J'avoue, après avoir lu, que la question ne peut pas sembler très historique. Mais bon, pour y répondre, l'on peut aborder justement des exemples purement historiques. Qu'est-ce qui fait pour les Asiatiques du Bouddhisme une religion ? Et pour les Européens une philosophie ? Mais par repères occidentaux n'entendaient-ils pas ces vulgarisations (aucun sens péjoratif pour moi) comme parler de "dogme" (il y en a un normalement), ou que Bouddha est un Dieu unique (ce qui est fait, y a plein de bouddhas et à divers degrés^^).
Tenez, j'aimerai vous faire part d'une histoire que j'ai lu quand j'étais gosse, personnellement j'ai aimé. Elle est tirée de l'Histoire des Hommes, les Premiers Empires, Michel Tarride et Catherine Chadefaud, Casterman.
Citer :
Açonka, le Roi Bouddhiste.
Lorsqu'il monte sur le trône en 273 av. J.-C., Açoka, petit-fils de Chandragupta, ne manque pas d'expérience. Initié dès l'adolescence au métier de roi, il a déjà gouverné une province et maté une grave révolte. Si l'on en croit les chroniques bouddhiques, la violence ne l'effraie guère et, à la mort de son père, il fait massacrer tous ses frères et sœurs afin de saisir seul le pouvoir.
Açoka hérite d'un empire fort et bien organisé. Il cherche à l'étendre davantage en poursuivant la politique de conquête de son grand-père. En 251 av. J.-C., il prend la tête d'une expédition militaire contre le puissant royaume de Kalinga, sur la côté orientale de l'Inde. Les deux armées sont nombreuses et valeureuses, les affrontements sans merci. Au soir de la dernière bataille, près de cent mille cadavres jonchent la plaine... Pourtant victorieux, Açoka demeure bouleversé par les horreurs de cette guerre. Hanté par le remords, il se convertit au bouddhisme, se retire quelque temps dans un monastère et se rend en pèlerinage à l'arbre de la Bodhi, là où le Bouddha connut l'illumination. De retour dans sa capitale, il décide de racheter ses erreurs et de "substituer la victoire de la loi au règne de la violence".
Le luxe de la cour disparaît, les dépenses militaires sont réduites au strict nécessaire. Celui qu'on nomme désormais Derânampiya, "le bien-aimé des dieux", se consacre au bien du peuple : il fait creuser des puits dans les villages, fonde des hôpitaux, recrute des vétérinaires. Dans tout l'Empire, ses pensées et ses lois, gravées sur des piliers et des rochers, invitent les hommes à pratiquer les "grands principes de la loi naturelle" : dire la vérité, faire la charité, observer la pureté et le contrôle de soi, respecter la vie sous toutes ses formes. Açoka veut aussi adoucir la justice des hommes ; un sursis de trois jours est accordé au condamné à mort avant l'exécution, qui doit lui permettre de se préparer par le jeûne et l'aumône, et laisser à ses proches le temps d'intervenir en sa faveur.
Soucieux de donner l'exemple, le roi informe ses sujets de ses progrès personnels. Ainsi l'édit qui interdit les sacrifices d'animaux est-il accompagné de la précision suivante : "Autrefois, dans la cuisine du roi ami des dieux, chaque jour des milliers d'animaux étaient tués pour les repas ; mais maintenant, au moment où on grave ce texte de loi, on ne tue que trois animaux : deux paons et un chevreuil. Désormais, même ces trois animaux ne seront plus tués". Totalement dévoué au bouddhisme, Açoka crée une nouvelle catégorie de ministres, les Surintendants de la Loi, qui seront les "agents de la propagande et les protecteurs des fidèles". Mais contrairement à tant de souverains animés par le zèle religieux, il autorise toutes les autres croyances.
Açoka meurt en 236 av. J.-C. Au fil du temps, la légende s'empare du roi défunt et fait de son règne un "âge d'or" de l'humanité. La réalité impose la nuance. Aussi sincère que soient la foi d'Açoka et sa volonté de bâtir un empire sur la morale, il n'en met pas moins toutes ces "vertus" au service d'un désir de pouvoir sans partage. Son œuvre immense ne lui survit guère. Dès sa mort, l'Empire est partagé entre ses fils. Quant au bouddhisme, il ne retrouvera jamais en Inde la place prépondérante qui avait été la sienne sous le règne d'Açoka, le bien-aimé des dieux.
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Oui, j'ai pris le nom d'un meneur aïnou victorieux... vous vouliez que je m'appelle comment ?!?