Lei Ming Yuan a écrit :
Le bonapartiste a écrit :
Pour faire la paix il faut être 2. Il y eu certes une ouverture avec Fox avant la 4ème coalition mais après les positions se sont durcis.
Effectivement. Le problème est que Napoléon ne le voulait absolument pas. En 1809, Fouché avait entamé des négociations secrètes avec l'Angleterre. Quand Napoléon l'a appris, au lieu de profiter de cette ouverture, il a tout arrêté et viré Fouché.
J’ai du mal à comprendre le lien entre le début de votre intervention sur la « non volonté » de paix (d’ouvertures de négociations ?) de Napoléon, et la fin concernant l’arrêt des pourparlers menés à l’initiative de Fouché et la disgrâce de ce dernier.
Sur cette affaire, il faut surtout voir chez l’Empereur la volonté de ne pas supporter qu’un de ses ministres (dans lequel d’ailleurs il plaçait une confiance toute relative) traite avec l’ennemi, avec l’aide d’un homme qu’il considérait comme un dangereux intrigant, de sa propre initiative et secrètement, et la résolution de ne pas s’engager dans les bases de paix qui avaient été évoquées à cette occasion. Reprocher à Napoléon de ne pas avoir « profité de cette ouverture » me semble relever d’une démarche partiale et/ou d’une mauvaise connaissance de l’affaire.
Tout d’abord, il convient de rappeler que l’initiative de Fouché ne créa par une ouverture mais s’ajoutait à des négociations préalablement lancées par l’Empereur, sous couvert d’une démarche hollandaise :
« Il faudrait que le conseil des ministres écrivît une lettre au secrétaire d'Etat des affaires étrangères d'Angleterre, qui serait portée par un agent secret. Cette lettre lui ferait connaître le tort qui résulterait pour l'Angleterre de la réunion, et que, si l'Angleterre voulait éviter la confusion de la Hollande, elle pourrait le faire en entamant des négociations et faisant une démarche quelconque, mais en demandant en même temps que tout fût suspendu relativement à la réunion de la Hollande. »
(Napoléon à Champagny, 12 janvier 1810)
Le choix de l’agent se porta sur le banquier Pierre-César de Labouchère, gendre du banquier londonien Baring, un proche de Wellesley, le secrétaire d’état aux affaires étrangères.
Le 1er février, Labouchère reçut des ministres hollandais Van der Heim et Mollerus les instructions suivantes :
« L'objet de la commission dont, à la demande, des soussignés, M. Pierre-César Labouchère s'est chargé, est de faire connaître au gouvernement d'Angleterre qu'en conséquence des renseignements parvenus au ministère hollandais, et qui ont toute l'apparence d'authenticité, le destin de la Hollande, c'est-à-dire le maintien ou la perte de son existence politique, dépend des dispositions qui pourraient avoir lieu de la part du gouvernement anglais pour parvenir à une prompte paix avec la France, ou du moins pour faire un changement réel dans les mesures adoptées par le susdit gouvernement, par rapport au commerce et à la navigation des neutres.
Ledit sieur Labouchère doit par conséquent se rendre, avec toute la promptitude possible, à Londres, où, de la manière et par les voies qu'il trouvera le plus convenables, il cherchera à porter le susdit état de choses à la connaissance du ministère anglais et de toute autre personne qui pourrait servir au but proposé ; et il lui sera permis, en cas de besoin, de faire savoir qu'il remplit cette mission avec le consentement du gouvernement hollandais, qui, à cause de l'authenticité des susdits renseignements, portant que, sans le susdit changement dans le système de l'Angleterre, la perte de l'indépendance de la Hollande est absolument inévitable, avait cru pouvoir fermer les yeux sur toutes les considérations et difficultés, pour tenter tout ce qui pourrait servir à maintenir l'existence politique du pays.
Il cherchera ensuite à faire envisager au gouvernement anglais combien il serait avantageux à l'Angleterre que la Hollande ne tombât point sous la domination souveraine de l'empire français, et qu'elle restât toujours une puissance indépendante. Il emploiera, pour prouver cette assertion, tous les arguments que la cause elle-même pourra lui fournir et qui lui sont connus.
S'il trouve au gouvernement anglais cette conviction, ou s'il parvient à la faire naître, il tâchera de l'engager à contribuer au maintien de l'existence politique de ce pays, et en se prêtant promptement à des négociations tendant à parvenir à une paix générale, ou du moins, dans le cas où de pareilles négociations ne pourraient être promptement entamées et déterminées, en donnant des assurances satisfaisantes de ses intentions de faire quelque changement dans le système adopté par les décrets du conseil d'Angleterre du mois de novembre 1807 (1), et dans les mesures qui en ont été les conséquences.
Il doit surtout appuyer sur ce dernier objet, afin, dira-t-il, de s'opposer à l'empressement de la France d'occuper la Hollande. Il ajoutera que, dans le cas où un relâchement ou un changement du susdit système serait adopté, on pourrait se flatter qu'outre la non-occupation de la Hollande, la guerre, tant qu'elle doit encore durer, prendrait enfin de nouveau la tournure et la marche moins désastreuse qu'elle avait il y a trois ans, et qu'il en résulterait un peu plus de probabilité d'un rapprochement, en ce qu'alors on ne verrait plus aucun motif pour l’Empereur des Français de laisser subsister les décrets de Berlin et de Milan (2), que S.M.I. n'a pris qu’en conséquence des ordres du conseil anglais de novembre 1807.
Si cependant le gouvernement anglais, après avoir prêté l'oreille à ces insinuations, fait des difficultés pour s'expliquer là-dessus définitivement, avant d'être informé positivement des intentions du gouvernement français à cet égard, il doit demander que le gouvernement anglais déclare s'il veut faire dépendre sa résolution d'arriver à des négociations de paix, ou du moins à un changement dans les susdits ordres de novembre 1807, des insinuations susdites et encore particulièrement de l'évacuation de la Hollande par les troupes françaises, et du rétablissement de tout sur le pied où se trouvaient les choses ayant la dernière invasion des Anglais en Zélande, en ajoutant telles autres conditions sur lesquelles le susdit gouvernement pourrait croire devoir insister avant de prêter la main aux mesures proposées, afin qu'on ait ainsi des données sûres avant de lui faire connaître les intentions du gouvernement français.
Quelle que soit la réponse du gouvernement anglais à ces représentations, pourvu qu'elle n'exclue pas tout espoir de parvenir au but qu'on se propose, et que les circonstances le lui permettent, il prolongera provisoirement son séjour à Londres, et, en attendant, il enverra aux soussignés, aussi promptement qu'il est possible, et par la voie la plus sûre, un récit détaillé de toutes ses démarches, des réponses qu'on lui aura faites, et de tout ce qui concerne sa mission.
Cependant, si, après avoir reçu une réponse aux ouvertures par lui faites, il trouvait nécessaire, pour le succès de la cause, de la porter lui-même à la connaissance de Sa Majesté le roi de Hollande, il sera libre de le faire; mais dans ce cas-là, quoique Sa Majesté puisse encore se trouver à Paris, il fera son voyage par la Hollande, et en aucune manière il ne se rendra de l'Angleterre directement en France.
Au reste, on lui recommande particulièrement le secret le plus rigoureux sur toute cette affaire, ainsi que la plus grande prudence et discrétion dans l'exécution de la commission à lui confiée. »
La démarche fut infructueuse et, le 12 février suivant, de Londres, Labouchère transmettait le rapport suivant :
« Le soussigné ayant reçu de Leurs Excellences les ministres la mission de se rendre eu Angleterre avec des instructions écrites sur la marche à tenir pour communiquer au gouvernement anglais la position de la Hollande, et de lui insinuer les moyens qui paraissaient les plus capables de détourner le sort qui menaçait le pays, s'est de suite rendu à la Brielle. Arrivé le 2 février, il en est reparti le 3, a mis pied à terre à Yarmouth le 3 au soir, s'est de suite mis en route pour Londres et y est arrivé le 6 au soir. Dès le 7 au matin, il a fait demander audience à M. le marquis de Wellesley, ministre des affaires étrangères, qui la lui a accordée pour le même jour, à cinq heures et demie. Après avoir communiqué à Son Excellence la teneur de ses instructions et discuté à fond la question principale, il a quitté le ministre avec la promesse qu'il mettrait ses communications devant le conseil, et lui ferait connaître le résultat de ces communications.
N'ayant pas reçu d'intimation de Son Excellence jusqu'au 11, le soussigné adressa quelques lignes au ministre pour le solliciter de le mettre a même de donner quelques avis ou indices des idées et des dispositions du gouvernement anglais par une occasion sur son départ. En conséquence, il reçut, le 12 au matin, une invitation pour le même jour à neuf heures du soir, à laquelle il s'est rendu, et il y a reçu une communication non officielle ni signée, dont copie ci-jointe.
[« La malheureuse situation de la Hollande a fait naître depuis longtemps dans ce pays-ci des sentiments d'intérêt et de compassion, et ces sentiments s'accroissent naturellement à chaque surcroît des maux auxquels la Hollande est en proie; mais la Hollande ne peut s'attendre que ce pays-ci fasse le sacrifice de ses propres intérêts et de son honneur.
La nature de la communication qui a été reçue de la part de M. Labouchère, permet à peine que l'on fasse la moindre observation touchant une paix générale; elle ne fournit pas même un motif à répéter les sentiments que le gouvernement anglais a si souvent déclarés sur cette matière. On peut néanmoins remarquer que le gouvernement français n'a pas manifesté le moindre symptôme d'une disposition à faire la paix, ou à se départir en aucune manière des prétentions qui jusqu'ici ont rendu inutile la bonne volonté du gouvernement anglais pour terminer la guerre.
La même observation peut s'appliquer à la conduite du gouvernement français dans la guerre qu'il fait au commerce : guerre dans laquelle il a été l'agresseur, et qu'il poursuit avec un acharnement qui ne se dément pas un instant. C'est à tort que, dans la note remise par M. Labouchère, il est dit que les ordres du conseil d'Angleterre ont donné lieu aux décrets français contre la navigation du commerce des neutres: les ordres du conseil n'ont point été le motif, mais la conséquence des décrets français. Les décrets français sont encore en vigueur, nulle mesure n'a été prise pour leur rappel. Il n'est point raisonnable de s'attendre que nous nous relâchions en aucune manière des mesures de défense personnelle que commande notre sûreté , et qui puissent nous mettre à l'abri des attaques de l'ennemi, parce que lui-même souffre par suite des mesures qu'il a prises, et cependant ne témoigne aucune disposition à s'en relâcher. »]
Dans cette nouvelle conférence, il a été question du degré de probabilité qu'il pouvait y avoir dans aucun cas, que ces premières démarches, quelle que fût la conduite du ministre britannique, amenassent des idées de rapprochement de la part de la France, et surtout de l'inconvenance qu’il y aurait pour l'Angleterre d'admettre en principe, qu'ayant une fois pris des mesures de représailles, comme le ministre les dénomme, celles-ci dussent de nécessité cesser avec les causes qui les avaient amenées.
Il a paru que le ministère anglais attache infiniment de poids et d'importance à ces mêmes ordres du conseil, qui forment l'objet immédiat de la démarche du gouvernement de Hollande, et que, soit que la France en convienne ou non, le ministère est convaincu qu'il n'y a pas de moyen plus efficace d'énerver les ressources de la France. En effet, ces mesures semblent former la base fondamentale du système sur lequel le ministère actuel fonde tous ses principes et toute sa conduite, et il semblerait que, tant que pourra durer la guerre, ce n'est que d'un changement de ministère que l'on pourrait attendre d'autres mesures et d'autres vues.
Le ministre a ensuite considéré que tandis que, d'un côté, il était extrêmement incertain si aucune déclaration ou même concession de sa part amènerait des changements utiles, de l'autre, il serait toujours impossible de compter sur leur stabilité, et que, dans tous les cas, toute marche qui lui paraîtrait incompatible avec son honneur et sa dignité, demeurait proscrite par le fait même, alors qu'elle semblerait se concilier avec ses intérêts.
Le soussigné a taché de convaincre le ministre que, dans cette circonstance particulière, l'intérêt général bien entendu et la prospérité permanente de tout Etat commerçant, exigeaient impérieusement de ne pas regarder avec indifférence la crise dans laquelle se trouve la Hollande; de coopérer, au contraire, à détourner l'orage. Il s'est même retranché à ne demander qu'une déclaration conditionnelle; mais le résultat qu'il transmet, est le seul auquel il ait pu parvenir. Son observation générale et les renseignements qu'il a pu recueillir, conduisent aux conditions suivantes:
Que la question principale de paix ou de guerre n'occupe qu'imparfaitement l'esprit du public, que l'habitude le réconcilie avec la continuation de la guerre, et que les conséquences, loin de s'en faire ressentir maintenant, sont plutôt favorables à l'intérêt particulier;
Que le système des restrictions commerciales est inhérent au ministère actuel, et, par la même raison, est l'objet de la critique de l'opposition; qu'il est donc vraisemblable que, pour le moment on continuera d'agir, du plus au moins, d'après ces restrictions, tant vis-à-vis de l'Amérique que de toutes les autres puissances;
Que le ministère anglais considère une ferme adhésion à ce système comme le meilleur moyen d'affecter sérieusement les ressources de la France, et de combattre son système d'influence sur le continent, et que toutes tentatives de la part de nations ennemies pour le ramener à d'autres idées, ne produiront probablement qu'un effet contraire;
Que cependant il ne faut pas en inférer une résolution fixe de repousser toute proposition de paix: peut-être même qu'il s'imagine que c'est la voie d'amener le plus promptement la France à s'occuper sérieusement de quelques moyens d'opérer un rapprochement; peut-être encore que, si ceci avait lieu, il se montrerait facile sous bien des rapports ; mais plutôt, que cela se fonde sur la conviction que, dans ce moment, le gouvernement français n'a aucunes vues sérieuses de paix qui puissent s'accorder avec les principes avoués du gouvernement anglais, et qu’il s'occupe uniquement à poursuivre ses dispositions quant à l'Espagne et au Portugal, lesquelles dispositions seront toujours l'obstacle le plus sérieux au succès de toutes les négociations qui pourraient s'entamer;
Que dans l'ensemble des considérations du jour, celles qui concernent la Hollande n'entrent que comme extrêmement secondaires, et que l'idée de l'impossibilité qu'aucune convention relative à ce pays pût jamais, sous l'influence de la France, présenter aucune chance de sûreté pour l'Angleterre, à moins d'être liée à une question générale, émousse tout l'intérêt que d'ailleurs ce pays par lui-même ne manquerait pas d'inspirer, au point même de ne pas donner accès aux motifs extrêmement importants qui devraient déterminer à considérer cette question séparément, et sous un point de vue immédiat.
Le soussigné n'apercevant dans cet état de choses nulle chance de succès dans les démarches ultérieures que le gouvernement de Hollande pourrait être tenté d'essayer, à moins que ces démarches ne se trouvent spécialement appuyées par la France, et qu'ainsi, quant à ce pays, son sort se trouve entièrement lié à la question de la paix générale, il croit, conformément à la teneur de ses instructions, ne pas devoir prolonger inutilement son séjour dans ce pays.
En conséquence, il se propose de se remettre en mer sous peu de jours: et dès son arrivée, il aura l'honneur de se présenter chez Leurs Excellences les ministres, afin de leur rendre verbalement un compte ultérieur et détaillé de tout ce qui a rapport à la mission dont ils l'ont chargé, et qu'il a taché de remplir avec tout le zèle et la sollicitude que l'importance du sujet ne pouvait manquer de lui inspirer. Il prie, en attendant, Leurs Excellences d'agréer l'assurance de son respect. »
Malgré ce rapport peu encourageant, Napoléon envisageait de poursuivre les pourparlers, et écrivit en ce sens à son frère le 20 mars :
« J'ai lu avec attention le rapport du sieur Labouchère. Je pense qu'il est convenable que vous le renvoyiez à Londres, non plus au nom du ministre hollandais, mais en votre nom. Il sera chargé de s'expliquer dans les termes de la note ci-jointe, et sera porteur d'un écrit non signé, à peu près pareil à celui qu'il a remis. Enfin, si le gouvernement anglais a la moindre volonté de paix, on peut se servir du sieur Labouchère ou de tout autre agent pour porter des paroles. Il est très important que Labouchère n'ait aucun titre, aucun caractère officiel, et que, dans aucun cas, il ne puisse montrer aucune pièce signée, ni d'une écriture connue.
Note :
Le Roi, à force de sollicitations et de sacrifices, a obtenu que tout le pays sur la droite du Rhin resterait indépendant, ce qui ne laisse pas d'être un avantage important pour les Anglais. Mais des troupes françaises et des détachements de douanes occupent les débouchés, ce qui rendra impossible l'introduction d'aucun bâtiment en Hollande. N'y aurait-il pas un moyen d'arriver à un arrangement sur les arrêts du Conseil de 1807 ? Car, le jour où ces arrêts seraient levés, les troupes françaises évacueraient la Hollande; peut-être même, ce jour-là, pourrait-on obtenir qu'elles évacuassent les villes hanséatiques; et ne serait-il pas d'un grand intérêt pour l'Angleterre de reprendre paisiblement ses relations avec le continent ?
C'est une erreur de croire que la France souffre de l'état actuel. Les denrées coloniales sont en si grande quantité qu'elle ne peut en manquer de longtemps, et le sirop de raisin et le miel suppléent partout au sucre. Les cotons de Macédoine, de Naples et du Levant, entretiennent ses manufactures, abondamment pourvues. Mais cet état de choses est contraire à l'industrie de tout le continent. D'abord, on conçoit bien que la paix ne peut venir qu'en faisant d'abord la guerre d'une manière moins acerbe. L'Angleterre gagnera, de plus, à ce système d'arrangement de voir ses différends levés avec les Etats-Unis d'Amérique. Elle aura sauvé la Hollande, l'indépendance des villes hanséatiques, maintenu sa paix avec l'Amérique, rétabli ses relations habituelles avec le continent, rendu à son commerce sa consommation et ses retours naturels, et fait faire un pas vers le rétablissement de la paix.
Quant à la paix elle-même, nul doute qu'aucune circonstance n'est plus favorable, et, si l'Angleterre est le moindrement disposée à la faire sur le pied d'une parfaite égalité et indépendance, la paix peut se conclure.
Pour n'avoir pas fait la paix plus tôt, l'Angleterre a perdu Naples, l'Espagne, le Portugal et le débouché de Trieste. Il est évident que, si elle tarde à la faire, elle perdra la Hollande, les villes hanséatiques, et qu'elle soutiendra malaisément la Sicile. »
Passons maintenant à Fouché. Si l’Empereur entrovoyait d’utiliser à nouveau les services de Labouchère, le ministre de la police, lui aussi, avait des vues sur le banquier hollandais. Ce fut quasiment au même moment où Napoléon écrivait la lettre précédemment citée à son frère que Labouchère, alors à Amsterdam, fut, à l’initiative personnelle de Fouché, abordé par l’affairiste Julien Ouvrard tout juste sorti de prison, qui lui transmit la note suivante, fort éloignée des intentions impériales :
« On paraît être actuellement, et pour l'époque du mariage seulement, disposé à se relâcher sur les points suivants : Malte, la Sicile, Naples, les provinces ioniennes, les villes hanséatiques, la Hollande, le Portugal, la plus grande partie des colonies espagnoles. »
De suite, Labouchère, persuadé qu’il s’agissait d’une démarche officielle, écrivit à Baring, afin de lui signifier que les négociations pouvaient être reprises sur ces nouvelles bases. La démarche ne fut pas plus fructueuse que la précédente, et le 8 mai, Baring répondait à son gendre que Wellesley avait finalement déclaré que toute négociation ne pouvait avoir lieu qu’avec « une personne dont les pouvoirs ne fussent clairs et incontestables »
Il n’y eut pas de suite. Fin avril, Napoléon, alors en Hollande, avait en effet été averti desdites négociations.
Le 12 mai, il signifiait sa colère à Louis en ces termes :
« Vous devez témoigner mon extrême mécontentement au sieur Labouchère de ce qu'il a pris sur lui de se conduire, dans une affaire de cette importance, par les instigations d'un homme sans aveu et d'un intrigant tel qu'Ouvrard; que la première fois qu'il a été entremêlé dans ces affaires, c'est après avoir causé avec un de vos ministres; qu'il est étonnant qu'aujourd'hui il se soit concerté avec un intrigant. »
Les pourparlers furent logiquement stoppés, Ouvrard mis en prison et Fouché disgracié.
( 1 ) : « Sa Majesté, considérant que le Gouvernement français a proclamé naguère un certain décret qui établit un système de guerre jusqu'alors sans exemple, contre ce Royaume, et tendant particulièrement à la destruction de son commerce et de ses ressources, d'après lequel « les îles anglaises ont été déclarées en état de blocus »; de manière que tous les bâtiments quelconques faisant le commerce avec les États de Sa Majesté, sont, ainsi que leurs cargaisons, sujets à la confiscation et à la condamnation;
Considérant que, par le même décret, «tout commerce en marchandises anglaises est prohibé, et tout article de denrée appartenant à l'Angleterre, ou provenant de ses colonies ou de ses manufactures, est déclaré de bonne prise »;
Considérant que les nations qui sont alliées à la France, et celles qui sont sous son influence, ont été requises d'exécuter, comme en effet elles ont exécuté et exécutent de semblables ordres;
Considérant que le décret de Sa Majesté du 7 janvier dernier n'a pas eu l'effet qu'on s'en proposait, soit de forcer l'ennemi à révoquer cette mesure, ou d'engager les nations neutres à s'interposer efficacement pour en obtenir la révocation; mais que, bien au contraire, on a mis récemment beaucoup plus de sévérité dans son exécution;
Considérant enfin que, dans ces circonstances, Sa Majesté se trouve forcée à prendre de nouvelles mesures pour établir et maintenir ses justes droits, et pour conserver cette Puissance maritime que, par les faveurs spéciales de la Providence, elle tient de la valeur de son peuple, et dont l'existence n'est pas moins essentielle à la protection des États qui conservent encore leur indépendance, et au bonheur ainsi qu'à l'intérêt du genre humain, qu'elle ne l'est à la sûreté et à la prospérité des États de Sa Majesté;
Sa Majesté, ayant pris à ce sujet l'avis de son conseil privé, ordonne, par ces présentes, que tous les ports et toutes les places de France et de ses alliés, ceux de tout autre pays en guerre avec Sa Majesté, ceux des pays d'Europe d'où le pavillon anglais est exclu, quoique ces pays ne soient pas en guerre avec Sa Majesté; qu'enfin tous les ports et places des colonies appartenant aux ennemis de Sa Majesté, seront désormais soumis aux mêmes restrictions relativement au commerce et à la navigation (sauf les exceptions ci-après spécifiées), que s'ils étaient actuellement bloqués de la manière la plus rigoureuse par les forces navales de Sa Majesté : en conséquence, tout commerce dans les articles provenant du sol ou des manufactures des pays susmentionnés, sera désormais regardé comme illégal, et tout navire quelconque sortant de ces pays, ou devant s'y rendre, sera capturé légitimement, et cette prise, ainsi que sa cargaison, adjugées aux capteurs.
Mais quoique Sa Majesté ait bien le droit, d'après les motifs exposés ci-dessus, de prendre une semblable mesure relativement à tous les pays et à toutes les colonies de ses ennemis, sans exception ni qualification, elle n'a pas voulu néanmoins entraver le commerce des neutres, plus qu'il n'est nécessaire pour remplir la juste résolution qu'elle a adoptée à l'effet de combattre les projets de ses ennemis, et de les rendre eux-mêmes victimes de leur propre violence et de leur injustice; et voulant bien encore se persuader qu'il est possible (tout en remplissant le but qu'elle se propose) de permettre aux neutres de s'approvisionner de denrées coloniales pour leur propre usage, et même d'autoriser, pour le présent, un certain commerce avec les ennemis de Sa Majesté, qui pourra avoir lieu directement avec les ports des États de Sa Majesté ou de ses alliés, de la manière ci-après déterminée,
Sa Majesté déclare qu'elle n'entend pas que le présent ordre soit applicable,
1° Aux navires appartenant à des Puissances qui ne sont pas comprises dans le blocus, lesquels navires auraient fait voile des ports des pays auxquels ils appartiennent, soit en Europe ou en Amérique, ou de quelque port libre dans les colonies de Sa Majesté (en se conformant aux règlements établis pour le genre de commerce qui peut se faire dans lesdits ports), pour se rendre directement dans quelque port des colonies appartenant aux ennemis de Sa Majesté ; ou de ces mêmes colonies, aussi directement, dans les pays auxquels ils appartiennent, ou dans quelque port libre appartenant à Sa Majesté;
2° Aux navires appartenant à des pays non en guerre avec Sa Majesté, lesquels auront fait voile, en se soumettant à tels règlements qu'il plaira à Sa Majesté de publier, et ce, pour se rendre directement de quelque port ou place de la Grande-Bretagne, ou bien de Gibraltar, ou de Malte, ou d'un port appartenant aux alliés de Sa Majesté, au lieu qui sera désigné dans son acquit à la douane.
3° Aux navires appartenant à des pays non en guerre avec Sa Majesté, lesquels viendraient d'un port d'Europe compris dans la présente mesure de blocus, pour se rendre directement dans quelque port ou place d'Europe appartenant à Sa Majesté ; bien entendu que l'exception dont il s'agit, n'est pas applicable à des navires qui entreraient dans un port actuellement bloqué par des escadres ou des vaisseaux de guerre de Sa Majesté, ou qui tenteraient de sortir desdits ports.
En conséquence, il est enjoint à tous bâtiments de guerre, corsaires et autres, naviguant en vertu d'une commission de Sa Majesté, d'informer tous les navires qui auraient commencé leur voyage avant d'avoir eu connaissance du présent ordre, et qui seraient destinés pour un port de France, ou de ses colonies, ou de ses alliés, ou pour tout autre pays en guerre avec Sa Majesté, ou d'où le pavillon anglais est exclu, et qui seraient en contravention avec les dispositions ci-dessus, qu'ils aient à discontinuer leur voyage, ou à se rendre dans un port quelconque d'Angleterre, ou bien à Gibraltar ou à Malte; et tout navire qui sera pris après avoir contrevenu aux dispositions présentes, sera déclaré de bonne prise, ainsi que sa cargaison, et le tout adjugé aux capteurs.
Et attendu que des pays non engagés dans la guerre ont acquiescé à ces ordres de la France, en prohibant tout commerce dans les articles provenant des États ou des manufactures de la Grande-Bretagne ; et que les négociants de ces mêmes pays ont concouru à rendre ces prohibitions efficaces, en acceptant de certaines personnes se qualifiant du titre d'agents commerciaux de l'ennemi, résidant dans les ports neutres, certains documents, appelés certificats d'origine, lesquels constatent que les objets embarqués ne proviennent ni des possessions ni des manufactures anglaises;
Et comme cet expédient a été imaginé par la France, et que ces négociants s'y sont soumis comme faisant partie du nouveau système de guerre dirigé contre le commerce de ce Royaume, et qu'il est par conséquent essentiellement nécessaire à l'Angleterre de résister à cette mesure,
Sa Majesté, de l'avis de son conseil privé, ordonne, par ces présentes, que tout navire qui sera muni d'un semblable certificat, après avoir eu connaissance du présent ordre, sera confisqué comme de bonne prise.
Les lords commissaires de la trésorerie de Sa Majesté, les lords commissaires de l'amirauté, et les cours de l'amirauté, sont chargés de l'exécution du présent traité. »
«Attendu que les articles du cru ou des manufactures des pays étrangers ne peuvent être importés dans ce pays que dans des navires anglais, ou dans des bâtiments appartenant aux pays d'où ces articles sont tirés, à moins qu'un ordre du conseil n'autorise spécialement de nouvelles mesures à ce sujet;
Sa Majesté prenant en considération son décret en date de ce jour, relativement au commerce qui peut se faire avec les ports de l'ennemi, et jugeant convenable que tout navire appartenant à une Puissance amie ou alliée de Sa Majesté puisse avoir la faculté d'importer dans ce pays-ci des articles provenant du cru ou des manufactures des pays qui sont en guerre avec Sa Majesté,
Sa Majesté, de l'avis de son conseil privé, ordonne, par ces présentes, que toutes les denrées et marchandises spécifiées et comprises dans un acte du parlement passé dans la quarante-troisième année du règne de Sa Majesté, et qui a pour titre, « Acte qui révoque les droits de douane payables dans la Grande-Bretagne, et qui en substitue de nouveaux », pourront être importées des ports ennemis par des navires appartenant à des Puissances amies ou alliées de l'Angleterre, et ce en acquittant les droits de douane, et en participant aux remises qui sont actuellement établies par la loi en faveur de l'importation de certaines marchandises; et pour ce qui est des denrées et marchandises dont l'importation est autorisée pour être mises en dépôt sans paiement de droits, en vertu d'un acte passé la quarante-troisième année du règne de Sa Majesté, elles pourront être importées, en se soumettant aux clauses dudit acte: quant à tous les articles dont l'importation en Angleterre est prohibée par la loi, il est ordonné que l'importation en sera permise, pour être réexportés dans tout pays ami ou allié de Sa Majesté.
Sa Majesté ordonne, en outre, que tout navire qui arriverait dans un port du Royaume-Uni, ou à Gibraltar, ou à Malte, d'après l'avertissement qu'il aurait reçu du présent ordre, sera autorisé à poursuivre son voyage, ou à se rendre dans un port ami; et pour cet effet, il lui sera délivré, par le collecteur ou le contrôleur des douanes, un certificat constatant qu'il s'est conformé au présent ordre. Mais dans le cas où des bâtiments ainsi avertis préféreraient d'importer leurs cargaisons, ils en auront la faculté, aux mêmes termes et aux mêmes conditions que si leur chargement avait été fait en conformité des dispositions prescrites par Sa Majesté.
Il est de plus ordonné que tous les bâtiments qui arriveront dans un port du Royaume-Uni, ou à Gibraltar, ou à Malte, et ce pour déférer au présent ordre, auront la faculté, relativement à tous les articles qui composeront leur cargaison, excepté le sucre, le café, le vin, l'eau-de-vie et le tabac, de faire voile pour tout port quelconque qui sera désigné dans l'acquit des douanes; et quant aux articles qui viennent d'être exceptés, ils ne pourront les exporter qu'en vertu d'une licence de Sa Majesté, et ce dans les places et aux conditions qui leur seront prescrites. »
«Attendu que toute vente de bâtiment faite par un ennemi à un autre, est considérée par la France comme illégale;
Et comme une grande partie de la marine de France et de ses alliés a été protégée, dans le cours des présentes hostilités, par de prétendus transferts à des neutres;
Considérant enfin qu'on peut opposer à l'ennemi les mêmes armes dont il se sert,
Sa Majesté ordonne que désormais tout transfert de cette nature sera regardé comme illégal, et que tout bâtiment qui aura appartenu aux ennemis, nonobstant toute vente qui aurait pu en être faite à des neutres, sera de bonne prise et adjugé aux capteurs. Le présent ordre aura son exécution aussitôt après qu'il se sera écoulé un temps suffisant pour que les dispositions en soient connues dans les ports et places ou les prétendues ventes ont pu avoir lieu. »
( 2 ) : «Vu les dispositions arrêtées par le Gouvernement britannique, en date du 11 novembre dernier, qui assujettissent les bâtiments des Puissances neutres, amies et même alliées de l'Angleterre, non seulement à une visite par les croiseurs anglais, mais encore à une station obligée en Angleterre et à une imposition arbitraire de tant pour cent sur le chargement, qui doit être réglée par la législation anglaise;
Considérant que, par ces actes, le Gouvernement anglais a dénationalisé les bâtiments de toutes les nations de l'Europe; qu'il n'est au pouvoir d'aucun Gouvernement de transiger sur son indépendance et sur ses droits, tous les souverains de l'Europe étant solidaires de la souveraineté et de l'indépendance de leur pavillon; que, si, par une faiblesse inexcusable et qui serait une tache ineffaçable aux yeux de la postérité, on laissait passer en principe et consacrer par l'usage une pareille tyrannie, les Anglais en prendraient acte pour l'établir en droit, comme ils ont profité de la tolérance des Gouvernements pour établir l'infâme principe que le pavillon ne couvre pas la marchandise et pour donner à leur droit de blocus une extension arbitraire et attentatoire à la souveraineté de tous les États,
Nous avons décrété et décrétons ce qui suit:
Art. 1er. Tout bâtiment, de quelque nation qu'il soit, qui aura souffert la visite d'un vaisseau anglais ou se sera soumis à un voyage en Angleterre, ou aura payé une imposition quelconque au Gouvernement anglais, et, par cela seul, déclaré dénationalisé, a perdu la garantie de son pavillon et est devenu propriété anglaise.
Art. 2. Soit que lesdits bâtiments, ainsi dénationalisés par les mesures arbitraires du Gouvernement anglais, entrent dans nos ports ou dans ceux de nos alliés, soit qu'ils tombent au pouvoir de nos vaisseaux de guerre ou de nos corsaires, ils sont déclarés de bonne et valable prise.
Art. 3. Les îles britanniques sont déclarées en état de blocus sur mer comme sur terre.
Tout bâtiment, de quelque nation qu'il soit, quel que soit son chargement, expédié des ports de l'Angleterre ou des colonies anglaises, ou de pays occupés par les troupes anglaises, ou allant dans les colonies anglaises ou dans des pays occupés par les troupes anglaises, est de bonne prise comme contrevenant au présent décret; il sera capturé par nos vaisseaux de guerre ou par nos corsaires, et adjugé au capteur. »
Art. 4. Ces mesures, qui ne sont qu'une juste réciprocité pour le système barbare adopté par le Gouvernement anglais, qui assimile sa législation à celle d'Alger, cesseront d'avoir leur effet pour toutes les nations qui sauraient obliger le gouvernement anglais à respecter leur pavillon.
«Elles continueront d'être en vigueur pendant tout le temps que ce gouvernement ne reviendra pas aux principes du droit des gens, qui règle les relations des États civilisés dans l'état de guerre. Les dispositions du présent décret seront abrogées et nulles par le fait, dès que le gouvernement anglais sera revenu aux principes du droit des gens, qui sont aussi ceux de la justice et de l'honneur.
Art. 5. Tous nos ministres sont chargés de l'exécution du présent décret."