Pour appréhender un peu les périodes anciennes et essayer de comprendre pourquoi, soudain, les hommes choisissent d'abandonner un lieu habité depuis des lustre, il faut, je pense, essayer de savoir ce qui préoccupait majoritairement les pensées de ces gens si éloignés de nous.
Je ne sais pas si nous avons des exemples en Europe ou au Proche Orient de cités "soudainement" abandonnées par leurs habitants. Mais certaines histoires ont des traits communs.
Par exemple : la civilisation minoenne. Son effondrement, en un demi-siècle, a été provoqué à la base par une catastrophe naturelle, l'éruption du Santorin dans l'île de Théra, dont les conséquences (séismes, tsunamis, pluies diluviennes, modification du climat sur plusieurs années) ont ravagé la Crète. Cependant, cet événement reste factuel. Bien que durement touchés, les Minoens auraient pu surmonter l'épreuve, ils en avaient les moyens "intellectuels" et probablement techniques. Après tout, l'éruption du Vésuve a englouti quelques villes mais n'a pas signé l'arrêt de mort de l'Empire Romain (plus grand il est vrai). C'est donc que, dans le cas des Minoens comme dans celui très probable des Mayas, il y a quelque chose en plus. Personnellement, je pense qu'il faut regarder du côté de l'organisation de l'état et du système religieux qui lui est lié. Dans les deux cas, Mayas et Minoens, nous avons un pouvoir central extrêmement autoritaire et puissant, florissant, en relation directe avec les dieux et les éléments naturels. Tant que le peuple parvient à survivre à peu près correctement même si, n'en doutons pas, la contestation est une chose vieille comme l'être humain, l'ordre se maintient. Mais quand se produit la catastrophe (quelle qu'elle soit, éruption, séisme, sécheresse...), le pouvoir s'avère incapable de contrer l'adversité (qui le pourrait !) et de soulager son peuple, le peuple se retourne contre lui d'une façon plus ou moins violente. En somme, c'est plus ou moins l'histoire de la Révolution Française, même si c'est un rapprochement un peu "rapide". Cela ne se traduit pas nécessairement par des massacres à grande échelle, mais plutôt par quelques pratiques sporadiques violentes (quelques assassinats ciblés, cannibalisme isolé...) et par un déclin rapide (moins d'un siècle) pour un retour à des modes de vie plus modestes. Suit en général l'émergence d'une autre civilisation à quelques distances de là (les Grecs dans le cas des Minoens, les Toltèques, je crois, dans le cas des Mayas).
Sans remonter aussi loin, quelqu'un parlait des mauvaises récoltes et de l'épidémie de peste du XIVe siècle. Plus que les guerres (qui n'ont certes pas arrangé les choses), elles ont en tout cas suffi à changer radicalement toute l'imagerie religieuse : danses macabres, transis, visions cauchemardesques de l'enfer, etc. Et il a fallu trois siècles à la démographie française pour s'en remettre.
Donc, en ce qui concerne Caral, il est bien possible que son déclin rapide ait été amorcé par un violent séisme suivi de changements radicaux de l'écosystème. Les habitants l'auraient a priori désertée déjà pour pouvoir manger à leur faim. Pour présumer du reste, il faudrait avoir une idée de la façon dont cette cité était dirigée et des cultes qui y étaient pratiqués.
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