Maurice a écrit :
Les termes flibustier, pirate et corsaire ont été employés à tout va dans ce fil. J'ai voulu faire le point : Voila ce que dit Larousse :
flibustier
nom masculin
(ancien anglais flibutor, du néerlandais vrijbuiter, qui fait du butin librement, peut-être avec l'influence de flibot)
Pirate de la mer des Antilles, aux XVIIe et XVIIIe s.
Vieux. Bandit.http://www.larousse.fr/encyclopedie/nom-commun-nom/flibustier/52526Donc un flibustier est un pirate et non pas un corsaire.
Pour corsaire :
corsaire
nom masculin
(italien corsaro, du latin cursus, course)
Navire rapide armé par un équipage habilité par son gouvernement à capturer des bâtiments de commerce ennemis (XVe-XIXe s.).
Capitaine ou marin de ce navireNon, un flibustier n'est certainement pas un pirate! Ce n'est pas parce qu'un dictionnaire le dit que c'est la Vérité révélée.
Et après on s'étonne que les gens n'achètent plus de dictionnaire. Faut dire qu'avec les conneries qui y sont écrites... Etant donnée la confusion générale qui concerne ces termes, que ce soit parmi les journalistes ou les simples honnêtes hommes, il convient de faire confiance aux historiens (quoiqu'ils ne soient pas eux non plus tous sur la même longueur d'onde).
J'avais dit plus haut qu'un flibustier était
grosso-modo un corsaire. Puisque la discussion devient pointue, il me faut maintenant préciser. Même s'il est entre les deux, un flibustier est en effet beaucoup plus proche du corsaire que du pirate. Il reçoit une commission d'une autorité étatique pour piller les navires/villes de l'ennemi de cet Etat. Mais il y a quand même une différence. Le corsaire était exclusivement au service de son pays. Le flibustier, lui, est beaucoup plus indépendant et peut jongler avec les pays qu'il sert! C'est un mercenaire qui peut passer d'un pays à un autre, même s'il n'en sert qu'un à la fois. On le voit bien à la fin du XVIIème siècle lorsque, après avoir oeuvré pour leur pays, nombre de flibustiers hollandais ou anglais se mettent au service de la France. Les grands capitaines flibustiers avaient d'ailleurs des lettres de marque de différentes autorités, du gouverneur français de la Tortue, du gouverneur anglais de la Jamaïque... Ce changement semble être dû à la "caraïbisation" de la course.
En effet, avant les années trente ou quarante du XVIIème siècle, la course avait ses bases en Europe. C'est le roi français, ou anglais, ou les autorités hollandaises, qui émettaient les lettres de marque. On imagine mal un Basque faire le voyage de Londres pour demander une commission... A partir de 1630-1640, tout change, la course devient locale. France, Angleterre et Hollande se sont installées dans les Caraïbes et ont mis en place des gouverneurs pour administrer les nouvelles colonies. Loin de la métropole, non secourus en cas de danger, ceux-ci vont oeuvrer avec une certaine autonomie, appliquant au coup par coup les décisions de leur gouvernement, distribuant des commissions aux flibustiers pour raisons de sécurité locales, dans le but de défendre leur colonie. Le lien avec la métropole se fait lâche, les gouverneurs renaclent devant certaines décisions. Pour prendre un exemple: Londres a interdit la flibuste dès 1670; néanmoins, le gouverneur anglais de la Jamaïque n'appliquera qu'à moitié la directive, distribuant parfois des commissions jusqu'en 1680.
La proximité des colonies (Espagne, Hollande, Angleterre et France se retrouvent dans un mouchoir de poche aux Caraïbes), l'autonomie des gouverneurs qui essaient de mener leur propre politique en fonction de la situation locale, la nécessité qu'ont ces mêmes gouverneurs d'avoir des flibustiers à leur service, la complexité des alliances et retournements d'alliance, l'influence des guerres européennes etc., tout cela conduit à un certain flou et encourage les flibustiers à passer d'un pays à un autre. Un Anglais combat les Hollandais en 1668. La paix arrive. Qu'à cela ne tienne, il passe au service des Français pour continuer à "butiner" des Hollandais. A partir de la Guerre de la Ligue d'Augsburg, Espagne, Angleterre et Hollande sont alliées contre la France en Europe. Les flibustiers anglais ou hollandais, toujours désireux de piller l'Espagnol, sont donc passés au service de la France.
On peut effectivement voir la flibuste comme une évolution de la course et un premier pas vers la piraterie. Mais il n'en reste pas moins qu'un flibustier reste plus proche d'un corsaire que d'un pirate qui, lui, n'agit que pour son propre compte et n'a de compte à rendre à personne.
Pour faire une analogie sportive quelque peu bizarre, alors que le corsaire était un joueur d'il y a un siècle qui restait fidèle à son équipe de toujours, le flibustier est comme ces stars actuelles qui changent d'équipe tous les deux ou trois ans et se vendent au plus offrant. Mais il continue à jouer en équipe! Le pirate, lui, refuse de jouer dans quelque équipe que ce soit et veut monter sa propre compétition parallèle...