Je n’ai pas lu le livre de Lugan sur l’Afrique mais je viens de finir
L’histoire de l’Afrique du Sud publié en 2010 chez Ellipses. Je ne connaissais pas cet historien et c’est le seul livre que j’aie trouvé sur ce sujet.
C’est vrai que l’auteur ne donne pas vraiment l’impression d’être de gauche
…
J’ignore si ce qu’il dit est historiquement correct, mais certaines remarques insistantes trahissent une vision de l’histoire de ce pays assez favorable aux Afrikaners - en tout cas plus favorable que ce qu'on entend habituellement.
Notamment :
- Lugan rappelle avec insistance, que l’argument des bantouphones qui consistent à revendiquer la primeur sur le territoire du Cap est faux. Seuls les bushmen fréquentaient cet endroit à l’arrivée des Hollandais au XVIIè . Selon Lugan, ils s’y sont donc installés avant les Africains bantouphones.
- le grand Trek des Afrikaners est présenté de façon épique, même si l’auteur reconnaît qu’ils se sont forgés leur propre mythologie. Les Afrikaners durent prendre la route pour fuir les colons anglais qui avaient interdit l’esclavage et leur demandèrent de se justifier devant des juges et de « répondre à des accusations largement infondées et parfois même à de simples dénonciations calomnieuses » (p. 163) leur reprochant la façon dont il traitait les noirs.
- l’apartheid est présenté de façon très ambiguë. Selon lui, deux courants l’ont traversé :
* l’un, défendu par le président Verwoerd, consistait en la création d’une confédération d’états souverains, à partir d’un partage équitable du pays afin que chaque « tribu » puisse disposer d’un territoire qui lui soit propre. Cet apartheid n’a jamais pu se mettre en place. J’ai eu la nette impression que Lugan aurait préféré cette solution…
* l’autre, tel qu’il a été pratiqué jusqu’aux années 90, basé sur l’idée de la suprématie des blancs qui n’ont jamais renoncé à faire travailler les noirs à des tâches subalternes, est proche de la ségrégation pratiquée dans les Etats du Sud des Etats-Unis ;
- le rôle de l’ANC dans l’embrasement des townships qui aurait servi, non pas à déstabiliser le régime blanc, mais à annihiler les autres partis d’opposition ;
- le bilan très négatif des 15 années de l’ANC au pouvoir, avec des chiffres effrayants
(que je ne conteste pas a priori) : 11 pour cent de la population a le SIDA, 16 à 20 pour cent des 15-49 ans ; un cinquième de la population blanche a quitté le pays ; beaucoup de viols (on parle de 30 pour cent des femmes
) ; une moyenne de 50 meurtres par jour ; en 2009, le chômage touchait 40 pour cent de la population active ! …
Ce livre reste néanmoins agréable à lire et très intéressant, ne serait-ce que parce qu’il n’est pas politiquement correct et présente une autre « histoire » de l’Afrique du Sud que celle qu’on entend habituellement dans les médias, mais j’aimerais maintenant entendre un autre son de cloche et lire une analyse critique de certains événements expliqués par Lugan.