Voici un lien vers un résumé assez bon sur la question du problème écologique soulevé (ou non) par l'île de Pâques :
http://ngm.nationalgeographic.com/2012/07/easter-island/bloch-text?source=news_easter_island_storyPour apporter quelques remarques que l'article semble ne pas prendre en compte, l'idée que Hunt et Lipo retiennent par rapport à un peuplement à partir de 1200 de notre ère dans l'île de Pâques n'est pas aussi révolutionnaire et simpliste qu'elle en a l'air : en réalité, elle vient d'une absence de lecture attentive (ou dénuée d'idéologie ?). Le peuplement de l'île, d'après les récentes recherches, débute entre 800 et 1000 ap. J.-C. ; or, les premiers
moai prévus pour être déplacés n'apparaissent qu'au XIIème siècle, supplantant l'ancienne statuaire plus traditionnelle comme la statue
Tukuturi : l'idée de Hunt et de Lipo n'est pas exactement que l'île de Pâques n'aurait été peuplée qu'à partir de ce moment, mais bien que si les
moai sont la cause d'une déforestation massive (qui aurait entraînée une catastrophe écologique, comme semble vouloir à tout prix le montrer National Geographic - ce qui n'est pas surprenant venant de cet organisme), il aurait fallu qu'on commençât à les bâtir bien avant. Or il n'en est rien et l'étude des 33 000 charbons de bois trouvés dans les foyers de l'île montre que le bois n'était presque plus utilisé comme combustible à partir de la deuxième moitié du XVIIème siècle : C. Orliac estime par ailleurs vraisemblablement que les causes de cette disparition de la végétation abondante ne serait pas le fait des populations insulaires mais plutôt d'une sécheresse prolongée. L'hypothèse d'une déforestation due aux
moai est donc peu plausible - contrairement à la façon dont l'article présente les choses.
Bien que tout ne soit pas tout à fait exact et qu'il y ait de nombreux raccourcis dans cet article, l'idée qui m'intéresse ici (et c'est la raison de l'endroit où je publie ce post, la modération pourra toujours le changer de place s'il y a lieu) concerne la technique employée par les Pascuans pour déplacer les
moai depuis leurs alvéoles volcaniques jusqu'aux
ahu de l'île : les chercheurs Terry Hunt et Carl Lipo ont tenté une expérience avec une réplique (mais est-elle aussi en tuf ?) pesant 3 tonnes en la déplaçant avec seulement 18 personnes. La statue donne ainsi l'impression de se "dandiner" à travers toute l'île puisqu'elle est acheminée vers son
ahu en position verticale et non horizontale. Ceci ferait écho à une légende orale locale qui rapporte que le chef
Tuu Ko Ihu, le dieu
Make Make ou les prêtres, investis d'une
mana, ordonnaient aux statues de "marcher" jusqu'à leurs
ahu.
La question est intéressante car elle permettrait de résoudre en grande partie les incertitudes autour des techniques maîtrisées par les Pascuans mais je m'interroge ici sur la fiabilité d'une telle méthode : tout d'abord, un
moai en tuf serait-il capable de supporter sans problème un tel mode de déplacement - le tuf étant une roche certes légère mais également très fragile ? à quelles conditions donc la démonstration de Hunt et de Lipo est-elle satisfaisante (et c'est la question qu'a soulevé M. Orliac en faisant remarquer que ce qu'il y avait d'étonnant résidait moins dans le déplacement des statues que dans les précautions qu'il nécessitait) ? Ensuite, si l'expérience a démontré sa possibilité concernant un poids de 3 tonnes, quid des
moai de 82 tonnes (je pense à celle de l'
ahu Te Pito Te Kura) et de 10 mètres (j'exclue cependant cette hypothèse concernant le moai encore dans son alvéole mesurant près de 20 mètres et pesant plus de 130 tonnes et je préfère me ranger à l'idée de M. Orliac sur une sorte de pétroglyphe gigantesque, un peu comme nos gisants de cathédrale) ? Enfin, dans l'histoire plus générale des techniques, a-t-on des informations sur des méthodes similaires de déplacement dans le reste du monde ?