Yughurtha a écrit :
[...] j'ai trouvé cet extrait d'une étude d'Edward Rosen sur les œuvres mineurs de Copernic.[...]
Merci pour cet extrait. Je ne savais pas que c'était disponible sur internet. Je suppose que vous l'avez trouvé à
http://copernicus.torun.pl/en/archives/ ... trative/2/ . Je vois ce même texte, avec des petites différences et des notes, dans le livre d'Edward Rosen,
Nicholas Copernicus, Complete Works, Minor Works, The John Hopkins University Press, 1985, 1992, pages 224 à 227.
Personnellement, j'aime beaucoup les études d'Edward Rosen (1906-1985), parce qu'il était très pointilleux, et parce qu'il comprenait bien l'esprit de l'époque et de la région.
jovien a écrit :
4° Que se serait-il passé si l'évêque de Varmie s'était converti au protestantisme et y avait entraîné ses ouailles? Aurait pu se faire comte ou duc de Varmie et aurait-il pu la transmettre à sa famille ? Ou bien est-ce qu'elle aurait probablement été administrée par un représentant laïc du roi de Pologne ? Ou bien aurait-elle probablement été intégrée au duché de Prusse ?
C'était une éventualité très improbable pour deux raisons.
a) L'évêque de Warmie n'était pas choisi de la même manière que ceux de la Prusse des Chevaliers Teutoniques et que ceux d'autres endroits qui sont passés au protestantisme.
Le roi de Pologne envoyait au pape une liste de trois ou quatre candidats, et le pape prenait généralement le premier de la liste. Donc, la présélection jouait un rôle prépondérant. Le roi de Pologne et son entourage faisaient très attention à ne sélectionner que des candidats ayant des idées proches des leurs. La Pologne avait déjà connu des tentatives de réforme religieuse, notamment par le Tchèque Jan Hus (c. 1369-1415) qui avait réussi à avoir un certain nombre de fidèles en Pologne. Les rois de Pologne, Alexandre Ier (1461-1506), puis Sigismond Ier (1467-1548) souhaitaient éviter les divisons religieuses. De plus Sigismond 1er avait épousé l'italienne Bona Sforza en 1518 qui l'avait probablement incité à se rapprocher ou à rester du côté de l'Italie et du catholicisme romain. Les évêques de Warmie, choisis dans la première moitié du XVIe siècle, furent :
- Lucas Watzenrode en 1489, l'oncle de Copernic, qui était proche de la cour polonaise à qui il devait son ascension, et admirateur de la renaissance italienne
- Fabian von Lossainen en 1512, un conservateur modéré
- Maurice Ferber en 1523, un conservateur modéré
- Johannes Dantiscus en 1537, un poète bourgeois, qui avait passé trois bonnes journées à Wittemberg à l'invitation de Luther, mais qui aimait trop le faste pour devenir protestant
- Tiedeman Giese en 1549, un homme très intelligent et ouvert aux idées nouvelles, mais trop modéré pour faire une révolution
- Stanislas Hosius en 1551, un catholique très conservateur, qui a pris des mesures contre "l'hérésie"
b) Le peuple de la Warmie avait des opinions politiques et religieuses plus proches de celles des catholiques polonais que de celles des réformateurs germaniques. La Warmie était une région essentiellement rurale, sans grande ville, alors que la Prusse Teutonique avait une bonne partie de sa population dans les villes de Danzig/Gdansk, Elbing/Elblag, Marienburg/Malbork, Brausnberg/Braniewo, et Königsberg/Kaliningrad. Les habitants des zones urbaines sont toujours plus attirés par les nouvelles idéologies que les habitants des campagnes. De plus, la Warmie avait connu une immigration de Polonais venant du sud, recherchant des terres agricoles à exploiter, alors que la Prusse des Chevaliers Teutoniques avait connu une immigration d'Allemands venant de l'ouest, de Scandinaves venant du nord, et même de quelques Hollandais.
Donc, les efforts de Luther et de ses partisans à Wittemberg furent vains pour convertir la Warmie.