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Message Publié : 21 Juil 2008 11:55 
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Polybe
Polybe
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Inscription : 21 Juil 2008 11:44
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Bonjour,

Je viens de finir un livre que j’ai trouvé passionnant : Hannon et l’Empire punique de J.G. Demerliac et J. Meirat aux éditions “Les Belles Lettres”, assez vieux puisqu’il a été édité en 1983.

L’Annexe I, traitant la navigation des bâtiments phéniciens, insiste sur l’utilisation assez fréquente d’une navigation au plus près avec des voiles carrées chez les civilisations de l’Antiquité. Ils abordent différentes techniques qui facilitent l’opération, comme de jouer sur le centre de voilure ou le centre de dérive par rapport au centre de gravité du bâtiment, deux méthodes qui peuvent être utilisées concuremment pour faciliter la navigation au plus près.

L’une des méthodes abordées m’a intriguée. Voici un extrait :
“ On peut encore déplacer le centre de dérive en modifiant les lignes d’eau du navire, c’est-à-dire en effectuant à bord un mouvement de poids, dans le but d’élever ou d’abaisser soit l’avant, soit l’arrière. Et à ce sujet, osons proposer une interprétation d’un détail insolite de la peinture thébaine précitée (décoration d’une tombe thébaine du XVIIe av.JC représentant les navires de la Reine Hatshepsit, photo Musée de la Marine). Sur chacun des bâtiments qui y figurent, on remarque une grosse jarre saisie contre le prolongement vertical de l’étrave. (...) Supposons donc que cette jarre soit ouverte à sa partie inférieure, et reliée par une manche en toile à une jarre identique située à l’extrême arrière, mais invisible sur cette peinture thébaine parceque placée plus bas et cachée par la coque. On se trouverait ainsi en présence d’un dispositif très simple permettant de faire varier l’assiette du navire. A la mer, les deux jarres sont au même niveau, et abritées dans la coque. Supposons-les à demi pleines d’eau. Si l’on veut venir au plus près, il faut rendre le navire ardent, dont enfoncer son avant. Il suffira de faire passer de l’eau de la jarre de la poupe à celle de l’étave, en utilisant les mouvements du tangage et en étranglant la manche par un moyen quelconque pour empêcher l’eau de revenir en arrière. Il va de soi qu’on ferait la manoeuvre inverse si l’on voulait marcher à une allure portante. Supposons à présent qu’étant entré au port on désire s’échouer par l’avant et mettre à terre la planche de débarquement, ce qui est précisement le cas sur la peinture thébaine. Il est nécessaire de déjauger, de relever l’avant pour le faire avancer le plus haut possible sur le rivage, et donc de faire passer toute l’eau de la jarre d’étrave dans celle de poupe ; mais comme en eau calme on ne peut pas compter sur le tangage, le moyen le plus simple est de surélever la jarre avant, qui se videra en vertu du principe des vases communicants, et de la saisir en position haute pour éviter qu’une fuite intempestive venant de l’arrière ne la remplisse hors de propos. De ce fait elle deviendra visible, et dans la position même que montre la peinture de la tombe thébaine.
(...) Remarquons en outre qu’un tel dispositif ne serait pas seulement très simple : il serait très efficace. Les navires des modèles les plus courants de l’Antiquité étaient de médiocre tonnage, et le transvasement d’une centainre de littre d’une extrémité à l’autre aurait eu un effet très sensible sur leur assiette.”


Juste après :
“(...) l’archéologie sous-marine pourrait fournir un argument en la faveur de cette hypotèse. Sur l’épave romaine du Grand Congloué, on remarque que tous les couples sont percés à leur partie inférieure d’une ouverture circulaire. Ces trous sont aligné, et ne peuvent être confondus avec les aiguillers (pour le passage des eaux de cale dans le drain), lesquels sont parfaitement visibles, à côté. Nous sommes tentés d’y voir la trace du passage d’une manche, qui se justifierait sir le navire avait été doté d’un système de contrôle de son assiette analogue à celui que nous avons proposé”

Quelqun a-t-il des informations sur cette technique ? La trouvez-vous plausible ? As-t-on fait des découvertes validant ou pas cette hypotèse, notemment sur l’épave du Grand Congloué ?

Merci pour tout renseignement :wink:

Cordialement - Flocon

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Message Publié : 24 Oct 2008 11:43 
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Inscription : 24 Oct 2008 9:50
Message(s) : 1
Cher (Chère) Flocon,
Je n'ai malheureusement pas grand temps pour vous répondre, tout du moins quelques secondes....
... Pour corriger certaines hypothèses ignorantes des messieurs Demerliac et Meirat.

Si leur idée du déplacement du centre de gravité du navire afin d'en modifier l'assiette et par là les lignes de la carène, est envisageable, et effectivement mise en pratique sur certaines unités modernes. Il n'en demeure pas moins que certaines de leurs assertions, ainsi que le bon sens laissent présager que leur hypothèses sont bien fantaisistes.....

1- A propos du Grand Congloué: ces épaves (et non « cette » vu qu'il y en a bien deux différentes), du point de vue strict de l'archéologie navale (à ne pas confondre avec l'archéologie sous-marine ou subaquatique qui ne sont finalement que des méthodes) sont malheureusement à considérer comme des néants complets d'informations, la faute reposant sur le balbutiement des méthodes de fouille en milieux immergés et sur l'inexpérience d'archéologues tel que M. Fernand Benoit dans l'approche de l'architecture navale romaine. Considérant alors que sur l'ensemble des épaves antiques fouillées convenablement (et ce déjà en 1983) et publiées par les archéologues français, le fait de prendre la seule épave (je pense qu'il font référence à l'épave la plus tardive chargées de Dressel 1) du Grand congloué comme exemple, est déjà un signe d'incompétence notoire (Citons ainsi parmi l'immensité des possibles: la Madrague de Giens, mais encore Port-Vendre I, les Laurons II ou encore les épaves de la Chrétienne...).

2- Et quand bien même????.....Et bien, concernant les trous d'anguiller: Nombreux sont les exemples sur les épaves antiques d'une présence de deux trous d'anguiller symétriquement placés sur les cans des membrures de part et d'autre de l'axe de quille...Encore une fois je ne peut que vous conseiller d'aller voir dans les ouvrages courants sur l'archéologie navale (Revues Archaeonautica, les cahiers d'archéologie subaquatique, les suppléments de Gallia traitant d'archéo navale) pour comprendre l'usage fait de ces ouvertures ... De croire qu'une manche pouvait y passer... relève encore une fois de l'ignorance...

3- Et quand bien même???...Et bien sur le tonnage des navires de commerce romains (ainsi que grecs selon moi...) une réflexion peut-etre faite: sur l'assertion «  Les navires des modèles les plus courants de l’Antiquité étaient de médiocre tonnage » repose toute la problématique.... D'un côté il est vrai que le nombre des petites unités était plus important que le nombre des moyennes et des grandes unités...L'assertion sur ce point est tout à fait juste.
Toutefois, comme on peut le voir sur le papyrus Bingen (Voir dans Arnaud, 2005, Les routes de la Méditerranée antique) l'importance commerciale (en terme de tonnage, et donc de puissance commerciale) de l'ensemble cumulé des tonnages des petits navires devait sans aucun doute être négligeable par rapport au tonnage d'une seule unité de grand, et même de moyen, tonnage.
Du coup, je sens que la question va être posée, la question importante: comment quantifier les tonnages antiques. Le problème est complexe, et selon moi bien plus anarchique qu'un simple classement. Cependant une grande esquisse peut -etre réalisée:
Petite tonnages: moins de 70 tonnes de port en lourd (qui peuvent porter effectivement 70 tonnes de marchandises)
Moyens tonnages: entre 70 et 200 tonnes de port en lourd
Grands tonnages: entre 200 et 400 tonnes de port en lourd
Tonnages exceptionnels: au delà de 400 tonnes....

Pour les évidences archéologiques les plus notoires: la Madrague de Giens présente ainsi un tonnage compris entre 315 et 450 tonnes de port en lourd (voir: Pomey, Tchernia 1978, Le navire de la Madrague de Giens, dans les supp. À Gallia, ou encore Le tonnage maximum de navires de commerces romains, dans le n° 2 en 1978 d'Archaeonautica), le navire d'albenga (bien que massacré à l'image de ceux du Grand Congloué) devait présenter quant à lui un port en lourd sensiblement supérieur, aux alentours de 500 tonnes métriques. Bref les tonnages « médiocres » sont loin d'êtres exclusif...Reste à savoir ce que les auteurs entendent par « médiocres ».
Si ce sont des barques de moins de 10 tonnes de port en lourd...déplacer 100 littres vers une extrémité le fera peut-être un tant soit peu piquer du nez (et encore, sur un voilier ayant un déplacement de 8 tonnes, mesurant douze mètres, le déplacement d'un équipier de 95 kilos sur le bout-dehors à l'extrémité avant, par mer plate (au port) ne le fait s'enfoncer que de quelques centimètres (je dirai trois quatre ...mais je ne vois le phénomène que du dessus généralement).
Au delà de cette limite, pour des navires de 15 mètres présentant un port en lourd de plus de 15 tonnes métriques....
Déplacer une charge de cent kilo vers l'avant ne serait que pure fatigue: par comparaison: un navire de commerce romain que je connais bien, le navire Dramont E (cf. Santamaria 1995, Archaeonautica n°13) mesurant un peu plus de 13.8 hors-tout, et présentant un port-en-lourd compris dans une fourchette 30-40 tonnes, devait quand à lui transporter plus de 400 amphores pesant en moyenne chacune plus de 40 kilo.....On imagine mal comment deux ou trois amphores placées vers l'avant puissent alors changer considérablement les lignes des œuvres vives du navires...


Pour ce qui est de la question de remonter au vent... ma foi...Bienvenue celui qui pourrait en parler avec assurance pour la période antique...il semble acquit que la voile carré par le jeu des cargues et par l'inclinaison de la vergue devait prendre le profil d'une voile latine....permettant de mieux remonter au vent.
Toutefois l'essentiel de la question repose sur cela: cherchait-on alors a remonter véritablement au vent????
Le récit d'un voyage de Chateaubriand au XIX en Méditerranée est éloquent sur la manière que l'on avait « avant » de naviguer sans (pouvoir ou vouloir) lutter irrationnellement contre les éléments....En attendant son heure et les vents plus favorable...

J'espère que ma réponse vous aura un peu éclairée. Je ne peux sinon que vous conseiller le report à L'ouvrage de Patrice POMEY et Eric REITH: L'archéologie navale, paru en 2005 aux éditions Erance qui fait état de référence à ce jour en la matière.
Et concernant la navigation, à celui cité précédemment: Pascal Arnaud, Les routes de la navigation antique, paru aux mêmes éditions, toujours en 2005


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