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Pourquoi cette sévérité avec l'article d'un journaliste qui rend compte d'un bouquin ?
Je ne préjuge pas du livre, mais a priori je n'adhère pas à sa thèse--si elle est bien telle que vous la relatez--, à savoir abolition de l'esclavage pour des raisons essentiellement économiques.
Ce n'est pas vrai pour le système esclavagiste que j'ai étudié--l'esclavage aux EU--et c'est une thèse datée et depuis longtemps réfutée dans l'historiographie de ce système esclavagiste particulier.
Quant à l'article qui rend compte de ce livre, un critique qui juge indispensable de répéter X fois avec des trémolos dans la voix que l'esclavage, c'est atroce, affreux, inhumain, barbare, se disqualifie ipso facto en tant que critique.
Le travail d'un critique est d'abord de rendre compte aussi scrupuleusement, objectivement et exhaustivement que possible de la teneur conceptuelle et informative d'un ouvrage; ses émotions, ses jugements moraux ne sont pas ce qui intéresse prioritairement le lecteur et ne doivent pas être mis au centre de son commentaire.
C'est pourtant exactement ce que fait ce commentateur: l'expression de ses sentiments personnels sur l'esclavage occupe une grande partie de son texte, et ces sentiments étant d'une grande banalité, on a droit à un chapelet de platitudes moralisatrices qui ne renseignent guère sur le livre.
De même, traiter de l'esclavage
en général en ne se concentrant que sur la traite atlantique et en ignorant ou en glissant sur les traites africaines et arabes (si c'est bien le cas du livre) signale de la part de l'auteur un biais idéologique caractérisé qui le positionne plus dans le champ de la démonstration surdéterminée par des convictions politiques que dans celui de la recherche historique-- et qui ne donne guère envie de lire son ouvrage.
Enfin, comme alain le souligne, les prises de position des papes, rois chrétiens, prélats etc, sur l'esclavage sont extrêmement diverses, complexes et évolutives; or, l'intitulé de votre fil, implique--voire exige --une réponse simple et tranchée sur ce point du rôle du christianisme dans l'abolition de l'esclavage.
Une réponse par oui ou par non à cette question est absolument impossible, sauf à déformer gravement la réalité historique: selon les époques ou les individus et les groupes, le christianisme a coopéré, voire suscité le développement de l'esclavage, ou l'a réglementé pour en limiter la brutalité, ou a visé son abolition.
Le christianisme, en matière d'esclavage, a donc été esclavagiste ET anti-esclavagiste, avec de surcroît toute une gamme des positions intermédiaires.
Dans la civilisation esclavagiste du Sud des EU, il y avait des pasteurs qui prêchaient que la soumission des esclaves à leur maître était une vertu chrétienne et que l'esclavage était une institution relevant de la volonté divine.
Il y en avait d'autres--quakers, anabaptistes--qui refusaient absolument le principe même de l'esclavage comme anti-chrétien, et qui voulaient son abolition.
Ceci devrait vous interroger sur ce qu'il y a de problématique à utiliser, dans une analyse historique, une catégorie aussi diverse et vaste (chronologiquement et dogmatiquement) que "le christianisme".