Daisuke a écrit :
Il me semblait que Michel Strogoff n'était qu'un personnage littéraire de Jules Verne ?!
C'est un personnage de fiction, mais Jules Verne n'écrivait pas de livre sans s'être documenté. Devant présenter son livre à l'ambassadeur de Russie, il ne devait pas y faire figurer choses trop anachroniques ou incroyables.
En l'occurrence, les révoltes de nomades contre la colonisation russe n'en étaient pas. Il y en eut de grandes, comme celle de Kenesary Khan au Kazakhstan entre 1841 et 1847.
Les descendants des peuples des steppes tentèrent encore de se libérer au XXe siècle, pour certains dès 1916 avec le mouvement Basmachi, d'autres en se joignant aux Blancs durant la guerre civile d'après 1917.
Marocain a écrit :
Montou a écrit :
[...] Ils n'étaient pas poussés comme pour les conquêtes arabes par le prosélitisme relligieux, ni par un changement climatique qui aurait perturbé leur mode de vie, alors quelle autre motivation que récupérer des richesses?
je pense qu'il doit en être de meme des conquêtes arabes; on parle de prosélytisme religieux, mais c'est surtout l'appat du butin qui motivait la conquête.
je pense que les invasions de nomades sur les civilisations sédentaires sont toujours motivés par un point: la recherche de richesse, mais ce sont des raisons démographiques et/ou climatiques/écologiques qui motivent ces conquêtes au départ.
Les Arabes ne sont pas tout-à-fait un peuple des steppes, même si la Syrie en est une. Mais je ne pense pas non plus que le zèle religieux explique leur conquête, parce que l'islam n'avait pas encore pris sa forme de religion universaliste qu'elle aura au temps des Abassides. Plusieurs sujets discutent de ce point ailleurs.
Pour en revenir aux rapports entre nomades et sédentaires, ils sont complexes, d'autant plus que la distinction entre les deux est souvent graduelle. Il est en effet courant que des nomades disposent de campements permanents, où les hordes se retrouvent périodiquement, et où vivent ceux qui parmi eux s'estiment trop faibles pour voyager. Les sédentaires fournissent aux nomades des métaux, des produits manufacturés et des céréales, les nomades fournissent de la viande et des chevaux. Beaucoup d'entre eux s'enrôlent dans les armées des sédentaires et peuvent aller jusqu'à fournir des contingents entiers de cavalerie. À Athènes, les Scythes sont employés pour faire la police. Des esclaves Turcs vendus par les leurs donneront aux Arabes leurs Mamelouks.
Mais il y a souvent compétition entre nomades et sédentaires pour l'utilisation des terres. Les nomades, spécialisés dans l'élevage extensif, ont besoin d'énormes étendues de terre, et voient d'un mauvais œil les sédentaires s'approprier les terrains. De plus, peuples guerriers, leurs chefs trouvent leur légitimité en organisant des expéditions qui ramènent de la nourriture et du butin à leur tribu. Plutôt que des chasses, des razzias chez les sédentaires est beaucoup plus lucratif, puisqu'il suffit de s'approprier les richesses que ces derniers ont amassés. Cela ne veut pas dire agresser tous les sédentaires en même temps : il en faut toujours pour racheter le butin et les esclaves capturés
Les nomades eux-mêmes se razzient aussi entre eux : chaque tête de bétail volé augmente d'autant le prestige de son propriétaire. De plus, là encore, l'espace où pâturer coûte cher.
Le niveau suivant est atteint lorsque les nomades cessent de penser seulement en terme de razzias, mais veulent passer à la conquête proprement dite. Cela survient quand d'une part, ils se sont familiarisé avec le fonctionnement de la société attaquée, souvent en servant dans son armée, et d'autre part, quand ils sont motivés pour se déplacer en masse dans de nouveaux habitats, qui ne leurs conviendront pas vraiment : montagnes, plaines à blé coupées de fleuves, marais... À cela, plutôt que des contraintes climatiques, je préfère l'explication politique : quand un chef est capable d'unifier les différentes tribus entre elles (Attila, Gengis Khan) il acquière une force de frappe gigantesque. Les tribus unifiées commencent alors à étendre leurs territoires de chasse et de pâturage, au détriment des autres tribus qui fuient, et agressent les sédentaires, ou s'agglomèrent à leur horde. Puis, la horde attaque les sédentaires, n'ayant plus à redouter des pertes, et peut en général les subjuguer, piller leurs villes, puis les rassembler dans un empire. Mais, trop peu nombreux pour peser sur leurs sujets, ils finissent par être absorbés par eux, adoptent leurs coutumes, tandis que leurs compagnons demeurés dans les steppes finissent par se disputer entre eux et retournent à leurs querelles intestines.