Pour ce qui est de la relation entre raja indien et britannique. Je crois que le documentaire oublie de mentionner un élément de taille, la présence à la cour de chaque prince indien indépendant (raja hindou et nawbab musulman) d'un représentant britannique qui sert à la fois d'espions pour les Britanniques et de conseiller du souverain. Il s'assure souvent de l'éducation du prince héritier. La question de l'intégration des états princiers à l'Union indienne ne va pas de soit puisqu'à l'indépendance chaque prince avait trois possibilités: rejoindre l'Inde, le pakistan ou l'indépendance. Le maharaja du Cachemire avait choisi l'indépendance avant de se rallier à l'Inde pour répondre à l'invasion pakistanaise. L'intégration ne s'est faite qu'en 1950 si ma mémoire est bonne et ils ont conservé leurs rentes jusqu'à ce qu'Indira Gandhi les supprime pendant l'état d'urgence.
Les liens entre les maharajas et les Britanniques sont cordiaux parce que ce sont les Britanniques qui bien souvent tiennent le pays (même sous contrôle indirect) pour eux. Il y a aussi des institutions comme le Mayo College qui forme les fils de prince.
Pour ce qui est des annexions par Lord Dalhousie. Il a tombé les masques parce qu'il les a multiplié et a exprimé pour la première fois ce principe qui était déjà mis en application avant. Les Britanniques avaient des traités avec les Indiens dont ils ne respectaient pas toujours les closes comme la reconnaissance d'un héritier adoptif. Les souverains indiens envoient des délégations à Londres pour essayer de faire reconnaître leur droit. Les exemples les plus connus sont l'annexion de l'Awadh (proncé Oudh) en 1856 et la non-reconnaissance de l'héritier de Jhansi à peu près à la même époque. La reine de Jhansi est une figure mythique importante de l'histoire de l'Inde. C'est la Jeanne d'Arc locale sauf qu'elle n'a pas entendu de voix et qu'elle n'a pas bouté les Anglais. A ce sujet, un très beau roman de catherine Clément: "la reine des cipayes". Sur la conquête de l'Awadh, le film de Satyajit Ray, shatranj ki khilari, les joueurs d'échecs représente bien comment l'épisode est perçu par les Indiens aujourd'hui. L'Avadh est un gros royaume qui correspond peu ou prou à l'actuel Uttar Pradesh.
Le racisme n'a pas toujours été très fort entre Indiens et Britanniques. Les élites bengalies au début du XIX° siècle voient d'un très bon oeil la colonisation britannique et ils souhaitent même la colonisation effective, par le peuplement, des campagnes indiennes, interdites jusqu'en 1833 aux Britanniques. (Texte de Rammohan Roy, discours de Dwarkanath Tagore) Les premiers administrateurs Britanniques prennent souvent des femmes indiennes (Cf. "Le moghol blanc" de William Dalrymple, un roman historique très particulier avec des extraits de documents historiques) et ils vivent à l'indienne d'où l’appellation moghol blanc.
Gandhi était pour le maintient de la caste mais contre la discrimination lié à la caste.
Le terme caste n'existe pas dans les langues indiennes. On parle du moins dans les langues du nord de
Jati le groupe de naissance. Les textes normatifs hindous ne parlent pas de
jati mais de
varna, la couleur.
Le texte de référence en la matière est un extrait du rigveda décrivant le sacrifice de l'homme (purush).
http://en.wikisource.org/wiki/The_Rig_V ... 10/Hymn_90De la tête de cet homme est sorti le brahmane, de ses bras sont sortis les kshatriyas(guerriers, princes), de ses hanches les vaishyas (commerçants) et de ses pieds les shudras (serviteurs).
Les lois de manu, des textes normatifs hindous plus tardifs disent très clairement "il n'y a pas de cinquième varnas".
Je vous passe les détails sur les mariages mais il pouvait arriver que des enfants issus de mariage inter-caste (possible chez manu si ce n'est pas la première femme) sont des chandelas, des mélangés et qu'ils sont d'un statut encore plus bas que les shudras.
L'intouchabilité est une question de pureté rituelle avant tout. L'intouchable est celui qui est rituellement trop sale et qu'on ne peut fréquenter sans craindre de perdre sa caste. Je reprends les 4 varnas cité plus haut. Les trois premières sont dites pures car elles ont accès à la connaissance: les védas et sont deux fois nés (physiquement par la naissance et spirituellement par la lecture des védas). Les shudras sont impures. Les jatis shudras les plus hautes sont cependant touchables. Les jatis les plus basses sont intouchables. Il y a bien un terme dans les langues vernaculaires pour ça mais pas en sanskrit. L'intouchabilité rime souvent avec pauvreté mais par exemple la caste qui s'occupe des crémations est très riche car ils vendent le bois pour la crémation.
Gandhi était un réformateur religieux et était pour un maintien de la caste mais contre la discrimination liée à la caste dans la société qui pour lui n'était pas présente dans les textes sacrés. Il a milité pour l'ouverture des temples hindous aux intouchables qui avant n'avaient pas le droit d'y entrer ni même de passer sur les routes y conduisant. Les femmes intouchables n'avaient pas le droit de porter de blouse sous leurs saris (l'équivalent du soutien gorge).
Gandhi est devenu très actif contre ces discriminations dans les années 1930 quand il était question de donner un électorat séparé aux musulmans et aux intouchables. Cela aurait numériquement affaibli les hindous. Il était proposé de ne retenir comme hindous que quelqu'un qui rend un culte à une grande divinité du panthéon hindou. Ce qui aurait réduit la part de la population hindoue à 30% des Indiens.
Ambedkar s'est opposé à la lecture de Gandhi et lui considère que les discriminations à l'encontre des intouchables sont constitutives de l'hindouisme et il décide de ne pas mourir hindou. Après avoir envisagé un temps la conversion à l'Islam ou au Christianisme, il se convertit finalement au Bouddhisme. La conversion au Christianisme ou à l'Islam aurait été vu comme une tentative de dénationalisation des intouchables (ce sont deux religions nées hors de l'Inde). Le bouddhisme est perçu comme une forme d'hindouisme d'ailleurs, ils se marient selon le droit hindou. (En Inde, on se marie suivant le droit personnel de sa religion : hindou, musulman ou chrétien).
La constitution indienne interdit toute discrimination liée à la caste mais pas la caste elle-même. En effet, comment interdire une pratique sociologique aussi forte. Il y a des conseils de castes dont certains comme les panchayats khap sont encore très influents. Par contre, en Inde, on n'est pas obligé d'avoir un nom de famille qui indiquerait la caste, la région d'origine et la religion. Le prénom suffit et il faut donner le prénom de son père.