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Message Publié : 13 Déc 2010 11:03 
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Hérodote
Hérodote

Inscription : 19 Sep 2010 18:01
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@ Mauser

Non, dans mon avant-dernier billet ci-dessus, je ne parlais pas de l’ « amusette » de Maurice de Saxe ; je parlais bien du « canon à la suédoise ». Les deux ne désignent pas la même chose.

1. L’amusette est une arme inventée et préconisée par Maurice de Saxe dans ses Rêveries (titre – curieux il faut l’avouer – de son traité d’art militaire rédigé en 1732 et publié plus de 20 ans plus tard). Cette arme n’existait pas à son époque. Caractéristiques de l’amusette :
« Pour pallier le manque d’artillerie de campagne dans l’armée qu’il souhaite voir mise sur pied, il [Maurice] décrit dans les Rêveries une pièce de son invention, l’ « amusette ». Avec l’idée de ce nouveau matériel, il innove vraiment. Petite pièce d’artillerie très légère, modèle hybride entre le fusil et le canon, l’amusette sur son affût est traînée par deux à trois hommes seulement, se charge par la culasse, tire des balles de plomb d’une demi-livre, porte au-delà de trois mille, voire quatre mille pas (c’est-à-dire, d’environ 2500 à plus de 3000 mètres), et elle est capable de tirer plus de deux-cents coups par heure (c’est-à-dire un peu plus de trois coups à la minute). »
Voir : S. Picaud-Monnerat, La petite guerre au XVIIIe siècle, p. 281 (dans le chapitre « L’influence de Maurice de Saxe ? », p. 278-283) ; croquis de l’amusette reproduit p. 593.
Voir aussi, bien sûr, le traité de Maurice de Saxe lui-même, par ex. dans l’édition récente suivante : Maurice de Saxe, Mes rêveries (préface de JP Charnay et introduction de JP Bois), Paris, Economica, 2002.

2. Le canon dit « à la suédoise », dont on fit des essais en France dès 1737, devint, du fait de sa mobilité, le canon d’accompagnement de l’infanterie ; à partir de 1757, chaque bataillon d’infanterie dut avoir un canon à la suédoise à l’entrée en campagne.. Mais, dès 1744, les régiments de troupes légères nouvellement levés en furent dotés (en principe, deux pièces par régiment). Caractéristiques du canon à la suédoise :
« C’était un canon de quatre livres de balle ou ‘canon de 4’ (c’est-à-dire, pouvant projeter un boulet de quatre livres ; pour les canons, le calibre d’une pièce était désigné par le poids du boulet exprimé en nombre rond de livres). Il pesait en principe entre 600 et 625 livres. […] La pièce ne mesurait que 4 pieds 6 pouces et demi de long (soit 1,44 m.). Ces dimensions et cette masse la rendaient bien plus maniable que la pièce de 4 classique du système de Vallière – système en vigueur dans l’armée française pendant les guerres de Succession d’Autriche et de Sept ans – qui, elle, mesurait 6 pieds 9 pouces (soit environ 2 m.) et pesait jusqu’à 1150 livres. […] Trois chevaux suffisaient pour tirer chaque pièce [à la suédoise] sur son affût […]. Quatre chevaux étaient requis, en revanche, pour traîner péniblement la pièce de 4 correspondante du système de Vallière. » Avec six hommes pour le service de chaque pièce à la suédoise, on lit que ces pièces, lors d’une épreuve en 1740, tirèrent jusqu’à dix coups par minute. Plus vraisemblablement, la pièce ne tirait qu’entre trois et huit coups par minute.
Voir : S. Picaud-Monnerat, La petite guerre…, p. 272-275 (dans le chapitre « Le canon d’accompagnement des troupes légères », p. 271-278).

Oui, vous avez raison : l’encrassement de l’âme devait être un problème. Après chaque coup, il fallait passer l’écouvillon dans l’âme de la pièce pour la nettoyer et la rafraîchir (écouvillon = hampe munie d’une tête ronde garnie de soies de cochon (ou de peau de mouton avec sa laine), à la manière des balais) ; l’écouvillon devait être passé de temps à autre dans un seau d’eau. Il dut bien arriver que l'on néglige le nettoyage, à vouloir maintenir une cadence de tir soutenue...

Zut, j’ai encore cité mon livre. Mais, cette fois, ce n’est pas de ma faute : c’est parce que vous m’avez posé une question.
Merci de votre annonce de lecture à venir :) .


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Message Publié : 02 Mars 2013 19:24 
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Polybe
Polybe

Inscription : 01 Mars 2013 11:49
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Premiere réponse sur les fontes de canon.
Je vais me limiter au XVIIIe.
Jusqu'au milieu du XVIIIe les pièces d'artillerie étaient coulée à noyau , le noyau était une pièce de fer entouré d'un fil de métal appelé fil d'archal lui même recouvert d'une "pâte de cendre". Une fois la pièce coulée on retirait le noyau et l'on alésait l'âme du tube pour le finir. Le très gros problème était d'obtenir une âme parfaitement centrée et une coulée de densité de métal homogène tout le long du tube. Pour aléser ensuite le canon, on le plaçait verticalement, la bouche en bas; le foret ou l'alésoir tournait sur un axe vertical à la force d'un manège de chevaux , le poids du canon le faisait descendre sur l'alésoir au fur et à mesure à mesure. Les tubes des canons étaient également fragilisés par des cavités occasionnées par l'air renfermé dans la terre du noyau, que la chaleur dilatait et qui se logeait dans la pièce. A la fin du XVIIe on avait bien essayé de couler des canon plein et de les forer verticalement mais sans succès la qualité n'était pas supérieure aux coulées à noyau.
Puis est arrivé en France la famille Maritz, ce sont des fondeurs d'origine Bernoise. Jean Maritz père fait des coulées pleine par la culasse (méthode développée par Keller) et surtout il met au point un système de forage très précis et fiable qui va augmenter précision et portée du boulet. Au lieu de laisser descendre par son poids le canon sur un foret qui tourne, il place le canon horizontalement et c'est lui qui tourne sur un foret fixe, la régularité de l'âme ainsi obtenue est "parfaite" , il y a aussi beaucoup moins de rebut. Jean Maritz père arrive en France vers 1732, mais il meurt peu après c'est sont fils qui lui succède il sera nommé en 1755 inspecteur général des fontes et forges de la marine . Après unséjour en Espagne où il installe des fonderie modernes il revient en France.

Je reviens de suite pour la pièce de 4 à la suédoise et plus tard pour les amusettes.


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Message Publié : 02 Mars 2013 19:40 
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Polybe
Polybe

Inscription : 01 Mars 2013 11:49
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Seconde réponse à propos des pièces de 4 à la Suédoise.

La pièce de 4 courte à la Suédoise 1740-1765 ou les débuts difficiles d'une artillerie régimentaire:

Au cours des années 1730, le chevalier de Belac réussit à intégrer le corps d'artillerie de l'armée Suédoise et à étudier de système d'artillerie développé par maréchal Cronstedt dans les années 1725.
En 1735 le chevalier de Belac transmet les indications et dessins sur ce système d'artillerie à M. le comte de Castéja ambassadeur de France en Suède ce dernier adresse un courrier avec deux modèles réduits à M. Boiteulx de Gormond secrétaire général de l'artillerie pour le renseigner sur l'usage qu'ont les armées Suédoise et Russe d'avoir à leur tête des pièces régimentaires capables de tirer plus de 10 coups à la minute ce qui est remarquable pour l'époque.
Pendant les années qui suivent débute une réflexion sur les pièces régimentaires en particulier à l'École Royale d'Artillerie de Metz. Un certain nombre de mémoires sont publiées sur le sujet.

En 1738 enfin, les premiers essais sont fait à Metz en plaçant une pièce ordinaire de 4 du système Vallière sur un nouvel affût dit "à la Suédoise" semblable au modèle envoyé par M. de Castéja puis en 1739 une nouvelle série d'essais sont réalisés à la Croix Saint Ouen près de Compiègne, certains en présence du Roi et du cardinal.
De ces différents essais il ressort que la pièce de 4 ordinaire monté sur son affût classique ne permet habituellement de tirer que 5 coups par minutes et que montée sur ce nouvel affût "à la Suédoise" elle tirait régulièrement près de 10 coups par minutes !

Pour améliorer la vitesse du tir le chevalier Pelletier plutôt que d'utiliser simplement des gargousses fait fabriquer des cartouches à la française et à la prussiennes, ces dernières quoique bien que plus coûteuses permettent un tir plus rapide. Les cartouches à la prussienne sont constituées d'un sachet (gargousse) de coutil enduit d'une espèce de bitume dans lequel on met la charge de poudre, on lui fixe un sabot de bois sur lequel on attache le boulet.
Autre innovation la mise à feu se fait par une fusée. Habituellement un verse dans la lumière de la poudre très fine contenue dans un pulvérin et que l'on enflamme, ici on utilise une fusée comme mèche. La fusée est faite dune tige de roseaux cueillie au commencement de l'hiver. La tige fait au plus trois lignes de diamètre pour pouvoir être glissés dans la lumière. Elles sont coupées en tubes de deux pouces et demi de long que l'on remplie d'un mélange de poudre de pulvérin, de salpêtre et de charbon écrasé, puis elle sont fermées avec de l'étoupille et misent dans une enveloppe de papier. De l'affut ou de la munition qui faisait la supériorité ?

Enfin en 1740 pour compléter ce nouvel l'affût, deux tubes d'une nouvelle pièce de 4 courte qui ne mesurent que quatre pieds et demi de long (1,46m), sont fondus à l'Arsenal de Paris par le Sieur Sautray, commissaire général des fontes. Les épreuves qui en sont faites permettent de tirer 10 coups par minute.

Cette même année 1740 l'affût de a pièce à la Suédoise prend une nouvelle orientation bien différente du modèle original Suédois et du modèle construit en 1738.
M. Cuisinier capitaine d'ouvrier d'artillerie à Metz en fait construire un modèle qui est la copie des amusettes que l'on retrouve dans les parcs d'artillerie des États du Nord ou dans les petits États Allemands. Cuisinier le décrit ainsi : " cet affût est sans avant train, les flasques servent de limoniers au cheval, cet affût porte avec lui trente coups à tirer par pièces au moins".
Autres changements apportés, il porte deux coffres sur les roues et la hausse se fait avec un coin de mire et non une vis.
Ce modèle n'est pas du goût du secrétaire d'État à la Guerre et du capitaine du Brocard. Ce dernier écrira à propos de l'affût de type amusette de Cuisiner "Je crois que l'on peut avoir dans une armée une vingtaine de pièces montées sur de pareils affûts, dont on pourra se servir avantageusement dans plusieurs occasions, mais il convient que le surplus soit monté sur des affûts à la française avec des avec des avants trains à timon le tout pouvant être beaucoup plus alléger qu'ils ne le sont présentement."
On peut penser que ce type d'affût avec une pièce de 4 qui génère un très fort recul était trop léger et trop fragile, les pièces étrangères avec ce type d'attelage à la même époque se limitaient à 1 livre.

Les épreuves sont concluantes et la fonte de 50 tubes de pièces de 4 «à la Suédoise» destinés à équiper les avants postes de l'infanterie est décidée et confiée au capitaine d'ouvriers du Brocard.
Le Manuscrit conservé au Musée de l'Armée daté vers 1750, donnent un affût classique à la française plus court avec un coffre à cartouches entre les flasques qui contient les munitions nécessaires pour tirer 55 coups, un système de pointage avec vis et manivelle est une nouveauté qui rend le règlage de la hausse plus rapide, le tout est tiré par un avant train à limons. L'adoption de ce dernier type d'affût nous est confirmé par l'ordonnance de janvier 1757 - Art.2 - «Ladite pièce à la Suédoise sera montée sur son affût et un avant-train; elle sera garnie d'un coffre qui contiendra les munitions nécessaires.»

Durant la Guerre de Succession d'Autriche les pièces restaient attachées au Parc de l'Artillerie. Leur déploiement se faisait selon la volonté du commandant de l'armée le Maréchal de Noailles ou le Maréchal de Saxe. Elles seront souvent installées aux côtés de pièces de 4 longues qui constituent la majorité des pièces du champ de bataille (avec quelques pièces de 8 souvent).
Durant ces campagnes elle donnèrent pas entièrement satisfaction et en 1748 elles semblent tomber en désuétude, ainsi le Parc de l'Artillerie de l'armée de Flandre comporte 86 pièces de 4 contre seulement 10 pièces à la Suédoise.

En 1755 on fait bien des essais avec la pièce de 3 prussienne, mais la guerre éclate en 1756, le 17 mai l'Angleterre déclare la guerre à la France et Frédéric II envahit la Saxe en août de cette même année. On s'affaire donc à couler et monter de nouvelles pièces de 4 dites à la Suédoise. De juillet à septembre 1756, le duc de Croÿ commande un camp d'instruction à Calais en préparation des campagnes, il relate dans ses mémoires certaines manœuvres pratiquées lors de ce camp qui concernent l'artillerie régimentaire « M. le Prince de Croÿ fit remettre à tous les régiments une copie de l'instruction qu'il avait reçut de la Cour sur les pièces de canon qui avaient été délivrées; les principaux articles qu'elle renfermait outre les soins que les commandants des corps et officiers particuliers en devait prendre, consistait dans le choix que l'on devait faire de seize hommes par bataillon pour les servir; les huit premiers désignés canonniers, exempts de service, et à un sol de haute paye. Les autres n'avaient un supplément de deux liards, et étaient destinés à remplacer au besoin ceux des huit premiers qui manqueraient. » Enfin le 20 janvier 1757 est publiée une ordonnance qui stipule: « le Roi donne à chaque bataillon de son infanterie française et étrangère destiné à servir en campagne 1 pièce de canon à la Suédoise, Sa Majesté accorde 1 200 livres pour l'achat de 3 chevaux, de leurs harnais, bricoles, habit de charretier... et 300 livres par ans pour la remonte et l'entretient. Deux sergents et 16 soldats dont 8 canonniers et 8 sous canonniers à la haute paye, employés à la manœuvre de ladite pièce. »

On peut trouver excessif la présence de 16 hommes à la manœuvre d'une pièce d'artillerie légère, mais il faut noter que sa mobilité sur le front de bataille se fait à la force des bras, les mouvements de l'infanterie imposent d'avancer ou de reculer plus ou moins rapidement, tout en conservant la possibilité de tirer, on doit donc raisonnablement considérer que les artilleurs étaient chargés principalement des séquences de tir alors que les 8 autres sous canonniers servaient principalement à l'installation et à la mobilité de la pièce.
La dotation des pièces régimentaires sera inconstante certains régiments n'en ayant aucune et d'autres une seule pour 2 ou 3 bataillons ce qui fera écrire au Maréchal de Belle-Isle en janvier 1758 dans un agenda rédigé à l'attention de M. de Crémille « Il n'est pas naturel que notre infanterie puisse combattre contre l'infanterie prussienne avec une disproportion de plus de moitié . Cet objet est de la plus grande conséquence. » Durant la guerre de sept ans elle ont été plus une gène qu'une aide véritable tout au moins pour une armée disposée en ligne, par contre à Hastenbeck, comme "petites pièces de montagne" les 4 pièces de Picardie et celles de Navarre furent très utile à M. de Chevert.

Gribeauval ne conservera pas cette pièce d'artillerie régimentaire jugée encore trop lourde, peu maniable et peu efficace , il lui préfère une modification de l'organisation de l'artillerie en créant des division d'artillerie de campagne avec 8 à 10 pièces servies par des artilleurs préfigurant l'artillerie des campagnes de l'Empire.
Le site du Musée militaire de Stockholm à des photos des affuts , mais l'affut des pièces de 4 dit à la Suédoise n'aura finalement rien de Suédois et sera du modèle français.

Ce sera un peu plus long pour les amusettes.


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