Je pense que le livre Metz 1870 évoqué plus haut par Festewagner devrait nous en apprendre davantage. Il existe plus d’une centaine de monuments de 1870 dans la campagne de Metz, répartis sur les champs de bataille des 14, 16 et 18 août : Borny, Rezonville, Gravelotte, Sainte-Marie-aux-Chênes, Saint-Privat… Il en existe aussi sur le champ de bataille de Spicheren-Forbach (6 août) et en Alsace (Wissembourg et Woerth) mais c’est autour de Metz qu’ils sont les plus nombreux. Il ne s’agit pas à proprement parler de Monuments aux Morts mais plutôt de monuments commémoratifs des combats érigés sur place par les régiments allemands qui y avaient pris part. D’autres ont été érigés dans les communes périphériques, par les régiments combattants qui y étaient stationnés notamment pendant le blocus de Metz. N’oublions pas que la Moselle fut annexée après le traité de Francfort et que les Allemands firent de Metz la plus grande place-forte du monde. Chaque régiment voulut avoir son propre monument. Pour ce qui concerne les Français, c’est sûr que les autorités civiles et militaires allemandes ne laissèrent pas les Lorrains annexés ériger comme ils le souhaitèrent des monuments à la mémoire des soldats français tombés sur les champs de bataille. Il en existe quelques-uns cependant, sur les champs de bataille et dans les cimetières. Le premier fut érigé dans le cimetière militaire de Metz-Chambière à l’initiative des Dames de Metz. Il fut élevé à la mémoire des 7000 soldats français morts sur les champs de bataille de Metz, dont 1200 dans les ambulances pendant le blocus de la ville. Il fut inauguré le 7 septembre 1871. Un monument avait été érigé en 1871 par les habitants de Borny, il fut détruit par les Allemands pendant la guerre de 1914, restauré après le retour à la France après 1918 et transféré au cimetière de Chambière dans les années 1970. Un monument français fut inauguré le 14 octobre 1872 à Sainte-Marie-aux-Chênes à la gloire du 94ème de ligne. Il existe un monument aux morts français, magnifique, au cimetière de l’Est à Metz où se trouvent plusieurs tombes de généraux et officiers français tombés en août. Il existe plusieurs monuments français érigés dans les communes pendant l’annexion, principalement dans les cimetières ou furent aménagés des carrés militaires, à l’initiative du Souvenir Français fondé en 1887 par l’Alsacien Niessen ; je cite de mémoire Moyeuvre-Grande, Peltre, Rombas, Woippy, Sierck-les-Bains, il en est beaucoup d’autres, Rozérieulles (vestige) Vionville, j’en oublie. En Lorraine mosellane, la mémoire collective garde surtout le souvenir, inoubliable, de la manifestation grandiose, autorisée par les autorités allemandes, organisée à Noisseville à l’initiative de Jean-Pierre Jean, responsable du Souvenir Français en Moselle annexée. Les 3 et 4 octobre 1908 y fut inauguré, au lieudit l’Amitié, le somptueux monument aux Morts « aux soldats français tombés héroïquement au Champ d’Honneur » Une foule estimée à 120.000 personnes y assista, venue de toute la Lorraine, des deux côtés de la nouvelle frontière, arborant une forêt de drapeaux français, et parmi elle une délégation médusée des plus hautes autorités civiles et militaires allemandes venue de Metz et une délégation de 900 officiers français dont plusieurs généraux, délégués par le gouvernement français. Pour l’autre partie de la question, les communes de Moselle et d’Alsace perdirent des enfants dans les mêmes proportions que les autres communes de France, le système de conscription par tirage au sort étant identique dans toutes les communes de l’hexagone. Par contre, la population civile connut des pertes plus importantes que sur le reste du territoire, du fait des combats qui détruisirent des villages entiers, des épidémies qui suivirent, des représailles durant le blocus de Metz qui dura plus de deux mois et enfin par les frondes et révoltes qui se manifestèrent dans la population au début de l’Annexion. Traiter plus profondément ce sujet ici serait bien trop long, je regrette de ne pouvoir y satisfaire davantage.
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