James Saint Angel a écrit :
N'oublions pas que Louis Napoléon Bonaparte passa 6 ans de sa vie à Boulogne en prison, il eut le temps de se faire des connaissances car jusqu'au jour de ce coup d'état d'opèrette, il n'était pas connu ( Il faut dire qu'auparavant il n'avait vécu qu'en Allemagne et en Suisse )
Rappel des faits : Il tente en vain de soulever la garnison de Boulogne. Il est arrêté et condamné à la prison à perpétuité. Emprisonné au fort de Ham, il s'en échappe en 1846.
Victor Hugo a rapporté les faits ainsi :
Citer :
…parodiant le débarquement à Cannes, coiffé du petit chapeau, apportant un aigle doré au bout d'un drapeau et un aigle vivant dans une cage, force proclamations, et soixante valets, cuisiniers et palefreniers, déguisés en soldats français avec des uniformes achetés au Temple et des boutons du 42e de ligne fabriqués à Londres. Il [ le futur Napoléon III ] jette de l'argent aux passants dans les rues de Boulogne, met son chapeau à la pointe de son épée, et crie lui-même : vive l'empereur; tire à un officier un coup de pistolet qui casse trois dents à un soldat, et s'enfuit. Il est pris, on trouve sur lui cinq cent mille francs en or et en bank-notes; le procureur général Franck-Carré lui dit en pleine cour des pairs : "Vous avez fait pratiquer l'embauchage et distribuer l'argent pour acheter la trahison." Les pairs le condamnent à la prison perpétuelle. On l'enferme à Ham. Là son esprit parut se replier et mûrir; il écrivit et publia des livres empreints, malgré une certaine ignorance de la France et du siècle, de démocratie et de foi au progrès : l'Extinction du paupérisme, l'Analyse de la question des sucres, les Idées napoléoniennes où il fit l'empereur "humanitaire". Dans un livre intitulé Fragments historiques, il écrivit : "Je suis citoyen avant d'être Bonaparte." Déjà, en 1832, dans son livre des Rêveries politiques, il s'était déclaré "républicain". Après six ans de captivité, il s'échappa de la prison de Ham, déguisé en maçon, et se réfugia en Angleterre. Février arriva, il acclama la République, vint siéger comme représentant du peuple à l'Assemblée constituante, monta à la tribune le 21 septembre 1848, et dit : "Toute ma vie sera consacrée à l'affermissement de la République", publia un manifeste qui peut se résumer en deux lignes : liberté, progrès, démocratie, amnistie, abolition des décrets de proscription et de bannissement; fut élu président par cinq millions cinq cent mille voix, jura solennellement la Constitution le 20 décembre 1848, et, le 2 décembre 1851, la brisa. Dans l'intervalle il avait détruit la République romaine et restauré en 1849 cette papauté qu'il voulait jeter bas en 1831. Il avait en outre pris on ne sait quelle part à l'obscure affaire dite Loterie des lingots d'or; dans les semaines qui ont précédé le coup d'Etat, ce sac était devenu transparent et l'on y avait aperçu une main qui ressemblait à la sienne. Le 2 décembre et les jours suivants, il a, lui pouvoir exécutif, attenté au pouvoir législatif, arrêté les représentants inviolables, chassé l'Assemblée, dissous le conseil d'Etat, expulsé la Haute cour de justice, supprimé les lois, pris vingt-cinq millions à la Banque, gorgé l'armé d'or, mitraillé Paris, terrorisé la France, jonché les rues de cadavres, versé des flots de sang; depuis il a proscrit quatrevingt-quatre représentants du peuple, volé aux princes d'Orléans les biens de Louis-Philippe leur père, auquel il devait la vie, décrété le despotisme en cinquante-huit articles sous le titre de Constitution, employé l'armée à la honte, garrotté la République, fait de l'épée de la France un bâillon dans la bouche de la liberté, brocanté les chemins de fer, fouillé les poches du peuple, réglé le budget par ukase, déporté en Algérie et à Cayenne dix mille démocrates, exilé en Belgique, en Espagne, en Piémont, en Suisse et en Angleterre quarante mille républicains, mis dans toutes les ames le deuil et sur tous les fronts la rougeur.
Louis Bonaparte croit monter au trône, il ne s'aperçoit pas qu'il monte au poteau
Napoléon le petit / Victor HugoEtait ce par goût du pélerinage qu'il revint 10 ans après ? Mystère...
James Saint-Angel
Allo, James !! Quelle nouvelle ?
LNB boulonnais pendant six années ?
In : Horace de Viel Castel Mémoires sur le règne de Napoléon III
Lundi 11 septembre 1854
En arrivant à Boulogne, l’Empereur a chargé M. Ducos, ministre de la marine, de s’informer s’il existait encore dans cette ville quelques uns des gens qui l’avaient arrêté en 1840 lors de son expédition malheureuse.
Ducos découvrit un matelot qui s’était jeté à la mer pour atteindre le prince qui cherchait à regagner à la nage le bâtiment qui l’avait amené ; lequel susdit matelot avait empoigné le prétendant par les cheveux ; puis Ducos découvrit encore le gendarme aujourd’hui douanier, qui sur le rivage avait pris du matelot livraison du prince vaincu et lui avait mis la main au collet. Ces deux hommes furent conduits chez Ducos qui leur demanda s’ils étaient bien les hommes qu’on lui avait désignés. Ces deux pauvres diables répondirent, non sans hésitation, qu’ils étaient les deux arrestateurs du prince et Ducos leur enjoignit de revenir le lendemain à neuf heures du matin. Après une nuit d’anxiétés, les deux gaillards, fort peu gaillards pour le moment, se présentèrent chez le ministre à l’heure précise, qui leur avait été indiquée. Ducos les conduisit chez l’Empereur et le matelot fut le premier admis en sa présence.
L’Empereur tortillait entre ses doigts sa longue moustache, il marcha vivement vers le matelot et lui dit : « C’est donc toi qui en 1840 est venu me prendre dans la mer en me saisissant par les cheveux ?
Le matelot : Majesté, … je … je …
L’Empereur : Voyons, est-ce toi, oui ou non ?
Le matelot (reprenant son assurance) : Eh bien oui, Majesté ; les autres tiraient, vous pouviez être blessé ou vous noyer, c’est moi qui me suis lancé à la mer pour vous sauver … C’est moi qui vous ai sauvé.
L’Empereur et le ministre avaient peine à garder leur sérieux en écoutant cette version singulièrement embellie par ce matelot, d’une arrestation changée en sauvetage.
« C’est bien, mon garçon, reprit l’Empereur, voilà la croix que tu as gagnée en faisant ton devoir, et voici 500 francs pour te souvenir de moi. »
Au matelot succéda le gendarme devenu douanier, mais son imagination moins inventive que celle du matelot ne lui suggéra point de merveilleuse transformation, il balbutia longtemps, puis prenant bravement son parti, répondit :
« Oui, Sire, c’est moi, vous étiez en contravention, j’étais de service et je vous ai arrêté.
L’Empereur : Et cette croix que tu portes, d’où te vient-elle, qui te l’a donnée ?
Le gendarme : Sire, c’est le roi Louis-Philippe.
L’Empereur ; A l’occasion de mon arrestation ?
Le gendarme : Je suis un ancien militaire … J’avais de bons services … je … mais c’est vrai, Sire, c’est à l’occasion de votre arrestation que je l’ai enfin reçue.
L’Empereur : J’en suis fâché parce que je ne peux pas te la donner puisque tu l’as, mais voici la médaille militaire (et l’Empereur, détachant celle qu’il portait, la mit sur la poitrine du gendarme) tu es un brave soldat. »
Le gendarme reçut comme le matelot une somme de cinq cents francs.