 
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Eginhard
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Jerome, en fait, votre incompréhension vient de ce que vous négligez, à mon avis, une partie du problème. Vous partez du principe d'un divorce qui aurait mal tourné, et d'un conflit d'assemblée. Ce n'est pas le cas. La crise de 1793, c'est un ménage à trois : girondins, montagnards ET (surtout d'ailleurs) Sans-culotterie (assemblées de sections, Enragés, peuple parisien, etc.). C'est un premier point très important. C'est la pression populaire qui les chasse de la Convention, c'est la pression populaire qui les envoie à l'échafaud.

Ensuite, ce sont les Girondins qui ont ouvert le bal en faisant juger un député, Marat, devant un tribunal d'exception. Énorme boulette qu'ils ont très chèrement payée.

En fait, les députés girondins ont commis des erreurs impardonnables. Sous leur direction, la France a plongé dans une crise sans précédent. On peut dire ce qu'on veut des montagnards, que la Terreur et l'économie dirigée c'est le mal, mais ils ont relevé la situation. Le prix à payer fut terrible, évidemment, mais ils ont réussi. Les Girondins n'ont pas su prendre la mesure de la colère de la sans-culotterie parisienne et ça leur a coûté leurs sièges - et leur tête pour certains. Ils avaient des leviers pour redresser les choses, ils se sont embourbés dans un conflit avec le peuple parisien - que l'on sait porté à chercher et trouver des boucs-émissaires.

Quand à la peine de mort, ma foi, comme je l'ai dit plus haut, elle existait à l'époque. Les traîtres (qu'ils le soient réellement ou pas est une question de point de vue que nous n'avons pas à juger) étaient tués. Mais la Révolution a inventé la peine carcérale - des tas de suspects n'ont pas été condamnés à la guillotine et sont sortis des prisons après la chute de la convention montagnarde.

Et surtout, surtout, n'assimilez pas les groupes de la convention à des partis modernes. Ce sont des groupes aux sensibilités variées - il y a loin entre un Danton, un Marat ou un Robespierre, pourtant tous montagnards.

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Message Publié : 02 Oct 2015 18:21 
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Et sinon, j'oubliais, le bouquin de Jean-Clément Martin, Nouvelle histoire de la Révolution française, est excellent pour aborder la RF. Un peu pointu, sans doute, si vous n'êtes pas familier du sujet, mais qui ouvre des pistes excellentes pour comprendre les mouvements qui ont animé la période 1789-1799. au pire, vous commencez par l'introduction à l'histoire de la RF de J.-P. Bertaud, qui vous donnera les bases, et vous enchainez sur le Martin.

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Message Publié : 03 Oct 2015 9:17 
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Marc Bloch
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Je remercie Jefferson pour la clarté pédagogique de ses réponses. Il pourra sans doute me dire pourquoi les conventionnels ne sont pas sentis isolés en France et en Europe et pourquoi ils n'ont pas cherchés à se serrer les coudes contre les contre révolutionnaires plutôt que de s'entretuer ?

Et aussi pourquoi la Convention n'a t elle pas copié les communes britanniques en distinguant (sans violence) une majorité et une opposition ?

Je note une piste : la pression des sections parisiennes. Peut elle suffire à expliquer les choses ?


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Message Publié : 03 Oct 2015 12:05 
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Eginhard
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Premier point, si vous le permettez, attention au terme de "contre-révolutionnaire", qui ne désigne personne en particulier, à l'époque. Tous, à un moment ou à un autre, sont accusés de "contre-révolution", y compris Robespierre au 9 thermidor. J'imagine que vous parlez des royalistes, dissimulés à l'intérieur, avec les armées de la Coalition à l'extérieur, mais la contre-révolution, dans l'esprit des tribuns de 1793-1794, ce sont aussi tous ceux qui paraissent vouloir, à tort ou à raison, mettre en péril une certaine idée de la Révolution. Les "agioteurs" et "accapareurs" étaient qualifiés de contre-révolutionnaires - Le Père Duchesne était "contre-revolutionnaire" quand il s'est agit de manœuvrer contre Hébert.

D'où un premier élément de réponse à votre question : le péril n'est pas seulement royaliste. Il n'y a pas d'union sacrée parce que les uns et les autres s'accusent de faire le jeu de l'ennemi déclaré - soit par impéritie, soit par égarement, soit par une volonté de nuire, avérée ou suspectée, soit par radicalisme. On peut refaire le match et se dire que si la guerre avait mieux tourné, il y aurait eu moins de têtes coupées, mais soyons réalistes : la terreur n'a pas été inventée en septembre 1793. Il y a eu du sang français versé, et beaucoup, bien avant l'emballement de la guillotine parisienne, et bien avant la guerre extérieure.

Dès les premiers mois de la Convention, entre Girondins, Montagnards et Commune de Paris, c'est l'affrontement. Et les passes d'armes, mal menées par une Gironde très divisée (une partie de la "Gironde", par exemple, était favorable à Robespierre fin 1792, après les attaques dont il avait été la cible "Robespierre, je t'accuse..."), se font, on l'oublie souvent, en l'absence de Constitution. On a aboli la royauté, établi une République, mais on navigue à vue. Sans texte fondateur. Je pense que c'est là un point important pour comprendre les événements de 1793. On tricote, sans véritable cadre légal.

Quand le vent tourne en 1793, que la Coalition perce, que les Vendéens se soulèvent, que la misère se répand partout, certains se rendent bien compte que la politique girondine est dans une impasse - au lieu de transiger, les girondins choisissent l'affrontement. Avec le résultat qu'on connaît. Pour leurs adversaires, leur impéritie met la Nation en péril. On leur renvoie à la figure leur mauvaise gestion de la guerre, leur proposition d'un appel au peuple pour sauver la tête du roi, les massacres de septembre, la crise économique et sociale, etc. Toutes leurs tentatives de retourner la situation à Paris tournent court et leurs ouvertures timides en faveur des Montagnards se retournent contre eux.

Pour l'exemple britannique, je ne saurais répondre. Je connais mal les révolutions anglaises. Quelqu'un de plus pointu que moi pourra sans doute vous répondre sur les spécificités de cette révolution "modérée". Je ne saurais comparer sérieusement les deux révolutions, française et anglaise. Mais bon, en matière de boucheries ou de massacres, les soubresauts anglais n'ont rien à envier à ceux de la France. Ils ont réussi leur révolution. Bon. Il n'y en a pas moins eu beaucoup de souffrances, avant et après, et on sait la brutalité anglaise exemplaire quand les circonstances l'exigent.

Quant à la pression des sections parisiennes, oui, leur rôle est fondamental dans le débordement de la Convention. Les Montagnards en ont profité, avant de s'efforcer de reprendre le contrôle de la situation - "terreur légale", élimination des Hébertistes, etc.

Bref. Je vous offre une réponse aussi longue qu'incomplète. Pour résumer, les morts tragiques auxquelles vous faites allusion dans votre message d'origine viennent sans doute avant tout d'un pourrissement général de la situation intérieure et extérieure - quand un gouvernement, quel qu'il soit, est débordé, menacé de perdre le contrôle, des choses affreuses surviennent.

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Message Publié : 03 Oct 2015 13:31 
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Grégoire de Tours
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Bonjour,

lol voilà ce que c'est d'avoir la "clarté pédagogique" : à vous l'aide au devoir et... le devoir d'aide. :mrgreen:
Jefferson a écrit :
Quant à la pression des sections parisiennes, oui, leur rôle est fondamental dans le débordement de la Convention.

A quel(s) moment(s) par exemple ?
Citer :
Les Montagnards en ont profité, avant de s'efforcer de reprendre le contrôle de la situation - "terreur légale", élimination des Hébertistes, etc.

Vous employez le verbe "s'efforcer", ceci veut dire que ce fut en quelque sorte le "début de la fin" ?
Les Montagnards ne s'en "remettront" pas ?
J'y vais à petits pas... ;) Après l'élimination des Hébertistes, puis de Danton et autres [... les sections se confinèrent dans une prudente réserve qui rassura le gouvernement...] Comment expliquer cette prudente réserve soudaine ? Une incompréhension ou plutôt un coup porté aux sans-culottes stupéfiés devant l'étalage des "affaires" et des corruptions ?
"On a tenté d'ébranler la forme du gouvernement républicain..." mais comment ne pas voir que l'on s'engage dans un étroit couloir, le même qui a coûté en partie aux Girondins leur tête, à savoir qu'avant ceux qui étaient renversés l'étaient avec l'appui populaire et dorénavant, la "faction" dominante se passait de l'appui populaire.
A quel moment le peuple va sentir cette "faction" oppressive et ceci se ressentir dans les sections ?
"Le gouvernement révolutionnaire doit peser sur lui-même non sur le peuple" (Saint-Just) mais ne se trouve-t-on pas devant une "dictature" -si le mot est mal choisi n'hésitez pas- jacobine ?
Sont-ils alors conscients qu'ils tomberont à plus ou moins long terme par un sursaut né soudainement et surfant sur les attentes des sections voire une inconnue ? Qu'avec leur disparition la Révolution est condamnée ? Ou bien conscients mais estimant que les bases données sont suffisamment ancrées que même dissous de la scène politique, le jacobinisme leur survivra ?
Peut-on voir un moment (Ventôse ?) où il aurait été bon de se recadrer afin de durer -non pas pour durer- mais pour continuer un travail de fond, prendre le temps de légiférer car ce n'est pas le travail qui manquait ou bien était-on condamner à ne plus exercer qu'en se méfiant à droite, à gauche, au centre et à chercher d'où allait venir le coup ?
Ceci n'est-il pas l'ancêtre de la politique "politicarde" plutôt que constructive c'est à dire tendant vers un but qui n'est pas la captation d'un pouvoir mais le service de l'Etat ?
Merci de vos réponses, si la longueur d'un post ne vous effraie pas ; étant demandeur, tout me va.
;)

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Message Publié : 03 Oct 2015 19:00 
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Grégoire de Tours
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Bonjour,

Jerôme a écrit :
... pourquoi ils n'ont pas cherchés à se serrer les coudes contre les contre révolutionnaires plutôt que de s'entretuer ?

Il suffit de se documenter sur les chances et faiblesses de la réaction et vous noterez que ceci fut fait.
Il existe un sujet sur les émigrés sur ce forum, en vous y référant vous constaterez que le problème fut réglé.
La fin de la Gironde ouvre un dossier plus grand, celui des "tripatouillage" qui verra tomber les "Hébertiste" très accolés avec les milieux financiers et dans la foulée les suspects de corruption ou d'enrichissement ou encore de spéculation (rétention puis cherté du grain, bénéfices sur l'intendance de l'armée etc).
Citer :
Et aussi pourquoi la Convention n'a t elle pas copié les communes britanniques en distinguant (sans violence) une majorité et une opposition ?

La question a maintes fois été évoquée sur des sujets existants concernant une "monarchie à l'anglaise". Ce qui par extension donne une majorité et une opposition. Louis XVI a bloqué. Après Janvier 93 et même avant, il y avait d'autres priorités tant intérieures qu'extérieures.
Citer :
Je note une piste : la pression des sections parisiennes. Peut elle suffire à expliquer les choses ?

Il a déjà été répondu plus haut. Il suffit de relire comment (c'était votre question) les Girondins furent mis sur la touche et vous noterez le poids des sections parisiennes et autres.
Toutes ces réponses ne demandent pas forcément une "grosse lecture", même wiki suffit avec les mots clefs et ensuite un peu creuser sur le Net. Pour la période où vous revenez :
- La République jacobine / 10 août 1792 - 9 Thermidor an II - M. Bouloiseau - Seuil - trouvable < à 10€
entre autres.
:-|

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Message Publié : 05 Oct 2015 9:57 
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Après juillet 1792, les sections parisiennes sont le principal organe politique des sans-culottes et elles pèsent lourdement sur toutes les décisions de la Convention. Ce que je voulais dire par "s'efforcer" de reprendre le contrôle, c'est que les députés montagnards ne doivent pas être assimilés (c'est je pense une erreur que commet Jerome) à la sans-culotterie parisienne. Ceux qu'on appelle "montagnards" sont des députés élus. Ils portent devant la Convention une partie des aspirations de leur base électorale, la sans-culotterie parisienne, mais veulent modérer ses éléments les plus radicaux. Il me semble évident, par exemple, qu'il n'y aurait pas eu de "terreur" sans le climat insurrectionnel permanent qui régnait à Paris et la pression de ses éléments les plus à gauche. Les Montagnards ont tenu à faire mettre dans la Constitution le droit à l'insurrection, ce n'est pas pour autant qu'ils acceptent qu'un leur agite sous le nez en permanence la menace de l'émeute populaire.

Ce qui provoque la chute des Girondins, c'est plus leur conflit mal mené avec la Commune de Paris que leurs rivaux à l'assemblée. Les députés de la Plaine, sans lesquels rien n'était possible, votent sous la pression populaire. On peut mettre en avant des moments de tension extrêmes, lors de la création du tribunal révolutionnaire, du procès de Marat, des journées de mai-juin, mais les Hébertistes participent aussi très largement de la radicalisation de la Convention montagnarde après l'été 93.

Les Montagnards, après avoir profité de la poussée de la sans-culotterie pour arriver au pouvoir, sont ainsi largement débordés à gauche par les Hébertistes jusqu'à l'élimination de ces derniers fin mars 1794 - loi des suspects, maximum, terreur légale, ce sont les Hébertistes qui forcent ces mesures. Et à leurs yeux, ça ne va pas encore assez loin ! C'est après le raccourcissement d'Hebert que la Commune de Paris est dite "apaisée", l'opinion publique retournée contre les Hebertistes et privée de ses grands tribuns. La campagne de dénigrement contre Hébert a été terrible - accusé de duplicité avec quelques affairistes et d'avoir tenté de provoquer des émeutes en organisant une disette à Paris.

Cette rupture des gauches, qui entraînera aussi la mort de Danton et sa coterie, est due à des programmes divergents, évidemment, mais aussi à des rivalités personnelles entre les tribuns, notamment sur le sujet de la déchristianisation. Pour Danton, c'est encore autre chose. On a beau jeu d'en faire un apôtre de la modération face à un Robespierre emporté par la ferveur révolutionnaire - ce corrompu notoire a surtout payé ses multiples compromissions.

Alors oui, on peut dire que l'explosion des gauches entraîne la chute de la convention montagnarde - si Danton, Hébert et Robespierre étaient restés alliés, avaient su trouver une politique commune, il n'y aurait sans doute pas eu le basculement de majorité de l'été 1794. Mais ce qui provoque la chute de Robespierre, c'est un surtout un complot - derrière lequel se trouvent certes des députés modérés, mais aussi des terroristes violents craignant pour leur propre tête. Ce n'est pas le peuple qui fait tomber la Convention montagnarde. Les sections ont bien tenté de se mobiliser pour sauver sa tête, certes de façon assez confuse.

Quand au terme de "dictature jacobine", deux points :
- D'accord pour une "dictature" au sens romain du terme : un gouvernement exceptionnel pour faire face à une situation exceptionnelle. Ce fut une dictature d'assemblée, partagée, collectivement assumée, et dans l'esprit de ses grands leaders, qui devait avoir une fin, la paix.
- Ensuite, ce fut une "dictature" voulue par le peuple parisien. Elle n'a pas été imposée d'en haut, exercée par quelques représentants de l'élite à un peuple soumis à ses diktats. Pour cela, il faudra attendre 1802 (ou 1804, c'est selon).

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Message Publié : 05 Oct 2015 12:43 
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Philippe de Commines
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J'apporterai juste une inflexion à votre propos. Le régime de terreur ou de "dictature", comme vous dites, n'a pas été voulu par le peuple parisien mais par une partie, activiste et extrémiste, du peuple parisien.

Et cette petite base qu'on appelle la sans-culotterie, somme toute très peu représentative de la nation, a bel et bien conduit à ce que les agents du gouvernement, eux-mêmes très peu contrôlés par le gouvernement, soumette le peuple à ses diktats.

C'est d'ailleurs la définition même du processus révolutionnaire : forcer un changement qui ne se ferait pas spontanément alors même que l'ancien régime a été aboli et que l'on détient le pouvoir.


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Message Publié : 05 Oct 2015 13:32 
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Eginhard
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Caesar Scipio a écrit :
J'apporterai juste une inflexion à votre propos. Le régime de terreur ou de "dictature", comme vous dites, n'a pas été voulu par le peuple parisien mais par une partie, activiste et extrémiste, du peuple parisien.

Et cette petite base qu'on appelle la sans-culotterie, somme toute très peu représentative de la nation, a bel et bien conduit à ce que les agents du gouvernement, eux-mêmes très peu contrôlés par le gouvernement, soumette le peuple à ses diktats.

C'est d'ailleurs la définition même du processus révolutionnaire : forcer un changement qui ne se ferait pas spontanément alors même que l'ancien régime a été aboli et que l'on détient le pouvoir.


La "sans-culotterie" à proprement parler n'est pas tout le petit peuple parisien, vous avez raison d'apporter cette nuance, mais sa frange politiquement active. Comme toujours, le petit peuple lui-même est inaudible, sauf dans ses débordements, comme en septembre 1792.

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Message Publié : 05 Oct 2015 13:45 
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Philippe de Commines
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Et même dans ces moments là, ce n'est pas tout le petit peuple.

Entre les discours et la réalité, la période révolutionnaire pose la question de "qui représentent ceux qui se disent le peuple ?"

Bien évidemment, quand la légitimité vient à résider dans le peuple, on retombe dans les problèmes classiques depuis l'Athènes antique des écarts entre la fraction mobilisée et active du Peuple et la réalité du Peuple.

Or les 1ères élections à la convention, organisées dans un climat de violence et d'intimidation, c'est un taux de participation de 10% du corps électoral. En termes de légitimité politique, c'est déjà des plus faibles. Et si vous ajoutez des groupes activistes extrémistes qui mettent sous pression ou forcent violemment les institutions déjà de facto très peu représentatives à prendre les actes qu'ils désirent, vous arrivez à un écart gigantesque entre le niveau de légitimité officielle découlant d'une lecture littérale des textes constitutionnels et la légitimité réelle des acteurs politiques qui imposent leur agenda.


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Message Publié : 05 Oct 2015 14:35 
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Comme vous le dites bien, ce problème du "peuple" et de ses représentations n'est pas spécifique à la période révolutionnaire française. Dans mes interprétations, j'entendais "le peuple parisien représenté par sa manifestation politique la plus évidente, les sans-culottes". Il va de soi que chaque destin est particulier, que parler de "peuple parisien" c'est créer un idéal-type approximatif , qui ne recouvre qu'imparfaitement la réalité - comme parler des "girondins" ou des "montagnards" ou des "royalistes". A y regarder à la loupe, aucun de ces groupes n'existe réellement.

C'est bien pour cela que je précisais déjà "petit peuple parisien", ce qui limite le cadre de l'idéal-type. Mais on voit bien, par exemple en regardant les procès des septembriseurs, dans cette foule qui prend de court ses propres cadres politiques (aussi bien ses représentants que ses leaders déclarés) qu'il y a une grande diversité de situations.

Dont acte. On peut convenir du moins qu'une partie des aspirations du petit peuple parisien passe par les revendications des assemblées de sections. Et de la sans-culotterie. Sans que les réalités se recouvrent parfaitement, nous sommes bien d'accord.

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Message Publié : 05 Oct 2015 15:45 
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Philippe de Commines
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J'espère que vous ne m'en voudrez pas de pinailler, mais je ne mets pas sur le même plan les problèmes que posent d'une part la notion spécifique de peuple (que ce soit le peuple parisien ou un autre), avec les autres notions de girondins, royalistes, jacobins, ...etc.

En effet, une catégorie est par définition réductrice et simplificatrice. Il y a beaucoup de nuances parmi les girondins, les royalistes, les montagnards, ... etc.

Mais la différence fondamentale est que la notion de peuple a ceci de particulier qu'elle définit en théorie la totalité de la population adulte civique. Or dans l'Athènes de Périclès ou Alcibiade comme dans la Rome des Gracques, de Marius, Sylla, Pompée et César, chacun a son peuple. Le peuple, ce n'est en réalité guère autre chose que les partisans mobilisés à l'appui de telle ou telle figure politique sollicitant leur soutien. Les technhiques de manipulation sont classiques. A l'approche d'une élection ou d'un vote important sur l'Agora ou sur le Forum, on fait venir ses partisans en masse pour tenter de s'assurer une majorité, intimider les autres, et le cas échéant empêcher l'accès des partisans de vos adversaires au lieu de vote. Et ensuite, on peut dire : "le Peuple a voté ceci" ou "le Peuple veut cela".

C'était le cas lors de ces journées révolutionnaires. Et ça l'est encore dans de nombreuses assemblées générales organisées en entreprise par des syndicats professionnels ou en université par des syndicats étudiants qui ne sont rien d'autre que les antennes étudiantes de groupuscules politisés militants.


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Message Publié : 05 Oct 2015 17:57 
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Certes, mais pour la période révolutionnaire, qui nous occupe ici, on a bien des mouvements spontanés qui ont pris de court ces membres politisés que vous évoquez. Concernant le maximum, la lutte contre l'agiotage, la mobilisation contre l'ennemi extérieur, la mise en œuvre de la terreur, on sait que des anonymes, en grand nombre, ont pris les devants et agi de leur propre chef, montrant leur soutien sans que des cadres, élus ou auto-proclamés, ne les y invitent.

Je veux bien qu'on ne puisse pas dire que "petit peuple" et "sans-culottes" recouvrent une même réalité, que l'on puisse contester la validité des élections à mains levées, avec leur cortège de pressions et de menaces, tout cela est très juste, et pourrait faire l'objet d'une passionnante discussion, mais enfin, on a tout de même entre 1792 et 1794 à Paris une culture révolutionnaire très ancrée dans les mœurs. Et des émulsions populaires qui n'ont pas besoin qu'on donne le tocsin pour faire couler le sang.

Évidemment, il y a des tas de gens simplement effrayés, attentistes, discrets, qui essaient de survivre sans faire de vagues - mais est-ce que ce sont eux qui nous intéressent ici, pour notre propos ? Je ne crois pas. Ceux qui nous intéressent ici, ce sont ceux qui bougent. Non pas que les autres ne soient pas aussi intéressants à étudier, mais pas forcément dans le cadre de cette rivalité entre Girondins et Montagnards que Jérôme évoquait.

J'ai employé le terme de "peuple parisien" une seule fois, il me semble, lorsque j'ai écrit qu'il était favorable à cette "dictature jacobine" évoquée par Ezio. Pour le reste, j'ai bien précisé, selon les cas, "sans-culottes", "sections" ou "Commune de Paris".

Sur ce point précis, oui, il me semble que le peuple parisien (petits patrons, ouvriers, petites gens survivant comme ils pouvaient dans un climat de peur et d'insurrection), en brossant à grands traits, était favorable à un certain nombre de mesures qui allaient vers l'égalité sociale ou la mise en œuvre de pratiques brutales à l'encontre de ceux qui étaient désignés, à tort ou à raison, comme contre-révolutionnaires. Et si les coloquintes de leurs anciens chefs, salis par leurs adversaires ou emportés par leurs propres contradictions, glissaient dans un panier d'osier, à la bonne heure !

Évidemment, le boulanger qui se voyait obligé de vendre son pain à perte ne devait pas être très satisfait de la situation, mais il allait sans doute avec plaisir voir Hébert se faire raccourcir le lendemain en apprenant que ce dernier dînait régulièrement chez des banquiers d'affaire et se régalait de mets précieux pendant que le peuple crevait de faim (vrai ou faux, c'est sans importance évidemment). Le peuple parisien a ete politisé, intéressé aux affaires publiques, comme jamais dans son histoire pendant la première révolution française. Ça ne me semble pas une faute que de l'évoquer en mouvement, d'en parler comme d'une entité ou d'un idéal-type, quand le sujet de la conversation n'est pas le "peuple" lui-même - en y apportant des nuances, comme vous le faites très justement.

Quand à la façon dont les "élites" de l'époque employaient le mot "peuple", c'est une autre affaire. Ce n'était pas mon propos, mais j'abonde évidemment dans votre sens sur ce point. Mais on ne parlait pas forcément des représentations en politique.

Quant à pinailler, c'est tout l'intérêt des débats ! Je suis loin de maîtriser tous les éléments de la période. Je peux le confesser ici - aucune chance que mon directeur de mémoire ne me repère derrière mon pseudo :)

Vous remarquez que j'emploie beaucoup les guillemets dans mes interventions. C'est justement parce que j'ai conscience que certains mots doivent être pris avec des pincettes :)

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