Voici des éléments de réponse pour la cavalerie de l'Ancien Régime. Vous avez raison au final on charge bien au galop. La question est: quand prend on le galop?
Pour Frederic II après quelques foulées sa cavalerie se met au galop. Pour la cavalerie française elle commence au trot pour finir au galop. Le but d'une charge étant d'obtenir un choc de cavaliers, un premier impact fort. Si elle doit charger en en ligne que ce soit en formation avec des intervalles ou en muraille, la charge de la cavalerie française se fait au grand trot, le galop n'étant pris n'est pris qu'à la toute fin de la course, tandis que la charge à la débandade ou en fourrageurs, plus tumultueuse se fait au galop. La première est destinée à enfoncer des bataillons ou des escadrons et la seconde est plus utile pour la poursuite des troupes en désordre, pour l'empêcher de se rallier et y faire des prisonniers.
Le choix d'une charge en ligne au trot s'explique par plusieurs raisons. La première est que les capitaines sont les propriétaires des chevaux de leur compagnie (jusqu'en 1762), on conçoit qu'ils tiennent à les ménager. Le second problème est de maintenir la cohésion de l'escadron alors que tout concours à déstabiliser l'harmonie de la course: un sol meuble, des obstacles disséminés, une terre gelée, détrempée, couverte de neige… , le bruit de la canonnade, les cris, la fumée, les chutes… il faut malgré cela maintenir un front régulier, ne pas trop s'ouvrir ou se serrer. La réussite de la charge dépend l'accélération progressive de la vitesse jusqu'à être à la vitesse maximum avant d'aborder la ligne ennemie avec l'alignement du front conservé. Ceci exprimé il s'agit de la théorie, en pratique la ligne se présente en dent de scie avec plusieurs points d'impact sur le front ennemi mais l'effet de vague doit être conservé, dans le cas contraire la ligne se disloque, les chevaux ne courent plus droit devant eux, se resserrent contre un autre escadron, se gênent, certains chevaux se désunissent, des cavaliers chutent et le mouvement général est rompu. Le maréchal de Saxe dans ses Rêveries écrivait: « Lorsque l'on charge, on doit partir à petit trot de la distance de cent pas, l'augmenter à mesure que l'on approche, et ensuite au galop; on ne doit serrer les bottes qu'à vingt ou trente pas de l'ennemi, et cela doit se faire par un officier qui commande, en criant: A moi. Il faut y styler la cavalerie, et les exercer pour leur rendre cette manœuvre familière, laquelle dit être prompte comme un éclair: il faut surtout leur apprendre à galoper à un train bien allongé. Tout escadron qui ne peut charger deux mille pas à toutes jambes, sans se rompre, n'est jamais propre à la guerre. C'est le point fondamental: quand votre cavalerie saura faire cela, elle sera bonne, tout le reste paraitra facile. » Malheureusement en 1750 le maréchal de Saxe meurt jeune encore à 54 ans.
Il n'y a pas d'école d'équitation commune, pas de manèges, chaque mestre-de-camp fait instruire ses cavaliers selon ses principes c'est pourquoi certains régiments de cavalerie française, composés de piètres cavaliers, chargent au galop sans grande cohésion on dit à la débandade ou en fourrageurs, ce qui est bien différent de la murailles des cavaliers au galop de Seydlitz.
Voici la conception de Frédéric II de la charge de la cavalerie. Le jeune comte de Gisors fils du maréchal de Belle Isle se rend en septembre 1754 en Silésie à l’invitation du roi de Prusse, au cours d’une de leurs conversations Frédéric II lui expose sa vision d’une charge de cavalerie: « Je met mes officiers en avant, hors du rang, parce qu’étant dans le rang ils sont simples cavaliers et obligés de se laisser entraîner au torrent de l’escadron. J’en mets derrière pour tomber sur le corps de ceux qui voudraient fuir. Je ne laisse aucun intervalle entre mes escadrons, parce que des escadrons séparés les uns des autres prêtent autant de flancs à l’ennemi. Je les fais charger au grand galop parce que la peur porte les poltrons en avant, sûrs comme ils le sont, pour peu qu’ils s’arrêtassent au milieu de la carrière, d’être écrasé par l’escadron suivant. Je veux que l’impétuosité de leur charge force l’ennemi à plier avant qu’ils puissent se mêler avec lui… » Au début de la guerre de sept ans la cavalerie prussienne n'a pourtant pas encore la qualité de son infanterie. Ainsi avant la bataille de Leuthen il menace sa cavalerie; s'il voit un régiment tourner la bride il le fera mettre à pied et en service de garnison. Seydlitz à la tête de la cavalerie prussienne en 1758, il n'a que trente ans, en fera la première cavalerie d'Europe.
Si vous avez des informations sur un changement d'école de tactique pour la charge de la cavalerie française à la fin de l'Ancien Régime je serais très intéressé.
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