grossmann a écrit :
napoléon aurait'il dut destiuer les souverains de prusses, rayé la prusse de la carte :
voici l'opinion d'un historien Louis de Carné dansLe Consulat, l’Empire et leurs historiens II. Le Système impérial (1854) :
Après la faute d’attaquer la Prusse et de se priver du seul contrepoids qu’on pût opposer en Allemagne à la haine éternelle de l’Autriche, il n’y en avait pas de plus grande à commettre que de la laisser vivre. Mieux valait détruire cet état que de lui imposer des conditions qui allaient préparer au peuple le plus fier de son passé d’indescriptibles souffrances. Ecraser de contributions de guerre des populations pauvres, interdire à la plus militaire des puissances allemandes de porter son armée au-delà du chiffre fixé par le vainqueur, se saisir de ses meilleures places pour en faire les points d’appui de la domination française en Europe, c’était rendre la nation aussi irréconciliable que l’était déjà son gouvernement, c’était charger de sa propre main les canons que, par une irrésistible impulsion populaire, le général Yorck pointerait un jour contre nos soldats décimés.
Détruire la monarchie prussienne n’aurait peut-être pas été impossible à cette époque, car cette création récente avait encore quelque chose d’artificiel, comme toutes les œuvres de la force et du génie. Relever la Pologne, restituer la Silésie à l’Autriche, agrandir la Saxe, constituer entre l’Elbe et le Rhin une puissance nouvelle, fut-ce même sous un prince français, rejeter enfin la maison de Hohenzollern dans les sables du brandebourg, dont deux grands règnes l’avaient fait sortir, tout cela n’aurait guère plus profondément blessé le patriotisme germanique que ne l’avait fait l’année précédente la formation de la nouvelle confédération du Rhin sous le protectorat de la France. Un pareil remaniement aurait plus violenté la politique que la nature. En le tentant, on aurait du moins désarmé la puissance destinée, aux jours du malheur, à nous porter les plus rudes coups, et l’empire aurait élevé les obstacles à la hauteur des haines
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Mais d'où cet historien tient-il que c'est la France qui aurait attaqué la Prusse ?
Il avait conclu un traité d'alliance avec la Prusse en début d'année 1806, lui cédant le Hanovre. C'est la Prusse qui a lancé un ultimatum à la France, déclaré la guerre, et attaqué la première.
J'apprécie toujours les citations de Napoléon que fait Cyril.
Il nous rappelle que Napoléon était non seulement corse, mais que, par un mystère restant à éclaircir, il était aussi normand. Napoléon, surtout sur ses dernières années où il a eu beaucoup de temps pour ses loisirs, a dit tout et son contraire. Il a aussi énoncé énormément de truismes. De cette façon, il se donnait le maximum de chances de dire quelque chose d'exact.
Sur le fond, c'était un problème d'équilibre des forces. Et ce qu'il a dit sur la Prusse, il aurait tout aussi bien pu le dire sur l'Autriche. Aucune grande puissance n'aime subir la présence d'un hégémon dans son voisinage. Seules les petits Etats, n'ayant quasiment pas de capacité de projection de puissance, préfèrent être protégées par un hégémon contre les ambitions de puissances de taille moyenne qui réduire l'écart avec l'hégémon en absorbant les petits.
L'Autriche et la Prusse , si elles exprimaient franchement leurs objectifs, ne supportaient évidemment pas de se voir écartées des affaires d'Allemagne et de voir l'Allemagne devenir une chasse gardée française. Elles ne l'acceptaient que contraintes et forcées, parce que l'écart de puissance avec la France napoléonienne était tel qu'elles n'avaient aucune chance de parvenir à rééquilibrer la situation à leur avantage par la force.
Ce qui a été un plantage absolument magistral en 1806, c'est que la Prusse n'a même pas attendu que les forces de l'allié russe parviennent sur les théatres d'Europe centrale. Elle s'est lancée bille en tête, par un accès d'arrogance dont celui de la France en 1870 n'est qu'un pâle reflet, seule contre une France au sommet de sa puissance historique. Et vu l'état en fait déplorable de l'armée prussienne qui s'était figée dans son état du règne de Frédéric II, elle a été littéralement éparpillée.
Davout (bon d'accord, c'était Davout), remporte la bataille d'Auerstaedt à quasiment 1 contre 3.
Une fois la Prusse écrasée et la paix conclue avec la Russie, quel sort réserver à la Prusse ? Ce n'était pas évident sur le moment. Ce qui comptait vraiment, c'était la relation avec la Russie, avec l'Autriche et avec le Royaume-Uni. Napoléon et ses conseillers voyaient-ils un intérêt à détruire complètement la Prusse ou au contraire à la laisser quasiment intacte en 1807 ? A ma connaissance, je ne le pense pas. Il était de toute façon très difficile de forcer le génie polonais à rentrer dans sa bouteille alors qu'il en était sortie pour prêter main forte aux français.
Napoléon a été débordé par la renaissance du patriotisme polonais, lequel s'est vu ouvrir des perspectives phénoménales par l'entêtement de la Prusse à poursuivre les hostilités après les 1ères déroutes.
La question de la destruction de la Prusse ne s'est, me semble-t-il, véritablement posée qu'à l'approche de la campagne de Russie quand, aux environs de l'hiver 1811-1812, Napoléon, prévenu par Davout du double-jeu prussien, a fait passer le message à Berlin qu'il démantèlerait la Prusse si jamais elle trahissait. En quoi il a commis une erreur stratégique puisqu'il a incité la Prusse à ne pas franchir le Rubicon tant que la situation ne serait pas idéale (ce qu'elle fit au début de l'année 1813 entre le désastre de Russie et la reconstitution d'une armée française pour mener la campagne d'Allemagne).
Cela aurait été plus intéressant si Napoléon avait dit : "j'aurais du démanteler la Prusse avant d'engager la campagne de Russie, car elle ne m'a été d'aucune utilité pendant la campagne et était décidée à se retourner contre moi à la première opportunité."