Bonjour,
Interessant sujet et intéressants exemples... Voici quelques informations et références concernant le XVIIIe siècle. Il est évident que, comme cela se révèle au fil des interventions ci-dessus, il faut distinguer entre les déplacements des armées dans leur ensemble, et les déplacements de la cavalerie seule pour des opérations en particulier : raids à longue distance, charge de cavalerie dans une bataille...
Lorsqu’une armée, cavalerie et infanterie combinées, avait à parcourir pendant une campagne militaire une distance nécessitant plusieurs jours de marche, on pouvait compter sur une distance moyenne parcourue, par jour, de 20 km. C'était déjà un rythme soutenu. Le général Colin cite l'exemple du roi de Prusse Frédéric II pendant la guerre de Sept Ans : durant la campagne de 1757, jusqu’à la bataille de Rossbach (5 nov. 1757), privilégiant l'offensive, il fait exécuter à son armée de grands mouvements d’une province à l’autre, à une vitesse moyenne de 20 km par jour, qu’il maintient pendant deux à quatre semaines (Général Colin, Les transformations de la guerre (1911), réédition de 1989, Paris, Economica, p. 143).
Mais, pour ce qui est des marches d'armées, les vitesses moins soutenues, de l'ordre de 14 à 19 km par jour, étaient fréquentes. A l'inverse, selon Roland Mousnier, dans les cas graves, sous Louis XIV, l’infanterie était capable de marcher 50 à 60 km par jour, cinq jours de suite. (Roland Mousnier, Les institutions de la France sous la monarchie absolue, Paris, PUF, 1990 [1ère éd. 1974], t. I, p. 531-533, chap. sur les vitesses de circulation en général).
Les régiments qui marchaient pour aller rejoindre le théâtre de la guerre faisaient des étapes quotidiennes comprises entre 12 et 30 km.
Concernant les évolutions dans la vitesse et les distances parcourues : Bernhard Kroener estime que, entre le début du XVIIe siècle et 1775, la performance quotidienne d’une armée combinée n’augmenta que d’une lieue, soit environ 4,5 km. (Source : André Corvisier (dir.), Dictionnaire d’art et d’histoire militaires, Paris, PUF, 1988, art. « Routes et étapes »).
Quand on se représente les choses, il faut tenir compte du fait que les armées se déplacent "avec armes et bagages", et que cela doit être pris en compte pour apprécier les performances et moyennes des chevaux et des hommes à leur juste valeur ; il faut compter avec les vallonnements du terrain, et avec le fait que les chemins de l'époque ne sont pas forcément bons, loin s'en faut, tout dépend de la météo ; il faut compter avec les risques de harcèlement de l'armée par les ennemis...
Enfin, pour l'anecdote, on trouve dans les papiers du comte de Beausobre, colonel de hussards de 1743 à 1756, une intéressante évaluation du temps de parcours comparé des distances pour les chevaux de la cavalerie de ligne et pour ceux de la cavalerie légère (plus petits). Source : Archives cantonales vaudoises (Suisse), fonds P Nelty de Beausobre, n° 53, ancien classement, une demi-page (sans date) dans une enveloppe contenant les n° 51 à 62. Copie : « Un cheval d’hussard fait 100 toises en 240 pas. Un cheval de cavalier fait 100 toises en 200 pas d’escadron. 100 toises en 60 galops……………….cavalier (en 45 secondes) 100 toises en 79 petits galops…………hussard 100 toises en 62 grands galops………..id. » Le nombre de secondes n'est pas indiqué pour les chevaux de hussards. (Une toise faisait environ 1,94 m.) Je cite cet extrait dans mon livre : La petite guerre au XVIIIe siècle (Economica, 2010), p. 215, note 36 (à propos des chevaux les plus appropriés pour les raids de longue distance).
S. Picaud-Monnerat
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