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Message Publié : 16 Mai 2005 14:43 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
Dans un grenier de Louey, Hautes-pyrénées, entre les pages d’un livre, j’ai trouvé deux documents. Je le mets dans « Histoire des mœurs », ne sachant trop dans quelle rubrique en parler, un seul étant daté.
Je vous propose de discuter de ces documents, ce qu'ils nous apprennent sur les moeurs rurales de cette époque, qui a bien pu les écrire, pour qui, etc.

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"La vie des hommes qui vont droit devant eux, renaitraient-ils dix fois en dix mondes meilleurs, serait toujours semblable à la première. Il n'y a qu'une façon d'aller droit devant soi." (Pierre Mac Orlan)


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Message Publié : 16 Mai 2005 14:46 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
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Citer :
Secret pour détruire le cusson du grenier de Rozès Jean de Villenave : Au nom de Dieu soit et la glorieuse vierge Marie glorieux est St Michel archange St Jean-Baptiste et St Pierre et St Paul et le glorieux St Laurent martyr, cusson ou cussonne de quelle qualité ou condition que ce soit tu ne mangeras pas froment ni seigle ni milhoc ni aucune espèce de grain que soit dans le grenier de Rozès Jean de Villenave en disant six fois le credo et six fois le pater et ave maria à l’honneur de saint Laurent martyr. C’est pour l’année 1824

Villenave : il y a deux villages dans le département portant ce nom, Villenave près Marsac et Villanave près Béarn. ( Il serait intéressant de savoir si l’un d’eux a Saint Laurent pour patron.)
Rozès ou Rozes : Il y a aujourd’hui quelques familles portant ce nom dans le département (je vais leur transmettre le document pour affiner les recherches)
Cusson (ou cussou) est le nom gascon du charançon, parasite des céréales et légumes secs.
Milhoc est le nom gascon du maïs.

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Message Publié : 16 Mai 2005 14:51 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
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pour le pisse sang de bœuf et vache il faut prendre une poignée [de] persil une autre [de] mauve ( ?) et un[e] autre [de] sauge, le piler et le faire bouillir avec une bouteille d’eau, lui en donner la moitié, si le sang ne s’arrête pas lui donner l’autre moitié quatre heures après


Ce document est plus une recette de médecine vétérinaire.
L'écriture me semble différente de celle du précédent.
Au toucher, et de format, le papier est strictement identique.

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Dernière édition par Dédé le 16 Mai 2005 15:23, édité 1 fois.

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Message Publié : 16 Mai 2005 15:16 
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La mauve est une plante connue depuis le Moyen Age pour ses propriétés émollientes.

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Message Publié : 16 Mai 2005 15:31 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
Pour le premier document, je me demande s'il peut être l'oeuvre d'un prêtre ou d'un "sorcier" ou autre guérisseur?
Je me demande si de telles croyances sont dans la ligne de l'église, ou relèvent de la superstition (du point de vue de l'église).Un certain mécréant, voyant le texte, me fait la remarque suivante: le dernière phrase "c'est pour l'année 1824" signifie simplement qu'il faudra revenir en 1825, (et sans doute repayer ?) un peu comme pour les contrats d'entretien actuels valables un an.

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Message Publié : 16 Mai 2005 15:36 
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Localisation : Paris
Le document n'est pas à proprement parler dans le droit fil du catholicisme (ça sent quand même beaucoup le paganisme). Ceci dit, il date de la grande époque de reconquête des campagnes par l'Eglise, et ce mouvement se fait notamment grâce au culte de la Vierge (mentionnée dans votre document) et en flattant un peu les superstitions populaires.

En résumé, il est très difficile, compte tenu de la date du document, de déterminer si le document émane du clergé ou si au contraire il relève de superstitions populaires condamnées par l'Eglise.

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Message Publié : 20 Mai 2005 14:07 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
en tout cas, ces pratiques et croyances se perpétuent:
Lu aujourd'hui, en 2005, dans La Nouvelle république des Pyrénées:

Citer :
Lamarque Pontacq: Un dimanche à Notre-Dame de Piétat

Sur la route de Lucq, forêt située au sud du village, près du ruisseau du même nom, fut construite, vers 1920, une chapelle vouée à la Vierge de Souffrance, de la Compassion, N-D de Piétat. des légendes circulent au sujet des origines lointaines de cet oratoire. Faut-il les croire?
Depuis longtemps, les gens [] viennent prier pour solliciter du ciel une sauvegarde et une protection face aux intempéries météorologiques, orages, grêle, tempêtes, sécheresse, qui porteraient préjudice aux récoltes, aux fruits de la terre.
En ce jour, [] l'abbé xx aidé du diacre yy; officia et bénit les cultures et les gens. [] à l'issue de la cérémonie religieuse, un apéritif les réunit tous sous l'ombre apaisante de l'immense tilleul.


Mes commentaires :
1- je n’aurais pas été étonné qu’on évoque ici le cusson .. ( Lamarque-Pontacq est à quelques encablures de Villenave, commune où on priait en 1824 contre les cusson)
2- quel rapport entre la Pietat, vierge de souffrance et de compassion, Marie devant la souffrance et la mort de son fils, peinte et sculptée par Michel-Ange, et ces « sollicitations » pour les récoltes ?
3- nous avons toujours des journalistes lyriques dans la presse régionale .
4- ça finit par l’apéro à l’ombre, je parierais que les mécréants sont arrivés à cette heure là.

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Message Publié : 20 Mai 2005 21:08 
Peut-être une très ancienne superstition populaire "récupérée" par l'Eglise.
A l’article « charançons » du Livre des superstitions , d’Eloïse Mozzani (coll. « Bouquins ») on trouve :

Citer :
Insectes nuisibles, les charançons étaient accusés autrefois d’obéir aux sorciers : « La croyance est sans doute plus ancienne que le XVIIe siècle, où l’on cite expressément parmi les maléfices connus celui qui consiste à envoyer des charançons dans les greniers » (Paul Sébillot).
Au Moyen Âge, on croyait chasser les charançons d’un grenier à blé en y plaçant aux quatre coins un morceau de papier, sur lequel on avait écrit : Ibi ceciderunt, expulsi sunt inimici mei, ou bien Expulsi sunt quia non potuerunt stare.


Ce dictionnaire des superstitions est une immense compilation des superstitions du monde entier. Une mine. Je vous le recommande.


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Message Publié : 21 Mai 2005 10:13 
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Jules Michelet
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Inscription : 29 Déc 2003 23:28
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De toute façon, pour venir d'une famille catholique du Sud-ouest, ce genre de superstitions ne m'étonne guère (et d'ailleurs je ne pense pas que ce soit une spécificité de cette région). Ma grand-mère m'a aussi raconté des pratiques dans le genre, quoique un peu moins poussées. Pas très orthodoxe, certes, mais il n'y a pas lieu de douter de la bonne foi de ces gens.

Une dernière question : quelqu'un qui écrit, en français qui plus est, dans une telle région vers 1824 (si j'ai bien compris), ça ne doit pas être n'importe qui, non ?


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Message Publié : 21 Mai 2005 12:37 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
Citer :
quelqu'un qui écrit, en français qui plus est, dans une telle région vers 1824 (si j'ai bien compris), ça ne doit pas être n'importe qui, non ?

très juste.
une autre question: à quelle époque a-t-on cessé d'écrire le lettre S de cette façon ? (un peu comme un F actuel)

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Message Publié : 29 Avr 2013 14:53 
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Philippe de Commines
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Localisation : village des Pyrénées
A la réflexion, ça nous parle surtout de la calamité du moment : le charançon détruisant la provision de céréales, y compris la semence pour l’année suivante.

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Message Publié : 29 Avr 2013 17:20 
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Localisation : Région Parisienne
Dédé a écrit :
une autre question: à quelle époque a-t-on cessé d'écrire le lettre S de cette façon ? (un peu comme un F actuel)


C'est le S gothique, qui existait en allemand jusqu'à ce qu'un décret d'Hitler impose l'écriture en caractère latin. C'est quelqu'un qui a appris à écrire à la fin de l'ancien régime, ou avec quelqu'un de cette époque, car en 1824, je ne pense pas qu'on apprenait aux enfants le S de cette façon.

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Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)


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