Merci beaucoup pour ces remarques. Cela va me permettre de continuer à parler de mon sujet favori.
Citer :
livre I, chapitre IX
Plus précisément, à la fin du chapitre 8.
Citer :
la traduction de Jean Peyroux dont je parlerai plus loin [...] Jean Peyroux (Ingénieur des Arts et Métiers)
J'aime beaucoup ses traductions, et c'est pour cela que je l'ai nommé précédemment. Il est proche du texte original (à l'opposé d'Alexandre Vialatte pour Kafka), ce qui est une grande qualité pour moi. Néanmoins il fait des traductions à la chaîne. Il ne bénéficie pas de l'aide de correcteurs. Voici quelques erreurs dans sa traduction de la biographie de Copernic :
Page 221 : au lieu de "Jean Cappel" lire "Jean Chapelain" le mécène qui a financé la biographie de Copernic
Page 223 : au lieu de "29e jour", lire "19e jour" comme c'est indiqué dans le texte latin de Gassendi
Page 223 : au lieu de "soeur germaine", lire "soeur"
Page 224 : au lieu de "dans le détroit de Gadès", lire "à Cadix"
Page 224 : au lieu de "avoir voyagé en Bohème", lire "avoir voyagé à Bologne" (Bononia), évocation de l'université où il étudia de 1497 à 1500
Page 226 : au lieu de "Apollonius mis à part le Soleil comme autour duquel comme centre", lire "Apollonius associa au Soleil le centre autour duquel"
Page 229 : au lieu de "vers le port", lire "hors du port"
Page 234 : au lieu de "orbile", lire "orbite"
Page 234 : au lieu de "Sixte V", lire "Sixte IV"
Page 235 : au lieu de "lettre d'un ami de son collège", lire "lettre amical de son collègue"
Page 235 : au lieu de "Chanoine", lire "Diacre"
Page 235 : il manque "Albetagni" entre "Ptolémée" et "Alphonse" (le roi d'Espagne)
Page 236 : au lieu de "Georges Rheticus", lire "Georg Johannes Rheticus"
Page 236 : les lignes à propos de Schöner sont incompréhensibles, car pour faire une bonne traduction il aurait fallu connaître le contexte de la Narratio Prima
Page 239 : au lieu de "Tiedemaun", lire "Tiedemann"
Page 241 : au lieu de "(NIII)" lire "(NII)"
Page 242 : au lieu de "Enseignements" lire "Mathématiques"
Page 242 : au lieu de "Des Enseignements sont écrits encore par les Mathématiciens", lire "L'Astronomie est écrite pour les Astronomes"
Page 243 : il manque "hypothèses" après "véritables"
Page 245 : au lieu de "je désirerais que soit rapportée à Vapovius Cantor de Cracovie, celle qu'il a écrite au sujet du mouvement de la Huitième Sphère", lire "je désirerais que soit rapportée la lettre sur le mouvement de la Huitième Sphère de Wapovski, cantor à Cracovie" et en notes, on pourrait préciser qu'il s'agit de la fameuse "Lettre contre Werner"
Page 248 : au lieu de "Jean Scrobocovicio", lire "Jean Scrobcovici"
Jean Peyroux n'est pas historien. Il n'a pas le temps de se renseigner en profondeur sur les sujets dont il est question dans les textes qu'il traduit. Dans ses notes, il indique avec honnêteté, page 317 "Benegger, j'ignore quel est ce personnage" qui est Matthias Bernegger (avec un "r" en 3e position), célèbre professeur d'Histoire à l'université de Strasbourg, traducteur de Galilée, et ami de Kepler, Bernegger qui a servi d'intermédiaire pour le mariage de la fille de Kepler ; page 317 "Deodatus, j'ignore quel est ce personnage" alors qu'il s'agit du fameux Elia Deodati d'une famille d'italiens protestants exilés en Suisse, qui est la personne qui a le plus aidé Galilée quand il a eu ses ennuis.
Cela dit, je remercie infiniment Jean Peyroux et la librairie Blanchard qui comblent un vide en donnant accès au grand public à des sources de première importance pour l'histoire des sciences, et pour la qualité de leur travail qui est globalement très bon.
Citer :
Je vais donc m'inspirer de ce qu'a écrit Gassendi sur Nicolas Copernic.
C'est très louable de vous affranchir des errements de Jan Czynski, mais il est dommage de se priver de toutes pièces historiques dont nous disposons aujourd'hui, et auxquelles Gassendi n'avait pas accès ou n'avait pas eu le temps d'étudier.
Citer :
pour Wikipédia Nicolas Copernic est "né le 19 février 1473 à Torun"
Quelle est la source ayant servi à écrire ce passage de l'article de Wikipedia ?
En réalité, la date de naissance de Nicolas Copernic n'est pas connue avec certitude, car si jamais cette date fut notée dans un registre paroissial ou municipal, il n'en reste plus aucune trace aujourd'hui et Copernic n'a écrit sa date de naissance sur aucun des manuscrits dont nous disposons. Les documents administratifs le concernant, par exemple son inscription à l'université, n'indique ni sa date de naissance ni son âge. Il ne reste aucune allusion à ses anniversaires (je ne sais pas s'il les fêtait). L'épitaphe ne mentionne pas ses dates de naissance et de décès. Il faut donc rechercher cette date dans des sources de seconde main, qui se contredisent :
- Le 19 février 1473 à 4 heures et 48 minutes de l'après-midi, dans le livre Caspar Peucer,
Elementa doctrinae de circulis coelistbus et primo motu, Wittenberg, 1551 : "Nicolaus Copernicus Torinensis Canonicus Varmiensis ; natus anno 1473, Februa. Die 19, hora 4, scrup. 48".
- Le 10 février 1473 dans Paul Eber,
Calendarium historicum, 1571, page 322.
- Le 4 février 1473 dans Johannes Gartze,
Astrologiae methodus in qua secundum doctrinam Ptolemaei, exactissima facillimaque genituras qualescumque judicandi ratio traditur, Bâle, 1576.
- Le 19 février 1473, à 4 heures et 38 minutes de l'après-midi, dans Francesco Giuntini,
Speculum astrologiae, Lyon, 1581, tome. 1, page 550, dans la partie Francisci iunctini ... in duos posteriores Ptolomaei Quadripartiti libros...commentaria, au centre de l'horoscope de Copernic est écrit : "1473 Die 19. Februarij, h. 4. mi. 38. post meridiem.". Giuntini donne deux autres dates dans ce même ouvrage, ce qui n'est pas très logique : Le 19 janvier 1472 à 4 heures et 48 minutes de l'après-midi dans la partie Calendarium astrologicum et poeticum, dans le paragraphe pour le mois de janvier et le " dies 19." : "Nicolaus Copernicus Torinensis Canonicus Varmiensis, natus anno 1472. hora 4. minut. 48. post meridiem."; le 19 février 1473, à 4 heures et 48 minutes de l'après-midi, dans la partie Calendarium astrologicum et poeticum, dans le paragraphe pour le mois de février et le " dies 19." : "Nicolaus Copernicus nascitur anno Chisti 1473. minutis. 48. post quartam horam pomeridianam.".
- En 1473, dans Reusner,
Icones sive imagines virorum literis illustrium, Strasbourg, 1587. Il parle encore de la naissance de Copernic dans deux vers, "Felix ista dies, nato quae prima refulsit : Conspicitur caudam quam Leo nocte minax" qui parlent de la queue d'un lion qui est menaçant et qui est peut-être une allusion à la constellation qui est visible le 19 février 1473 à 4 heures 57 minutes.
- En 1473, dans Boissard,
Icones quinquaginta vivorum illustrium, Francfort, 1598. L'historien, collectionneur, et dessinateur, Jean-Jacques Boissard (1528-1602), reprend cette date de la notice de Nicolas Reusner.
- Le 19 février 1473 à 4 heures et 38 minutes de l'après-midi dans Baldi,
Vite de matematici, écrit en 1588, publié en 1908. L'astronome du duc de Guastalla, Bernadino Baldi (1553-1617), dit avoir trouvé cette date dans le livre de Giuntini. Il note avoir vu l'autre date de 1472, mais il considère que seule la date indiquée dans l'horoscope est valable.
- Le 19 février 1473 dans une note écrite vers 1600 par Michael Maestlin, page 96 du livre
Naratio prima par Rheticus : "Nic. Copernicum natum refereunt anno 1473 die 19. Feruarii hora 4 scr. 48 p.m. die Veneris ante Cathedram Petri".
- Le 19 février 1473 à 4 heures et 48 minutes sur un dessin d'un horoscope anonyme, fait au 16e ou au 17e siècle. Certains historiens, dont Owen Gingerich, voient dans cet horoscope la preuve qui établit définitivement la date de naissance de Copernic. Personnellement, je trouve qu'il n'est pas très sérieux de se baser sur un document anonyme.
- Le 19 février 1473 à 4 heures et 48 minutes de l'après-midi, dans une note manuscrite de Jan Brozek, vers 1612, sur la page du titre du
De revolutionibus qui est conservé actuellement à l'observatoire astronomique de l'université de Cracovie.
- Le 19 février 1473 dans Melchior Adam Silesius,
Vitae germanorum superiori, Francfort, 1615, page 126 : "Absolutae hic subtilitatis mathematicus natus est anno Christi septuagesimo tertio supra mille quadringentos, die decimo nono Februarij, Torunij in Borussia."
- Le 19 février 1473 dans Nicolas Muler,
Astronomia Instaurata, Groningen, 1617. Ce livre n'est rien d'autre que la troisième édition du livre de Copernic sur les révolutions. Il inclus une petite biographie de Copernic, dans laquelle l'éditeur, Nicolas Muler (1564-1630), déclare avoir trouvé la date de 1472 dans l'ouvrage de Giuntini et la date de 1473 dans
Germani vero chronologi, qui lui paraît plus fiable.
- Le 19 février 1473 dans Pierre Gassendi,
Tychonis Brahei, eqvitis Dani, astronomorvm coryphaei vita, itemqve Nicolai Copernici, Georgii Peverbachii & Ioannis Regiomontani, celebrium Astronomorum, Paris, 1654.
- En 1473 dans Christoph Hartknoch,
Alt und Neues Preussen, Francfort, 1684, page 370.
- En 1473 dans Thomas Pope Blount,
Censura celebriorum authorum, London, 1690, page 430.
- En 1473 dans Johann Franz Buddeus,
Allgemeines Historisches Lexicon, Leipzig, 1709, page 734.
- Le 19 février 1472 à 4 heures et 38 minutes de l'après-midi dans Georg Petrus Schultz,
Das Gelahrte Preussen, Thorn, 1724, page 39. Georg Petrus Schultz se trompe trois fois, d'abord, en disant que cette date a été donnée par Giuntini, ensuite en affirmant que Maestlin a fait l'erreur de donner la date du 19 février 1473 et enfin en décrétant que Maestlin a été le seul à critiquer la date de 1472.
- Le 19 février 1473 à 4 heures et 48 minutes de l'après-midi, dans Jakob Heinrich Zernecke,
Thornische Chronica, Berlin, 1727, page 81.
- En 1472 dans Giuseppe Maria Carafa,
De professoribus gymnasii romani liber secundus, Rome, 1751, page 381.
- En 1433 dans la légende d'un portrait de Copernic peint pour l'université de Cracovie un peu après 1765.
- Le 19 février 1472 dans Jozef Konstantyn Bogulawski,
Zycua Slawnych Polakow Kroto Zebrane, Varsovie, 1788, tome 1, page 48.
- Le 19 février 1473, dans Gottfried Centner,
Geehrte und Gelehrte Thorner, Thorn, 1763, page 11.
- Le 19 février 1473, dans Alexandre Savérien,
Histoire des philosophes modernes, Paris, 1765, page 1.
- Le 19 février 1473, dans Johann Gottfried Herder,
Der Teutsche Merkur, Weimar, 1776, page 171.
- Le 19 février 1472, dans Jozef Konstantyn Boguslawski,
Zycia Slawnych Polakow Krotko Zebrane, Varsovie, 1788, page 48. Boguslawski (1754-1817) a retenu la date de Giuntini qu'il a trouvé dans Gassendi.
- Le 19 février 1473, dans Ludwig Baczko,
Nikolaus Copernikus, Leipzig, 1796, page 137.
- Le 19 janvier 1472 dans le texte qui accompagne une gravure faite au plus tard en 1798 par Nicolas Balthasar Dandeleau.
- Le 12 février 1473 dans Jan Czynski,
Kopernik et ses travaux, Paris, 1847, page 26.
- Le 12 février 1473 dans François Arago,
Œuvres complètes, Paris, 1854, tome III, page 173.
- En 1472, dans Joseph Bertrand,
Les fondateurs de l'astronomie moderne, Paris, 1865, page 5.
- Le 19 février 1473, dans Kühne et Kirschner,
Biographia Copernicana, Berlin, 2004, page 302. Ces deux grands experts de Copernic font remarquer que cette date véritable (richtig) était connu depuis le 16e siècle : "Wie die Aufzeichnungen von Caspar Peucer und Pirmin Gasser zeigen, war der richtige Geburstag von Copernicus, der 19. Februar 1473, durchaus schon im 16. Jh. Bekannt ".
Toutes ces dates s'entendent selon le calendrier julien car l'usage en histoire veut que les anciennes dates ne soient pas actualisées afin d'éviter d'écrire "... le jour de Noël, au début du mois de janvier, ...".
La date de naissance de Copernic, la plus fréquemment citée et qui me paraît la plus fiable, est celle du 19 février 1473. La date de 1472 vient d'une erreur de Giuntini, qui a ensuite été reprise par au moins six biographes. A vrai dire, que Copernic soit né en janvier ou en février, en 1472 ou en 1473, n'a pas beaucoup d'importance. Les erreurs se propagent d'un ouvrage à l'autre à travers les siècles, et il en est de même pour les corrections. Il suffit de choisir les bons auteurs.
Je maintiens que pour la date de la mort de Copernic, Gassendi ne se base que sur une source secondaire, la biographie de Baldi, laquelle dérive de la lettre de Giese. Son fac-similé se trouve dans Erna Hilfstein,
Studia Copernicana XXI, 1980, qui est un livre rare malgré la qualité de son contenu (Erna Hilfstein, compagne d'Edward Rosen, est une historienne aussi rigoureuse que lui). Depuis 1537, Giese vivait à 150 km de Copernic, dans sa résidence épiscopale de Löbau/Lubawa. Et en mai 1543, il se trouvait encore plus loin de son ami puisqu'il était allé à Cracovie pour assister au mariage du prince Sigismond Auguste avec Elisabeth d'Autriche.
De nos jours, nous avons un autre document, que Gassendi n'a pas connu. Pourquoi ne faudrait-il pas en tenir compte ? C'est un document officiel original, daté et contresigné par le notaire Fabian Emmerich, donc qui a plus de poids que la copie de la lettre de Giese. Mais comme c'est un document qui parle du remplacement de Copernic sans parler de sa mort, il ne peut pas nous donner la certitude que l'on aimerait avoir à ce sujet. Néanmoins, ceux qui ont un peu étudié les diocèses européens à la Renaissance savent qu'il était très rare qu'un chanoine fut remplacé avant sa mort. De plus, ni Giese, ni personne d'autre n'a dit qu'il se serait démis de son office avant son décès. Dans le seul cas que je connaisse d'un remplacement avant la mort du titulaire, le coadjuteur était une personne âgée et très influente qui a acheté la démission. Or Copernic n'avait pas besoin d'argent (voir son héritage) et le remplaçant de Copernic était un homme très jeune qui n'était probablement pas très pressé ni habitué aux négociations pour obtenir une démission. Donc, un historien allemand très bien informé, Jürgen Hammel, et moi-même pensons qu'il y a un doute sur la date de sa mort, et que ce serait malhonnête de ne pas avoir de doute étant donné ce document d'archive du chapitre de Warmie et la fragilité du document de Giese. Par ailleurs, il y a deux autres sources dont j'ai déjà parlées (Snell et Kepler) qui attestent que Copernic a vu son livre imprimé ou au moins quelques pages imprimées, plusieurs jours avant sa mort.
Par ailleurs, pour moi, Copernic fut un grand homme, pas seulement à cause de la (re)découverte du système héliocentrique, mais aussi pour d'autres qualités. Il fut un humaniste connaissant assez bien les auteurs de l'antiquité, latins et grecs, parlant lui-même grec, et ayant traduit un livre du grec vers le latin. Il fut un bon économiste comme le montre ses remarquables traités sur les monnaies. Il connaissait la trigonométrie comme le montre son livre sur les sinus. Il fut un bon médecin selon les témoignages de ses contemporains. Il a été critiqué et manipulé par les anti-cléricaux à la suite du procès de Galilée, par les français du 19e siècle amateurs de bonnes histoires plutôt que d'histoires vraies, par les allemands qui l'ont célébré comme étant un grand prussien, par les communistes qui en ont fait un homme modeste qui s'est élevé grâce à son génie alors qu'il était d'une famille très riche et entouré de savants (dont le génial Fracastoro, un peu trop dans l'ombre, selon moi).