Chantillon a écrit :
Le Minotaure au milieu de son labyrinthe représente un cheminement dans les ténèbres. Et vaincre le Minotaure c’est vaincre le chaos, le dévoreur (d’âmes) et cela permet de survivre (dans l’au-delà et donc d’accéder à la vie éternelle).
Et si le Minotaure se situe sur une île, c’est symboliquement parce qu’il faut s’y rendre en bateau (en barque).
- 95% du mythe est consciencieusement oblitéré (le volet athénien avec Thésée, Dédale, voire Procris, etc. ; le rôle de Poséidon, présent du début à la fin (père du Minotaure comme de Thésée, à l’origine des deux malédictions, l’attique et la crétoise) ; l’intégration de Thésée à un groupe mixte de jeunes gens destinés au "sacrifice" ; le rôle de la famille minoenne (les personnalités complexes et torturées de Minos, Pasiphaé, Ariadne, etc.). Ne sont conservés que deux éléments privés de tout contexte, et donc de tout sens : « taureau » et « labyrinthe »
- Le contexte culturel et politique soigneusement ignoré (l’opposition entre Thésée le roi « démocratique » et Minos le despote ; l’affirmation de la thalassocratie athénienne ; l’interprétation probable éleusinienne)
Bref, le B.A.-BA de la méthode historique est foulé aux pieds. On commence par tirer l’ensemble de son contexte, on continue en dépouillant de tout ce qui dérange, et ce qui reste est enfin forcé dans un schéma interprétatif préétablit.
Un « cheminement dans les tenèbres » ? Moui. J’appellerais ça un parcours initiatique de mon côté.
Placé « sur une île, c’est symboliquement parce qu’il faut s’y rendre en bateau (en barque). » Ce n’est pas un symbole, c’est une lapalissade. Mais je présume que l’allusion à la barque fait référence à celle de Charon ou du Livre des morts. Sauf que l’île est certes en mythologie un espace d’altérité, un autre monde, mais certainement pas une référence à la mort systématiquement. Les Amazones, les Cyclopes, les Lotophages, Circé, Géryon, Calypso… tous des insulaires. Si l’île des Bienheureux ou l’île d’Achille peuvent éventuellement s’approcher de ta conception, sauf qu’il s’agit de mythes tardifs. A l’inverse, l’accès au monde des morts est toujours souterrain, ce qui n’est pas le cas du Labyrinthe, construction humaine, en surface.
Mais tu as décrété qu’il s’agissait d’une allégorie de l’accès à « l’au-delà », à « la vie éternelle », en dépit d’un « dévoreur d’âme »…
D’abord, ce n’est qu’une possibilité parmi bien d’autres, en admettant qu’elle soit viable ce dont je doute, même ou surtout en mettant en relation avec les Mystères d’Eleusis.
Parmi d’autres interprétations, banalement, la première qui me vient à l'esprit est l’entrée dans le monde des adultes avec un sens sexuel particulièrement marqué dans chaque étape (des couples de puceaux embarquent, mais des hommes et femmes débarquent, avec un Thésée qui traîne en prime sa récente conquête ; le Minotaure, fruit des amours de Pasiphaé et d’un taureau, symbole de bestialité, double monstrueux du taureau symbole de fertilité ; tandis que pendant ce temps de son côté, Minos est maudit pour ses infidélités et éjacule des monstruosités vénéneuses…. ; alors que tous les être hybrides gambadent librement à l’extérieur, hors de la demeure des hommes, le Minotaure seul est cloîtré à domicile et ne peut en sortir, comme si le labyrinthe était un double néfaste du domicile conjugal… En un seul mythe sont regroupés tous les écueils du mariage ; heureusement, la solution est offerte par l’amour de la zentille donzelle qui partage avec lui son fil/destin). Il faudrait que je creuse, mais là est sans doute une des clés. Juste pour signaler que des interprétations, ce n’est pas ce qui manque en mythologie… sauf chez toi, il n’y en a forcément qu’une, et bien entendue égyptienne…
Mais bon, hop, jouons le jeu, c’est une allégorie de la mort et mettons de grosses œillères sur tout ce qui gêne. Reste à trouver un rapport avec l’Egypte…
Ah ? Il y a un labyrinthe dans les mythes égyptiens ? (il y a bien un labyrinthe égyptien selon les Grecs, mais là n’est pas la question). Je croyais qu’ils étaient guidés pas à pas...
Ah ? Il faut combattre des monstres dans les mythes infernaux égyptiens ? Ou des taureaux ?
Ah ? Il faut trouver la sortie chez les Egyptiens afin de quitter ce lieu au plus vite ? Je croyais que chez eux, le problème était d’y entrer…
Ah ? Seuls les jeunes gens sont concernés en Egypte ? Je croyais que la mort concernait tout le monde…
Au final, à partir de vagues points communs excessivement banals (un parcours initiatique et la présence d’un bovidé dans l’affaire ; et encore, chez les Egyptiens, je ne vois toujours pas trop où il est ce taureau du monde des morts) est inventé de toute pièce une filiation entre deux mythes très éloignés l’un de l’autre, et de là est généralisée une filiation entre deux mythologies. Même pas une éventuelle influence (qu’on peut bien entendu trouver, plus ou moins anecdotique ou tardive, comme on trouvera des influences thrace, italiques, crétoises, anatoliennes, mésopotamienne, voire libyenne, le tout variant selon l’époque), non, une filiation, répétée à loisir : « à l'origine de toutes les autres mythologies » (sic !), « les Grecs avaient repris leur mythologie sur celle des Egyptiens », voire même carrément une traduction : « les Grecs ont repris les divinités égyptiennes en les renommant »…
Quatre pages de chamailleries et des douzaines de points d’exclamations le tout en quelques heures pour en arriver là…
Mais nous n’avons pas perdu notre temps, nous avons doctement appris que l’épopée de Gilgamesh date « de la fin du III av JC au II siècle av JC » et « la Bible arrivera 5 siècles plus tard », soit une rédaction de la Genèse au IIIe siècle après JC…. A moins qu’il ne faille mettre en relation avec l’autre fragment de cours mal compris, « épopée de Gilgamesh (2600 av JC) », ce qui place la rédaction de la Bible en 2100 av… Dans la même veine, "presque 5000 et 6000 ans" séparent la Bible de la Mythologie égyptienne, ce qui suppose des écrits égyptiens au VIe millénaire av. Mais si tu ne vois pas où est le problème, ma foi…
Pédro, si tu trouves quelque chose sur ces mythes crétois d'influence égyptienne, je suis preneur. Pour ce qu'on peut savoir des mythes minoens...