Inscription : 28 Jan 2005 17:41 Message(s) : 5 Localisation : Centre France
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Sur la bataille de Pavie, ci-dessous un texte de François Ier lui-même, extrait d'un fil sur le forum de http://www.histoire-en-ligne.com
De la campagne et de la bataille de Pavie, voici ce qu’en dit François Ier lui-même. Il écrit ce long poème du fond de sa prison à Madrid en 1525 :
« Quant j’entendis que la nécessité Que je marchasse estoit pour vérité, Je m’advançay deffendant mon pays, Des ennemys à bon droit trop hays ; Que diray ? Plus tost fut preste l’armée D’honneur conquère et de gloire affamée : Si feismes tant que nostres ennemis Veirent nos tantes et pavillons près mis ; De passer l’eaue, qu’on nomme la Durance, Fiesmes devoir en grande dilligence. Mais l’Espaignol tourna la ferme envye De combattre, pour tost sauver sa vye En recullant, de son salut soigneux. Prandre Marseille alors n’est envyeulx, Dont s’en alla perdant toute espérance De plus mal faire, ne nuyre à la Prouvance, En mauldissant Bourbon et ses praticques, Congnoissant bien ses trahisons inicques. Avecques eulx avoit ung chef louable, Et de verty trop fort recommandable ; Celuy estoit en guerre et pays exquis, De Pescaire se disoit le marquis : Donc par bon sens tous les siens si ralye, Droict le chemin sy prennent d’Ytalye, Car à bon droict il estoit l’espérance De tout leur camp par vertu et prudance. Par quoi souldars luy laissent faiz et soing De leur salut en ce très grant besoing ; Mais par conseil si ne leur peult donner, Pour eulx sauver, vouloir habandonner Artillerie et bagaige en effect, Car sans cela tout eust été deffaict. Trop estions près et puissans sans doubtance Pour combattre sans doubteuse espérance, Si fortune, sur moy tant envyeuse, D’un trop grant heur n’eust faict vye malheureuse. Et moy voyant la difficuleté Et le joindre impossibilité, Je concludz lors suivre mes ennemys Qui jà estoient tous dans les hautz montz mis Par autre voye et chemyn m’advancer, Dont point deceu ne fuz de mon penser. A tous mes gens je fiz grant feste et joye Pour esprouver ceste nouvelle voye En leur disant : O souldars et amys, Puisque fortune en ce lieu nous a mis, Favorisant la sienne voulonté Par la vertu de nostre honnesteté, En ne craignant des grans monts la haultesse, Vous asseurant sur ma foy et promesse Que si premiers sommes en Ytalie Que sans combat guerre sera finye. Vaincquons doncques par vertuz nos passions : Plaisirs, maisons, fault que nous oublyons ; Donnons repos par un peu de souffrance Que porterons à ceste notre France. Cela leur dis pour tousjours esmouvoir La nostre armé à faire son devoir. Mais pour certain je congnuz bien alors En la pluspart estre vertu dehors. La montaigne de neige revestue Leur cueur attriste et leur voulloir si tue, Prenans coulleur pour mieux dissimuler Que bien failloit premièrement aller Sur le fleuve qu’on nomme la Durance Faire ung pont ; mectant leur espérance Que la longueur romperoit l’entreprise, Couvrant leur peur de manteau de fainctise. Mays l’eaue ne veult nullement comporter Le faiz que voit sur elle à tort boutter ; Bien nous monstra qu’en elle eut plus d’honneur Qu’en nos soudars de cueur ne de bon heur ; Car tout soubdain se rendit si petite Baissant son cours par trop légière fuicte Que nous laissa passer tout le bagaige, Et campagne tant nous fist d’avantaige. Mays qui pourroit se garder de aymer Fleuve tant digne, et nos soudars blasmer, Ayant faillu que l’eaue sans congnoissance Ayt triumphé d’honneur sur leur offence ? Dont passasmes suivans notre entreprise Estant en nou nouvelle force pri(n)se. Et tant feismes qu’n unze jours pour veoir Les champs Lombars peusmes apparcevoir ; (…) Lors je marchay avecques espérance D’un gaing certain, sans nulle deffiance. Treize enseignes de gendarme, en effect, Feiz demourer fermes pour bon effect ; Nos Allemans avecques eulx je laisse, Leur commandant qu’ils marchassent sans cesse Au petit pas, affin que leur désir Fust bien conduict à temps et à loisir : Et cela faict, je retins pour ma bande Troys enseignes ; à ceulx-là je commande Voulloir marcher, leur priant qu’à l’ouvraige Congnoistre on peult l’effect de leur couraige. (…) Mais pour venir à mon premier propoz, Quant indignes de vertuz et repoz Je veiz mes gens par fuicte trop honteuse, A leur honneur et à moy dommageuse, Triste regret et peine tout ensemble, Dueil et despit en mon cueur si s’assemble ; Autour de moy en regardant ne veiz Que peu de gens des miens, à mon advis ; (…) Et là je fuz longuement combattu, Et mon cheval mort sus moy abbatu.(…) Mais quoy ! j’estoys soubz mon cheval en terre ! Entre ennemys alors porté par terre, Dont ma deffence à l’heure ne valut Contre mon gré ; aussi Dieu ne voulut Bien me trouva en ce piteux arroy Exécutant leur chef le vice-roy. Quand il me vit, il descendit sans faille, Affin qu’ayde à tel besoing ne faille. Las ! que diray ? cela ne veulx nyer : Vaincu je fuz et rendu prisonnier. Parmy le camp en tous lieux fuz mené, Pour me monstrer çà et là pourmené.(…) Trop fort doubtant que l’amour de ma mère Ne peust souffrir ceste nouvelle amère, Par desplaisir cause de ma prison, Sans regarder que tant triste saison Le seul confort de toute France est mis Sur sa vertu, la gardant d’ennemys, Et qu’en ma seur ne demourast povoir Pour telle dame et à son mal pourveoir ; Et si me fist la pitié lors entendre De mes enfans la jeunesse tant tendre, Pour se savoir ny garder ny deffaire Contre nully qui leur voulust mal faire." (…)
(extrait du chapitre 8, M. Rey, Histoire de la captivité de François Ier, Techener, Paris, 1837)
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