Pédro a écrit :
Malgré tout je crois qu'il faut être un peu plus prudent concernant le XVIe siècle ; la cavalerie lourde ne disparut pas si facilement tant par tradition certes, mais aussi par réel intérêt. A Marignan la cavalerie de François Ier n'eut pas un rôle décoratif et employé de manière plus tactique après la guerre de Cent Ans elle retrouva pour un temps son utilité, par les charge de flanc par exemple. Il existe un très grand nombre de représentation de l'époque qui nous montre des scènes de bataille où l'on voit d'ailleurs fort bien les unités de cavalerie engagées ; cela flattait l'égo des aristocrates (qui n'ont certainement pas abandonné l'idéal chevaleresque ; voyez l'adoubement de François Ier, Bayard lui-même) et montrait malgré tout les réalités du combat, où les grands carrés d'infanterie jouent un rôle capital.
Pour la disparition des lances j'avoue ne pas du tout être documenté. Je sais que chez les Polonais avec leurs hussards ailés les lances sont toujours présentes (voir l'épopée de Jean Sobieski), mais pour l'Europe occidentale, je ne vois pas ce qui a pu déterminer leur abandon. Toujours est-il que malgré le développement des armes à poudres la cavalerie est toujours bien présente. Ce n'est que l'armure lourde qui est devenue obsolète. Les combattants sont donc moins lourdement équipés mais conservent avant tout une cuirasse de protection pour le buste. A Rocroi c'est la cavalerie d'Enghien qui emporte la décision, preuve de son efficacité. Néanmoins, c'est une charge à l'épée...
Est-ce que cela permettait de faucher plus facilement les unités légères dispersées dans une poursuite puisque le choc devenait de plus en plus compromis par les lourdes formations d'infanterie?
Oui, il ne faut pas enterrer la cavalerie trop vite (malgré Azincourt et Pavie), car elle joue encore un rôle déterminant. Pensez à la bataille d'Ivry, où l'infanterie d'Henri IV n'intervient même pas. Il est vrai que la gendarmerie se voit de plus en plus concurrencée par la cavalerie légère, plus adaptée à la guerre du temps, davantage faite d'escarmouches que de batailles rangées.
C'est précisément pendant les guerres de religion que les gendarmes français troquent la lance contre le pistolet, et surtout à partir des années 1580. Ils prennent modèle sur les reîtres, ces cavaliers allemands armés de pistolets à rouet. De fait, ces mercenaires étaient bien plus polyvalents que les gendarmes, efficaces tant contre la cavalerie que contre les carrés d'infanterie, dont ils éclaircissaient les rangs à distance, avant de s'élancer dans la mêlée à coups d'épée ou de masse. Le remplacement progressif de la lance par le pistolet modifie considérablement la technique d'attaque de la cavalerie. Les cavaliers d'Henri de Navarre / Henri IV ne chargent plus en haie mais en escadrons, à la manière des reîtres. On observe également une plus grande coopération entre les différentes armes. À Coutras, soutenus par l'infanterie, les cavaliers protestants infligent une cuisante défaite aux gendarmes de Joyeuse, qui sont équipés de lances et disposés en haie (l'artillerie, il est vrai, joue un rôle déterminant dans leur déroute).
À Rocroi, par contre, les cavaliers de Condé chargent directement à l'épée, sans décharger leurs pistolets au préalable. C'est Gustave-Adolphe, qui, dans sa folle chevauchée du début des années 1630, a réintroduit la charge de cavalerie l'épée à la main. En effet, la nécessité de ranger le pistolet pour pouvoir dégainer l'épée ralentissait considérablement les cavaliers, alors que le roi de Suède comptait sur la puissance de l'impact.