Avec un nom évoquant les Aventures de Tintin ou les 55jours de Pékin, la secte du Lotus Blanc, le Bailian, est à l’origine de la première grande rébellion chinoise. Cette société secrète, dont les racines plongent dans les profondeurs du XIVe siècle, figure parmi les groupes religieux les plus puissants qu’ait connus l’Empire du Milieu. Elle prend une ampleur considérable à la fin du XVIIIe siècle au moment où la Chine sort de son âge d’or. Après une période de prospérité et de paix, la dynastie Qing doit affronter une série de crises économiques et sociales. Des troubles graves éclatent, et la secte du Lotus Blanc, que dirige un petit fonctionnaire adepte du kung-fu, Wang Lun, fera chanceler le pouvoir mandchou.
Ce mouvement de grande ampleur est né dans la vallée du Yangsté, au cœur de la Chine Han (l’ethnie majoritaire, en Chine, les Chinois proprement dits). «Il s’agit typiquement d’une secte messianique, avec la croyance en un sauveur du monde et un message baignant dans un synchrétisme de taoïsme et de bouddhisme, agrémenté d’éléments de manichéisme», poursuit Yves Chevrier. Des éléments semblables à ceux que l’on retrouve en filigrane dans le mouvement Falun gong, puisque Li Hongzhi se présente comme un sauveur du monde. Comme pour le Lotus Blanc, il développe une méthode mystico-religieuse aux accents d’apocalypse ou l’on trouve, mêlées, décadence morale de l’humanité, destruction imminente du monde, le tout sur fond de taoïsme et de bouddhisme avec des références constantes à la Blancheur et la Noirceur…
De 1795 à 1803, les activités du Lotus Blanc engendrent elles aussi une formidable répression. Une répression qui, en fin de compte, cristallise le mouvement. Il faudra plusieurs années pour en venir à bout… Mais l’éradication de la secte ne sera que partielle, car renaissant de ses cendres, tel un phénix, surgira moins d’un siècle plus tard, la secte des Boxers– en français, les Boxeurs.
Marco Polo dans ses voyages à la fin du XIIIe siècle, découvre encore des manichéens au sud de la Chine (Zaitoun). Au début du XXe siècle, on prétend que la vénération de Mani est attestée dans certaines inscriptions de temples chinois, même si l'existence de l'Eglise manichéenne des origines n'est plus attestée historiquement depuis plusieurs siècles.
Leur présence est encore attestée dans un temple bouddhiste au XVIle siècle grâce à la description qu'en fait un érudit chinois dont S.N.C.L. donne une traduction anglaise, après celles de Pelliot et Bisson. Dans ce temple, retrouvé au XXe siècle. est encore conservée une statue de Mani Bouddha qui représente l'un des rares vestiges de l'expansion des manichéens sous les Mongols, alors que la religion manichéenne avait été sévèrement persécutée sous la dynastie des Song.
Sur le manichéisme en Chine voir LIEU, S. N. C., Manichaeism in Central Asia and China, Leiden, Boston, Brill, 1998, xiii-258p.
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