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Oui mais qui dit humanitaire dit collectivité. Or il semblerait que c'est plutôt l'esprit d'individualisme qui prédomine chez les américains contrairement aux européens plus tournés vers le monde
Qui dit humanitaire ne dit pas forcément collectivité: est-ce que les régimes communistes soviétique ou cambodgien traitaient leurs travailleurs plus humainement que les capitalistes américains?
Ce n'est plus le cas maintenant à l'ère du capitalisme néo-libéral globalisé,mais les ouvriers travaillant chez Ford il y a 60 ans avaient des salaires comparativement élevés qui leur permettaient d'acheter les voitures qu'ils produisaient, et ils bénéficiaient d'avantages sociaux appréciables. Le paternalisme patronal peut avoir du bon.
L'individualisme américain est essentiellement économique: dans l'idéologie fondatrice américaine, le contenu de cet individualisme est que c'est la responsabilité et la dignité de tout adulte en bonne santé d'assurer lui-même sa subsistance matérielle par son travail, et de ne pas compter sur l'assistance de l'Etat pour vivre. Cela s'appelle "self-reliance" (le fait de ne compter que sur soi-même et de ne pas être dépendant), et c'est considéré comme une des qualités qui définissent l'Américanité et qui expliquent le succès économique américain.
C'est un trait culturel constant: dépendre de l'aide de l'Etat est vu par la classe moyenne comme un peu déshonorant, c'est bon pour les minorités ou les mères célibataires pauvres.
Mais il y a en contrepoint de cet individualisme le poids du sens civique et du patriotisme, plus intense qu'en Europe, et celui de la religion, nettement plus fervente et pratiquée qu'en Europe (dans l'Amérique profonde, tout le monde est membre d'une église comme on est membre d'un club, le meilleur moyen pour quelqu'un qui s'installe dans une ville américaine inconnue de s'intégrer dans sa nouvelle communauté est de joindre une église).
Ce qui fait que la vie associative, les oeuvres caritatives et humanitaires, justement souvent organisées par les églises, sont beaucoup plus nombreuses qu'en France: on considère que la charité et l'entr'aide sont un devoir chrétien d'une part, et que d'autre part l'entr'aide doit venir des compatriotes et corelégionnaires, pas de l'Etat.
Cette place prépondérante accordée à l'initiative privée et à l'implication des églises dans la vie de leur communauté, c'est assez proche de ce qui devait exister en Europe au XIXème siècle, mais qui a presque disparu, suite au recul des religions en tant qu'instances de régulation sociale et à l'émergence de l'Etat providence.
Et on revient à ce qui a été dit plus haut: dans maints domaines, ce sont les Européens qui se sont éloignés de leurs racines et de leurs traditions, et les Américains qui , souvent, les ont conservées.