Voici ce qu'en dit Socrate le Scolastique V,XXV :
[5,25] CHAPITRE XXV. Eugène fait mourir le jeune Valentinien, et usurpe la puissance Souveraine. Il est vaincu par Théodose, et massacré à ses pieds. Il y avait en Occident un Grammairien nommé Eugène, qui après avoir enseigné la langue Latine, se mit dans le Palais de l'Empereur, et parvint à la Charge de son Secrétaire. Ayant acquis un grand crédit par son éloquence, il ne put user modérément de sa fortune. Car s'étant joint à Arbogaste natif de Gaule, Maître de la milice, homme d'un naturel farouche, et prêt à répandre le sang, il se résolut d'usurper la Souveraine puissance. Etant convenus de se défaire de l'Empereur Valentinien, ils corrompirent les Eunuques de la chambre par de magnifiques promesses, et le firent étrangler. Eugène s'étant ainsi rendu maître de l'Empire en Occident, y disposa de tout avec un pouvoir tyrannique. Théodose fut dans une grande peine, quand il vit qu'après avoir défait Maxime, il était obligé de prendre les armes contre un autre. Ayant néanmoins assemblé ses troupes, il déclara Honorius son fils Empereur le dixième jour du mois de Janvier, dans son troisième Consulat, et dans celui d'Abondantius, et ayant laissé ses deux fils à Constantinople, il partit pour l'Occident. Quantité d'Etrangers qui habitent au delà du Danube, le suivirent volontairement pour le servir contre Eugène. Il arriva en peu de temps dans les Gaules, où le Tyran l'attendait à la tête d'une formidable armée. Le combat fut donné proche d'un fleuve nommé le Froie, à trente-six milles d'Aquilée. Il fut donné à l'endroit où les Romains combattaient contre d'autres Romains. Mais à l'endroit où étaient les Etrangers qui avaient suivi Théodose, les Romains qui tenaient le parti d'Eugène eurent l'avantage. Quand l'Empereur vit que ces étrangers étaient taillés en pièces, il fut percé d'une vive douleur, se prosterna à terre, et fit une prière qui fut exaucée. Bacure Maître de sa milice, reprenant en même temps courage, courut avec quelques Officiers à l'endroit où les Etrangers étaient les plus faibles, les soutint, et mit en fuite ceux qui un peu auparavant les poursuivaient. Il arriva à la même heure un autre événement fort merveilleux ; c'est qu'un grand vent repoussa contre les soldats d'Eugène les traits qu'ils avaient tirés sur l'armée de l'Empereur, et accrut la force de ceux que les soldats de Théodose avaient tirés contre eux. Le sort du combat s'étant changé de la sorte, le Tyran se jeta aux pieds de l'Empereur, et lui demanda la vie. Mais les soldats lui coupèrent la tête sur la place même, le sixième jour du mois de Septembre, sous le troisième Consulat d'Arcadius, et le second d'Honorius. Arbogaste le principal auteur de tout le mal, s'étant enfui deux jours après le combat, et n'ayant point trouvé de moyen de se sauver, se tua de sa propre main.
Cette bataille est une énième manifestation du problème de succession dans l'Empire. L'usurpateur Eugène que Théodose n'accepta pas finit par le faire disparaitre. Au IVe siècle seul on assiste à plusieurs guerres civiles entre empereurs comme par exemple entre Constance II et Magnence qui débouche sur une autre bataille orientalo-occidentale ; la bataille de Mursa en 351.
_________________ Scribant reliqua potiores, aetate doctrinisque florentes. quos id, si libuerit, adgressuros, procudere linguas ad maiores moneo stilos. Amm. XXXI, 16, 9.
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