Jean R a écrit :
En 1913, en France, on avait à choisir entre Poincaré et Pam. On disait : "Poincaré, c'est la guerre" (souvenir d'un article du Canard Enchainé qui parlait de Pam comme d'un "brave Poher de l'époque", ce qui situe l'époque à laquelle je l'ai lu). On a élu Poincaré (suffrage indirect, mais je n'ai jamais vu que c'était considéré comme non démocratique).
Une simple remarque pour bien distinguer deux fonctions politiques : sous la Troisième République, le
Président de la République a très peu de pouvoirs, ceux-ci étant dans les mains du
Président du Conseil des ministres. En février 1913, Poincaré, ancien Président du Conseil des ministres (1912-1913), est élu Président de la République au suffrage indirect mais, d'une, son élection importe peu tant ses pouvoirs sont réduits face à ceux du Président du Conseil des ministres, de deux, la légitimité démocratique de la Troisième République repose d'abord dans le pouvoir du Parlement sur la stabilité et le maintien du régime politique conduit par le Président du Conseil des ministres, à l'époque Barthou, puis Doumergue et Viviani.
Pierma a écrit :
je pense aussi par exemple à la république de Weimar, submergée jusqu'au cauchemar et dès ses débuts par les mouvements nationalistes, au point que la complicité de juges bienveillants limite l'emprisonnement d'Hitler à 9 mois pour le putsch de la Brasserie. Bien qu'il s'agisse formellement d'une démocratie, avec des élections libres, le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle file un mauvais coton.
Oui, bien d'accord ! Sur la légitimité démocratique de la République de Weimar, il y a un lien avec quelques pistes dans le sous-forum de l'entre-deux-guerres :
viewtopic.php?f=48&t=1136Pierma a écrit :
mais on trouve bien des exemple de démocraties où les militaires - par exemple - ont monopolisé le pouvoir, ce qui suffit à mon avis pour les exclure de la définition.
La France de la Première Guerre mondiale a frôlé ce risque d'une confiscation du pouvoir par les militaires (comme le couple Hindenburg-Luddendorff le fit en Allemagne) : à la fin du mois d'août 1914, Joffre tente de créer une ascendance du pouvoir militaire sur le pouvoir civil en maintenant le gouvernement "en exil" à Bordeaux. Le pouvoir politique se ressaisit à l'appel des armes de Clemenceau, Doumer et Ferry et, avec le concours du Général Pedoya, député de l'Isère, les trois hommes enferment Joffre dans un rôle politique, celui de Ministre de la Guerre pour contrer sa politique militaire.
Dédé a écrit :
Sans répondre à cette question, il me semble que :
La première guerre mondiale n'est pas seulement une guerre franco-allemande, même dans son déclenchement. Elle est essentiellement (dans son origine) une guerre de nationalismes européens, et il y avait des démocraties (?) dans les deux camps.
La Première Guerre mondiale est surtout un conflit entre des démocraties (France, Angleterre, Etats-Unis) et des empires autocratiques (Allemagne wilhelmienne, Autriche-Hongrie impériale, Empire ottoman). L'exception, il faut la reconnaître, est la Russie impériale, partie intégrante du camp des alliés et son explosion après février 1917, avec la première révolution parlementaire, puis en octobre 1917, avec la seconde révolution populaire, facilite le discours démocratique de Wilson contre les empires autocratiques vaincus.
Dédé a écrit :
Explication de mon point d'interrogation : la démocratie est-elle compatible avec le nationalisme exacerbé ? autrement dit, une vraie démocratie est-elle compatible avec la haine maladive des autres peuples ?
Le nationalisme exacerbé est-il synonyme de xénophobie (ce qu'on pourrait définir comme "haine maladive des autres peuples") ?
Il me semble plutôt que le nationalisme exacerbé s'exprime par un repli sur soi-même, sa culture, sa tradition et, certes, une peur de l'autre, voir une haine de l'autre mais pas dans tous les cas. En conséquence, il me semble qu'une démocratie peut fait état de nationalisme exacerbé : nationalisme américain au tournant des XIXème et XXème siècle puis dans les années 1920 avec le retour des Républicains (avec les politiques anti-immigration et le culte de la culture américaine), par exemple, nationalisme français de l'après-guerre (avec la Chambre Bleu Horizon), etc.