J'aimerais savoir pourquoi du mouvement Baroque qui encourage à l’exubérance,à la liberté et à l'imagination on n'est passé au classicisme qui est comme une régression dans l'évolution de la liberté des écrivains au XVII siècle?

Merci.

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C'est s'aimer bien peu que de haïr quelqu'un mais c'est haïr tout le monde que de n'aimer que soi.
Proverbe chinois

Tout d'abord, on n'est pas "passé" du baroque au classicisme ; ces deux styles (qu'il est d'ailleurs bien difficile de définir) ont cohabité, dans des lieux parfois différents, mais pas toujours. C'est surtout dans la France de Louis XIV que se développe le classicisme, en réaction au goût italien, que ce soit en littérature ou dans les arts plastiques - architecture, peinture... Mais ça n'empêche pas qu'on ait largement hésité (par exemple, pour le Louvre, on a fait venir Le Bernin, qui est reparti après une cabale d'architectes français, ce qui a donné la colonnade tout à fait classique). En musique, c'est un peu plus compliqué, on ne parle de classicisme qu'à partir du milieu du XVIIIe, pour Mozart et Haydn essentiellement ; cependant, on distingue un baroque français d'un baroque italien.
Au contraire, le baroque s'est beaucoup développé en Italie, puis dans le monde germanique et (couci-couça) en Espagne, donnant peu à peu lieu au rococo.

Ensuite, le classicisme n'est en rien une régression : de nombreux chefs d'oeuvre peuvent être qualifié de classiques, comme les pièces de Racine ou de Boileau (que vous connaissez sans doute mieux que la poésie de Cyrano de Bergerac) en littérature, ou Vaux-le-Vicomte et Versailles en architecture. La codification parfois très poussée du classicisme (l'exemple le plus connu en est la règle des trois unités dans le théâtre) ne doit pas forcément être lue comme une entrave à la liberté d'un artiste : la règle est souvent un stimulant pour un artiste, qui peut jouer sur ses limites, et tenter de la contourner. D'ailleurs, pensez que ce sont les artistes eux-mêmes qui définissent des règles (cf. art poétique de Boileau, par exemple).

Merci d'avoir éclairci ma vision du Classicisme!

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C'est s'aimer bien peu que de haïr quelqu'un mais c'est haïr tout le monde que de n'aimer que soi.
Proverbe chinois

Il y a un excellent petit bouquin d'Eugenio d'Ors qui s'appelle du Baroque. Il date de 1935. Il voit dans le baroque une catégorie permanente de la pensée, qu'il lie au dionysiaque. Le baroque a pour lui toujours existé, et il cite aussi bien l'art de l'antiquité tardive que le gothique flamboyant ou le style 1900. Mais pour la période historique, celle du XVII-XVIIIe s., il insiste sur l'esprit rationaliste qui se développe, qui donne les Lumières, les progrès des sciences etc. Le baroque est une réaction à ce désenchantement, la contre-courbe inutile pour compenser l'aridité de la géométrie, l'homme naturel contre la société policée, ... (il fait de Defoe un des grands auteurs baroques avec son Robinson Crusoe). Il montre comment Pombal qui réglemente le Portugal, gère le royaume avec un souci d'efficacité administrative, reconstruit Lisbonne (après 1755) de manière méthodique et rationnelle, s'accorde un parc foisonnant dans la capitale portugaise. Le baroque est ici, selon d'Ors, "un dimanche de la pensée". Il est renforcé au Portugal par sa position finisterre car "on n'occupe pas impunément une loge à l'avant scène dans le grand théâtre du mystère" (je cite de mémoire). Bref un petit livre, mais tout à fait stimulant même s'il a fait froncer le sourcil aux historiens de l'art purs et durs.

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"Denken heisst überschreiten" : Penser signifie faire un pas au-delà. Ernst Bloch (1885-1977)

C'est une vision qui date quand même beaucoup... L'idée d'un baroque intemporel, comme l'idée d'une succession systématique archaïque / classique / maniériste sont dépassées, les mouvements artistiques étant éminemment plus complexes.
On n'utilise plus guère le terme de baroque, d'ailleurs, si ce n'est pour le critiquer. Il sert à désigner tout et n'importe quoi, et des oeuvres qui sont construites dans des pensées complètement différentes. D'ailleurs oeuvres "classiques" comme "baroques" dérivent souvent d'une même pensée, en particulier, au début du XVIIe, la mise en oeuvre des recommandations du Concile de Trente.

Sur le sujet, lire Yves Bonnefoy, Rome 1630, une mine synthétique et claire.

Je n'y connais pas grand chose en histoire de l'art, mais j'ai appris que le baroque était un style artistique (j'entends ici architectural et pictural) post-tridentin, justement parce que "l'excentricité" demandée devait trancher catégoriquement avec le style épuré des temples protestants... J'ai tout faux ?

NB : L'art baroque est présent sur le forum : viewtopic.php?f=20&t=24219&p=328918&hilit=baroque#p328918

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[...] Te raconter enfin qu'il faut aimer la vie
Et l'aimer même si le temps est assassin
Et emporte avec lui les rires des enfants
Et les mistrals gagnants...
Renaud, Mistral gagnant, 1985.

Pas tout faux mais c'est tout de même un peu trop simple, ça n'est pas du surchargé pour du surchargé du moins le beau baroque. Il y a tout une symbolique, la courbe, le mouvement pour évoquer l'incertitude de la vie terrestre. Le mouvement ascendant pour la transcendance. Et puis c'est un art de l'émotion. En fait c'est bien l'art qui exprime le message de la Réforme catholique. Mais ses canons ont eu une influence si forte que cela a débordé sur l'art profane.

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Alceste

Que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants... ne soient pas des signaux de haine et de persécution...

La prière de Voltaire, Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII

Eugenio d'Ors s'inscrit non dans l'histoire de l'art mais celle des idées. On peut bien sûr dire que l'apollinien et le dionysiaque sont dépassés mais c'est de toute façon un livre à connaître ne serait-ce que par l'importance qu'il a eu pour ceux qui ont écouté ou lu d'Ors, comme Paul Valéry, Picasso et Stravinsky. Il s'agit ici moins de la scientificité de l'auteur que la séduction d'un grand esprit de l'entre-deux-guerres, qui a le sens de la formule (encore une fois, lisez son anallyse du Robinson Crusoe). Sinon, la référence sur le baroque litteraire est bien sûr le livre de Jean Rousset, La Littérature à l'âge baroque, Circé et le Paon. Je crois que les historiens de la littérature ne rechigne pas à utiliser le terme de baroque. C'est pour la musique que le terme de "baroque" est particulièrement mal employé : on classe souvent Buxtehude ou Bach dans la musique baroque. Pour le côté contre-Réforme, on passera.... (même si Bach a composé une messe catholique).

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"Denken heisst überschreiten" : Penser signifie faire un pas au-delà. Ernst Bloch (1885-1977)

Oui Bach n'a rien de baroque.

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Alceste

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