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Message Publié : 13 Avr 2008 2:57 
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Nietzche n'est pas vraiment le plus simple à lire ; loin de là à mon humble avis.
Par le recours permanent aux images, aux métaphores, aux paraboles -bref à la littérature et à la poésie- il rend complexe la compréhension du sens profond de son texte. Je dirais même, au risque de provoquer un désaccord chez certains, que Kant est un auteur beaucoup plus simple -car beaucoup plus net- à lire.

Mais bon, d'un autre côté, je ne prétend rien ... je ne suis pas docteur en philosophie. :mrgreen:

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"Un monde ne saurait être fictif par lui-même, mais seulement selon qu'on y croit ou pas." - Paul Veyne


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Message Publié : 13 Avr 2008 23:19 
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Grégoire de Tours
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:)

Personnellement, je dirais que ce sont deux écritures très différentes, mais qui renvoient aussi à deux pensées très différentes. Kant écrit comme on pose des équations, tandis que Nietzsche se définirait presque plus comme artiste ou psychologue que comme philosophe. La lecture de Kant est donc ardue en ce sens qu'il faut véritablement le lire ligne à ligne, mot à mot, si on veut espérer retrouver et suivre le fil de sa démonstration. Mais tout est là, écrit avec la plus grande précision et rigueur. Au contraire, la lecture de Nietzsche est ardue en ce sens que beaucoup de choses sont implicites, dissimulées, et demandent une certaine culture.
Mais du coup, le ticket d'entrée n'a pas le même coût, et clairement, on peut lire Nietzsche sans trop de problème, quitte à le lire comme un poète ou un écrivain, tandis que pour se colleter aux Critiques de Kant, il faut une motivation, je ne pense pas qu'on puisse s'y mettre "pour le plaisir".

C'est intéressant, d'ailleurs, car c'était tout à fait conscient, chez Nietzsche, cet effort pour se rendre accessible par le plus grand nombre. C'est d'ailleurs une constante de la pensée germanique, justement après Kant, et en réaction à lui. Hegel, par exemple, et lorsqu'il était jeune, disait déjà qu'il fallait écrire la philosophie comme on écrit de la poésie, de manière à rendre la pensée accessible au "peuple". Mais chez Nietzsche, c'est un peu plus pervers : Il est sans doute le premier à appliquer systématiquement le principe selon lequel ce n'est pas en s'adressant à la raison que l'on convainc et que l'on fait passer ses idées, mais en s'adressant à... autre chose, disons la psyché. Par conséquent, Nietzsche était tout à fait conscient du fait que ses ouvrages seraient lus de manière non informée, c'est par exemple clairement avec cette stratégie en tête qu'il a écrit Zarathoustra, sa correspondance est assez claire sur ce point -enfin, surtout sa correspondance des derniers mois, il est vrai, alors bien sûr, on peut en discuter à l'infini.
En tous cas, cela pour dire que je me demande jusqu'à quel point on peut affirmer en revanche que Nietzsche pratiquait "l'art d'écrire". C'est au sens straussien que vous utilisez cette expression, Jean le Bleu ?

(Entre parenthèses, le choix de votre pseudo me touche tout particulièrement, c'est l'un de mes romans favoris. Vous également ?)

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Dernière édition par Bergame le 13 Avr 2008 23:23, édité 2 fois.

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Message Publié : 13 Avr 2008 23:20 
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Il peut peut-être s'agir tout simplement d'une divergence de goûts purement "littéraires", ou stylistiques.

Personnellement, le style de Nietzsche me convient parfaitement, et l'utilisation des images me rend l'accès à sa pensée, ou du moins l'humble interprétation que j'en fait, plus facile d'accès.

Il m'est plus accessible de lire un prose poétique comme celle d'Ainsi parlait Zarathoustra, que L'être et le Néant de Sartre...

Mais il est certain que beaucoup d'auteurs sont assez difficiles à lire, je pense notamment à Hegel, qui m'a demandé une énorme préparation sur la phénoménologie avant de pouvoir oser entamer et essayer d'aboder sa Phénoménologie de l'esprit, ou encore Bergson, avec Durée et simultanéité, que je n'ai même pas pu débuter, faute de connaissance physiques nécessaires...

Quant à des regroupements d'oeuvres, je signale qu'est parue il y peu de temps un petit recueil édité par Le Monde (Le Monde de la philosophie), regroupant trois des ses oeuvres: Ainsi parlait Zarathoustra, Le Crépuscule des Idoles, et Ecce Homo, qui sont toujours disponibles à l'achat.

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« L'âge que nous vivons est dangereux ; comme il serait ennuyeux s'il ne l'était pas. » John Steinbeck
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Message Publié : 14 Avr 2008 8:45 
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Plutarque
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Tout à fait d'accord avec Bergame.
Il y a une structure feuilletée chez Nietzsche qui fait qu'on n'y entre pas de la même façon selon, par exemple, le degré de familiarité que l'on a avec la culture grecque. Il fait toujours bon y revenir. Et il est évident que Nietzsche vise ailleurs, remue ailleurs, en tout cas s'adresse à autre chose qu'à l'implacable logique cultivée par Kant ou Spinoza, jusqu'à Hegel.
A propos de Hegel justement : l'intention que tu nous rapportes, Bergame, était louable (d'où la sors-tu ? mais c'est très probable, il me semble qu'on a trop tendance à mettre en avant le Hegel philosophe officiel pour mieux se dispenser de penser le Hegel enthousiaste de la Révolution française et par certains aspects - oui - proprement démocrate). ! Et pourtant, il a cultivé l'excès inverse : l'obscurité, ce que j'appellerai (ce n'est pas sans lien avec sa propre démarche de pensée) un héraclitéisme consciencieux et obstiné. Certains y voient une entreprise systématique de dissimulation et de travestissement (Jacques d'Hondt, Hegel), le moyen de conserver une marge critique potentielle. Cette marge a-t-elle été utilisée, y a-t-il un Hegel "caché" ? Fantasme ?
Ce serait, en quelque sorte, la part historique de l'oeuvre (d'Hondt donne des pistes, pas toujours convaincantes : la franc-maçonnerie notamment).

Concernant les éditions du Monde, je suis sceptique (pour avoir feuilleté un ou deux volumes, il me semble me rappeler qu'il n'y a pas d'appareil critique). Mieux vaut se rabattre sur les éditions de poche en librairie, pour lesquelles sont parfois données des traductions récentes, et surtout un appareil de notes dignes de ce nom.

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Albert Camus


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Message Publié : 14 Avr 2008 9:05 
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Thucydide
Thucydide

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Bonjour,

Bergame a écrit :
En tous cas, cela pour dire que je me demande jusqu'à quel point on peut affirmer en revanche que Nietzsche pratiquait "l'art d'écrire". C'est au sens straussien que vous utilisez cette expression, Jean le Bleu ?

(Entre parenthèses, le choix de votre pseudo me touche tout particulièrement, c'est l'un de mes romans favoris. Vous également ?)
:)


(En effet, c'est l'un de mes romans préférés, au même titre qu' Un roi sans divertissement du maître Giono :) )

En effet également, c'est au sens straussien que je veux dire que Nietzsche pratique 'l'art d'écrire". Textes à l'appui, on peut démontrer que la conception du monde de Nietzsche et celle de Léo Strauss se ressemblent. Une conception aristocratique au sens grec du terme (comme on la retrouve chez Hannah Arendt) du monde, des hommes et par conséquent de la culture.

A tout seigneur tout honneur, je cite d'abord Nietzsche, dans une conférence donnée en 1872, nommée "Sur l'avenir de nos établissements d'enseignement" (une série de conférences peu connues mais extrêmement intéressantes). C'est un dialogue entre un philosophe et son disciple, où le disciple dit à son maître:
"Vous aviez coutume de dire que personne n'aspirerait à la culture si l'on savait à quel point le nombre des hommes vraiment cultivés est finalement et ne peut être qu'incroyablement petit; et que cependant ce petit nombre d'hommes vraiment cultivés n'était possible que si une grande masse, déterminée au fond contre sa nature et uniquement par des illusions séduisantes, s'adonnait à la culture; qu'on ne devait donc rien trahir publiquement de cette ridicule disproportion entre le nombre des hommes vraiment cultivés et l'énorme appareil de la culture; que le vrai secret de la culture était là: des hommes innombrables luttent pour acquérir la culture, travaillent pour la culture, apparemment dans leur propre intérêt, mais au fond seulement pour permettre l'existence d'un petit nombre."
Le maître approuve ensuite les dires de son disciple.

Mettons cela en parallèle avec deux passages de Léo Strauss. Le premier, dans Un art d'écrire oublié.
"En étudiant certains penseurs anciens, je me suis rendu compte que la relation entre la quête de la vérité (la philosophie ou science) et la société a pu être conçue de la manière suivante: la philosophie ou science, la plus haute activité de l'homme, c'est la tentative de remplacer l'opinion sur "toutes choses" par la connaissance de "toutes choses"; mais l'opinion est l'élément de la société; la société respire, et ainsi elle met la société en danger. [...] Les philosophes ou savants qui maintiennent cette conception de la relation entre la philosophie ou science et la société sont amenés à user d'une manière d'écrire particulière, qui leur permet de révéler ce qu'ils tiennent pour la vérité à un petit nombre, sans pour autant mettre en danger l'acceptation sans réserve, par la majorité, des opinions sur lesquelles repose la société."

Enfin, un passage non moins significatif de La persécution et l'art d'écrire, du même Léo Strauss.
"Un livre exotérique contient deux enseignements: un enseignement populaire de caractère édifiant, qui est au premier plan; et un enseignement philosophique concernant le sujet le plus important, qui est indiqué seulement entre les lignes."

Strauss a consacré sa vie à l'exégèse de textes notamment de textes d'anciens. La filiation paraît ici évidente avec Nietzsche. Pourtant Strauss, dans un autre texte, dit de Nietzsche qu'il n'a pas été assez prudent dans son art d'écrire, ce qui lui a valu des récupérations douteuses. Au fond, si Nietzsche voulait rompre avec la philosophie traditionnelle, il ne pouvait pas ne pas rompre avec la manière traditionnelle d'écrire de la philosophie. Ce qui nous amène à nous demander si c'est la forme ou le fond de sa pensée qui fait que le philosophe est philosophe. Il serait bon de savoir si Nietzsche se considérait en tant que tel ou non, personnellement je n'en n'ai aucune idée.
Je concluerai sur cette fameuse phrase, issue, si ma mémoire est bonne, de Par delà bien et mal, et qui illustre ce que Nietzsche pense de ce qu'il écrit: "Pour pouvoir pratiquer la lecture comme un art, une chose avant tout autre est nécessaire, que l'on a parfaitement oubliée de nos jours- il se passera donc encore du temps avant que mes écrits soient "lisibles"-, une chose qui nous demanderait presque d'être de la race bovine et certainement pas un "homme moderne", je veux dire: savoir ruminer..."

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Message Publié : 14 Avr 2008 11:07 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours
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Plus Oultre a écrit :
d'où la sors-tu ?


Ah cher ami, il n'y avait bien que toi qui pouvais me poser cette question. :wink: Oui, c'est un peu étonnant, n'est-ce pas, c'est la raison pour laquelle cela m'est resté en tête. J'ai trouvé cela chez Papaioannou, bon, mais c'est un texte de jeunesse (1796), qu'on a même longtemps attribué à Schelling dit notre commentateur, mais qui est clairement écrit de la main de Hegel :
"Il nous faut une nouvelle mythologie, mais cette mythologie doit être au service des Idées, elle doit être au service de la Raison. Aussi longtemps que nous n'aurons pas transformé les idées en oeuvres d'art, c'est-à-dire en mythes, elles n'auront aucun intérêt pour le peuple et, inversement, aussi longtemps que la mythologie ne sera pas rationnelle, le philosophe aura honte de lui-même. Les éclairés et les non-éclairés devront finalement se donner la main [...] Alors règnera la liberté universelle et l'égalité des esprits ! Un esprit supérieur envoyé par le Ciel doit instaurer cette nouvelle religion parmi nous ; elle sera la dernière oeuvre de l'humanité."

Et, bah, Hegel est sans doute plus ta spécialité que la mienne, mais je trouve que cela apporte un éclairage, un peu inattendu certes, mais pas inintéressant sur la suite de l'oeuvre, non ?

En fait, citer Hegel me permet surtout d'exemplifier ce dont nous discutons ici : Si l'on s'en tient à ce que Nietzsche écrit noir sur blanc, Hegel constitue plus un repoussoir qu'une influence. Mais si l'on cherche à dépasser les apparences, il me semble que nombre de figures hégeliennes, à commencer par l'Aufhebung bien sûr, sont évidentes dans la pensée du "Prophète". Mais bref, Löwith a montré cela depuis longtemps déjà.

Alors cela étant dit, Jean le bleu, il faut ajouter que, pour les mêmes raisons sus-mentionnées, Nietzsche est un auteur auquel on peut faire dire beaucoup de choses. Et il ne suffit pas de dire qu'il a été "récupéré", comme s'il existait une interprétation vraie de Nietzsche et plusieurs interprétations fausses et récupératrices. En fait, de l'ensemble de l'oeuvre, on peut extraire des citations à l'appui d 'une interprétation ou de son contraire. Par exemple, Jean le Bleu, vous défendez une interprétation aristocratique de Nietzsche -tiens, plus ou moins celle de Losurdo, pour reprendre un nom qui commence à être connu ici :) - je pourrais vous trouver des passages qui dépeindraient Nietzsche en défenseur de la démocratie. Et, à moins de, justement, s'éloigner considérablement de Nietzsche, il n'y a aucune raison de considérer qu'une interprétation soit plus vraie ou plus fondée qu'une autre. Car Nietzsche a beaucoup d'intérêt mais il a aussi beaucoup d'inconvénient, à commencer par la dissolution de tout concept de vérité.
(En revanche, et au passage, il me semble qu'une interprétation "aristocratique" de Hannah Arendt se défend beaucoup moins bien, mais il faudrait voir ce que vous entendez par là).

Maintenant, sur la question qui nous intéresse, l'art d'écrire. J'avoue ne connaitre la thèse de Strauss que de seconde main, mais ce que j'en comprends est qu'il s'agit effectivement d'une méthode de dissimulation vis-à-vis de l'opinion. Au contraire des théoriciens de l'espace public (effectivement un concept fondamental de la démocratie), Strauss dit, en gros, que la vérité ne peut être énoncée au plus grand nombre sans danger, et que la plupart des soit-disant publicistes ont toujours procédé en masquant le coeur de leurs thèses de manière à n'être compris que d'un public cultivé, véritable destinataire de l'oeuvre. En particulier, Strauss était un grand lecteur de Platon, et l'exemple paradigmatique c'est encore et toujours le sort que la démocratique Athènes réservera à Socrate, et ce que le fondateur de l'Académie, ainsi échaudé, en concluera pour son propre enseignement.
Est-ce là une synthèse à peu près acceptable ? Vous me direz, Jean le Bleu, s'il vous plait.

Maintenant, Nietzsche pratique-t-il l'art d'écrire ? Et bien, je sais comme le moustachu constituait une influence primordiale pour Strauss, mais il me semble qu'avec lui, on est dans tout à fait autre chose. Nietzsche, encore une fois, ne dissimule pas la vérité, il la dissout. Ce n'est pas pour se protéger d'une opinion irrationnelle et dangereuse que Nietzsche dissimule, et s'exprime par analogies et métaphores, c'est, d'une part parce qu'il revendique clairement un statut d'artiste -et donc, non de philosophe ou d'intellectuel- Nietzsche pense être l'un des grands génies de la langue allemande ; et d'autre part, parce qu'encore une fois, il y a au contraire une stratégie de manipulation chez lui. Nietzsche a un horizon, clairement affirmé : Inversion de toutes les valeurs. Toutes les valeurs, pas seulement celles des élites culturelles et intellectuels. Les destinataires de l'oeuvre de Nietzsche, ce ne sont donc pas les élites, ce ne sont pas les "meilleurs", c'est au contraire l'homme du commun. Simplement, et encore une fois, Nietzsche sait/pense qu'on ne change pas les valeurs en s'adressant à la raison, à l'intellect.
Mais éventuellement, on peut aller plus loin, et considérer que si Nietzsche pense qu'on ne peut changer les valeurs en s'adressant à l'intellect, c'est justement parce qu'il s'adresse au peuple. ;) Sauf qu'à mon sens, c'est réduire Nietzsche à bien peu de choses, une sorte d'Ortega y Gasset germanique, bof.

Et puis, pour finir, j'aimerais ajouter quelque chose sur l'interprétation élitiste ou aristocratique qu'on fait de Nietzsche aujourd'hui. Ce qui est certain, c'est que Nietzsche est un amoureux de l'art et de ce que, aujourd'hui, nous appelons "culture". La forme la plus élevée de l'expression, pour lui, c'était la musique, et durant les dix années qui suivront son "accident", la seule chose qu'il sera capable de faire, dans l'état de légume qui était le sien, ce sera de s'assoir à son piano, et jouer -magnifiquement d'ailleurs, rapportent les rares témoins.
Or, A.Philonenko écrivait à ce propos quelque chose qui me semble très juste : Nous ne pouvons plus avoir, aujourd'hui, le même rapport à la culture que celui qu'entretenait Nietzsche. Pour une raison simple : La musique était alors une expérience extrèmement rare -et donc de grande valeur. On considère par exemple que Nietzsche n'a du avoir l'occasion d'entendre un opéra de Mozart qu'une seule fois dans sa vie. Par conséquent, il est clair que la musique, comme toute activité "culturelle", était alors une activité profondément élitiste, mais non pas élitiste par doctrine : élitiste par force. Elle ne pouvait pas être autrement qu'élitiste.
Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui : De nos jours, on peut acquérir la totalité de l'oeuvre de Mozart pour quelques dizaines d'euros, et l'écouter aussi régulièrement et aussi aisément qu'on le souhaite. C'est sans doute l'une des conséquences du progrès technologique les plus importantes sur le plan sociologique que celui de la diffusion massive de la "culture", en tant que connaissance et art. Voila, je crois, un point, fondamental, qui sépare irrémédiablement Nietzsche de notre contemporanéité -et par la même occasion, qui fait que la thèse de Strauss, antimoderne par excellence, ne tient pas dans le cas de Nietzsche, à mon humble avis.

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Dernière édition par Bergame le 14 Avr 2008 11:22, édité 1 fois.

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Message Publié : 14 Avr 2008 11:20 
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Citer :
Bergame
La lecture de Kant est donc ardue en ce sens qu'il faut véritablement le lire ligne à ligne, mot à mot, si on veut espérer retrouver et suivre le fil de sa démonstration. Mais tout est là, écrit avec la plus grande précision et rigueur. Au contraire, la lecture de Nietzsche est ardue en ce sens que beaucoup de choses sont implicites, dissimulées, et demandent une certaine culture. Mais du coup, le ticket d'entrée n'a pas le même coût...


Je suis 100% d'accord.
Nietzsche, au premier abord semble "simple" car sa lecture est aisée.
Kant utilise un vocabulaire propre, des outils qui, si ils sont incommodes au départ, deviennent rapidement limpides. Dans le cas de Nietzsche, la complexité est plus sous-jacente .... et donc -encore une fois pour moi- la difficulté est plus grande.

En tout cas, deux auteurs fondamentaux.
/Nico.

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Message Publié : 14 Avr 2008 12:00 
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Thucydide
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Bergame a écrit :
Et, à moins de, justement, s'éloigner considérablement de Nietzsche, il n'y a aucune raison de considérer qu'une interprétation soit plus vraie ou plus fondée qu'une autre. Car Nietzsche a beaucoup d'intérêt mais il a aussi beaucoup d'inconvénient, à commencer par la dissolution de tout concept de vérité.


Vous pointez là, cher Bergame, un élément capital pour comprendre Nietzsche. Il remplace en effet la notion de vérité par la notion de valeur. Et en cela, il ne peut pas adopter la forme adoptée par un Kant ou un Hegel. Les visées ne sont pas les mêmes, et donc la forme non plus. Pour Nietzsche, plus que tout autre, c'est l'interprétation qui prime, au nom des valeurs. Vous avez donc tout à fait raison de me reprendre, c'est justement en faisant des simplifications abusives qu'on trahit la pensée d'un auteur.

Bergame a écrit :
Strauss dit, en gros, que la vérité ne peut être énoncée au plus grand nombre sans danger, et que la plupart des soit-disant publicistes ont toujours procédé en masquant le coeur de leurs thèses de manière à n'être compris que d'un public cultivé, véritable destinataire de l'oeuvre. En particulier, Strauss était un grand lecteur de Platon, et l'exemple paradigmatique c'est encore et toujours le sort que la démocratique Athènes réservera à Socrate, et ce que le fondateur de l'Académie, ainsi échaudé, en concluera pour son propre enseignement.


Pour ce qui est de la thèse de Léo Strauss, je ne la connais que par le biais de textes dûment choisis par un straussien lui-même, mais c'est également ce que j'en ai retenu.

Bergame a écrit :
Or, A.Philonenko écrivait à ce propos quelque chose qui me semble très juste : Nous ne pouvons plus avoir, aujourd'hui, le même rapport à la culture que celui qu'entretenait Nietzsche. Pour une raison simple : La musique était alors une expérience extrèmement rare -et donc de grande valeur.


C'est encore une fois exact, et l'histoire prend ici tout son sens pour éclairer le contexte dans lequel Nietzsche développe son discours. D'ailleurs Alexis Philonenko est un historien de la philosophie, et en tant que tel, il est le plus à même de restituer l'univers culturel, (mais aussi politique et social) dans lequel évolue Nietzsche (mais aussi Kant, les post-kantiens, etc...)

Bergame a écrit :
Voila, je crois, un point, fondamental, qui sépare irrémédiablement Nietzsche de notre contemporanéité


Nietzsche est toujours inactuel alors :)

Pour ce qui est d'H Arendt, j'entendais, mais je reconnais ne pas l'avoir précisé, une conception aristocratique de la culture. C'est manifeste dans La crise de la culture.

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Message Publié : 14 Avr 2008 15:58 
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Hérodote
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Jean le bleu a écrit :
Bergame a écrit :
Or, A.Philonenko écrivait à ce propos quelque chose qui me semble très juste : Nous ne pouvons plus avoir, aujourd'hui, le même rapport à la culture que celui qu'entretenait Nietzsche. Pour une raison simple : La musique était alors une expérience extrèmement rare -et donc de grande valeur.

C'est encore une fois exact, et l'histoire prend ici tout son sens pour éclairer le contexte dans lequel Nietzsche développe son discours. D'ailleurs Alexis Philonenko est un historien de la philosophie, et en tant que tel, il est le plus à même de restituer l'univers culturel, (mais aussi politique et social) dans lequel évolue Nietzsche (mais aussi Kant, les post-kantiens, etc...)

A propos, une lecture du chapitre "écouter" du livre L'Altération musicale ou ce que la musique apprend au philosophe de Bernard Sève peut éclairer cet aspect, notamment l'absence de techniques d'enregistrements avant une époque récente. Je n'ai malheureusement plus l'extrait en question sous les yeux, mais il est éclairant.

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Pour revenir à Nietzsche, je dirais qu'il est difficile de le lire pour plusieurs raisons :

-La première, et peut-être la plus connue, est la falsification des ouvrages de Nietzsche par sa soeur Elizabeth, qui a longtemps posé problème. Heureusement aujourd'hui, les textes établis par Colli-Montinari sont traduits en français. Tous les textes de Nietzsche ne figurent pourtant pas dans l'édition Gallimard ( je pense notamment à l'Introduction à l'étude des dialogues de Platon et à Les philosophes préplatoniciens, publiés par les éditions de l'éclat qui sont, à mon avis, une bonne introduction à la philosophie de Nietzsche, et surtout à une lecture chronologique), mais au moins la Volonté de Puissance a été écartée. Malheureusement, certains commentaires de l'œuvre de Nietzsche font grand cas de ce dernier ouvrage (celui de Deleuze Notamment). Et encore aujourd'hui, Nietzsche continue d'être associé aux idées antisémites à cause de ces falsifications.

-La seconde est, comme l'a souligné Jean le Bleu, "l'art d'écrire" qui le caractérise. Il distingue les termes "ésotérique" et "exotérique" et appelle "philologue" le lecteur capable de déceler dans ses textes l'emploi des synonymes, des métaphores, qui témoignent de l'attention qu'il portait à l'outil linguistique. Nietzsche fut aussi un lecteur attentif de Goethe, Schiller, Heine, et Lichtenberg ( il les cite d'ailleurs régulièrement dans ses ouvrages, ce qui est rarement commenté ), qui voulait employer le langage le plus rigoureux et le plus exact possible. Il est malheureusement difficile de retrouver les jeux de mots, de synonymie, de renvois dans un texte traduit, même si ceux-ci peuvent être signalés dans les différentes éditions existantes. La traduction pose quant à elle plusieurs problèmes. Il suffit de se procurer différentes éditions pour voir combien ses textes peuvent être édulcorés parfois. Il y a en effet chez Nietzsche des pointes, des affirmations terribles, dans lesquelles les traducteurs ont soit vu des métaphores, des hyperboles, soit au contraire les coups d'éclat d'un auteur peu fréquentable. Il conviendrait de se méfier de telles interprétations.

-La troisième enfin, est la tentation de lire Nietzsche par fragments, par morceaux. La lecture des premiers ouvrages, du "Nietzsche grec", peuvent ainsi être un bon moyen de rentrer dans cette œuvre difficile à approcher, car ceux-ci ne prennent pas encore la forme de paragraphes, d'aphorismes, de poèmes ou de paraboles comme c'est le cas plus tard. Cela a aussi pour avantage de lire Nietzsche dans l'ordre, ce qui n'est pas insignifiant. En effet, de nombreuses notions apparaissent puis disparaissent chez Nietzsche, et c'est à mon avis se tromper que d'expliquer Nietzsche à la lumière de la "Volonté de puissance" ou de l'"Eternel retour". De plus, Nietzsche aimait dire que l'étude d'un philosophe ne devait pas se faire en dehors d'une étude de sa biographie. C'est ainsi qu'il essaye de dresser un portrait des auteurs présocratiques dans ses premiers ouvrages. Il est donc possible de faire une lecture de Nietzsche qui soit en accord avec cette volonté de circonscrire sa psychologie, en accompagnant cette lecture d'une bonne biographie. Celle de Daniel Halévy a longtemps fait autorité, et je suis actuellement plongé dedans! Elles ne peuvent pas remplacer une confrontation au texte, mais peuvent l'éclairer.

Avant de finir, je pense qu'il faut aussi prendre garde à ne pas se faire une lecture faussée de Nietzsche en lisant des commentaires d'autres grands philosophes postérieurs, tels que Jaspers, Heidegger, Strauss ou Deleuze. Ils en font une lecture personnelle qu'il est intéressant de connaître, mais dont il faut savoir se séparer. Les fragments posthumes sont aussi très instructifs... Mais chers. Peut-être les trouverez-vous à la BU.


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Message Publié : 12 Juin 2008 10:35 
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Polybe
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Inscription : 11 Juin 2008 14:10
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Je pense que Philonenko a mal posé la question de la relation de Nietzsche à la musique. Dans le monde urbain du XIXe siècle où il n'existait pas encore de distinction entre la musique populaire et la musique savante, la musique était très accessible à toutes les classes sociales: si les aristocrates pouvaient se permettre de payer un abonnement annuel ou semi-annuel d'une loge d'opéra, les artisans, les petits bourgeois ou les étudiants pouvaient payer les places de galérie ou de parterre. De plus, comme il n'y avait pas d'autre chose à faire, la population urbaine passait la plupart de ses soirées à l'opéra, en y assistant à la même production parfois pour une dizaine de fois. Ce qui faisait de cette culture quelque chose beaucoup plus accessible que nos disques compacts de musique classique. Du coup, pour l'époque de Nietzsche, la these de l'élitisme ou de l'inaccessibilité de la musique est très discutable.
De plus, il y a la question de Mozart qui est aussi problématique (comme vient de l'évoquer gnmpfmndoh). Au XIXe siècle, Mozart fait partie des "anciens", des classiques, or le problème, c'est que les gens de l'époque ne comprenaient pas de ce terme ("classique") la même chose que nous. Pour eux Mozart était une figure respectée, à qui on faisait référence quand on voulait situer un compositeur contemporain dans l'histoire de la musique. Mais ses oeuvres étaient très peu joués par rapport aux oeuvres des compositeurs contemporains. A l'époque de Nietzsche, un philosophe pouvait être spontinien ou weberien, wagnérien ou meyerbeerien. Mais Mozart ne faisait pas directement partie de l'imaginaire musical de l'époque.


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 Sujet du message : Re: nietzsche facile ?
Message Publié : 18 Juin 2008 20:35 
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Arvo a écrit :
Nietzsche, ainsi d'ailleurs que Platon, sont deux auteurs que je cite régulièrement lorsqu'il est question de recommander des premiers auteurs...comme étant des auteurs à ne pas lire... Mieux vaut encore le côté daté d'un Aristote ou le classicisme désarmant d'un Descartes. La difficulté avec les deux premiers vient précisément qu'ils donnent l'impression d'être facile à lire, on peut par exemple retirer de la lecture de certains de leurs textes un plaisir réel (on peut les lire à la plage...), dû aussi en partie au fait que le premier écrit sous forme d'aphorismes et le second des dialogues. L'impression de facilité précisément ne doit pas tromper, elle est révélatrice de la difficulté qu'il y a à interpréter, qu'il peut y avoir à faire un commentaire d'un texte pertinent, c'est à dire qui respecte la pensée de l'auteur.
La solution réside bien entendu à mon sens dans les commentaires qu'en ont fait des gens comme Deleuze (pour Nietzsche) ou d'autres philosophes. D'ailleurs la difficulté ressort bien lorsqu'il s'agit d'interpréter la pensée d'auteurs comme Heidegger ou pour le dernier Husserl. Le fait même que les grands commentateurs subissent des révisions à la baisse de leurs prétentions ou encore que certaines questions, souvent les plus importantes restent des chantiers toujours ouverts à la construction témoignent de cet état de fait. La preuve, prenez un texte de Nietzsche, pénétrez-en vous (plusieurs lectures), prenez le commentaire de Jaspers, Klossovski ou Deleuze, si besoin mettez les commentaires en parallèle et voyez si vous aviez perçu la problématique sous-jacente !
Cordialement


Je suis absolument d'accord avec cela. Combien de fois n'ai-je pas entendu "J'ai bien aimé Nietzsche car c'est un auteur facile à lire" de la part de personnes qui n'avaient absolument rien compris !
Nietzsche est sans doute, à sa manière, un auteur pratiquement aussi difficile à comprendre que Kant ou Hegel. Pour ceux-ci, la difficulté est de s'habituer à un vocabulaire hermétique, des tournures de phrases alambiquées et cette ultime froideur propre aux idéalistes allemands, pour celui-là, il faut savoir ruminer ses aphorismes, il faut lire avec patience !


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Message Publié : 18 Juin 2008 20:43 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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En effet, et d'ailleurs, pour du "facile à lire", il vaut mieux attaquer Contre l'Université et l'Essai sur les Femmes, de Schopenhauer.

En plus, on rit beaucoup (enfin moi, je ne voudrais pas généraliser :wink: )

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Les facultés de conceptualisation de l'empereur Constantin paraissent avoir été très limitées ; malgré de longues séances, les évêques ne semblent pas avoir réussi à lui faire bien comprendre la différence qui séparait l'orthodoxie de l'arianisme. (Y. Le Bohec)

Bref, un homme "au front étroit mais à la forte mâchoire" (J.P. Callu)


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Message Publié : 05 Sep 2008 8:38 
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Polybe
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Voila, enfin acheté le T2 des oeuvres de Nietzsche chez Laffont, par laquel de ces oeuvres me conseilleriez vous de commencer moi qui suis un novice en la matiere ?

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"Il y a des libertés : la liberté n'a jamais existé "


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Message Publié : 09 Sep 2008 15:07 
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Polybe
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Localisation : Alsace
Jin a écrit :
Voila, enfin acheté le T2 des oeuvres de Nietzsche chez Laffont, par laquel de ces oeuvres me conseilleriez vous de commencer moi qui suis un novice en la matiere ?


Quelqu'un pour eclairer ma pauvre lanterne ? Je ne sais vraiment pas par quel ouvrage débuter !?

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Message Publié : 09 Sep 2008 18:29 
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Philippe de Commines
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Inscription : 30 Juil 2003 21:44
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Je n'ai rien lu de Nietzsche, mais si j'en crois ce que j'ai souvent entendu dire : qu'on ne compte plus les contresens que l'on fait au sujet du discours de ce philosophe (Nietzsche antisémite, nazi avant l'heure, théoricien de la supériorité du faible au fort, apologie du bourreau...), il est plutôt difficile à lire.

Non ?

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