Bonjour,
Sir Peter a écrit :
le conflit a été ingénieusement préparé par Bismark,il pense que depuis 1850 environ la France usurpe la place de première puissance continentale...
La France, de son côté veut être la première puissance européenne, du moins Napoléon III le souhaite et l'exprime.
De son côté Bismarck veut une Prusse forte à la tête d'une Allemagne plus qu'unifiée, cimentée. Il a la chance d'aller de concert avec un roi -Guillaume- qui a les mêmes espérances pour des raisons similaires et aussi différentes, plus personnelles.
Si Guillaume Ier pouvait avoir une détestation viscérale de la France et de tout ce qu'elle représentait, je cherche chez Bismarck l'origine d'une telle exécration. A moins que -parfais serviteur de l'Etat- il n'ait tout simplement eu aucun état d'âme à abattre ce qui s'opposait à la future Allemagne (on le voit avec l'Autriche). Et l'homme est plein de bon sens : un conflit avec l'Autriche ceci s'oubliera devant l'histoire d'un passé commun. C'est une évidence comme il est évident que la France peut être facilement isolée diplomatiquement.
Pour la France, les traités infâmes de 1815 ne sont pas "digérés". Il ne faut pas attendre des pays européens que l'épisode napoléonien ait été oublié, que le congrès de Vienne ait tout cicatrisé. De part et d'autre, il existe un vieux fond qui se transmet avec des batailles sublimées, ou des épisodes malheureux amplifiés, une résistance exagérée, des personnages exaltés.
Bismarck a peut-être aussi eu l'espoir de fossoyer un régime qui laisserait place à un autre tout aussi instable. Un voisin instable et dont l'instabilité peut amener une révolution ou même des troubles révolutionnaires : on a vu, on connait, il y a des précédents et mieux vaudra étouffer ceci dans l'oeuf pour une paix continentale.
Jean-Marc Labat a écrit :
Ajoutez y une opinion publique parisienne déchaînée, alors que la province est loin de vouloir la guerre, et le tour est joué. J'ai plus l'impression que Napoléon III a été dépassé par les évènements qu'il n'en a été l'instigateur.
Sans doute avez-vous raison.
Comme j'ignorais tout de ce sujet, j'ai lu plusieurs livres d'où certains changements d'appréhensio dans mes posts au fur et à mesure de lectures croisées.
Il est honnête d'avouer que, là encore, Paris est un "problème". La province, en effet, et surtout certaines couches sociales sont loin de vouloir un conflit. La résonance du moindre "éternuement parisien" fait aussitôt craindre le pire en province et l'économie commence à se gripper.
Les élections de 1869 voient les réunions se multiplier, devenir violentes, c'est le rappel semble-t-il des clubs de la IIème. On retrouve aussi un considérable essor de la presse qui fait du "coup d'Etat sauveur" un "crime avec ses martyrs" (La Lanterne). L'opposition est en effet "révolutionnaire". Les Républicains ont triomphé dans toutes les grandes villes mais mordu sur de rares campagnes : [... cantons du Midi ou de l'Est déjà acquis par les "démoc-soc" sous la IIème république...].
Les Ruraux semblent avoir réélu un grand nombre de candidats officiels, de libéraux cléricaux ou protectionnistes hostiles à tout mouvement révolutionnaire. Pour que les Républicains se coalisent, il faudra ce conflit...
Peut-être que si le ministère Ollivier qui prépare de grandes réformes visant à donner satisfaction aux milieux d'affaires, aux cléricaux, aux conservateurs (rétablissement du protectionnisme, décentralisation, liberté de l'enseignement supérieur) avait eu une politique plus tournées vers "les masses"... mais il semble commun d'oublier à qui nous devons un pouvoir pour ne se souvenir que de qui vient de le soutenir.
gamelin a écrit :
... étant donné qu'il savait ( je l'ai lu dans sa biographie écrite par Pierre Milza) que l'armée française n'était pas suffisamment préparée?...
Pour en revenir à la question de Gamelin, j'ai trouvé ces chiffres :
[... Elle -la France- ne dispose que d'une armée de 370 000 hommes (dont 60 000 sont en Algérie et 6 000 à Civitavecchia)... dès Août 1870, l'Allemagne peut
"lancer en première ligne plus de 500 000 hommes, soutenus par plus de 160 000 soldats de réserve dans les dépôts, tandis que 190 000 hommes de la Landwehr forment en même temps une armée de seconde ligne sans équivalent en France" (Chanal) ... S'ajoute à cela la médiocrité de bien des officiers supérieurs français, que le régime avait souvent promus en raison de leur fortune personnelle plus que pour leurs capacités, et une organisation désastreuse de la concentration des troupes aux frontières : début Août, Napoléon III ne dispose encore que de 235 000 hommes fort mal rassemblés. Aussi les défaites s'accumulent : Wissembourg, le 4 août ; Froeschwiller, le 6 août ; l'Alsace doit être évacuée par Mac Mahon. En Lorraine, Bazaine se laisse enfermer dans Metz. Pour le délivrer, le reste des troupes françaises, suivi plus que commandé par un empereur malade, vient maladroitement se faire encercler dans la cuvette de Sedan, où, le 1er septembre, il ne reste qu'à capituler. Napoléon III est prisonnier...]
Cependant le second empire ne fut pas que cela. Il ne faut pas oublier l'accompagnement des progrès et des mutations économiques (une prospérité et une expansion, une expansion ferroviaire, une croissance industrielle), un niveau de vie qui a changé en mieux, même dans le monde rural et même s'il existe des disparités (niveau de vie ouvrier).