Dans le genre des nanars historiques, on a déjà beaucoup donné. Ce film a la vertu d'entrer dans la catégorie moins courue du nanar préhistorique.
10 000 est un film de Roland Emmerich, inoubliable réalisateur de films catastrophes qui réalise un film catastrophique.
Ceci dit, j'ai passé un excellent moment de détente au cinéma, où j'ai pu vraiment bien rire à de multiples reprises alors je ne cracherai pas dans la soupe: c'est très drôle! Involontairement, mais tout de même!
Les 25 premières minutes sont plutôt bonnes. On assiste à la vie d'un petit campement de chasseurs-cueilleurs nettement paléolithiques, perdu dans une haute montagne quelconque. J'ignore la crédibilité de tout cela: vie en altitude élevée, méthode de chasse au mammouth douteuse, etc... mais si l'on passe sur leurs cheveux de rasta et leurs dents trop blanches pour être honnêtes, c'est un bon début. Une scène spectaculaire de chasse au mammouth est là pour montrer que le réalisateur s'y connait en effets spéciaux plutôt réussis, et le scénario aurait même tendance à décoller quand le tueur (accidentel) de mammouth devient chef mais qu'il a du remords de devenir chef sans avoir vraiment été courageux mais en bénéficiant d'un heureux concours de circonstances. Bref, c'est une
Guerre du feu à l'américaine qui démarre, mais bon, ça pourrait être pire se dit-on.
Et en effet, ça le devient! Une horde de on-ne-sait-pas-trop-quoi débarquent sur leurs chevaux, dévastent le village, tuent des gens, emportent les autres en esclavage, sauf bien sûr les malins qui s'étaient judicieusement planqués et qui vont, comme de juste, suivre la trace des ravisseurs de leurs enfants, femmes et amis. Tout le scénario est ainsi cousu de fil blanc: le couple séparé par le coup du sort, le garçon dont la maman a été tuée par les méchants et qui va aller devenir un grand guerrier pour se venger et s'accomplir, la quête iniatique pour rendre le héros digne d'être chef, des méchants sans nuance.
Bref, le groupe de pieds-nickelés du paléolithique suit les traces des méchants ravisseurs. Ils traversent leurs belles et looooongues montagnes bien blanches et froide avant d'arriver... dans une jungle tout à fait tropicale! eh oui, c'est ainsi à Hollywood, on a des notions de géographie assez floues... Là, combats contre des oiseaux gigantesques de type
Phorusrhacos (disparu depuis environ 200 000 à 300 000 ans quand est censée se dérouler l'action du film, mais qu'importe), contre un tigre à dents de sabre auquel le héros sauve la vie et devinez quoi? le bestiau renonce à en faire son quatre heures et le sauvera à son tour ensuite. Mais de toute façon, il disparaîtra par la suite rapidement, du film comme de la vérité historique.
Sortis de la jungle humide nos héros arrivent dans... une sorte de savane africaine, peuplée d'Africains biens noirs dans leurs jolies cases de terre cuite, puis ils parviennent après quelques péripéties dans un désert de sable, dunaire au possible. Où ils se paument évidemment comme des boulets avant de se retrouver grâce à notre bonne vieille étoile du Nord ou une astuce de ce genre.
Et là, le bouquet final! Ils découvrent, le long de la rive d'un grand fleuve (le Nil?), la civilisation des ravisseurs, très occupée à exploiter ses nouveaux esclaves pour leur faire construire une pyramide (ouf, on est en Egypte cette fois c'est sûr). Malgré quelques bâtiments d'aspect indéterminés mais plutôt de type mésopotamiens, on se dit qu'on est en Egypte et l'on est ravi de voir que finalement, nous étions mauvaises langues! En effet, le réalisateur n'est pas si nul, il est même à la pointe de l'historiographie et nous livre enfin le secret, le mystère des pyramides et de leurs constructions! Vous pensiez, comme tous les niais archéologues, que des systèmes d'échafaudages, de rampes diverses et variées, de poulies, de rondins de bois ou autres avaient aidé les esclaves à réaliser ces merveilles? Vous étiez si naïfs! Je ne vous fait pas languir plus longtemps avant de vous apporter l'éclairante réponse d'Emmerich: Les Egyptiens avaient domestiqué des mammouths pour trainer leurs grosses pierres! Je passerai également sur leurs prêtres égyptiens qu'on dirait par moment évadés de la cage aux folles et à d'autres d'Iznogoud (pour le côté machiavélique oriental). Je passerai aussi sur l'aspect curieux de Pharaon. Là, vous dites vous, c'est fini, le réalisateur n'a définitivement aucune crédibilité avec des Egyptiens qui cohabitent avec des chasseurs-cueilleurs! Mais vous n'avez donc rien compris! Un esclave le dit rapidement: ils sont venus ici quand leur pays est tombé sous la mer! Ce sont des Atlantes, bande de bourricots incultes que nous étions!
Je passe également sur la fin de l'histoire, insoutenable de suspense, pour ne pas dévoiler le fin de mot de l'histoire. Je pense quand même ne surprendre personne si je signale que tout finit bien?
Ah oui, encore une chose, dans l'exaltation du
happy end final, quand les gentils chasseurs blancs et velus disent au revoir à leurs gentils alliés noirs, ceux-ci leur offre l'occasion de changer de vie en devenant non plus des chasseurs mais des agriculteurs! Oui mesdames et messieurs, sous nos yeux ébahis, on assiste en direct au passage au néolithique d'un peuple! Et cela grâce à une graine formidable, le... maïs!
N'en jetez plus, envoyez le générique. J'espère que ceux qui l'ont vu se sont autant amusé et que personne n'a pris au sérieux la moindre scène de ce divertissant objet filmique.