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Message Publié : 20 Sep 2005 22:17 
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Polybe
Polybe

Inscription : 17 Mai 2005 21:49
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A propos de mon dernier post, quelques auteurs qui represente un peu de theme de l'anarchisme chretien :

Tolstoï, Jacques Ellul, Ivan Illitch. Je n'ai lu que le dernier, mais c'est partit pour les deux autres dès demain. Si vous avez des conseils à ce sujet, vous êtes les bienvenus.

Citer :
"Par conviction spirituelle, je ne suis pas seulement non violent mais je suis pour la non-puissance. Ce n'est sûrement pas une technique efficace. (...) Mais c'est ici qu'intervient pour moi la foi. (...) On ne peut pas créer une société juste avec des moyens injustes. On ne peut pas créer une société libre avec des moyens d'esclaves. C'est pour moi le centre de ma pensée."

- Patrick Chastenet, Entretiens avec Jacques Ellul, Paris, La Table Ronde, 1994, p. 52.

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Message Publié : 21 Sep 2005 9:12 
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Thucydide
Thucydide

Inscription : 30 Avr 2005 11:00
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"Anarchisme chrétien" : ne sont-ce pas là des termes antinomiques ?


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Message Publié : 21 Sep 2005 9:39 
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Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges

Inscription : 09 Août 2005 17:34
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"Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu"
"Vous ne pouvez pas servir deux maîtres..."
"Je fais toujours la volonté du Père..."
... "anarchisme chrétien" me semble une contradiction dans les termes... et théologiquement et historiquement!


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Message Publié : 21 Sep 2005 11:52 
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Polybe
Polybe

Inscription : 17 Mai 2005 21:49
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J'ai déja traité un peu plus haut les correspondances qu'il me semblai voir entre l'anarchisme et la religion. pour simplifier l'une c'est ni dieu ni maitre, l'autre c'est pas de maitre sauf Dieu. Pour certaine personne c'est un cheminement qui conduit logiquement de l'une a l'autre.

On peut croire en Dieu et ne pas accepté que certains(les rois, ...) ou certaines choses (l'argent, la technique, ...) regnent sur les autres. Pour moi c'est même une application logique de la religion.

Je ne peut que vous conseiller de la lecture a ce sujet. Outre les oeuvres des personnages précités, voici quelques liens glanés de ci de la.

anarchistes mystiques russes Le terme mystique tombe surement mal, mais c'est un lien interessant.

Jacques Ellul

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Message Publié : 04 Jan 2006 14:37 
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Polybe
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Inscription : 17 Mai 2005 21:49
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De Jacques Ellul, justement Anarchie et Christianisme (Lyon, Atelier de création libertaire, 1988. Réédition La Table Ronde, 1998)) où il montre que l'anarchisme est la sensibilité politique la plus compatible avec la pensée biblique.

Peut être ce penseur arriverat-il mieux que moi a vous expliquer ce sujet, car cette citation

Citer :
anarchisme chrétien" me semble une contradiction dans les termes... et théologiquement et historiquement!


semble montrer que les termes anarchie et christianisme ne sont pas forcement compris par tous.

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Message Publié : 22 Mars 2006 11:43 
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Hérodote
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Je rajouterai, aux trois anarchismes précités, l'anarcho-capitalisme dont Gustave de Molinari, disciple de l'économiste landais Frédéric Bastiat, fut l'un des premiers théoriciens.
L'anarchie est une société sans Etat mais pas sans règles. Il ne faut donc pas la confondre avec l'anomie. Il est important de ne pas confondre Etat et Droit comme il faut faire une différence Etat de droit et état de Droit.


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Message Publié : 25 Mars 2006 12:35 
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Grégoire de Tours
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C'est-à-dire ?
Vous voulez dire que la "règle" est une forme de droit, c'est cela ? Mais qu'est-ce exactement qu'une "règle", alors ?


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Message Publié : 25 Mars 2006 13:28 
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Hérodote
Hérodote

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Le droit est un ensemble de règles régissant le vie en société.
Une règle est une prescription à laquelle il faut se conformer dans certaines circonstances.


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Message Publié : 01 Avr 2006 20:50 
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Grégoire de Tours
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Bon, procédons donc par ordre : Règle / Droit.

Le droit, au sens d'un ensemble d'énoncés prescriptifs régissant la vie en société sur un territoire donné, est par définition garanti par une autorité. Pourquoi par définition, parce que si le droit n'était pas garanti par une autorité -je vais dire Etat, pour faire plus simple- rien ne pourrait jamais assurer qu'il soit respecté. Donc il n'existerait pas. Donc, à moins que vous me proposiez une autre définition, mais pour moi, pas de doute : Le droit est absolument inséparable de l'Etat -ou d'une autorité supra, mais n'anticipons pas.

Donc pour l'instant, si on définit l'Etat comme l'organisation qui revendique le monopole de la violence -de l'usage de la force- sur un territoire donné, on le définit comme l'organe chargé de faire respecter le droit, bref de le garantir.
La difficulté étant maintenant de savoir si l'Etat est lui-même soumis au droit ou non. Si on dit "non", on se facilite beaucoup le travail :) mais disons quand même : "oui, autant que possible". Nous sommes alors dans le cas de l'Etat de droit. La question que posent alors les "libéraux", c'est : Mais qu'est-ce que c'est qu'un Etat qui se garantit lui-même ? C'est accorder beaucoup trop de pouvoir à un seul ordre, et le fait qu'il trouve sa légitimité dans la souveraineté populaire ne change rien à l'affaire.

A partir de là, les propositons diffèrent très largement.

Dans certains cas, on considère que le danger se situe dans le monopole de la légitimité politique. On prone une polyarchie, cherchant à multiplier les contre-pouvoirs à l'Etat, et l'économie est plus ou moins comprise dans ce sens. Ceux-la pensent que les hommes sont d'abord menés par leur intéret personnel d'une part, et d'autre part contestent naturellement le monopole de l'Etat sur le droit. Ils considèrent donc la primauté de la règle.

Dans d'autres cas, on considére que le danger se situe dans l'autonomie légitimante de l'Etat, que toute "vraie" légitimité est hétéronome, et que seul Dieu est l'entité dont le pouvoir se justifie par lui-même. Ceux-là veulent revenir sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat, ils veulent plus ou moins sérieusement installer le royaume de Dieu sur cette terre, et cela passe alors par la disparition de l'Etat profane. Là, on n'est pas dans le libéralisme, est-ce bien la peine de le préciser.

Variante : Il y a ceux qui font à peu près le même raisonnement, mais sans forcément invoquer le divin, simplement des valeurs humaines plus ou moins transcendantes et universelles. C'est la variante "Droits de l'Homme".

Nous sommes donc passés du droit à la morale. C'est normal, car c'est là qu'est tout l'enjeu, au fond.
Car la seule manière de prôner -sérieusement- une société auto-régulée, une anarchie ou la primauté de la règle sur le droit (le tout étant à peu près équivalent, enfin je crois, vous me direz), c'est de la fonder sur la morale. Vous pouvez dire : "Une société sans droit est possible" -droit au sens de garanti par l'Etat, disons "droit objectif" par oppositions aux "droits subjectifs", les droits naturels par exemple - uniquement tant que vous concevez que la vie sociale est éthiquement fondée. Sinon, et bien vous revendiquez un modèle du type "guerre de tous contre tous", qui ne peut quand même pas être un modèle de société enviable et attractif, n'est-ce pas ? Enfin, je veux dire que c'est un concept théorique, quoi. Une vue de l'esprit.

Donc voila. La question, ce n'est pas : Droit ou règle, c'est : Droit ou éthique.


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Message Publié : 02 Avr 2006 15:23 
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Grégoire de Tours
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Bergame a écrit :
Le droit, au sens d'un ensemble d'énoncés prescriptifs régissant la vie en société sur un territoire donné, est par définition garanti par une autorité. Pourquoi par définition, parce que si le droit n'était pas garanti par une autorité -je vais dire Etat, pour faire plus simple- rien ne pourrait jamais assurer qu'il soit respecté. Donc il n'existerait pas. Donc, à moins que vous me proposiez une autre définition, mais pour moi, pas de doute : Le droit est absolument inséparable de l'Etat -ou d'une autorité supra, mais n'anticipons pas.

Xavier a tout à fait raison de dire qu’il ne faut pas confondre Etat et Droit. Et c’est pourtant ce que vous faîtes ici Bergame. Je vous conseille la lecture de L’origine de l’Etat de Lowie et La société contre l'Etat de Clastres, vous verrez que le Droit existe sans Etat.

Bergame a écrit :
Car la seule manière de prôner -sérieusement- une société auto-régulée, une anarchie ou la primauté de la règle sur le droit (le tout étant à peu près équivalent, enfin je crois, vous me direz), c'est de la fonder sur la morale. Vous pouvez dire : "Une société sans droit est possible" -droit au sens de garanti par l'Etat, disons "droit objectif" par oppositions aux "droits subjectifs", les droits naturels par exemple - uniquement tant que vous concevez que la vie sociale est éthiquement fondée. Sinon, et bien vous revendiquez un modèle du type "guerre de tous contre tous", qui ne peut quand même pas être un modèle de société enviable et attractif, n'est-ce pas ? Enfin, je veux dire que c'est un concept théorique, quoi. Une vue de l'esprit.

Donc voila. La question, ce n'est pas : Droit ou règle, c'est : Droit ou éthique.

Vous avez une vision purement Hobbesienne. Je respecte cela mais pour ma part je suis plutôt partisan de Locke. Ce que vous nommez "droits objectifs" sont souvent appelés "droits positifs" et peuvent souvent être subjectifs et immoraux. A l’inverse ce que vous nommez "droits subjectifs" sont souvent appelés "droits naturels" et sont toujours objectifs et moraux. Je prend un exemple: les impôts. Le droit étatique exige de payer des impôts (dont les taux peuvent passés du simple au quintuple selon la position temporelle ou géographique, ce qui prouve le caratère subjectif...). Le droit naturel dit que si le payeur y est contraint c’est du vol. Et le vol est immoral.
Ce n’est donc pas la question Droit ou Ethique, c’est plutôt Droit éthique ou Droit non éthique.


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Message Publié : 03 Avr 2006 0:28 
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Grégoire de Tours
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Noacyl, plutôt que de "conseiller des lectures", pourquoi ne développez-vous pas des arguments ? Parce qu'à propos de Clastres par exemple, je crois qu'il ne me serait pas très difficile encore de montrer que votre référence est très mal choisie ? Enfin, si vous avez vraiment lu Clastres, vous savez qu'il ne parle pas de droit , n'est-ce pas ?

Alors je répète qu'il est impossible de parler de droit sans une autorité qui le garantit. Si vous pensez autrement, pourquoi pas, mais s'il vous plait, présentez des arguments.

Ensuite, non, le droit objectif n'est pas forcément positif. Le positivisme est une des doctrines du droit, l'autre grande doctrine étant le jusnaturalisme qui considère au contraire que le droit trouve son origine dans la morale.

Enfin, j'aimerais svp vous demander de bien vouloir citer le passage où Locke parle de l'impot. Ce n'est pas un piège, mais je ne me souviens pas qu'il y fasse référence, je peux avoir une lacune.


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Message Publié : 03 Avr 2006 10:02 
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Hérodote
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Bergame a écrit :
Alors je répète qu'il est impossible de parler de droit sans une autorité qui le garantit. Si vous pensez autrement, pourquoi pas, mais s'il vous plait, présentez des arguments.

Vous avez raison. Mais autorité ne veut pas dire Etat et encore moins pouvoir.


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Message Publié : 03 Avr 2006 12:57 
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Grégoire de Tours
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Bergame a écrit :
Enfin, si vous avez vraiment lu Clastres, vous savez qu'il ne parle pas de droit , n'est-ce pas ?

Vous jouez sur les mots et on en revient à la différenciation règle/droit discutée plus haut où vous avez vous même fini par dire:
Citer :
la primauté de la règle sur le droit (le tout étant à peu près équivalent, enfin je crois, vous me direz)


Bergame a écrit :
Alors je répète qu'il est impossible de parler de droit sans une autorité qui le garantit. Si vous pensez autrement, pourquoi pas, mais s'il vous plait, présentez des arguments.

Des règles peuvent être respectées sans qu’il y ait un homme ou un groupe d’hommes qui commandent. Il n’y a donc pas de pouvoir autre qu’un "pouvoir" détenu par toute la société. Et les règles, lesquelles sont apprises par l’éducation, sont respectées par tout le monde. Clastres montre bien cela en prenant exemple sur les sociétés dites primitives.

Bergame a écrit :
Ensuite, non, le droit objectif n'est pas forcément positif. Le positivisme est une des doctrines du droit, l'autre grande doctrine étant le jusnaturalisme qui considère au contraire que le droit trouve son origine dans la morale.

Non Bergame. Dans votre message précédent vous avez appelé "droit objectif" le droit garanti par l’Etat. J'ai répondu que cela s’appelait "droit positif" et qu’il était au contraire subjectif. Le jusnaturalisme est ce que j’ai appelé "droit naturel". :wink:

Bergame a écrit :
Enfin, j'aimerais svp vous demander de bien vouloir citer le passage où Locke parle de l'impot. Ce n'est pas un piège, mais je ne me souviens pas qu'il y fasse référence, je peux avoir une lacune.

J’ai pris l’exemple des impôts pour expliquer que le droit positif pouvait être immoral alors que le droit naturel était moral.


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Message Publié : 03 Avr 2006 21:17 
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Grégoire de Tours
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Noacyl a écrit :
Vous jouez sur les mots


Je sais Noacyl, vous me l'avez déjà dit, je joue sur les mots. Mais comment vous dire : Pour celui qui ne fait de différences qu'entre les fruits et les légumes, l'orange n'est jamais qu'un gros citron -en un peu moins jaune. Seulement, un botaniste à qui vous iriez faire part de votre découverte soufflerait sans doute un bon coup, prendrait un air gêné, et réfléchissant à par où il pourrait commencer, finirait sans doute par vous dire : "Oui, c'est vrai, tu as raison, après tout. Les citrons et les oranges, c'est un peu pareil. D'ailleurs, tiens ! ajouterait-il peut-être l'air presqu'heureux, tous les deux contiennent de la vitamine C !"

C'est un petit peu pareil si vous allez voir un juriste ou un philosophe du droit en disant que "tradition" et "droit", c'est pareil. Que voulez-vous qu'on vous dise ? Bien sûr, vous avez raison, d'ailleurs tous deux sont un ensemble d'énoncés prescriptifs.

Par ailleurs, lorsque vous ajoutez que ces règles que vous évoquez sont celles qui sont apprises par l'éducation, vous vous dirigez encore vers un autre paradigme, culturaliste celui-là, qui n'a strictement rien à voir avec Clastres. Mais bon, tant qu'on est dans les fruits, une bonne salade, ça se refuse pas.

Pour Clastres, je vous le dis en un mot, la problématique n'est absolument pas celle du droit, ni de la règle. C'est celle du pouvoir. Et sa définition du pouvoir n'est absolument pas la votre : Aucune notion de souveraineté chez Clastres, pas de "pouvoir détenu par toute la société", simplement : un rapport au pouvoir et à la force différent dans les sociétés an-historiques, qui selon lui les différencie fondamentalement des sociétés historiques. Mais cela ne change rien à la question de l'autorité elle-même -qui est due au prestige, selon Clastres, du moins en temps de paix- et surtout, n'a rien à voir avec la règle ou le droit. C'est tout simplement un autre sujet.
Trouvez des liens si vous voulez, il y en a peut-être, mais argumentez, et commencez s'il vous plait par le lire. Au moins lisez ici : http://www.passion-histoire.net_ ... sc&start=0


Noacyl a écrit :
répondu que cela s’appelait "droit positif" et qu’il était au contraire subjectif. Le jusnaturalisme est ce que j’ai appelé "droit naturel". :wink:


Aaah ? C'est donc cela que vous appelez les "droits naturels" ? :) Mais cher Noacyl, vous en donnez une telle définition que je pensais que nous ne parlions pas de la même chose ! Tiens, par exemple, pourquoi semblez-vous les opposer à l'Etat, ces "droits naturels" ?

Votre "exemple", que bien entendu, vous n'avez pas trouvé chez Locke, tendait ainsi à dire ceci : Les droits naturels sont les droits inaliénables de l'individu, irréductibles à l'autorité de l'Etat. En particulier, les droits de l'individu et les prérogatives de l'Etat sont divergents. Il s'agit donc de défendre ces droits contre la mainmise de l'Etat lorsqu'il outrepasse les pouvoirs -quand il exige l'impot par exemple.
Donc ça, pour vous, c'est le jusnaturalisme, n'est-ce pas ? Une sorte de société contre l'Etat, comme vous le disiez si mal, bref un anarchisme de bon aloi, "moral".

Et bien, moi je vous propose une autre version : La théorie des droits naturels cherche à expliquer pourquoi et comment le droit, bien qu'il soit issu de l'Etat, soit irréductiblement produit par les citoyens, souverains. Ceux-ci étant alors considérés à la fois comme sujets et objets du droit.
Dans cette perspective, il n'y a donc absolument pas antagonisme entre l'Etat et le citoyen, au contraire, il y a convergence. Et ce qui définit la constitution de la société, c'est justement l'abandon des droits naturels de l'homme au profit du pouvoir politique, et qui plus est, un abandon volontaire.

Alors, puisque vous citez Locke, votre philosophe "préféré", mais sans pouvoir hélas le citer, moi je vous propose quelques références à l'appui de cette thèse.

Second Traité du gouvernement civil, c'est pas compliqué, ça commence dès le §1 avec la spécificité du pouvoir politique, §2, définition de ce pouvoir comme droit de faire les lois et de les faire exécuter, au besoin en recourant à la force et aux sanctions pénales. Naturellement, §3 : uniquement en vue du bien public.

Traité du gouvernement civil. Tenez, vous le trouverez ici :
http://classiques.uqac.ca/classiques/lo ... civil.html je vais détailler un peu :

§87 : "Chacun des membres s'est dépouillé de son pouvoir naturel, et l'a remis entre les mains de la société etc."

§88 : "Pour toute les causes dans lesquelles il peut appeler au Magistrat, il a remis en même temps à la société le droit d'employer toute sa force pour l'exécution des jugements de la société."

§74 : Car effectivement, le Prince n'exerce son pouvoir que parce que le peuple y consent. Mais vous noterez bien que Locke dit : "consentement". Une fois que les droits naturels ont été abandonnés, ils l'ont été pour la vie. Locke précise d'ailleurs que l'individu est lié à son Prince, à son territoire et à ses lois. Ainsi :

§119 : Le consentement tacite : "Je dis que tout homme qui a quelque possession, qui jouit de quelque bien [...] donne par là son consentement tacite, et est obligé d'obéir aux lois de ce gouvernement, tant qu'il jouit des biens qui y sont renfermés etc."
En revanche, les enfants ne sont pas engagés par cette fidélité, mais je ne sais plus où c'est dans le texte.

§94 : Le Sénat, Parlement, comme adjuvant au Prince : "Personne, sans doute, dans la société civile ne peut etre exempte d'en observer les Lois".

§98 : "Ou le plus grand nombre ne peut conclure et obliger le reste à se soumettre à ses décrets ; [...] là on ne saurait résoudre et exécuter la moindre chose ; et par conséquent, cette espèce de corps de société se dissoudrait d'abord." Ca, c'était pour votre (mauvaise) lecture de Tocqueville.

Par ailleurs, je pense que cela va être un choc pour vous, mais Locke était fondamentalement égalitariste, comme c'est dit par exemple §123.

Pour comprendre quels droits naturels sont abandonnés dès lors qu'on entre en l'état de société, lire à partir de §129

Etc. etc.

Et puis, pendant que vous y serez, je vous propose de lire tout le chapitre III qui s'intitule De l'Etat de Guerre : Vous comprendrez peut-être ainsi ce que la pensée de Locke doit à Hobbes, cela vous évitera sans doute à l'avenir de les opposer naïvement.

Toujours est-il que, comme vous le voyez, on est très loin de l'anarchiste qui érigerait les droits inaliénables de l'individu en face du monstre-Etat. Ca, c'est autre chose, c'est Nietzsche, c'est Proudhon, c'est Engels même, à la limite (éventuellement) mais ce n'est pas le libéralisme.

Et vous voyez également que chez Locke, le droit, bien qu'issu des droits naturels abandonnés par les individus à l'autorité, est garanti par la force et le pouvoir de l'Etat. Et Locke répète assez régulièrement que l'état de nature est un état de confusion, de discordes, de guerre, pour qu'on ne s'y trompe pas quand on le lit.
Par conséquent, aucun doute : Pour Locke, quiconque résidant sur le territoire d'un Etat doit se soumettre à ses lois, y compris -et surtout !- lorsqu'il s'agit de l'impot.

C'est que, voyez-vous, les philosophes libéraux pensaient simplement qu'en l'état de société, on n'a pas que des droits, on a aussi des devoirs. Et que l'Etat est là pour assurer que chacun les respecte et les assume. Etonnant, n'est-ce pas ?

Bref, vous serez gentil à l'avenir de ne pas sortir à nouveau des noms d'auteur sans venir avec des références, svp. Celles-ci m'ont prises assez de temps, j'espère que vous saurez en tenir compte. Parce que je pense sérieusement que vous n'avez lu vous-même aucun des auteurs que vous citez, et que vous vous contentez de répéter bêtement ce que vous disent vos profs de Dauphine ou d'Assas.
Ce qui n'est pas très libre-penseur non plus, je vous le signale au passage.

Cordialement.


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Message Publié : 03 Avr 2006 22:47 
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Hérodote
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Inscription : 22 Mars 2006 10:51
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Bergame a écrit :
Par conséquent, aucun doute : Pour Locke, quiconque résidant sur le territoire d'un Etat doit se soumettre à ses lois, y compris -et surtout !- lorsqu'il s'agit de l'impot.

Impôt qui doit être utilisé uniquement pour assurer les fonctions régaliennes.
Locke a une conception minimal de l'Etat et, en cela, il est plus proche de l'anarchiste libéral que de l'étatiste français.
Et le domaine de la loi est strictement limité aux domaines régaliens dans le respect du droit naturel (le droit positif est soumis au droit naturel).


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