Bonjour à tous,
Le débat sur les 2 empereurs a apparemment dévié vers une débat sur l'Empire libéral, ce qui n'est pas pour me déplaire puisque c'est, à mon sens, une question centrale sur l'intérêt historique du second Empire.
En effet, on ne peut que s'imaginer ce qu'aurait été la France sous l'Empire libéral, mais plusieurs indices nous permettent de penser (en tout cas en ce qui me concerne) que le pays se serait certainement économisé quelques dizaines d'années d'hésitations constitutionnelle et institutionnelle.
Ainsi, Durallo (qu'on ne peut suspecter de bonapartisme) parle de décentralisation ; sans aller jusque-là, il est à peu près certain que l'Empire libéral aurait très vite accordé un statut à la municipalité parisienne (ce qui n'arrivera pas avant les années 1970 !), mais aussi que les conseils généraux auraient gagné en poids dans les institutions suite au travail de la commission parlementaire sur la décentralisation, présidée, il ne faut l'oublier, par Guizot, l'ancien ministre de Louis-Philippe.
Durallo parle encore de stabilité ; comment ne pas être d'accord avec lui, quand, enfin, depuis 1789, un régime est sur le point d'être accepté par l'immense majorité des Français sans être un régime d'exception dû à des circonstances exceptionnelles (le 1er Empire en particulier). En 1870, l'Empire est LE régime des Français : le "peuple" est acquis dans son immense majorité (cf le plébiscite du 8 mai), les élites non-bonapartistes se rallient petit à petit (les orléanistes, dont Prévost-Paradol, et même des républicains préparent ce ralliement tel Picard, qui est le porte-parole de la gauche ouverte), seuls les républicains radicaux (Gambetta, Ferry, etc.) refusent de collaborer avec le régime, mais concernant des personnes comme Ferry, on peut penser qu'il aurait fini par mettre ses principes dans sa poche pour faire une carrière...
Evidemment, comme le sous-entend Fialin, on peut se dire que l'Empire libéral n'a plus grand chose à voir avec l'Empire de 1852 ; où est le bonapartisme dans tout ça ? Mais c'est là une question essentielle. En effet, comment imaginer qu'un régime bonapartiste puisse durer sur une période très longue ? Cela me semble contraire à l'esprit "providentiel" du bonapartisme. Ceci n'empêche pas de se différencier d'une monarchie bourgeoise comme celle de Louis-Philippe. Chez Louis-Philippe, pas d'appel au peuple ni de suffrage universel, et les pouvoirs du monarque étaient bien moins étendus, car n'oublions pas qu'en 1870, Napoléon III conserve un très grand pouvoir.
Enfin, Clio parle de régime reposant sur un seul homme et des dysfonctionnements ; or, peut-on dire que l'Empire libéral, une fois passée quelques années de pratique, aurait encore reposé sur la personne de Napoléon III ? L'Empire aurait alors acquis le statut, tant convoité, de monarchie héréditaire et non de régime providentiel et viager ; la dynastie des Bonaparte, quant à elle, aurait alors été enfin considéré comme la "4ème race", rêve du 1er Napoléon.
Dans ce domaine, comme dans bien d'autres, Napoléon III aurait donc réalisé les espoirs de Napoléon Ier ; dissocier les 2 empereurs est donc, pour moi, impossible. L'un et l'autre sont les faces d'une même médaille.
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