Je reviens sur le sujet ouvert par Skipp le 20/11/07 et sur la relation entre le reggae et Hailé Sélassié.

La musique reggae a pour fondement le ras tafari, autre nom du Négus, roi d'Ethipie Haile Selassie.

Le point de départ est un prédiction de Marcus Garvey, prêcheur jamaïcain (il aura plus tard une grande influence sur la pensée de Malcolm X). Ce dernier a finalement transposé l'exode et le retour à la Terre promise aux Noirs des Amériques, descendant d'esclaves. Le point centrale du rastafarisme est le retour en Afrique.

Marcus Garvey a annoncé le règne prochain d'un roi africain. Or peu de temps après, Hailé Sélassié accédait au pouvoir.

La croyance d'un dieu vivant, d'un Christ ressucité en la personne d'Hailé Selassié sera le leitmotiv des paroles des chanteurs de Reggae (Burning Spear, Steel Pulse et bien sûr les wailers ("almighty Gos is a living man")

Le mouvement rastafari associe donc une lecture libre de la bible, une recherche mysthique de la terre promise avec une sorte de "thélogie protestante" de la libération par la dénonciation de Babylon (notion ambigüe évoquant tant les puissances colonisatrices, l'Occident, la finance mondiale, les politiciens, voire l'homme blanc).

Au delà de tout mysticisme, ma question concerne la personnalité d'Hailé Selassié : les renseignements que j'ai pu glaner le dépeigne de trois manières contradictoires : le monarque juste, soucieux de l'intérêt de son peuple, le tyran capricieux avide d'un faste ersatz de celui de l'occident ou le roitelet manipulé par les puissances coloniales lorgnant sur ce pays jamais colonosé jusqu'alors (Le Royaume-Uni et l'Italie mussolinienne).

Auriez-vous des élémnents de réponse ?

Bonjour,

Bon, je ne suis pas du tout spécialiste de la question (je dirais même complètement néophyte! ), mais votre message m'a fait m'intéresser au sujet. De ce qui ressort de mes lectures, aucun des trois portraits (assez caricaturaux) de Selassié que vous citez ne convient réellement.
Premièrement, malheureusement, un "monarque juste, soucieux de l'intérêt de son peuple" ça n'a jamais existé (enfin il me semble )... Selassié était un homme comme les autres, une fois le pouvoir entre ses mains, il lutta pour le conserver...
Il n'était certainement pas manipulé par les occidentaux, ou tout du moins pas à son insu (les manipulés sont parfois les plus grands manipulateurs). Il avait apparemment de réelles relations, franches et amicales avec Roosevelt ce qui lui permis d'obtenir l'entrée de l'Ethiopie à l'ONU dès sa création (l'Ethiopie était déjà membre de la SDN depuis 1923). Enfin, il apparaît comme assez moderniste, supprimant l'esclavage en 1918 et 1923. Son renversement semble être plus lié à des facteurs conjoncturels de crise, bien que allié à l'occident il s'opposait à certains pays africains, ce qui ne plaisait pas à tout le monde...

Voilà, je ne peux plus ajouter grand chose...
Espérons que ce sujet réveillera le forum...désespérément vide

L'incarnation de Jah, qu'il représentait pour les rastas, n'était d'ailleurs pas vraiment du goût de l'empereur mais il est vrai que les critères qui en ont fait l'icône involontaire de ce mouvement étaient nombreux (historiques, politiques, religieux,...)

Sujet intéressant, il mérite le détour.

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Attila fit assassiner Bleda pour devenir l'hunnique empereur.

"Live At The Counter Eurovision", de Misty In Roots.

Je n'étais pas amateur spécialement de reggae, jusqu'à avoir écouté cet album, qui est une sorte de petit miracle.

Je dépoussière un vieux tiroir mais bon,
Le sujet mérite le détour, quelque mois finalement, c'est rien

Je vous conseille la biographie d' Hailé Selassié, par Gontrand de Juniac.
Très pertinente, cette biographie aborde peu le thème de ce sujet, mais elle y fait allusions dans quelques passages.
Ceux-ci laissent entrevoir que l' attitude du souverain est assez mitigée vis à vis de ces "fanatiques" de l'autre bout de l'océan.
Quelques petites anecdotes, par exemple il n'adhérait pas à tous les principes des "Rastafariens", il interdit les dread-locks dans les écoles qu'il à fait construire en Jamaïque, il semble avoir considéré, selon de Juniac qu'il ne souhaitait pas "l'arrivée en terre Éthiopienne d'une bande de fainéants qui ne paie pas ses impôts et qui passe son temps à fumer de la ganja"
Tout ceci est bien sur à prendre avec beaucoup de précautions, la biographie se basant uniquement sur des faits politiques de la vie de Sélassié, et ne s'intéresse peu voir pas du tout au coté spirituel.
Mais certaines choses font penser qu' Hailé Sélassié n'a pas pleinement pris conscience pendant son règne de l'impact qu'il avais sur les Rastas et du mouvement qui naissait.

Je pense que toute personne ne peut se résumer à un seul aspect et que toutes les trois présentations contradictoires sont simultanément vraies.
Un exemple : je connait un docteur es-sciences qui est extrémement superstitieux. Ca me parait absolument contradictoire, mais c'est un fait, il faut l'accepter.

Mais pourquoi des noirs américains , presque tous descendants des africains de l'ouest étaient-ils admirateurs d'un roi-empereur d'un état de l' Afrique de l'Est ?
Je pense qu'il y a toute la mystique des 1ers chretiens noirs que furent les éthiopiens et toute la mystique de la Reine de Sabbat qui aurait tenu tête aux empereurs égyptiens, romains, juifs...........

Parce que l'Ethiopie est le seul pays africain à n'avoir pas été colonisé (hormis la très brève parenthèse italienne). Ce pays joue un rôle mythique de grand foyer de civilisation, de nation résistante et de fer de lance de la fierté africaine. C'est tout cela qui réside dans l'Ethiopie et son défunt négus, qui s'était également fait remarquer par son fameux discours à la SDN.

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"[Il] conpissa tous mes louviaus"

"Les bijoux du tanuki se balancent
Pourtant il n'y a pas le moindre vent."

Tout ce que je sais d'Haile Selassie est un fait peut-être pas très connu ou pas souvent évoqué : le récit par Haroun Tazieff de leur rencontre à l'issue de recherches géologiques dans la région. Tazieff souhaitait présenter au monarque les possibilités d'utiliser l'énergie géothermique. Il raconte dans "L'Odeur du soufre" avoir eu affaire à un homme d'une très grande intelligence, à l'esprit vif, et très attiré par ce projet de développement éminemment moderne qui contrastait avec la structure quasi médiévale de la société, découverte par Tazieff au fin fond du royaume.
Le coup d'Etat eu lieu peu après, coupant court au projet.