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Message Publié : 03 Sep 2019 10:56 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 19 Fév 2011 17:03
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Nous sommes en train de mener exactement la même conversation qu'il y a pile 3 ans, avec les mêmes exemples et contre-exemples.

J'avais particulièrement apprécié et retenu la citation de Bourgoing par Cyril Drouet:
Citer :
« Nous allions assister, du point où nous nous étions avancés, au plus beau des spectacles dont on puisse jouir en un jour de bataille, celui d'une grande charge de cavalerie se ruant hardiment sur le front impassible d'une ligne d'infanterie hérissée de baïonnettes ; le courage ardent, l'élan impétueux aux prises avec la fermeté inébranlable, l'imposante immobilité !
Tout dépend, dans de pareils moments, du sang-froid de la ligne d'infanterie. Les fusiliers expérimentés, les vieilles bandes qui ont l'habitude de cette lutte entre deux armes rivales, savent que le bataillon doit garder en réserve le feu qui fait toute sa force, et que c'est une faute grave de tirer de loin sur cette cavalerie qui accourt presque toujours avec des cris étourdissants. Quant aux jeunes fantassins, ils sont instinctivement disposés à répondre par un feu précipité à ces clameurs lointaines et furieuses. Ils cèdent trop souvent à cette tentation, s'ils ne sont pas contenus par des chefs exerçant sur eux l'ascendant d'un caractère éprouvé, et des autres qualités qui établissent la popularité des chefs de guerre.
Voici comment l'un des officiers qui se trouvaient avec le duc de Trévise dans le grand carré de la jeune garde, mon ami le capitaine Gillet de Kervéguen, aide de camp du général Roguet, m'a raconté ce qui se passa sur ce point assez éloigné de nous pour ne présenter, par moments, à nos regards, qu'une masse confuse voilée par la fumée de la fusillade.
Le maréchal donna une forme allongée au carré, dont il tourna l'un des grands côtés en face de la cavalerie ennemie : sa troupe était placée sur trois rangs. Ce chef entra alors, suivant l'ordonnance, dans l'intérieur de cette forteresse vivante. Je vis de loin ce carré de notre jeune garde qui, au moment de l'arrivée de son chef, poussait les cris habituels de : Vive l'Empereur! devenir tout à coup silencieux.
En cet instant, nous pouvions reconnaître et suivre du regard la marche du duc de Trévise; les fanions flottants des lanciers de son escorte, s'élevant au-dessus des rangs intérieurs du carré, nous indiquaient qu'il longeait au pas celle des faces qui attendait la cavalerie ennemie déjà lancée au galop.
On nous rapporta depuis la simple, mais énergique allocution qu'il adressa à ses soldats :
« Enfants, ne criez plus ! laissez crier l'ennemi… Ne tirez pas. silence. Ne faites feu qu'au commandement ! »
Cette voix aimée, cette voix claire et vibrante fut écoutée. La face du carré resta l'arme haute ; cette jeune infanterie demeura calme, immobile, attentive au commandement qui lui était promis.
Ce qui arrive le plus souvent en présence d'une troupe de si fière contenance se renouvela cette fois encore.
[…]
L'effet moral de la vue d'une troupe ainsi préparée, pouvant à chaque instant faire un feu d'ensemble, salve meurtrière dont le résultat sera plus terrible à mesure qu'on approche, cet effet moral agit presque toujours, même sur la cavalerie la plus déterminée.
Celle que nous voyions accourir en ce moment sembla hésiter, quand elle fut à cent pas de la ligne française; à cinquante pas, son impétueux mouvement s'arrêta tout à fait. Au même instant, les fusils de la jeune garde s'abaissèrent, la salve retentit, et cette longue ligne de cavalerie rétrograda, en abandonnant le terrain couvert de cavaliers, de chevaux morts ou blessés.
Ces escadrons aguerris se rallièrent sans tarder; leurs chefs les reconduisirent bravement dans la même direction, mais le carré du duc de Trévise ne fut pas entamé. »


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Message Publié : 03 Sep 2019 13:33 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 13 Mars 2010 20:44
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Houssaye cite aussi le soir de Ligny où la cavalerie Prussienne charge un carré Français aux uniformes et shakos disparates (pénurie)
sa salve fauche 83 cavaliers (les a-t-il comptés ? :)
la cavalerie venait de faire connaissance avec la Garde (4ème Chasseurs de mémoire)

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il pleuvait, en cette Nuit de Noël 1914, où les Rois Mages apportaient des Minenwerfer


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Message Publié : 03 Sep 2019 17:21 
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Darwin1859 a écrit :
Un cheval, aussi entraîné soit-il, ne se rue pas sans cabrer sur un mur hérissé de piques de 7 pieds de long, a fortiori si d'autres se sont déjà empalés dessus.


Il y a eu un documentaire qui est passé à la télé il n'y a pas trop longtemps. Je pense que c'est sur Arte. On y voyait une vingtaine de figurants recrutés pour l'occasion. Donc, des non-professionnels, et ils avaient té choisis pour cela, car ils voulaient des "candides". Ils les ont "formés" au maniement d'une pique et à rester groupés ... La pique était un simple de 3m de long sans pointe.

La suite fut qu'ils devaient résister à la charge d'un cavalier en armure. Le cheval n'est jamais entré en contact avec les bâtons. Il s'est toujours cabré ou reculé pour refuser le contact. Le but était de montrer qu'une troupe de piéton déterminés, et un peu formés (1 à 2 heures, tout ou plus) résistait facilement à un cavalier ...


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Message Publié : 03 Sep 2019 18:43 
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A l'inverse, une charge de cavalerie sur une infanterie qui n'a pas eu le temps de former le carré peut être un massacre.

Je n'ai pas réussi à remettre la main sur un bouquin que j'ai sur la campagne de France, mais il y a un terrible épisode dans ce genre.

De mémoire c'est un parti de cavalerie prussienne qui tombe sur deux bataillons de conscrits, à peine formés, qui sont partis de Paris à marche forcée pour rejoindre l'armée. (Je pense qu'il s'agissait de les répartir dans les unités existantes, compte-tenu de leur inexpérience.)

Les malheureux n'ont pas le temps de former le carré (ils n'étaient d'ailleurs pas entraînés à le faire) et se font massacrer. Quelques survivants réussissent à fuir ou à se cacher.

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Message Publié : 03 Sep 2019 19:28 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant
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Pierma a écrit :
A l'inverse, une charge de cavalerie sur une infanterie qui n'a pas eu le temps de former le carré peut être un massacre.


La bataille de Patay en est aussi un bon exemple ; les archers anglais n'ayant pas eu le temps de se fortifier derrière pieux et fossés sont chargés par une avant garde française et cela vire au carnage.

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Scribant reliqua potiores, aetate doctrinisque florentes. quos id, si libuerit, adgressuros, procudere linguas ad maiores moneo stilos. Amm. XXXI, 16, 9.


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Message Publié : 04 Sep 2019 7:16 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 13 Mars 2010 20:44
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Pierma a écrit :
A l'inverse, une charge de cavalerie sur une infanterie qui n'a pas eu le temps de former le carré peut être un massacre….sur la campagne de France, mais il y a un terrible épisode dans ce genre..

Je pensais à Fère Champenoise, à vérifier, les héros de Pacthod formés en carré ont tenu le coup mais sans doute d'autres unités auraient craqué ?

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Message Publié : 04 Sep 2019 9:31 
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Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges
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bourbilly21 a écrit :
Pierma a écrit :
A l'inverse, une charge de cavalerie sur une infanterie qui n'a pas eu le temps de former le carré peut être un massacre….sur la campagne de France, mais il y a un terrible épisode dans ce genre..

Je pensais à Fère Champenoise, à vérifier, les héros de Pacthod formés en carré ont tenu le coup mais sans doute d'autres unités auraient craqué ?


Témoignage de Löwenstern (Mémoires) :
"La cavalerie de Korff, qui formait la tête des colonnes de l’armée de Silésie, arriva bientôt et courut à travers champs pour intercepter le chemin que prenait la colonne ennemie.
Lorsqu’elle l’eut atteinte, elle l’attaqua aussitôt mais sans résultat.
Le général Korff n’avait que 4 pièces d’artillerie volante, qui ne purent agir que faiblement et ses charges furent toutes repoussées par l’intrépidité de l’infanterie française qui vait formé plusieurs carrés et laissa approcher les dragons à bout portant et fit alors seulement un feu roulant si bien entretenu que nos dragons ne purent l’entamer.
Le général Pacthod, qui commandait cette colonne, repoussa ainsi de pied ferme, durant une heure et demie, cette cavalerie. Et, apparemment, ces attaques ne lui parurent pas dangereuses car il ne fit aucun mouvement pour se retirer sur Fère-Champenoise, qui était la route que les maréchaux avaient prise. Il avait massé son convoi d’artillerie derrière un carré considérable et appuyé sa droite au village de Villeseneux.
Mais bientôt le nombre de nos troupes s’accroissant d’heure en heure, il ne lui resta plus que la ressource de gagner Fère-Champenoise à travers champs. Le convoi, dans cette marche, fut pris et pillé. Sa retraite se fit en échiquier, chaque régiment formant un carré et 16 pièces de canon, placées dans les intervalles sur le front et les flancs de ces carrés, résistèrent à notre cavalerie par un feu sagement dirigé.
Le général Pacthod espérait gagner Fère-Champenoise, lorsque le comte Paul Palhen vint s’établir sur ses derrières avec 2 régiments de chasseurs à cheval et le plaça dans l’alternative de se faire jour ou de se rendre.
Un carré ennemi se forma en colonne d’attaque, se jeta sur les régiments du comte Pahlen et les força à rétrograder. Mais ce succès ne fut que de courte durée. Le comte Pahlen profita d’un moment où l’ennemi s’était débandé, se jeta dessus, l’enfonça et le sabra.
Le général Pacthod, voyant l’impossiblité de gagner Fère-Champenoise précipita alors sa marche vers les marais de Saint-Gond.
La division de hussards du général Wassiltchikoff arriva sur ces entrefaites. Elle fit plusieurs charges qui ne lui réussirent point. Le carré, car ce n’en n’était plus qu’un maintenant, écarta continuellement par un feu roulant les efforts de la cavalerie, qui s’épuisa en vaine charges contre cette intrépide infanterie.
[...]
Au moment où ces charges s’exécutaient et se répétaient à l’infini, nous vîmes tout à coup, sur les hauteurs qui dominaient ces plaines immenses, un groupe de cavalerie [...]Le colonel Markoff, qui, avec ses pièces, nous avait si maltraité, descendit des hauteurs sur ordre du Tsar avec sa batterie et commença un feu d’enfer sur la colonne de Pacthod qui, sans tirer un coup de feu, dirigeait toujours sa marche vers les marais de Saint-Gond.
Deux pièces de canon du général Korff s’étaient placées dans la direction que la colonne française devait prendre et quoiqu’elles tirassent avec de la mitraille, la colonne ennemie marcha dessus et les força de quitter leur position.
Mais bientôt, le Tsar arriva lui-même, suivi du maréchal Schwarzenberg et du maréchal Wrede. Un enthousiasme général se communiqua aux chefs et aux troupes. Les chasseurs à cheval de Siéversk commandés par le colonel Denisoff, les hussards d’Alexandria par le colonel Lisoffski furent les premiers qui entamèrent la colonne du général Pacthod. Les autres régiments arrivèrent et chargèrent successivement.
La colonne fut entièrement dispersée et sabrée. Pas un homme n’échappa.
[...]
La journée de Fère-Champenoise était une des plus brillantes de la campagne. Seule la cavalerie russe avait eu la gloire de ce double combat. L’ennemi s’était battu en désespéré et le général Pacthod eut les suffrages de toute l’armée pour la manière héroïque dont il s’était conduit. Notre cavalerie avait fait des charges réitérées, qui ne réussirent pas d’abord ; mais la présence du Tsar l’électrisa à un tel point que rein ne put l’arrêter et à la fin, elle entra dans les carrés comme dans du fromage ;
Le maréchal Wrede, qui se trouvait dans la suite du Tsar, se mit à la tête d’un de nos régiments de chasseurs à cheval et le sabre à la main, chargea avec les nôtres comme un simple cavalier.
Cette journée résolut le problème si longtemps disputé que l’infanterie, si elle n’est pas protégée par le terrain, ne peut pas à la longue résister à une bonne et nombreuse cavalerie. La nôtre, quoiqu’on l’eût épuisée inconsidérément par des charges mal combinées et mal conduites, parvint malgré cela à entamer les carrés ennemis et à les exterminer. Les cuirassiers, qui essentiellement sont plus propres à enfoncer les masses, ne prirent guère part au combat que livra le général Pacthod. Ils seraient probablement parvenus plus tôt à un résultat satisfaisant."

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" Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)


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Message Publié : 04 Sep 2019 11:26 
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Inscription : 10 Fév 2009 0:12
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C'est bien à ce combat de Fère Champenoise que je faisais allusion. (Je me souviens des marais de Saint Gond.)
Mais j'aurais dû mettre la main dessus, parce que ma mémoire me joue des tours : apparemment il ne s'agit pas de jeunes conscrits (ils manoeuvrent avec précision) et surtout ils n'ont pas été surpris en marche.

Quel dommage que tant de sang froid ne leur ait pas permis de s'en sortir !

Merci Cyril.

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Message Publié : 04 Sep 2019 11:32 
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Inscription : 20 Déc 2008 14:01
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Localisation : Bourgogne
Excellent témoignage, merci Cyril.

Il confirme en tous points ce que je dis plus haut : une infanterie en ordre n'est pas entamable par de la cavalerie (la preuve plusieurs fois à Fère-Champenoise). Il faut plusieurs heures de charge, de tirs d'artillerie, de manoeuvres, obliger l'infanterie française à faire mouvement (vers les marais de Saint-Gond) et donc à perdre sa formation pour que la cavalerie puisse enfin s'imposer, au prix de lourdes pertes j'imagine.
CQFD.

CEN EMB

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