Dans La chute ou l'empire de la solitude, Dominique de Villepin s'exprime à propos du duc de fer, dans le chapitre L'égarement du livre l'Illusion. Chapitre où il est pris comme sujet le bourbier espagnol (1808-1814) (pages 48-49) :
" Eu égard à sa faiblesse initiale, comparée aux 300 000 Français alors présents dans la péninsule, il opte pour une stratégie défensive. Elle vise à user l’adversaire pour mieux le détruire par une contre-attaque vigoureuse déclenchée au moment opportun. Prototype du flegmatique hautain, tel que l’on se représente l'aristocrate britannique, cet ami de Castlereagh est un homme de rigueur doublé d’un grand pragmatique. Les faiblesse numérique et quantitative de sa cavalerie le conduisent à privilégier son infanterie, l’une des meilleures du monde par sa discipline et son endurance. Pour la renforcer, il la soumet à de très nombreux entraînements sur cibles et multiplie les manœuvres. Il cherche en priorité à améliorer la qualité du feu, pour tirer mieux et plus vite. Bénéficiant de fusils plus précis et de balles plus lourdes que les nôtres, il modifie l’alignement, passant de trois à deux, ce qui permet à tous les hommes de faire feu en même temps, là où les Français, avançant sur trois lignes ou en colonnes d’attaque, se privent d’une large partie de leur puissance de feu. En outre, il déploie ses bataillons en arc de cercle et non en ligne plate, ce qui lui permet de tirer de flanc sur la colonne assaillante. En cas d’attaque brusque, ses troupes sont entraînées à se former rapidement en carrés, organisation particulièrement meurtrière contre la cavalerie, rappelant la phalange macédonienne ou la tortue romaine. Toutes ces combinaisons cumulées produisent un feu puissant et dévastateur. Le général Foy, auteur d’une Histoire de la guerre de la péninsule, s’incline : « En campagne, il est facile de manœuvrer les Anglais, de tourner autour d’eux, de les arrêter, de les molester. En bataille, rendus sur le terrain et alignés, il n’y a pas d’ennemis plus redoutables. Leur infanterie est solide au feu, exercée au métier et tire parfaitement ; leurs officiers sont les plus braves et les plus patriotes de l’Europe. »
Mais la tactique selon Wellington privilégie d’abord le choix de la position. Elle doit être conforme à son schéma favori, soit préparer à une bonne défensive en se situant sur des hauteurs couvertes par des protections naturelles. Il prend l’habitude de dissimuler ses troupes à contre-pente, les masquant à l’adversaire et les protégeant du feu de l’artillerie, avant de les précipiter en haut de la crête juste avant que les Français ne l’atteignent. Là, ses troupes en arc de cercle et à bout portant, il fusille les assaillants et n’hésite pas à les poursuivre en dévalant la pente. La recette de Waterloo est déjà en place. Enfin, il s’abrite volontiers derrière des positions fortifiées, obligeant ses adversaires à mener une épuisante guerre de siège. Pour l’affaiblir davantage, Wellington innove encore à pratiquant la stratégie de la terre brûlée, sachant que son armée bénéficie du soutien des population et donc d’un bon approvisionnement. Appuyé sur le Portugal, il reste le plus longtemps possible près de ses magasins, à l’inverse de la guerre éclair impériale où la guerre est censée nourrir la guerre."
_________________ "L'Angleterre attend que chaque homme fasse son devoir" (message de l'amiral Nelson à Trafalgar)
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